Mostafa Abed El Karem El Kott and Others v Bevándorlási és Állampolgársági Hivatal.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:826
Date19 December 2012
Celex Number62011CJ0364
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑364/11
62011CJ0364

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

19 décembre 2012 ( *1 )

«Directive 2004/83/CE — Normes minimales relatives aux conditions d’octroi du statut de réfugié ou du statut conféré par la protection subsidiaire — Apatrides d’origine palestinienne ayant effectivement eu recours à l’assistance de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) — Droit de ces apatrides à la reconnaissance du statut de réfugié sur le fondement de l’article 12, paragraphe 1, sous a), seconde phrase, de la directive 2004/83 — Conditions d’application — Cessation de ladite assistance de la part de l’UNRWA ‘pour quelque raison que ce soit’ — Preuve — Conséquences pour les intéressés sollicitant l’octroi du statut de réfugié — Droit de pouvoir ‘ipso facto se prévaloir de [cette] directive’ — Reconnaissance de plein droit de la qualité de ‘réfugié’ au sens de l’article 2, sous c), de la même directive et octroi du statut de réfugié conformément à l’article 13 de celle-ci»

Dans l’affaire C‑364/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Fővárosi Bíróság (Hongrie), par décision du 3 juin 2011, parvenue à la Cour le 11 juillet 2011, dans la procédure

Mostafa Abed El Karem El Kott,

Chadi Amin A Radi,

Hazem Kamel Ismail

contre

Bevándorlási és Állampolgársági Hivatal,

en présence de:

ENSZ Menekültügyi Főbiztossága,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, M. K. Lenaerts, vice-président, MM. A. Tizzano, L. Bay Larsen (rapporteur), T. von Danwitz et J. Malenovský, présidents de chambre, MM. U. Lõhmus, E. Levits, A. Ó Caoimh, J.-C. Bonichot, A. Arabadjiev, Mme C. Toader et M. J.‑J. Kasel, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 mai 2012,

considérant les observations présentées:

pour M. Kamel Ismail, par Mes G. Győző et T. Fazekas, ügyvédek,

pour l’ENSZ Menekültügyi Főbiztossága, par M. I. Ciobanu, en qualité d’agent, assisté de Mme M. Demetriou, barrister,

pour le gouvernement hongrois, par M. M. Fehér ainsi que par Mmes K. Szíjjártó et Z. Tóth, en qualité d’agents,

pour le gouvernement belge, par M. T. Materne et Mme C. Pochet, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et N. Graf Vitzthum, en qualité d’agents,

pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et S. Menez ainsi que par Mme B. Beaupère-Manokha, en qualité d’agents,

pour le gouvernement roumain, par Mmes F. Abrudan et I. Bara ainsi que par M. R. H. Radu, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. L. Seeboruth, en qualité d’agent, assisté de Mme S. Fatima, barrister,

pour la Commission européenne, par Mme M. Condou-Durande et M. V. Kreuschitz, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 septembre 2012,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive 2004/83/CE du Conseil, du 29 avril 2004, concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (JO L 304, p. 12, et rectificatif JO 2005, L 204, p. 24).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant MM. Abed El Karem El Kott, A Radi et Kamel Ismail, qui sont tous trois des apatrides d’origine palestinienne, au Bevándorlási és Állampolgársági Hivatal (Office de l’immigration et de la nationalité, ci-après le «BAH») au sujet du rejet par ce dernier de leurs demandes tendant à obtenir le statut de réfugié.

Le cadre juridique

Le droit international

La convention relative au statut des réfugiés

3

La convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 [Recueil des traités des Nations unies, vol. 189, p. 150, no 2545 (1954)], est entrée en vigueur le 22 avril 1954. Elle a été complétée et amendée par le protocole relatif au statut des réfugiés, conclu à New York le 31 janvier 1967, lui-même entré en vigueur le 4 octobre 1967 (ci-après la «convention de Genève»).

4

Aux termes de l’article 1er, section A, paragraphe 2, premier alinéa, de la convention de Genève, le terme «réfugié» s’applique à toute personne qui, «craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle [...] ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner».

