Interedil Srl, in liquidation v Fallimento Interedil Srl and Intesa Gestione Crediti SpA.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:671
Date20 October 2011
Celex Number62009CJ0396
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-396/09

Affaire C-396/09

Interedil Srl, en liquidation

contre

Fallimento Interedil Srl
et
Intesa Gestione Crediti SpA

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunale di Bari)

«Renvoi préjudiciel — Pouvoir d’une juridiction inférieure de poser une question préjudicielle à la Cour — Règlement (CE) nº 1346/2000 — Procédures d’insolvabilité — Compétence internationale — Centre des intérêts principaux du débiteur — Transfert du siège statutaire dans un autre État membre — Notion d’‘établissement’.»

Sommaire de l'arrêt

1. Questions préjudicielles — Compétence de la Cour — Acte pris sur le fondement du titre IV de la troisième partie du traité CE

(Art. 267 TFUE)

2. Droit de l'Union — Primauté — Droit national contraire — Inapplicabilité de plein droit des normes existantes — Obligation de respecter les instructions d'une juridiction supérieure non conformes au droit de l'Union — Inadmissibilité

(Art. 267 TFUE)

3. Coopération judiciaire en matière civile — Procédures d'insolvabilité — Règlement nº 1346/2000 — Compétence internationale pour ouvrir une procédure d'insolvabilité — Juridictions de l'État membre du centre des intérêts principaux du débiteur

(Règlement du Conseil nº 1346/2000, art. 3, § 1)

4. Coopération judiciaire en matière civile — Procédures d'insolvabilité — Règlement nº 1346/2000 — Compétence internationale pour ouvrir une procédure d'insolvabilité — Juridictions de l'État membre du centre des intérêts principaux du débiteur — Critères de détermination

(Règlement du Conseil nº 1346/2000, art. 3, § 1, 2e phrase)

5. Coopération judiciaire en matière civile — Procédures d'insolvabilité — Règlement nº 1346/2000 — Compétence internationale pour ouvrir une procédure d'insolvabilité — Procédure secondaire

(Règlement du Conseil nº 1346/2000, art. 3, § 2)

1. En application de l’article 267 TFUE, les juridictions dont les décisions sont susceptibles d’un recours juridictionnel en droit interne disposent depuis le 1er décembre 2009 du droit de saisir la Cour à titre préjudiciel lorsque sont en cause des actes adoptés sur le fondement du titre IV du traité.

Eu égard à l’objectif de coopération efficace entre la Cour et les juridictions nationales que poursuit l’article 267 TFUE et au principe de l’économie de la procédure, la Cour a, depuis le 1er décembre 2009, compétence pour connaître d’une demande de décision préjudicielle émanant d’une juridiction dont les décisions sont susceptibles d’un recours juridictionnel en droit interne, et ce même si la demande a été déposée avant cette date.

(cf. points 19-20)

2. Le droit de l’Union s’oppose à ce qu’une juridiction nationale soit liée par une règle de procédure nationale, en vertu de laquelle les appréciations portées par une juridiction supérieure nationale s’imposent à elle, lorsqu’il apparaît que les appréciations portées par la juridiction supérieure ne sont pas conformes au droit de l’Union, tel qu’interprété par la Cour.

En effet, premièrement, l’existence d’une règle de procédure nationale, en vertu de laquelle les juridictions ne statuant pas en dernière instance sont liées par des appréciations portées par la juridiction supérieure, ne saurait remettre en cause la faculté qu’ont les juridictions nationales ne statuant pas en dernière instance de saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle lorsqu’elles ont des doutes sur l’interprétation du droit de l’Union.

Deuxièmement, un arrêt rendu à titre préjudiciel par la Cour lie le juge national, quant à l’interprétation ou à la validité des actes des institutions de l’Union en cause, pour la solution du litige au principal.

