Société Générale S.A. v Agenzia delle Entrate – Direzione Regionale Lombardia Ufficio Contenzioso.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:318
Docket NumberC-565/18
Date30 April 2020
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Celex Number62018CJ0565
CourtCourt of Justice (European Union)
62018CJ0565

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

30 avril 2020 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Article 63 TFUE – Libre circulation des capitaux – Taxe sur les transactions financières – Opérations portant sur des instruments financiers dérivés ayant pour titre sous-jacent un titre émis par une société résidente de l’État membre d’imposition – Taxe due indépendamment du lieu de conclusion de la transaction – Obligations administratives et déclaratives »

Dans l’affaire C‑565/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Commissione tributaria regionale per la Lombardia (commission fiscale régionale pour la Lombardie, Italie), par décision du 2 juillet 2018, parvenue à la Cour le 6 septembre 2018, dans la procédure

Société Générale SA

contre

Agenzia delle Entrate – Direzione Regionale Lombardia Ufficio Contenzioso,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. P. G. Xuereb et T. von Danwitz (rapporteur), juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Société Générale SA, par Mes D. Conti et C. Romano, avvocati, ainsi que par M. M. Gusmeroli, dottore commercialista,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

pour la Commission européenne, par M. W. Roels et Mme F. Tomat, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 novembre 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 18, 56 et 63 TFUE.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Société Générale SA (ci-après « Société Générale ») à l’Agenzia delle Entrate – Direzione Regionale Lombardia Ufficio Contenzioso (administration fiscale – direction régionale de la Lombardie, service du contentieux, Italie, ci-après l’« administration fiscale »), au sujet d’une demande de remboursement d’une taxe sur les transactions financières ayant pour objet des instruments financiers dérivés acquittée par Société Générale.

Le droit italien

3

L’article 1er de la legge n. 228 – Disposizioni per la formazione del bilancio annuale e pluriennale dello Stato (Legge di stabilità 2013) [loi no 228, relative aux dispositions pour la formation du budget annuel et pluriannuel de l’État (loi de stabilité 2013)], du 24 décembre 2012 (supplément ordinaire à la GURI no 302, du 29 décembre 2012, no 212, p. 1, ci-après la « loi no 228/2012 »), dispose, à ses paragraphes 491, 492 et 494 :

« 491. Le transfert de la propriété d’actions et d’autres instruments financiers participatifs [...], émis par des sociétés résidentes sur le territoire de l’État, ainsi que des titres représentatifs desdits instruments, indépendamment de l’État de résidence de l’entité émettrice, est soumis à une taxe sur les transactions financières au taux de 0,2 pour cent de la valeur de la transaction. Le transfert de la propriété d’actions découlant de la conversion d’obligations est également soumis à la taxe ci-dessus. [...] La taxe est due indépendamment du lieu de conclusion de la transaction et de l’État de résidence des parties contractantes. [...]

492. Les opérations portant sur des instruments financiers dérivés [...], ayant principalement comme instrument sous-jacent un ou plusieurs des instruments financiers prévus au paragraphe 491, ou dont la valeur dépend essentiellement de l’un ou de plusieurs des instruments financiers prévus au même paragraphe, et les opérations sur les valeurs mobilières [...], permettant d’acheter ou de vendre principalement un ou plusieurs instruments financiers visés au paragraphe 491 ou comportant un paiement comptant déterminé principalement par rapport à un ou plusieurs instruments financiers visés au paragraphe précédent, y compris les warrants, les warrants couverts et les certificats, sont soumises, au moment de la conclusion, à une taxe fixe, déterminée en fonction du type d’instrument et de la valeur du contrat, conformément au tableau 3 annexé à la présente loi. La taxe est due indépendamment du lieu de conclusion de la transaction et de l’État de résidence des parties contractantes. Dans le cas où les opérations visées à la première phrase prévoient également, comme mode de règlement, le transfert des actions ou des autres instruments financiers participatifs, le transfert du droit de propriété desdits instruments financiers, qui se produit au moment du règlement, est soumis à l’impôt selon les modalités et dans la mesure prévue au paragraphe 491. [...]

[...]

