Aleš Kuhar y Jožef Kuhar contra Addiko Bank d.d.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:537
Date26 June 2019
Docket NumberC-407/18
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
CourtCourt of Justice (European Union)
Celex Number62018CJ0407
62018CJ0407

ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

26 juin 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Directive 93/13/CEE – Procédure d’exécution forcée d’une créance hypothécaire – Acte notarié directement exécutoire – Contrôle judiciaire des clauses abusives – Suspension de l’exécution forcée – Incompétence du juge saisi de la demande d’exécution forcée – Protection du consommateur – Principe d’effectivité – Interprétation conforme »

Dans l’affaire C‑407/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Višje sodišče v Mariboru (cour d’appel de Maribor, Slovénie), par décision du 6 juin 2018, parvenue à la Cour le 21 juin 2018, dans la procédure

Aleš Kuhar,

Jožef Kuhar

contre

Addiko Bank d.d.,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. F. Biltgen, président de chambre, M. C. G. Fernlund et Mme L. S. Rossi (rapporteure), juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement slovène, par Mme B. Jovin Hrastnik, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mme M. Kocjan et M. N. Ruiz García, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant MM. Aleš et Jožef Kuhar à Addiko Bank d.d., établissement bancaire slovène, au sujet de l’exécution forcée d’une créance au titre d’un contrat de crédit hypothécaire conclu sous la forme d’un acte notarié directement exécutoire.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 3 de la directive 93/13 prévoit :

« 1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

2. Une clause est toujours considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle lorsqu’elle a été rédigée préalablement et que le consommateur n’a, de ce fait, pas pu avoir d’influence sur son contenu, notamment dans le cadre d’un contrat d’adhésion.

[...] »

4

L’article 4 de cette directive énonce :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

5

L’article 5 de ladite directive est rédigé comme suit :

« Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d’une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. [...] »

6

L’article 6, paragraphe 1, de la même directive dispose :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

7

Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

Le droit slovène

La loi relative à la protection des consommateurs

8

L’article 23 du Zakon o varstvu potrošnikov (loi relative à la protection des consommateurs, Uradni list RS, no 98/04) prévoit :

«Une entreprise ne peut pas prévoir de clauses contractuelles abusives à l’égard du consommateur.

Les clauses contractuelles visées au paragraphe précédent sont nulles. »

9

L’article 24, premier alinéa, de cette loi énonce :

« Des clauses contractuelles sont considérées comme abusives si elles créent, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, si elles rendent l’exécution du contrat indûment préjudiciable au consommateur, ou si elles rendent l’exécution du contrat nettement différente de ce que le consommateur pouvait légitimement attendre, ou bien si elles méconnaissent le principe de bonne foi et de loyauté. »

La loi relative à l’exécution et aux mesures conservatoires

10

L’article 9 du Zakon o izvršbi in zavarovanju (loi relative à l’exécution et aux mesures conservatoires, Uradni list RS, no 3/07) énonce :

« Une décision de première instance est susceptible d’appel à moins que la loi n’en dispose autrement.

Un recours d’un débiteur contre une ordonnance d’exécution faisant droit à une demande d’exécution est une réclamation.

[...]

Une décision concernant la réclamation est susceptible d’appel.

[...] »

11

L’article 15 de cette loi prévoit :

« Les dispositions du Zakon o pravdnem postopku [(code de procédure civile, Uradni list RS, no 73/07)] s’appliquent par analogie à la procédure d’exécution forcée et aux mesures conservatoires, sauf disposition contraire de la présente loi ou d’une autre loi. »

12

L’article 17, premier et second alinéas, de ladite loi dispose :

« Le juge ordonne l’exécution sur la base d’un titre exécutoire.

Sont des titres exécutoires :

1.

une décision de justice exécutoire et une transaction judiciaire exécutoire ;

2.

un acte notarié exécutoire ;

[...] »

13

Aux termes de l’article 55, premier alinéa, de la même loi :

« Il est possible d’introduire une réclamation contre une ordonnance d’exécution forcée pour des motifs qui font obstacle à l’exécution, notamment :

[...]

2)

si le titre sur la base duquel l’exécution forcée a été accordée n’est pas un titre exécutoire ou un acte authentique ;

[...] »

14

L’article 71 de la loi relative à l’exécution et aux mesures conservatoires est libellé comme suit :

« La juridiction peut suspendre entièrement ou partiellement l’exécution forcée à la demande du débiteur lorsque ce dernier fait valoir de manière crédible qu’une exécution immédiate lui ferait subir un préjudice irréparable ou difficilement réparable et pire que celui qu’est susceptible de subir le créancier si l’exécution est différée, dans les cas de figure suivants :

[...]

5)

introduction d’un recours en nullité de la transaction conclue dans l’acte notarié directement exécutoire sur la base duquel l’exécution forcée a été accordée ;

[...]

Sans préjudice du paragraphe précédent, le juge peut, à la demande du débiteur, suspendre l’exécution forcée dans d’autres cas également, pour des motifs légitimes particuliers, mais pour trois mois au maximum et une seule fois.

Sur proposition du créancier, le juge subordonne le sursis à l’exécution à la constitution d’une garantie par le débiteur, sauf si cela porte préjudice à son entretien ou à celui des membres de sa famille. Si le débiteur ne constitue pas la garantie dans le délai fixé par le juge, qui ne peut excéder 15 jours, la demande de suspension est réputée avoir été retirée. »

Le code de procédure civile

15

L’article 3, troisième alinéa, point 1, du code de procédure civile dispose :

« Une juridiction ne reconnaît pas une disposition des parties :

1.

contraire à l’ordre public. »

La loi relative au notariat

16

L’article 4 du Zakon o notariatu (loi relative au notariat, Uradni list RS, no 2/07) énonce :

« Un acte notarié prévoyant une obligation de donner, de faire, de ne pas faire ou de tolérer quelque chose, susceptible de faire l’objet d’un règlement amiable, constitue un titre exécutoire si le débiteur accepte expressément ce caractère directement exécutoire dans cet acte même ou dans un acte notarié séparé et si la créance est exigible. »

17

L’article 42 de cette loi dispose :

« Avant d’établir un acte notarié, le notaire doit décrire aux parties de manière compréhensible le contenu, les conséquences juridiques de l’acte juridique ou de l’expression de volonté prévus, il doit attirer l’attention des parties sur les risques connus et habituels liés à un tel acte juridique ou à une telle expression de volonté. Le notaire doit également attirer l’attention des parties sur d’autres circonstances éventuelles concernant l’acte juridique prévu, s’il les connaît [...]. Il doit également dissuader les parties d’employer des expressions peu claires, incompréhensibles ou ambigües et attirer expressément leur attention sur les conséquences juridiques...

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