The Queen contra Minister of Agriculture, Fisheries and Food, ex parte National Federation of Fishermen's Organisations y otros y Federation of Highlands and Islands Fishermen y otros.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1995:129
Docket NumberC-44/94
Celex Number61994CC0044
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date10 May 1995
EUR-Lex - 61994C0044 - FR 61994C0044

Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 10 mai 1995. - The Queen contre Minister of Agriculture, Fisheries and Food, ex parte National Federation of Fishermen's Organisations e.a. et Federation of Highlands and Islands Fishermen e.a.. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice, Queen's Bench Division, Divisional Court - Royaume-Uni. - Politique commune de la pêche - Programmes d'orientation pluriannuels - Limitation du nombre de jours en mer. - Affaire C-44/94.

Recueil de jurisprudence 1995 page I-03115


Conclusions de l'avocat général

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1 Les questions préjudicielles soumises à la Cour dans le cadre de la présente procédure portent sur la compatibilité avec le droit communautaire du Sea Fish Licensing (Time at Sea) (Principles) Order 1993 (1), décret qui introduit des limites au nombre de jours annuel que les navires de pêche britanniques de plus de 10 mètres de longueur peuvent passer en mer (ci-après le «décret»). Ainsi qu'il ressort de l'ordonnance de renvoi, le nombre de jours par an que de tels navires peuvent passer en mer sur la base du décret en question ne pouvait excéder, pour la période comprise entre le 1er janvier 1993 et le 31 décembre 1996, celui de 1991.

Les requérantes au principal, qui représentent la quasi-totalité des opérateurs économiques britanniques du secteur de la pêche maritime (ci-après les «requérantes»), ont contesté le décret devant la High Court of Justice, en invoquant son incompatibilité avec différentes dispositions de droit communautaire. En particulier, les requérantes ont soutenu que le décret viole la décision 92/593/CEE de la Commission, du 21 décembre 1992 (2) (ci-après la «décision»), les règlements instituant la politique commune de pêche (3), les articles 6, 34, 39 et 40, paragraphe 3, du traité CE, ainsi que plusieurs principes généraux du droit communautaire (4).

Le contexte normatif communautaire et national

2 Il convient de résumer brièvement le contexte normatif tant national que communautaire dans lequel s'insèrent les questions, ainsi que les finalités particulières que l'abondante législation communautaire tend à poursuivre.

La politique communautaire en matière de pêche se fixe comme objectif principal la protection et le développement des nombreuses activités économiques qui s'y rattachent. Cet objectif doit cependant être constamment tempéré par l'exigence, tout aussi prioritaire, d'une protection efficace de l'environnement marin, et donc d'une gestion rationnelle des ressources halieutiques. C'est pourquoi, depuis que la pêche a été déclarée politique autonome de l'agriculture (5), le développement de la législation communautaire en la matière s'est accompagné d'une prise de conscience du déséquilibre existant entre les capacités de pêche et les ressources disponibles. Alors que d'une part, en effet, on instituait l'organisation commune du marché pour les produits de la pêche, plus particulièrement destinée à garantir la commercialisation et la libre circulation des produits dans ce secteur, on a d'autre part graduellement introduit et développé également un corpus de règles destinées à préserver l'intégrité des ressources disponibles (6). Le but n'était pas seulement de protéger l'environnement, mais également de garantir la survie de la pêche en tant que secteur économique de production. C'est donc toujours dans cette perspective qu'il y a lieu d'interpréter les dispositions communautaires en la matière, en particulier celles qui régissent le présent cas d'espèce.

3 En premier lieu, le règlement (CEE) n_ 4028/86 du Conseil, du 18 décembre 1986, relatif à des actions communautaires pour l'amélioration et l'adaptation des structures du secteur de la pêche et de l'aquaculture (7) (ci-après le «règlement»). Il s'agit en effet du règlement cadre en vigueur au moment de l'adoption du décret national litigieux, qui instituait un régime de concours financiers communautaires en faveur des États membres qui s'engageaient à favoriser l'évolution structurelle du secteur de la pêche. En vertu de ce règlement, les États intéressés par le concours sont tenus de présenter à la Commission un «programme d'orientation pluriannuel» (ci-après le «POP»), dans lequel ils indiquent les mesures spécifiques qu'ils entendent adopter.