5

L’article 1er, section D, de la convention de Genève, qui met en place un statut juridique d’exception pour un certain groupe de personnes, énonce:

«Cette convention ne sera pas applicable aux personnes qui bénéficient actuellement d’une protection ou d’une assistance de la part d’un organisme ou d’une institution des Nations unies autre que le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés.

Lorsque cette protection ou cette assistance aura cessé pour une raison quelconque, sans que le sort de ces personnes ait été définitivement réglé, conformément aux résolutions y relatives adoptées par l’Assemblée générale des Nations unies, ces personnes bénéficieront de plein droit du régime de cette convention.»

La Commission des Nations unies de conciliation pour la Palestine

6

La Commission des Nations unies de conciliation pour la Palestine (UNCCP) a été instituée par la résolution no 194 (III) de l’Assemblée générale des Nations unies, du 11 décembre 1948. Aux termes du paragraphe 11, second alinéa, de cette résolution, l’Assemblée générale des Nations unies:

«Donne pour instructions à l’[UNCCP] de faciliter le rapatriement, la réinstallation et le relèvement économique et social des réfugiés, ainsi que le paiement des indemnités, et de se tenir en liaison étroite avec le Directeur de l’Aide des Nations unies aux réfugiés de Palestine, et, par l’intermédiaire de celui-ci, avec les organes et institutions appropriés de l’Organisation des Nations unies.»

L’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient

7

La résolution no 302 (IV) de l’Assemblée générale des Nations unies, du 8 décembre 1949, relative à l’aide aux réfugiés de Palestine, a institué l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Le mandat de celui-ci a été régulièrement renouvelé et son mandat actuel expire le 30 juin 2014. La zone d’opération de l’UNRWA comprend le Liban, la Syrie, la Jordanie, la Cisjordanie (y compris Jérusalem-Est) et la bande de Gaza.

8

Aux termes du paragraphe 20 de ladite résolution no 302 (IV), l’Assemblée générale des Nations unies:

«Donne pour instructions à l’[UNRWA] de se concerter avec l’[UNCCP], de manière que l’un et l’autre puissent accomplir au mieux leurs tâches respectives, notamment en ce qui concerne le paragraphe 11 de la résolution 194 (III), adoptée par l’Assemblée générale le 11 décembre 1948».

9

Conformément au paragraphe 6 de la résolution no 2252 (ES-V) de l’Assemblée générale des Nations unies, du 4 juillet 1967, relative à l’assistance humanitaire, celle-ci approuve les efforts déployés par l’UNRWA pour fournir une assistance humanitaire, dans toute la mesure possible, à titre d’urgence et en tant que mesure temporaire, aux autres personnes de la région qui sont actuellement déplacées et ont gravement besoin d’une assistance en raison des récentes hostilités.

10

Aux termes des paragraphes 1 à 3 de la résolution no 66/72 de l’Assemblée générale des Nations unies, du 9 décembre 2011, relative à l’assistance aux réfugiés palestiniens, celle-ci:

«1.

Note avec regret que ni le rapatriement ni l’indemnisation des réfugiés, prévus au paragraphe 11 de sa résolution 194 (III), n’ont encore eu lieu, et que, de ce fait, la situation des réfugiés de Palestine demeure un sujet de grave préoccupation [...]

2.

Note également avec regret que l’[UNCCP] n’a pu trouver le moyen de faire progresser l’application du paragraphe 11 de la résolution 194 (III), et prie de nouveau l’[UNCCP] de poursuivre ses efforts en ce sens [...]

3.

Affirme la nécessité de poursuivre l’œuvre de l’[UNRWA], ainsi que l’importance de ses opérations, qui doivent être menées sans entrave, et de ses services pour le bien-être et le développement humain des réfugiés de Palestine et la stabilité de la région, en attendant le règlement équitable de la question des réfugiés de Palestine.»

Le droit de l’Union

La directive 2004/83

11

En vertu du considérant 3 de la directive 2004/83, la convention de Genève constitue la pierre angulaire du régime juridique international de protection des réfugiés.

12

Ainsi qu’il découle du considérant 10 de ladite directive, lu à la lumière de l’article 6, paragraphe 1, TUE, celle-ci respecte les droits fondamentaux, les libertés et les principes reconnus, notamment, par la charte des droits fondamentaux de...

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