494. La taxe prévue au paragraphe 491 est due par le bénéficiaire du transfert ; celle prévue au paragraphe 492 est due dans la mesure établie par chacune des contreparties des opérations. La taxe prévue aux paragraphes 491 et 492 ne s’applique pas aux entités qui s’interposent dans les mêmes opérations. Dans le cas d’un transfert de propriété d’actions et d’instruments financiers prévu au paragraphe 491, ainsi que pour les opérations sur les instruments financiers prévues au paragraphe 492, la taxe est payée par les banques, les sociétés de fiducie et les entreprises d’investissement habilitées à fournir au public, à titre professionnel, les services et activités d’investissement [...] ainsi que par les autres entités intervenant dans l’exécution des opérations susmentionnées, y compris les intermédiaires non-résidents. Lorsque plusieurs entités parmi celles indiquées à la troisième phrase, interviennent dans l’exécution de l’opération, la taxe est payée par celle d’entre elles qui reçoit l’ordre d’exécution directement de l’acquéreur ou de la contrepartie finale. Dans les autres cas, la taxe est acquittée par le contribuable. Les intermédiaires et autres entités non-résidents intervenant dans l’opération peuvent désigner un représentant fiscal [...] qui répond, dans les mêmes termes et avec les mêmes responsabilités que l’entité non résidente, des obligations liées aux opérations visées aux paragraphes précédents. [...] »

4

Le tableau 3, visé à l’article 1er, paragraphe 492, de la loi no 228/2012, figurant en annexe de celle-ci et intitulé « Tableau : taxe sur les transactions financières par instrument financier (valeur libellée en euros pour chaque contrepartie) », se présente comme suit :

Valeur nationale du contrat

(en milliers d’EUR)

Instrument financier

0-2,5

2,5-5

5-10

10-50

50-100

100-500

500-1000

Plus de 1000

Contrats à terme standardisés (futures), certificats, warrants couverts et contrats d’option sur les rendements, mesures ou indices relatifs aux actions

0,01875

0,0375

0,075

0,375

0,75

3,75

7,5

15

Contrats à terme standardisés (futures), warrants, certificats, warrants couverts et contrats d’option sur actions

0,125

0,25

0,5

2,5

5

25

50

100

Contrats d’échange (swaps) sur les actions et rendement, indices ou mesures correspondants

Contrats à terme liés à des actions et rendement, indices ou mesures correspondants

Contrats financiers avec paiement d’un différentiel lié aux actions et aux rendements, indices ou mesures correspondants

Tout autre titre comportant un règlement en espèces déterminé par référence aux actions et aux rendements, indices ou mesures correspondants

Combinaisons des contrats ou des titres précités

0,25

0,5

1

5

10

50

100

200

Le litige au principal et la question préjudicielle

5

Le 28 mars 2014, Société Générale, établie en France, a présenté, par l’intermédiaire de sa succursale italienne, une déclaration à l’administration fiscale au titre de la taxe sur les transactions financières instaurée par la loi no 228/2012. Sur la base de cette déclaration, relative aux opérations effectuées au cours de l’année d’imposition 2013 par la société mère française, ayant pour objet des instruments financiers dérivés visés à l’article 1er, paragraphe 492, de cette loi, le montant de cette taxe s’élevait à la somme de 55207 euros.

6

Le 1er août 2014, Société Générale a demandé à l’administration fiscale le remboursement des sommes acquittées au titre de cette taxe, en faisant valoir que la loi no 228/2012, en ce qu’elle prévoit l’imposition des transactions financières portant sur des instruments financiers dérivés lorsque le titre sous-jacent à de tels instruments a été émis par une entité établie en Italie, est contraire à la Constitution italienne, notamment aux principes d’égalité formelle et de capacité contributive, prévus respectivement aux articles 3 et 53 de celle-ci, ainsi qu’au droit international coutumier, applicable dans l’ordre juridique italien en vertu de l’article 10 de cette constitution, et au droit de l’Union, en particulier aux articles 18, 56 et 63 TFUE.

7

Le 28 janvier 2015, à défaut de réponse de l’administration fiscale, Société Générale a saisi la Commissione tributaria provinciale di Milano (commission fiscale provinciale de Milan, Italie) d’un recours contre cette décision de refus tacite, fondé sur les mêmes moyens. Par jugement du 18 mai 2016, cette juridiction a rejeté ce recours, en considérant que la loi no 228/2012 n’était ni inconstitutionnelle ni contraire au droit de l’Union. S’agissant de la constitutionnalité de l’article 1er, paragraphe 492, de cette loi, ladite juridiction a estimé qu’il existait un lien effectif et objectif, à caractère économique, entre le fait générateur de la taxe instituée par cette disposition, à savoir la négociation aboutissant à la conclusion d’un...

