Comisión Europea contra Hungría.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:439
Celex Number62017CC0171
Docket NumberC-171/17
Date14 June 2018
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
CourtCourt of Justice (European Union)
62017CC0171

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 14 juin 2018 ( 1 )

Affaire C‑171/17

Commission européenne

contre

Hongrie

« Manquement d’État – Article 49 TFUE – Liberté d’établissement – Article 56 TFUE – Libre prestation des services – Directive 2006/123/CE – Articles 15 et 16 – Restrictions – Justification – Nécessité – Proportionnalité – Système national de paiement mobile – Droit exclusif – Monopole – Service d’intérêt économique général »

1.

Par le présent recours, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en ayant introduit et maintenu en vigueur le système national de paiement mobile, régi par l’a nemzeti mobil fizetési rendszerről szóló 2011. évi CC. törvény (loi no CC de 2011 relative au système national de paiement mobile) ( 2 ) et par le 356/2012. (XII. 13.) Korm. rendelet a nemzeti mobil fizetési rendszerről szóló törvény végrehajtásáról (décret gouvernemental no 356/2012 portant exécution de la loi no CC de 2011) ( 3 ), du 13 décembre 2012, la Hongrie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu, à titre principal, de l’article 15, paragraphe 2, sous d), et de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur ( 4 ) et, à titre subsidiaire, des articles 49 et 56 TFUE.

2.

Dans les présentes conclusions, nous exposerons les motifs pour lesquels nous pensons que ce recours en manquement doit être accueilli.

I. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. Le droit primaire

3.

Aux termes de l’article 49, premier alinéa, TFUE :

« Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre dans le territoire d’un autre État membre sont interdites. Cette interdiction s’étend également aux restrictions à la création d’agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d’un État membre établis sur le territoire d’un État membre. »

4.

L’article 56, premier alinéa, TFUE dispose :

« Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l’intérieur de l’Union [européenne] sont interdites à l’égard des ressortissants des États membres établis dans un État membre autre que celui du destinataire de la prestation. »

2. La directive « services »

5.

Les considérants 8, 17 et 70 de la directive « services » indiquent :

« (8)

Les dispositions de la présente directive concernant la liberté d’établissement et la libre circulation des services ne devraient s’appliquer que dans la mesure où les activités en cause sont ouvertes à la concurrence, de manière à ce qu’elles n’obligent pas les États membres à libéraliser les services d’intérêt économique général [(ci-après les “SIEG”)] ou à privatiser des entités publiques proposant de tels services, ni à abolir les monopoles existants pour d’autres activités ou certains services de distribution.

[...]

(17)

La présente directive ne vise que les services fournis en échange d’une contrepartie économique. Les services d’intérêt général ne sont pas couverts par la définition de l’article 50 [CE (devenu l’article 57 TFUE)] et ne relèvent donc pas du champ d’application de la présente directive. Les [SIEG] sont des services qui sont fournis en contrepartie d’une rémunération et entrent par conséquent dans le champ d’application de la présente directive. Toutefois, certains [SIEG], notamment dans le domaine des transports, sont exclus du champ d’application de la présente directive et certains autres [SIEG], par exemple ceux pouvant exister dans le domaine des services postaux, font l’objet d’une dérogation à la disposition sur la libre prestation des services établie par la présente directive. La présente directive ne traite pas du financement des [SIEG] et n’est pas applicable aux systèmes d’aides accordées par les États membres, en particulier dans le domaine social, conformément aux règles communautaires en matière de concurrence. La présente directive ne traite pas du suivi du Livre blanc de la Commission sur les services d’intérêt général.

[...]

(70)

Aux fins de la présente directive, et sans préjudice de l’article 16 [CE (devenu l’article 14 TFUE)], des services ne peuvent être considérés comme des [SIEG] que s’ils sont fournis en application d’une mission particulière de service public confiée au prestataire par l’État membre concerné. L’attribution de cette mission devrait se faire au moyen d’un ou de plusieurs actes, dont la forme est déterminée par l’État membre concerné, et devrait définir la nature exacte de la mission attribuée. »

6.

L’article 1er, paragraphes 2 et 3, de cette directive dispose :

« 2. La présente directive ne traite pas de la libéralisation des [SIEG], réservés à des organismes publics ou privés, ni de la privatisation d’organismes publics prestataires de services.

3. La présente directive ne traite pas de l’abolition des monopoles fournissant des services, ni des aides accordées par les États membres qui relèvent des règles communautaires en matière de concurrence.

La présente directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres de définir, conformément au droit communautaire, ce qu’ils entendent par [SIEG], la manière dont ces services devraient être organisés et financés conformément aux règles relatives aux aides d’État ou les obligations spécifiques auxquelles ils doivent être soumis. »

7.

La section 2, intitulée « Exigences interdites ou soumises à évaluation », du chapitre III de la directive « services », relatif à la « [l]iberté d’établissement des prestataires », se compose des articles 14 et 15. L’article 14 de cette directive, porte sur les « [e]xigences interdites », tandis que l’article 15 de ladite directive, relatif aux « [e]xigences à évaluer », dispose :

« 1. Les États membres examinent si leur système juridique prévoit les exigences visées au paragraphe 2 et veillent à ce que ces exigences soient compatibles avec les conditions visées au paragraphe 3. Les États membres adaptent leurs dispositions législatives, réglementaires ou administratives afin de les rendre compatibles avec ces conditions.

2. Les États membres examinent si leur système juridique subordonne l’accès à une activité de service ou son exercice au respect de l’une des exigences non discriminatoires suivantes :

[...]

d)

les exigences autres que celles relatives aux matières couvertes par la directive 2005/36/CE [ ( 5 )] ou que celles prévues dans d’autres instruments communautaires, qui réservent l’accès à l’activité de service concernée à des prestataires particuliers en raison de la nature spécifique de l’activité ;

[...]

3. Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes :

a)

non-discrimination : les exigences ne sont pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, de l’emplacement de leur siège statutaire ;

b)

nécessité : les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général ;

c)

proportionnalité : les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d’autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d’atteindre le même résultat.

[...] »

8.

Figurant au chapitre IV de la directive « services », intitulé « Libre circulation des services », l’article 16 de celle-ci porte sur la « [l]ibre prestation des services ». Il énonce en son paragraphe 1 :

« Les États membres respectent le droit des prestataires de fournir des services dans un État membre autre que celui dans lequel ils sont établis.

L’État membre dans lequel le service est fourni garantit le libre accès à l’activité de service ainsi que son libre exercice sur son territoire.

Les États membres ne peuvent pas subordonner l’accès à une activité de service ou son exercice sur leur territoire à des exigences qui ne satisfont pas aux principes suivants :

a)

la non-discrimination : l’exigence ne peut être directement ou indirectement discriminatoire en raison de la nationalité ou, dans le cas de personnes morales, en raison de l’État membre dans lequel elles sont établies ;

b)

la nécessité : l’exigence doit être justifiée par des raisons d’ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l’environnement ;

c)

la proportionnalité : l’exigence doit être propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

[...] »

B. Le droit hongrois

1. La loi no CC de 2011

9.

La loi no CC de 2011 a modifié le cadre juridique des services de paiement mobile avec effet au 1er avril 2013, mais avec effet obligatoire uniquement à partir du 2 juillet 2014.

10.

L’article 1er, sous d), de cette loi dispose :

« Aux fins de la présente loi, on entend par

[...]

d)

système de paiement mobile : tout système dans lequel le client achète le service par l’intermédiaire d’un système de commercialisation électronique accessible sans rattachement à un point fixe, à l’aide d’un moyen de télécommunication, d’un dispositif numérique ou d’un autre outil informatique. »

11.

L’article 2 de ladite loi énonce :

« Est réputé être un service faisant l’objet d’une commercialisation centralisée et mobile

a)

le service public de stationnement (parking) conformément à la...

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