Conclusiones del Abogado General Sr. M. Szpunar, presentadas el 31 de mayo de 2018.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:378
Date31 May 2018
Docket NumberC-105/17
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Celex Number62017CC0105
62017CC0105

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 31 mai 2018 ( 1 )

Affaire C‑105/17

Komisia za zashtita na potrebitelite

contre

Evelina Kamenova

en présence de

Okrazhna prokuratura – Varna

[demande de décision préjudicielle formée par l’Administrativen sad – Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs – Vente en ligne – Notion de “professionnel” »

I. Introduction

1.

La recherche de biens et de services sur Internet fait partie de notre vie quotidienne et, désormais, sans doute même de notre culture. Le nombre de plateformes de vente en ligne n’a cessé d’augmenter et, en 2016, dans l’Union européenne, le pourcentage des citoyens âgés de plus de 16 ans et de moins de 74 ans ayant commandé par Internet des biens ou des services pour leur usage personnel s’élevait à 55 % ( 2 ). La fonction de ces plateformes consiste à faire office d’intermédiaire ou de courtier en ligne. Elles mettent ainsi en contact direct soit un professionnel et un consommateur, soit deux professionnels, soit deux particuliers, intéressés par l’acquisition de produits neufs ou d’occasion à des fins privées ( 3 ).

2.

Or, dans de nombreuses situations, les annonces publiées sur les plateformes en ligne ne laissent pas clairement apparaître si le vendeur est un professionnel ou un particulier.

3.

Le présent renvoi préjudiciel, qui a été adressé à la Cour par l’Administrativen sad – Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie), porte sur l’interprétation de l’article 2, sous b) et d), de la directive 2005/29/CE ( 4 ).

4.

La demande de décision préjudicielle a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Evelina Kamenova à la Komisia za zashtita na potrebitelite (commission bulgare de protection des consommateurs, ci-après la « CPC ») au sujet d’un acte adopté par cette dernière portant constatation d’une infraction administrative. L’infraction imputée à Mme Kamenova tiendrait au non-respect de la Zakon za zashtita na potrebitelite (ZZP) (loi sur la protection des consommateurs, ci-après la « ZZP ») pour avoir omis de fournir des renseignements aux consommateurs à l’occasion d’annonces de vente de biens publiées sur une plateforme en ligne.

5.

La juridiction de renvoi souhaite savoir, en substance, si une personne physique qui a publié simultanément huit annonces de vente de divers produits sur une plateforme de vente en ligne peut être qualifiée de « professionnelle » et si son activité constitue une « pratique commerciale » au sens de la directive sur les pratiques commerciales déloyales.

6.

Cette affaire donne donc à la Cour l’occasion de préciser la notion de « professionnel » au sens de cette directive ainsi que les critères à prendre en compte par les juridictions nationales lors de l’appréciation de cette notion dans le cadre particulier de la vente en ligne.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. La directive sur les pratiques commerciales déloyales

7.

Aux termes de l’article 1er de la directive sur les pratiques commerciales déloyales, lu en combinaison avec les considérants 14 et 15 de celle-ci, cette directive a pour objectif d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en procédant à une harmonisation complète et totale des législations nationales relatives aux pratiques commerciales déloyales.

8.

L’article 2 de cette directive dispose :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

b)

“professionnel” : toute personne physique ou morale qui, pour les pratiques commerciales relevant de la présente directive, agit à des fins qui entrent dans le cadre de son activité, commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, et toute personne agissant au nom ou pour le compte d’un professionnel ;

[...]

d)

“pratiques commerciales des entreprises vis-à-vis des consommateurs” [...] : toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit aux consommateurs ;

[...] ».

9.

Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de cette même directive, la directive « s’applique aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs, telles que définies à l’article 5, avant, pendant et après une transaction commerciale portant sur un produit ».

2. La directive 2011/83/UE

10.

Ainsi qu’il ressort de l’article 1er de la directive 2011/83/UE ( 5 ), l’objectif de cette directive est de « contribuer, en atteignant un niveau élevé de protection du consommateur, au bon fonctionnement du marché intérieur en rapprochant certains aspects des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux contrats conclus entre les consommateurs et les professionnels ».

11.

L’article 2 de cette directive dispose :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

2)

“professionnel” : toute personne physique ou morale, qu’elle soit publique ou privée, qui agit, y compris par l’intermédiaire d’une autre personne agissant en son nom ou pour son compte, aux fins qui entrent dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale en ce qui concerne des contrats relevant de la présente directive ;

[...] ».

12.

Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de la directive relative aux droits des consommateurs, celle-ci « s’applique, dans les conditions et dans la mesure prévues par ses dispositions, à tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur [...] ».

B. Le droit bulgare

13.

L’article 47 de la ZZP, promulguée au DV no 99, du 9 décembre 2005, dans sa version publiée au DV no 61 de 2014, en vigueur depuis le 25 juillet 2014, et l’article 50 de la ZZP transposent respectivement les articles 6 et 9 de la directive relative aux droits des consommateurs concernant, d’une part, les obligations d’information concernant les contrats à distance et, d’autre part, le droit de rétraction.

III. Les faits à l’origine du litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour

14.

Il ressort du dossier de l’affaire au principal que M. K. K. (le consommateur dans cette affaire) a acquis, au titre d’un contrat de vente à distance, une montre d’occasion de marque « Longines » sur le site Internet http://olx.bg.

15.

Le 20 octobre 2014, la montre, mise en vente par un utilisateur sous l’alias « eveto-ZZ », a été livrée au consommateur par une entreprise de coursier. Les données relatives à l’expéditeur indiquaient le nom, l’adresse et le numéro de téléphone de ce dernier. Après avoir constaté que la montre ne correspondait pas aux propriétés indiquées dans l’annonce publiée sur la plateforme de vente en ligne, le consommateur a exprimé au vendeur, par voie téléphonique, sa volonté de résilier le contrat. Ce dernier a toutefois refusé de reprendre le bien en échange d’un remboursement.

16.

En conséquence, le consommateur a déposé une plainte auprès de la CPC. Lors des vérifications effectuées par la CPC, il s’est avéré que l’expéditeur de la montre sous l’alias « eveto-ZZ » était Mme Kamenova. Selon le gestionnaire du site, au 10 décembre 2014, l’utilisateur « eveto-ZZ » avait publié au total huit annonces pour divers produits en vue de leur vente ( 6 ).

17.

Par acte du 27 février 2015, la CPC a constaté une infraction administrative. Le 17 mars 2015, Mme Kamenova a contesté cet acte au motif qu’elle n’avait pas la qualité de professionnel et que les dispositions de la ZZP ne lui étaient dès lors pas applicables. La CPC a adopté une décision de sanction contre Mme Kamenova sur le fondement de l’article 207 de la ZZP pour violation de l’article 47, paragraphe 1, points 2, 3, 5, 7, 8 et 12, ainsi que de l’article 50 de la ZZP. La CPC s’est fondée sur le fait que Mme Kamenova avait omis d’indiquer dans chacune des annonces le nom et l’adresse du professionnel, ainsi que son adresse de courrier électronique ; le prix total, tous droits et taxes compris ; les conditions de paiement, de livraison et d’exécution ; le droit du consommateur de se rétracter du contrat de vente à distance ; les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ; ainsi que le rappel de l’existence d’une garantie légale de la conformité des produits par rapport au contrat de vente.

18.

Mme Kamenova a introduit un recours contre la décision de sanction devant le Varnenski rayonen sad (tribunal d’arrondissement de Varna, Bulgarie). Par jugement du 22 mars 2016, cette juridiction a annulé la décision de sanction du CPC au motif que Mme Kamenova n’avait pas la qualité de « professionnel » au sens du paragraphe 13, point 2, des dispositions complémentaires de la ZZP et s’est référée à la directive sur les pratiques commerciales déloyales, en relevant que la notion de « professionnel » visée est liée non pas à un acte unique et isolé, mais à l’exercice, dans un cadre commercial, d’affaires ou professionnel, d’une activité ayant un caractère systématique.

19.

La CPC a formé un pourvoi en cassation contre ce jugement devant la juridiction de renvoi.

20.

Estimant que la solution du litige au principal dépendait de l’interprétation des dispositions pertinentes du droit de l’Union, l’Administrativen sad – Varna (tribunal administratif de Varna) a, par jugement du 16 février 2017, parvenu au...

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