To continue reading

Request your trial
17 practice notes
  • AllianzGI-Fonds AEVN contra Autoridade Tributária e Aduaneira.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 17 March 2022
    ...Gerichtshofs das mit den fraglichen nationalen Bestimmungen verfolgte Ziel (vgl. insbesondere Urteil vom 30. April 2020, Société Générale, C‑565/18, EU:C:2020:318, Rn. 26 und die dort angeführte Rechtsprechung) sowie deren Zweck und Inhalt (vgl. insbesondere Urteil vom 2. Juni 2016, Pensioe......
  • „Viva Telecom Bulgaria“ EOOD v Direktor na Direktsia „Obzhalvane i danachno-osiguritelna praktika“ - Sofia.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 24 February 2022
    ...Estado miembro o a los residentes de dicho Estado miembro de hacerlo en otros Estados (sentencia de 30 de abril de 2020, Société Générale, C‑565/18, EU:C:2020:318, apartado 22 y jurisprudencia 87 A este respecto, aun suponiendo que el artículo 16, apartado 2, punto 3, de la ZKPO, que es mat......
  • Conclusiones del Abogado General Sr. H. Saugmandsgaard Øe, presentadas el 6 de octubre de 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 6 October 2021
    ...80) ; du 30 janvier 2020, Köln-Aktienfonds Deka (C‑156/17, EU:C:2020:51, point 72), et du 30 avril 2020, Société Générale (C‑565/18, EU:C:2020:318, point 17 Voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, Köln-Aktienfonds Deka (C‑156/17, EU:C:2020:51, points 45 et 46). 18 Voir notamment, en ce ......
  • A SCPI v Veronsaajien oikeudenvalvontayksikkö.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 7 April 2022
    ...secundaria con respecto a la otra y puede subordinarse a ella (véase, por analogía, la sentencia de 30 de abril de 2020, Société Générale, C‑565/18, EU:C:2020:318, apartado 19 y jurisprudencia 38 En el caso de autos, la normativa nacional controvertida en el litigio principal se refiere a l......
  • Request a trial to view additional results
17 cases
  • AllianzGI-Fonds AEVN contra Autoridade Tributária e Aduaneira.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 17 March 2022
    ...Gerichtshofs das mit den fraglichen nationalen Bestimmungen verfolgte Ziel (vgl. insbesondere Urteil vom 30. April 2020, Société Générale, C‑565/18, EU:C:2020:318, Rn. 26 und die dort angeführte Rechtsprechung) sowie deren Zweck und Inhalt (vgl. insbesondere Urteil vom 2. Juni 2016, Pensioe......
  • „Viva Telecom Bulgaria“ EOOD v Direktor na Direktsia „Obzhalvane i danachno-osiguritelna praktika“ - Sofia.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 24 February 2022
    ...Estado miembro o a los residentes de dicho Estado miembro de hacerlo en otros Estados (sentencia de 30 de abril de 2020, Société Générale, C‑565/18, EU:C:2020:318, apartado 22 y jurisprudencia 87 A este respecto, aun suponiendo que el artículo 16, apartado 2, punto 3, de la ZKPO, que es mat......
  • Conclusiones del Abogado General Sr. H. Saugmandsgaard Øe, presentadas el 6 de octubre de 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 6 October 2021
    ...80) ; du 30 janvier 2020, Köln-Aktienfonds Deka (C‑156/17, EU:C:2020:51, point 72), et du 30 avril 2020, Société Générale (C‑565/18, EU:C:2020:318, point 17 Voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, Köln-Aktienfonds Deka (C‑156/17, EU:C:2020:51, points 45 et 46). 18 Voir notamment, en ce ......
  • A SCPI v Veronsaajien oikeudenvalvontayksikkö.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 7 April 2022
    ...secundaria con respecto a la otra y puede subordinarse a ella (véase, por analogía, la sentencia de 30 de abril de 2020, Société Générale, C‑565/18, EU:C:2020:318, apartado 19 y jurisprudencia 38 En el caso de autos, la normativa nacional controvertida en el litigio principal se refiere a l......
  • Request a trial to view additional results

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT