Comisión de las Comunidades Europeas contra Reino Unido de Gran Bretaña y de Irlanda del Norte.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1997:35
Date23 January 1997
Docket NumberC-300/95
Celex Number61995CC0300
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
CourtCourt of Justice (European Union)
EUR-Lex - 61995C0300 - FR 61995C0300

Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 23 janvier 1997. - Commission des Communautés européennes contre Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord. - Manquement - Article 7, sous e), de la directive 85/374/CEE - Transposition incorrecte - Exonération de la responsabilité pour les produits défectueux - Etat des connaissances scientifiques et techniques. - Affaire C-300/95.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-02649


Conclusions de l'avocat général

1 Les présentes conclusions ont trait à une procédure au titre de l'article 169 du traité, introduite par la Commission contre le Royaume-Uni pour absence de transposition correcte de l'article 7, sous e), de la directive 85/374/CEE du Conseil, du 25 juillet 1985, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux (1) (ci-après la «directive»).

Le cadre normatif et la procédure

2 Comme le précise son premier considérant, la directive tend à éliminer les divergences entre les législations nationales en matière de responsabilité du producteur, divergences qui sont «susceptibles de fausser la concurrence, d'affecter la libre circulation des marchandises au sein du marché commun et d'entraîner des différences dans le niveau de protection du consommateur contre les dommages causés à sa santé et à ses biens par un produit défectueux».

Aux termes de l'article 1er de la directive, «Le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit». L'article 4 dispose en outre que «La victime est obligée de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage», tandis que l'article 6, paragraphe 1, spécifie qu'«Un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre compte tenu de toutes les circonstances, et notamment: a) de la présentation du produit; b) de l'usage du produit qui peut être raisonnablement attendu; c) du moment de la mise en circulation du produit». Cette disposition ajoute qu'«Un produit ne peut être considéré comme défectueux par le seul fait qu'un produit plus perfectionné a été mis en circulation postérieurement à lui».

Les causes d'exclusion de la responsabilité du producteur sont précisées par l'article 7, sur la base duquel «Le producteur n'est pas responsable en application de la présente directive s'il prouve: a) qu'il n'avait pas mis le produit en circulation; b) que, compte tenu des circonstances, il y a lieu d'estimer que le défaut ayant causé le dommage n'existait pas au moment où le produit a été mis en circulation par lui ou que ce défaut est né postérieurement; c) que le produit n'a été ni fabriqué pour la vente ou pour toute autre forme de distribution dans un but économique du producteur, ni fabriqué ou distribué dans le cadre de son activité professionnelle; d) que le défaut est dû à la conformité du produit avec des règles impératives émanant des pouvoirs publics; e) que l'état des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise en circulation du produit par lui n'a pas permis de déceler l'existence du défaut; f) s'agissant du fabricant d'une partie composante, que le défaut est imputable à la conception du produit dans lequel la partie composante a été incorporée ou aux instructions données par le fabricant du produit».

3 En application de l'article 19, la directive devait être mise en oeuvre avant le 30 juillet 1988. Le Royaume-Uni l'a mise en application par la première partie du Consumer Protection Act (ci-après la «loi») qui est entré en vigueur le 1er mars 1988, dont l'article 1er, paragraphe 1, stipule textuellement que «la présente partie a pour objet et pour effet d'adopter les dispositions nécessaires pour se conformer à la directive sur la responsabilité du fait des produits et sera interprétée en ce sens». L'article 4, paragraphe 1, sous e), portant application de l'article 7, sous e), de la directive, exclut la responsabilité du producteur lorsqu'il prouve que «l'état des connaissances scientifiques et techniques au moment pertinent ne permettait pas d'escompter d'un producteur de produits similaires au produit en cause qu'il ait pu déceler le défaut s'il avait existé dans ses produits pendant qu'ils étaient sous son contrôle».

4 Estimant que la loi n'avait pas transposé correctement la directive sous divers aspects, la Commission a, par lettre du 26 avril 1989, engagé, en application de l'article 169 du traité, une procédure d'infraction contre le Royaume-Uni. Ce dernier a, par lettre du 19 juillet 1989, rejeté les allégations de la Commission, en faisant valoir que, tout en étant formulée différemment, la législation nationale en question constitue une transposition correcte de la directive.

Le 2 juillet 1990, la Commission a émis un avis motivé par lequel elle a confirmé les griefs initialement avancés. Le Royaume-Uni, à son tour, a réitéré ses objections dans sa lettre de réponse à l'avis motivé, datée du 4 octobre 1990.

5 Compte tenu des arguments invoqués par le Royaume-Uni, ainsi qu'à la lumière de l'article 1er, paragraphe 1, de la loi, qui impose d'en interpréter les dispositions dans un sens conforme à la directive, la Commission est parvenue à la conclusion que cinq des six moyens avancés dans la phase précontentieuse devaient être abandonnés.

Considérant en revanche fondé le grief relatif à l'article 4, paragraphe 1, sous e), de la loi, portant application de l'article 7, sous e), de la directive, la Commission a introduit un recours tendant à faire constater l'absence de transposition correcte de cette dernière.

Le fond

6 Selon la Commission, la formulation de l'article 4, paragraphe 1, sous e), de la loi met en évidence son incompatibilité avec l'article 7, sous e), de la directive. En effet, alors que le critère établi dans ce dernier est objectif, dans la mesure où il se fonde sur l'«état des connaissances techniques et scientifiques», sans faire aucune référence à la capacité du producteur ou d'un autre producteur de produits similaires de déceler l'existence du défaut, la disposition nationale, en mettant l'accent sur le comportement d'un producteur raisonnable, requiert une appréciation subjective.

De cette manière, cette disposition finirait par transformer la responsabilité objective ou sans faute introduite par l'article 1er de la directive en une responsabilité fondée sur la négligence du producteur.

7 La principale conséquence de la modification du régime de responsabilité prévu par la directive se produirait, selon la Commission, sur le plan processuel: pour prouver qu'à la date considérée il n'était pas possible, ni pour lui ni pour un autre producteur de produits similaires, de déceler le défaut, il suffirait au producteur d'un produit défectueux de démontrer qu'il n'a commis aucune négligence et qu'il a pris toutes les précautions d'usage dans ce secteur industriel.

Il s'agirait donc d'une preuve plus aisée à rapporter que celle imposée par la directive, sur la base de laquelle le comportement du producteur serait sans pertinence, sa responsabilité n'étant exclue que lorsqu'il est prouvé qu'à l'époque considérée l'état des connaissances techniques et scientifiques rendait impossible la découverte du défaut.

8 Pour la Commission, l'incompatibilité manifeste et irrémédiable de la formulation de la loi avec le texte de la directive ne pourrait même pas être écartée par les dispositions de l'article 1er, paragraphe 1, de la loi, qui imposent une interprétation conforme à la directive, et encore moins en vertu des principes généraux d'interprétation définis par l'article 2, paragraphe 4, de l'European Communities Act de 1972 et par la jurisprudence de la House of Lords, principes qui ne sont utilisables qu'à l'égard de dispositions dont le libellé est ambigu et susceptible de différentes interprétations, et donc pas au cas d'espèce.

A l'appui du bien-fondé de son recours, la Commission a en outre avancé qu'au cours des débats à la Chambre des Lords plusieurs pairs ont soulevé des doutes sur la compatibilité de...

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