L'article 1er du règlement précise que le concours est destiné à des actions entreprises dans des domaines déterminés, parmi lesquels, sous d), l'«adaptation des capacités de pêche par l'arrêt temporaire ou définitif de l'activité de certains navires de pêche». L'article 2, paragraphe 1, définit le POP comme «un ensemble d'objectifs assortis d'un inventaire des moyens nécessaires à leur réalisation, permettant d'orienter, dans une perspective d'ensemble de caractère durable, le développement du secteur de la pêche». L'article 2, paragraphe 2, du règlement prévoit une série de conditions et de données devant nécessairement figurer dans le POP. Celui-ci doit en outre, pour les besoins du financement, être communiqué à la Commission (conformément aux règles définies à l'article 3), qui décide, en vertu de l'article 4, sur le point de savoir s'il répond aux exigences du règlement et s'il peut dès lors faire l'objet d'interventions financières communautaires (et nationales) dans le secteur en cause. Les financements sont ensuite accordés conformément aux dispositions prévues à cet effet aux articles 40 à 48 du règlement. La décision est donc l'acte par lequel la Commission a approuvé le troisième POP du Royaume-Uni, relatif à la période 1993-1996.

4 Ce règlement a été partiellement modifié, avec effet au 31 décembre 1992, par le règlement (CEE) n_ 3946/92 (8). Ce dernier, dans le but de fournir aux États un moyen supplémentaire dans la recherche d'un équilibre entre pêche et ressources disponibles, a introduit le concept d'«effort de pêche»: alors que le règlement exigeait des réductions de la «capacité de pêche» d'une flotte déterminée, la version amendée fait référence à des réductions de l'«effort de pêche», c'est-à-dire à des réductions de capacité combinées à des réductions de l'activité de cette flotte.

Le nouveau texte de l'article 1er, sous d), du règlement prévoit donc que les financements communautaires peuvent être octroyés, entre autres, en vue de la mise en oeuvre des mesures d'«adaptation de l'effort de pêche par l'arrêt temporaire ou définitif de l'activité de certains navires de pêche». Dans le même ordre d'idées, l'article 1 bis prévoit que «les États membres prennent des mesures afin de limiter les efforts de pêche à un niveau compatible avec l'exploitation équilibrée des stocks halieutiques», en précisant qu'il s'agit de mesures combinant la réduction des capacités des flottes de pêche et l'adaptation de leur activité.

5 Sur certains aspects de la matière, pertinents aux fins du litige, est ensuite intervenu le règlement n_ 3760/92, précité (9). En vertu de l'article 11 de ce dernier, le Conseil, agissant selon la procédure prévue à l'article 43 du traité, «fixe, sur une base pluriannuelle et pour la première fois au plus tard le 1er janvier 1994, les objectifs et modalités visant à restructurer le secteur de la pêche communautaire, en vue d'atteindre de manière durable un équilibre entre les ressources et leur exploitation. Cette restructuration tient compte, cas par cas, des éventuelles conséquences économiques et sociales...».

6 Enfin, et pour être complet, il y a lieu de rappeler le règlement (CEE) n_ 3699/93 du Conseil (10), entré en vigueur le 1er janvier 1994 et qui n'est donc pas applicable aux faits de la cause. Ce règlement, qui comporte des innovations sensibles par rapport au régime précédemment en vigueur, impose aux États membres l'obligation explicite de prendre «des mesures d'ajustement des efforts de pêche pour atteindre au minimum les objectifs des programmes d'orientation pluriannuels visés à l'article 5», en adoptant, si nécessaire, des «mesures d'arrêt définitif des activités de pêche des navires» (article 8, paragraphe 1). Ces mesures peuvent en outre comprendre, en vertu de l'article 8, paragraphe 3, «des limitations des jours de pêche ou de mer autorisés par période déterminée...».

Dans le nouveau régime du règlement n_ 3699/93, donc, les objectifs fixés par les États dans leurs POP semblent avoir revêtu un caractère obligatoire. La preuve de ce caractère obligatoire se trouve en outre dans la décision 94/15/CE du Conseil (11), qui ne s'applique pas non plus aux faits de la cause étant donné qu'elle a été adoptée postérieurement au décret litigieux. Ladite décision, qui trouve sa base juridique à l'article 11 du règlement n_ 3760/92, précité, oblige formellement les États membres à diminuer les efforts de pêche de leur flotte conformément aux objectifs fixés dans les POP, en confiant à la Commission le soin de veiller à la réalisation de ces objectifs (articles 1er et 2).

7 Le Royaume-Uni a présenté jusqu'à présent trois POP, dont le premier avait essentiellement pour objet la réduction des capacités de la flotte, alors que le deuxième, relatif à la période 1987-1991, était basé sur l'application plus restrictive d'un régime de licences de pêche ainsi que sur...

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