Wellcome Trust Ltd contra Commissioners of Customs and Excise.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1995:426
Date07 December 1995
Celex Number61994CC0155
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-155/94
61994C0155

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. CARL OTTO LENZ

présentées le 7 décembre 1995 ( *1 )

A — Introduction

1.

Dans la présente affaire, la Cour de justice a été saisie par les Value Added Tax Tribunals, London, afin qu'elle réponde à plusieurs questions relatives aux investissements en actions d'une « trust corporation », constituée en société anonyme (« company limited by guarantee ») (« The Wellcome Trust Ltd »). Cette trust corporation, qui est la demanderesse au principal, remonte à Sir Henry Wellcome.

Burroughs, Wellcome and Company a été constituée à Londres en 1880, sous forme de société de personnes (« partnership »), par deux pharmaciens américains, Silas Burroughs et Henry Wellcome, qui, tous deux, ont acquis ultérieurement la nationalité britannique. En 1924 a été constituée la Wellcome Foundation Ltd (ci-après la « fondation »), qui a repris les activités existantes. Sir Henry Wellcome est décédé en 1936. Par un acte de dernière volonté, il a confié la gestion de l'ensemble de sa participation dans la fondation à une œuvre de bienfaisance constituée en trust (le « Wellcome Trust »), ayant pour objet l'encouragement de la recherche en médecine humaine et vétérinaire et de l'étude de l'histoire de la médecine. Au départ, il y avait sept trustees. Le 1o juin 1992, à la suite d'une décision de justice et en conformité avec une attestation délivrée par le Lord Chancellor, la Wellcome Trust Ltd, partie demanderesse dans la présente procédure, a été désignée pour agir en tant que trustee unique en remplacement des personnes physiques exerçant antérieurement cette fonction. Les anciens trustees ont été nommés directeurs de la trust corporation. Il n'est pas contesté que cette modification n'a aucune incidence sur les questions auxquelles il convient de répondre en l'espèce. (Lorsqu'il sera fait référence au « trust », ce terme visera les personnes physiques exerçant la fonction de trustee et, pour la période postérieure au 1er juin 1992, la trust corporation.)

2.

Jusqu'en 1984, la partie demanderesse détenait uniquement un lot d'actions de la fondation, dont la valeur s'élevait à 250 millions de UKL en 1980. Comme le trust souhaitait cependant diversifier ces investissements, une première vente d'actions a eu Heu, rapportant 200 millions de UKL. Les modalités selon lesquelles la vente de ces actions devait être effectuée avaient été fixées de manière détaillée et, à cette occasion, il avait été décidé que, pendant les deux années suivant la vente, aucune autre action ne devait être vendue sans accord préalable. Ce n'est qu'en 1987 que, par décision judiciaire, des compétences quasiment illimitées en matière d'investissement ont été accordées à la partie demanderesse.

3.

En 1991, 160 personnes travaillaient pour la partie demanderesse, dont cinq dans le cadre de l'activité d'investissement.

4.

Après l'extension des compétences de la Wellcome Trust Ltd en matière de vente, par décision de justice rendue en 1992, une deuxième vente d'actions a été effectuée. L'objectif était de recueillir des fonds de façon à réinvestir sous des formes plus différenciées, afin d'obtenir un revenu plus important et ayant des assises plus larges. Bien qu'il eût été décidé qu'un quart des actions devait être conservé, la deuxième vente d'actions était la plus importante vente non gouvernementale jamais effectuée au Royaume-Uni. Elle a été préparée et exécutée avec le plus grand soin. En vue d'éviter que la vente d'un si grand nombre d'actions ne provoque une chute trop importante du cours, on a choisi d'adopter la méthode dite du bookbuilding. Cette méthode consiste à donner aux investisseurs potentiels la faculté de faire une offre durant une période déterminée. Pour ce faire, on s'est adressé à des investisseurs se trouvant au Royaume-Uni, en France, en Allemagne, en Suisse, aux États-Unis, au Japon, en bordure du Pacifique et dans le reste du monde. Les différentes régions étaient confiées à plusieurs gestionnaires, sous la surveillance d'un coordinateur global. Après l'expiration de la période fixée pour l'introduction des offres, le trust a déterminé le prix et la répartition des actions. A cela s'est ajoutée une offre publique au Royaume-Uni. L'opération a, finalement, porté sur 288 millions d'actions, vendues au prix de 8 UKL l'unité, dont environ un tiers à des acquéreurs extérieurs à la Communauté européenne. Après cela, plus de 1,8 milliard de UKL a été réinvesti. Cette opération a — tout comme la vente des actions — été effectuée de manière particulièrement attentive et professionnelle.

