European Commission v Hungary.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:881
CourtCourt of Justice (European Union)
Date07 November 2018
Docket NumberC-171/17
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62017CJ0171
62017CJ0171

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

7 novembre 2018 ( *1 )

« Manquement d’État – Directive 2006/123/CEArticles 15 à 17 – Article 49 TFUE – Liberté d’établissement – Article 56 TFUE – Libre prestation des services – Système national de paiement mobile – Monopole »

Dans l’affaire C‑171/17,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 5 avril 2017,

Commission européenne, représentée par M. V. Bottka et Mme H. Tserepa-Lacombe, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Hongrie, représentée par MM. M. Z. Fehér et G. Koós, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de la septième chambre, faisant fonction de président de la quatrième chambre, Mme K. Jürimäe (rapporteure), MM. C. Lycourgos, E. Juhász et C. Vajda, juges,

avocat général : M. Y. Bot,

greffier : M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 mars 2018,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 14 juin 2018,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en introduisant et en maintenant en vigueur le système national de paiement mobile régi par la nemzeti mobil fizetési rendszerről szóló 2011. évi CC. törvény (Magyar Közlöny 2011/164) (loi no CC de 2011, relative au système national de paiement mobile, ci-après la « loi no CC ») et par le 356/2012. (XII. 13.) Korm. rendelet a nemzeti mobil fizetési rendszerről szóló törvény végrehajtásáról (décret gouvernemental no 356/2012, portant exécution de la loi relative au système national de paiement mobile, ci-après le « décret gouvernemental no 356/2012), la Hongrie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 15, paragraphe 2, sous d), et de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur (JO 2006, L 376, p. 36), ainsi que, à titre subsidiaire, en vertu des articles 49 et 56 TFUE.

I. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

2

Les considérants 8, 17, 70 et 72 de la directive 2006/123 énoncent :

« (8)

Les dispositions de la présente directive concernant la liberté d’établissement et la libre circulation des services ne devraient s’appliquer que dans la mesure où les activités en cause sont ouvertes à la concurrence, de manière à ce qu’elles n’obligent pas les États membres à libéraliser les services d’intérêt économique général ou à privatiser des entités publiques proposant de tels services, ni à abolir les monopoles existants pour d’autres activités ou certains services de distribution.

[...]

(17)

La présente directive ne vise que les services fournis en échange d’une contrepartie économique. Les services d’intérêt général ne sont pas couverts par la définition de l’article [57 TFUE] et ne relèvent donc pas du champ d’application de la présente directive. Les services d’intérêt économique général sont des services qui sont fournis en contrepartie d’une rémunération et entrent par conséquent dans le champ d’application de la présente directive. Toutefois, certains services d’intérêt économique général, notamment dans le domaine des transports, sont exclus du champ d’application de la présente directive et certains autres services d’intérêt économique général, par exemple ceux pouvant exister dans le domaine des services postaux, font l’objet d’une dérogation à la disposition sur la libre prestation des services établie par la présente directive. [...]

[...]

(70)

Aux fins de la présente directive, et sans préjudice de l’article [14 TFUE], des services ne peuvent être considérés comme des services d’intérêt économique général que s’ils sont fournis en application d’une mission particulière de service public confiée au prestataire par l’État membre concerné. L’attribution de cette mission devrait se faire au moyen d’un ou de plusieurs actes, dont la forme est déterminée par l’État membre concerné, et devrait définir la nature exacte de la mission attribuée.

[...]

(72)

Les services d’intérêt économique général sont chargés de missions importantes liées à la cohésion sociale et territoriale. Le processus d’évaluation prévu dans la présente directive ne devrait pas faire obstacle à l’accomplissement de ces missions. Les exigences requises pour accomplir de telles missions ne devraient pas être affectées par ledit processus ; en même temps, il convient de remédier aux restrictions injustifiées à la liberté d’établissement. »

3

L’article 1er de cette directive dispose :

« [...]

2. La présente directive ne traite pas de la libéralisation des services d’intérêt économique général, réservés à des organismes publics ou privés, ni de la privatisation d’organismes publics prestataires de services.

3. La présente directive ne traite pas de l’abolition des monopoles fournissant des services, ni des aides accordées par les États membres qui relèvent des règles [de l’Union] en matière de concurrence.

La présente directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres de définir, conformément au droit [de l’Union], ce qu’ils entendent par services d’intérêt économique général, la manière dont ces services devraient être organisés et financés conformément aux règles relatives aux aides d’État ou les obligations spécifiques auxquelles ils doivent être soumis.

[...] »

4

L’article 2, paragraphe 2, de ladite directive dispose :

« La présente directive ne s’applique pas aux activités suivantes :

a)

les services d’intérêt général non économiques ;

[...]

i)

les activités participant à l’exercice de l’autorité publique conformément à l’article [51 TFUE]

[...] »

5

L’article 4, point 7, de la même directive définit la notion d’« exigence » comme « toute obligation, interdiction, condition ou limite prévue dans les dispositions législatives, réglementaires ou administratives des États membres ou découlant de la jurisprudence, des pratiques administratives, des règles des ordres professionnels ou des règles collectives d’associations professionnelles ou autres organisations professionnelles adoptées dans l’exercice de leur autonomie juridique ».

6

L’article 15 de la directive 2006/123, intitulé « Exigences à évaluer », prévoit :

« 1. Les États membres examinent si leur système juridique prévoit les exigences visées au paragraphe 2 et veillent à ce que ces exigences soient compatibles avec les conditions visées au paragraphe 3. Les États membres adaptent leurs dispositions législatives, réglementaires ou administratives afin de les rendre compatibles avec ces conditions.

2. Les États membres examinent si leur système juridique subordonne l’accès à une activité de service ou son exercice au respect de l’une des exigences non discriminatoires suivantes :

[...]

d)

les exigences autres que celles relatives aux matières couvertes par la directive 2005/36/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (JO 2005, L 255, p. 22),] ou que celles prévues dans d’autres instruments [de l’Union], qui réservent l’accès à l’activité de service concernée à des prestataires particuliers en raison de la nature spécifique de l’activité ;

[...]

3. Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes :

a)

non-discrimination : les exigences ne sont pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, de l’emplacement de leur siège statutaire ;

b)

nécessité : les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général ;

c)

proportionnalité : les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d’autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d’atteindre le même résultat.

4. Les paragraphes 1, 2 et 3 ne s’appliquent à la législation dans le domaine des services d’intérêt économique général que dans la mesure où l’application de ces paragraphes ne fait pas échec à l’accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été confiée.

[...] »

7

L’article 16, paragraphe 1, de cette directive est libellé comme suit :

« Les États membres respectent le droit des prestataires de fournir des services dans un État membre autre que celui dans lequel ils sont établis.

L’État membre dans lequel le service est fourni garantit le libre accès à l’activité de service ainsi que son libre exercice sur son territoire.

Les États membres ne peuvent pas subordonner l’accès à une activité de service ou son exercice sur leur territoire à des exigences qui ne satisfont pas aux principes suivants :

a)

la non-discrimination : l’exigence ne peut être directement ou indirectement discriminatoire en raison de la nationalité ou, dans le cas de personnes morales, en raison de l’État membre dans lequel elles sont établies ;

b)

la nécessité : l’exigence doit être justifiée par des raisons d’ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou de protection de l’environnement ;

c)

la proportionnalité : l’exigence doit être propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. »

8

L’article 17, point 1, de ladite directive dispose que l’article 16 de cette dernière ne s’applique pas...

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