Opinion of Advocate General Bobek delivered on 16 July 2020.
Jurisdiction | European Union |
Celex Number | 62019CC0352 |
ECLI | ECLI:EU:C:2020:588 |
Date | 16 July 2020 |
Court | Court of Justice (European Union) |
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. MICHAL BOBEK
présentées le 16 juillet 2020(1)
Affaire C‑352/19 P
Région de Bruxelles-Capitale
contre
Commission européenne
« Pourvoi – Règlement (CE) no 1107/2009 – Produits phytopharmaceutiques – Règlement d’exécution (UE) 2017/2324 –Substance active “glyphosate” – Article 263 TFUE – Qualité pour agir des particuliers – Affectation directe – Article 4, paragraphe 2, TUE – Régions des États membres – Article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus – Interprétation conforme – Affectation individuelle – Acte réglementaire ne comportant pas de mesures d’exécution »
I. Introduction
1. Une entité fédérée d’un État membre qui, en vertu de la constitution de cet État, est investie de la compétence de protéger l’environnement et qui, dans l’exercice de cette compétence, interdit l’utilisation du glyphosate sur son territoire, parce qu’elle considère que cette substance active est dangereuse, est-elle directement concernée par le règlement d’exécution de la Commission (UE) 2017/2324 (2) qui renouvelle l’approbation de ladite substance active, la déclarant en fait inoffensive ?
2. Le Tribunal est parvenu à la conclusion qu’une telle entité, en l’occurrence la Région de Bruxelles-Capitale, n’est pas directement concernée par une mesure de l’Union de cet ordre. Il a dès lors déclaré irrecevable le recours en annulation introduit par cette région (3). J’estime que, en refusant la qualité pour agir à la Région de Bruxelles-Capitale, le Tribunal a commis une erreur de droit, interprétant de manière erronée le quatrième alinéa de l’article 263 TFUE, ainsi que plusieurs dispositions du droit dérivé applicable.
II. Le cadre juridique
A. Le droit international
3. L’article 2 de la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, conclue au nom de la Communauté européenne par la décision du Conseil 2005/370/CE du 17 février 2005 (4) (ci‑après la « convention d’Aarhus »), qui comporte les définitions, dispose aux points 2 et 4 :
« Aux fins de la présente convention,
[...]
2. L’expression “autorité publique” désigne :
a) l’administration publique à l’échelon national ou régional ou à un autre niveau ;
b) les personnes physiques ou morales qui exercent, en vertu du droit interne, des fonctions administratives publiques, y compris des tâches, activités ou services particuliers en rapport avec l’environnement ;
c) toute autre personne physique ou morale assumant des responsabilités ou des fonctions publiques ou fournissant des services publics en rapport avec l’environnement sous l’autorité d’un organe ou d’une personne entrant dans les catégories visées aux points a) et b) ci‑dessus ;
[...]
4. Le terme “public” désigne une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la coutume du pays, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes. »
4. L’article 9 de la convention d’Aarhus, qui concerne l’accès à la justice, dispose aux paragraphes 3 et 4 :
« 3. [...] chaque partie veille à ce que les membres du public qui répondent aux critères éventuels prévus par son droit interne puissent engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement.
4. [...] les procédures visées aux paragraphes 1, 2 et 3 ci‑dessus doivent offrir des recours suffisants et effectifs, y compris un redressement par injonction s’il y a lieu, et doivent être objectives, équitables et rapides sans que leur coût soit prohibitif. [...] »
B. Le droit de l’Union
5. Par la directive 2001/99/CE de la Commission, du 20 novembre 2001, modifiant l’annexe I de la directive 91/414/CEE du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques en vue d’y inscrire les substances actives glyphosate et thifensulfuron-méthyle (5), la substance active « glyphosate » a été inscrite dans ladite annexe I de la directive 91/414/CEE (6) et a donc été approuvée par cette directive avec effet à compter du 1er juillet 2002.
6. Avec effet au 14 juin 2011 et moyennant certaines mesures transitoires, la directive 91/414 a été abrogée par le règlement (CE) nº 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil (7).
7. Les considérants 10, 23 et 29 du règlement nº 1107/2009 énoncent ce qui suit :
« (10) Des substances ne devraient entrer dans la composition de produits phytopharmaceutiques que s’il a été démontré qu’elles présentent un intérêt manifeste pour la production végétale et qu’elles ne devraient pas avoir d’effet nocif sur la santé humaine ou animale ou d’effet inacceptable sur l’environnement. Afin de garantir le même niveau de protection dans tous les États membres, la décision concernant l’acceptabilité ou la non‑acceptabilité de telles substances devrait être prise au niveau communautaire sur la base de critères harmonisés. Ces critères devraient être appliqués pour la première approbation d’une substance active au titre du présent règlement. Pour les substances actives ayant déjà fait l’objet d’une approbation, ces critères devraient être appliqués au moment du renouvellement ou du réexamen de leur approbation.