5.

Il semble que les compétences du trust soient limitées au réinvestissement du produit de la vente dans, notamment, des actions, mais que le trust ne soit pas autorisé à faire du commerce avec ces actions. Le trust est soucieux de ne pas outrepasser ses compétences. On s'efforce, en outre, d'éviter qu'il ne détienne une participation devant être communiquée à l'autorité de contrôle.

A côté de ses activités d'investissement, la partie demanderesse vend également des livres, des photographies médicales et des photocopies, activité au titre de laquelle elle est enregistrée comme assujetti. Le produit de ses ventes d'actions n'a jamais été pris en compte à cet égard.

6.

Après la deuxième vente d'actions, la partie demanderesse a cependant demandé le remboursement de la taxe acquittée en amont pour les 33,22 % d'actions qui avaient été cédées à des acquéreurs extérieurs à la Communauté européenne. La taxe acquittée en amont s'élevait à 297832,65 UKL. La partie demanderesse considérait en effet que la deuxième vente d'actions devait, en raison de son ampleur et de l'importance de sa préparation, être considérée comme étant une activité économique au sens de la sixième directive TVA. A titre subsidiaire, on a fait valoir que l'intégralité des investissements pratiqués par le trust, et donc également la deuxième vente d'actions, devait être considérée comme étant une activité économique. L'administration affirmait, quant à elle, que la partie demanderesse devait être traitée comme un particulier.

7.

Les dispositions communautaires applicables en l'espèce sont celles de l'article 17, paragraphe 3, sous c), de la sixième directive du Conseil en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (ci-après « sixième directive TVA ») ( 1 ). Cette disposition stipule, pour ce qui concerne les déductions:

«3. Les États membres accordent également à tout assujetti la déduction ou le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée visée au paragraphe 2 dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins:

...

c)

de ses opérations exonérées conformément à l'article 13 sous B sous a) et sous d) points 1 à 5, lorsque le preneur est établi en dehors de la Communauté ou lorsque ces opérations sont directement liées à des biens qui sont destinés à être exportés vers un pays en dehors de la Communauté. »

Ce texte se réfère tant à l'article 17, paragraphe 2, qu'à certaines dispositions de l'article 13, sous B, qui visent les autres exonérations à l'intérieur du pays. L'article 17, paragraphe 2, stipule que:

«2. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l'assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable:

a)

la taxe sur la valeur ajoutée due ou acquittée pour les biens qui lui sont ou qui lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti;

... »

Parmi les dispositions de l'article 13, sous B, sous a) et sous d), points 1 à 5, seules les dispositions figurant sous d), point 5, sont applicables en l'espèce. Il y est stipulé que:

« Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

...

d)

les opérations suivantes:

...

5.

les opérations, y compris la négociation mais à l'exception de la garde et de la gestion, portant sur les actions, les parts de sociétés ou d'associations, les obligations et les autres titres, à l'exclusion:

des titres représentatifs de marchandises,

des droits ou titres visés à l'article 5, paragraphe 3. »

L'article 4 de la sixième directive TVA définit la notion d'« assujetti », notion fondamentale en l'espèce. Cette définition est la suivante:

«1. Est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d'une façon indépendante et quel qu'en soit le lieu, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.

2. Les activités économiques visées au paragraphe 1 sont toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence.

... ».

En l'espèce, il convient également de tenir compte de l'article 2 qui détermine les opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. Ces opérations sont les suivantes:

«1.

les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l'intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel;

2.

les importations de biens. »

Dans le cadre de la procédure au principal décrite ci-dessus, la juridiction...

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