Rudolfs Meroni v Recoletos Limited.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:349
Date25 May 2016
Celex Number62014CJ0559
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-559/14
62014CJ0559

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

25 mai 2016 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Coopération judiciaire en matière civile — Règlement (CE) no 44/2001 — Reconnaissance et exécution de mesures provisoires et conservatoires — Notion d’“ordre public”»

Dans l’affaire C‑559/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Augstākās tiesas Civillietu departaments (Cour suprême, département des affaires civiles, Lettonie), par décision du 15 octobre 2014, parvenue à la Cour le 5 décembre 2014, dans la procédure

Rūdolfs Meroni

contre

Recoletos Limited,

en présence de :

Aivars Lembergs,

Olafs Berķis,

Igors Skoks,

Genādijs Ševcovs,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), président de chambre, MM. A. Arabadjiev, J.-C. Bonichot, S. Rodin et E. Regan, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Rūdolfs Meroni, par Me D. Škutāns, advokāts,

pour le gouvernement portugais, par MM. L. Inez Fernandes et E. Pedrosa, en qualité d’agents,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme V. Kaye, en qualité d’agent, assistée de M. B. Kennelly, barrister,

pour la Commission européenne, par MM. A. Sauka et M. Wilderspin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 25 février 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 34, point 1, du règlement (CE) no 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Rūdolfs Meroni à Recoletos Limited au sujet d’une demande de reconnaissance et d’exécution en Lettonie d’une décision concernant des mesures provisoires et conservatoires, rendue par la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Commercial Court) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench (chambre commerciale), Royaume-Uni].

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La Charte

3

Aux termes de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), intitulé « Droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial » :

« Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article.

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter.

[...] »

4

Sous le titre VII, intitulé « Dispositions générales régissant l’interprétation et l’application de la Charte », l’article 51 de celle-ci prévoit, à son paragraphe 1 :

« Les dispositions de la présente Charte s’adressent aux institutions, organes et organismes de l’Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu’aux États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union. En conséquence, ils respectent les droits, observent les principes et en promeuvent l’application, conformément à leurs compétences respectives et dans le respect des limites des compétences de l’Union telles qu’elles lui sont conférées dans les traités. »

Le règlement no 44/2001

5

Les considérants 16 à 18 du règlement no 44/2001 énoncent :

« (16)

La confiance réciproque dans la justice au sein de [l’Union] justifie que les décisions rendues dans un État membre soient reconnues de plein droit, sans qu’il soit nécessaire, sauf en cas de contestation, de recourir à aucune procédure.

(17)

Cette même confiance réciproque justifie que la procédure visant à rendre exécutoire, dans un État membre, une décision rendue dans un autre État membre soit efficace et rapide. À cette fin, la déclaration relative à la force exécutoire d’une décision devrait être délivrée de manière quasi automatique, après un simple contrôle formel des documents fournis, sans qu’il soit possible pour la juridiction de soulever d’office un des motifs de non-exécution prévus par le présent règlement.

(18)

Le respect des droits de la défense impose toutefois que le défendeur puisse, le cas échéant, former un recours, examiné de façon contradictoire, contre la déclaration constatant la force exécutoire, s’il considère qu’un des motifs de non-exécution est établi. Une faculté de recours doit également être reconnue au requérant si la déclaration constatant la force exécutoire a été refusée. »

6

L’article 32 dudit règlement définit la notion de « décision » comme « toute décision rendue par une juridiction d’un État membre quelle que soit la dénomination qui lui est donnée, telle qu’arrêt, jugement, ordonnance ou mandat d’exécution, ainsi que la fixation par le greffier du montant des frais du procès. »

7

L’article 33 du règlement no 44/2001 prévoit :

« 1. Les décisions rendues dans un État membre sont reconnues dans les autres États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure.

2. En cas de contestation, toute partie intéressée qui invoque la reconnaissance à titre principal peut faire constater, selon les procédures prévues aux sections 2 et 3 du présent chapitre, que la décision doit être reconnue.

3. Si la reconnaissance est invoquée de façon incidente devant une juridiction d’un État membre, celle-ci est compétente pour en connaître. »

8

L’article 34, points 1 et 2, de ce règlement dispose :

« Une décision n’est pas reconnue si :

1)

la reconnaissance est manifestement contraire à l’ordre public de l’État membre requis ;

2)

l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse se défendre, à moins qu’il n’ait pas exercé de recours à l’encontre de la décision alors qu’il était en mesure de le faire. »

9

Conformément à l’article 35, paragraphes 2 et 3, du règlement no 44/2001, l’autorité requise est liée par les constatations de fait sur lesquelles la juridiction de l’État membre d’origine a fondé sa compétence. Il ne peut être procédé au contrôle de la compétence des juridictions de l’État membre d’origine. Le critère de l’ordre public visé à l’article 34, point 1, de ce règlement ne peut être appliqué aux règles de compétence.

10

L’article 36 de ce règlement dispose que, en aucun cas, la décision étrangère ne peut faire l’objet d’une révision au fond.

11

L’article 38, paragraphe 1, dudit règlement, prévoit :

« Les décisions rendues dans un État membre et qui y sont exécutoires sont mises à exécution dans un autre État membre après y avoir été déclarées exécutoires sur requête de toute partie intéressée. »

12

L’article 41 de ce règlement est libellé comme suit :

« La décision est déclarée exécutoire dès l’achèvement des formalités [...] La partie contre laquelle l’exécution est demandée ne peut, en cet état de la procédure, présenter d’observations. »

13

Conformément à l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 44/2001 :

« La déclaration constatant la force exécutoire est signifiée ou notifiée à la partie contre laquelle l’exécution est demandée, accompagnée de la décision si celle-ci n’a pas encore été signifiée ou notifiée à cette partie. »

14

L’article 43 dudit règlement prévoit :

« 1. L’une ou l’autre partie peut former un recours contre la décision relative à la demande de déclaration constatant la force exécutoire.

2. Le recours est porté devant la juridiction indiquée sur la liste figurant à l’annexe III.

3. Le recours est examiné selon les règles de la procédure contradictoire.

[...]

5. Le recours contre la déclaration constatant la force exécutoire doit être formé dans un délai d’un mois à compter de sa signification. Si la partie contre laquelle l’exécution est demandée est domiciliée sur le territoire d’un autre État membre que celui dans lequel la déclaration constatant la force exécutoire a été délivrée, le délai est de deux mois et court à compter du jour où la signification a été faite à personne ou à domicile. Ce délai ne comporte pas de prorogation à raison de la distance. »

15

Conformément à l’article 45de ce règlement :

« 1. La juridiction saisie [...] ne peut refuser ou révoquer une déclaration constatant la force exécutoire que pour l’un des motifs prévus aux articles 34 et 35. [...]

2. En aucun cas la décision étrangère ne peut faire l’objet d’une révision au fond. »

Le droit letton

16

L’article 138 du Civilprocesa likums (code de procédure civile) énonce les moyens pour garantir une demande, à savoir :

« 1)

la saisie des biens meubles et de l’argent liquide appartenant au défendeur ;

2)

l’inscription d’une mention d’interdiction dans le registre des biens meubles concernés ou un autre registre publique ;

3)

l’inscription de la mention de la garantie de la demande au registre foncier ou au registre des navires ;

4)

la mise sous séquestre d’un navire ;

5)

l’interdiction faite au défendeur d’effectuer certaines activités ;

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