[...]
(23) [...] Il convient dès lors que les autorisations de produits phytopharmaceutiques soient accordées par les États membres.
[...]
(29) Le principe de reconnaissance mutuelle est l’un des moyens de garantir la libre circulation des marchandises au sein de la Communauté. Pour éviter les doubles emplois, réduire la charge administrative pesant sur l’industrie et les États membres et prévoir une mise à disposition plus harmonisée des produits phytopharmaceutiques, les autorisations accordées par un État membre devraient être acceptées par les autres États membres lorsque les conditions agricoles, phytosanitaires et environnementales (y compris climatiques) sont comparables. La Communauté devrait dès lors être divisée en zones présentant de telles conditions comparables, afin de faciliter une telle reconnaissance mutuelle. Toutefois, des circonstances environnementales ou agricoles propres au territoire d’un ou de plusieurs États membres pourraient nécessiter que, sur demande, les États membres reconnaissent ou modifient une autorisation délivrée par un autre État membre, ou refusent d’autoriser le produit phytopharmaceutique sur leur territoire, si des circonstance agricoles ou environnementales particulières le justifient [...]. »
8. L’article 20, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement nº 1107/2009 prévoit, pour ce qui nous intéresse, que, « [e]n cas de retrait de l’approbation ou si l’approbation n’est pas renouvelée en raison de préoccupations immédiates concernant la santé humaine ou animale ou l’environnement, les produits phytopharmaceutiques concernés sont immédiatement retirés du marché ».
9. À cet égard, l’article 36, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement nº 1107/2009 prévoit :
« Lorsque la mise en place de mesures nationales d’atténuation des risques visées au premier alinéa ne permettent pas de répondre aux préoccupations d’un État membre liées à la santé humaine ou animale ou à l’environnement, un État membre peut refuser l’autorisation du produit phytopharmaceutique sur son territoire si, en raison de ses caractéristiques environnementales ou agricoles particulières, il est fondé à considérer que le produit en question présente toujours un risque inacceptable pour la santé humaine ou animale ou l’environnement. »
10. L’article 40, paragraphe 1, du règlement nº 1107/2009 prévoit :
« Le titulaire d’une autorisation accordée conformément à l’article 29 peut, au titre de la procédure de reconnaissance mutuelle prévue dans la présente sous-section, demander une autorisation pour un même produit phytopharmaceutique, une même utilisation et une utilisation selon des pratiques agricoles comparables dans un autre État membre, dans les cas suivants :
a) l’autorisation a été accordée par un État membre (État membre de référence) qui appartient à la même zone ;
[...] »
11. L’article 41, paragraphe 1, du règlement nº 1107/2009 prévoit :
« L’État membre recevant une demande au titre de l’article 40 autorise, [...] compte tenu, le cas échéant, des circonstances qui prévalent sur son territoire, le produit phytopharmaceutique concerné dans les mêmes conditions que l’État membre examinant la demande sauf lorsque l’article 36, paragraphe 3, s’applique. »
12. L’article 43 du règlement nº 1107/2009 prévoit :
« 1. L’autorisation est renouvelée sur demande de son titulaire, pour autant que les conditions fixées à l’article 29 soient toujours remplies.
[...]
5. Les États membres statuent sur le renouvellement de l’autorisation d’un produit phytopharmaceutique dans un délai maximal de douze mois à compter du renouvellement de l’approbation de la substance active, du phytoprotecteur ou du synergiste contenu dans le produit.
6. Si, pour des raisons indépendantes de la volonté du titulaire de l’autorisation, aucune décision n’est prise sur le renouvellement de l’autorisation avant son expiration, l’État membre concerné prolonge l’autorisation de la durée nécessaire pour mener à bien l’examen et adopter une décision sur le renouvellement. »
13. L’article 78, paragraphe 3, du règlement nº 1107/2009 prévoit l’adoption d’un règlement comportant la liste des substances actives inscrites à l’annexe I de la directive 91/414, ces substances étant réputées approuvées en vertu de ce règlement.
14. Le règlement d’exécution (UE) nº 540/2011 de la Commission, du 25 mai 2011, portant application du règlement (CE) nº 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, en ce qui concerne la liste des substances actives approuvées (8) a adopté la liste...
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