En outre, le juge national chargé d’appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit de l’Union a l’obligation d’assurer le plein effet de ces dispositions en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition nationale contraire, sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de cette disposition nationale par la voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel.

(cf. points 35-36, 38-39, disp. 1)

3. La notion de «centre des intérêts principaux» du débiteur, visée à l’article 3, paragraphe 1, du règlement nº 1346/2000, relatif aux procédures d’insolvabilité, doit être interprétée par référence au droit de l’Union.

En effet, il s'agit d'une notion propre au règlement qui doit donc être interprétée de manière uniforme et indépendante des législations nationales.

(cf. points 43-44, disp. 2)

4. Aux fins de déterminer le centre des intérêts principaux d’une société débitrice, l’article 3, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement nº 1346/2000, relatif aux procédures d’insolvabilité, doit être interprété en ce sens que le centre des intérêts principaux d’une société débitrice doit être déterminé en privilégiant le lieu de l’administration centrale de cette société, tel qu’il peut être établi par des éléments objectifs et vérifiables par les tiers. Dans l’hypothèse où les organes de direction et de contrôle d’une société se trouvent au lieu de son siège statutaire et que les décisions de gestion de cette société sont prises, de manière vérifiable par les tiers, en ce lieu, la présomption prévue à cette disposition ne peut pas être renversée. Dans l’hypothèse où le lieu de l’administration centrale d’une société ne se trouve pas au siège statutaire de celle-ci, la présence d’actifs sociaux comme l’existence de contrats relatifs à leur exploitation financière dans un État membre autre que celui du siège statutaire de cette société ne peuvent être considérées comme des éléments suffisants pour renverser cette présomption qu’à la condition qu’une appréciation globale de l’ensemble des éléments pertinents permette d’établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de ladite société ainsi que de la gestion de ses intérêts se situe dans cet autre État membre.

Dans le cas d’un transfert du siège statutaire d’une société débitrice avant l’introduction d’une demande d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité, le centre des intérêts principaux de cette société est présumé se trouver au nouveau siège statutaire de celle-ci.

(cf. point 59, disp. 3)

5. La notion d’«établissement» au sens de l’article 3, paragraphe 2, du règlement nº 1346/2000, relatif aux procédures d’insolvabilité, doit être interprétée en ce sens qu’elle requiert la présence d’une structure comportant un minimum d’organisation et une certaine stabilité en vue de l’exercice d’une activité économique. La seule présence de biens isolés ou de comptes bancaires ne répond pas, en principe, à cette définition.

(cf. point 64, disp. 4)







ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

20 octobre 2011 (*)

«Renvoi préjudiciel – Pouvoir d’une juridiction inférieure de poser une question préjudicielle à la Cour – Règlement (CE) n° 1346/2000 – Procédures d’insolvabilité – Compétence internationale – Centre des intérêts principaux du débiteur – Transfert du siège statutaire dans un autre État membre – Notion d’‘établissement’»

Dans l’affaire C‑396/09,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Tribunale di Bari (Italie), par décision du 6 juillet 2009, parvenue à la Cour le 13 octobre 2009, dans la procédure

Interedil Srl, en liquidation,

contre

Fallimento Interedil Srl,

Intesa Gestione Crediti SpA,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. M. Safjan, A. Borg Barthet, M. Ilešič et Mme M. Berger (rapporteur), juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme A. Impellizzeri, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 janvier 2011,

considérant les observations présentées:

– pour Interedil Srl, en liquidation, par Me P. Troianiello, avvocato,

– pour Fallimento Interedil Srl, par Me G. Labanca, avvocato,

– pour Intesa Gestione Crediti SpA, par Me G. Costantino, avvocato,

– pour la Commission européenne, par M. N. Bambara et Mme S. Petrova, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 10 mars 2011,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3 du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insolvabilité (JO L 160, p. 1, ci-après le «règlement»).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Interedil Srl, en liquidation (ci-après «Interedil»), à Fallimento Interedil Srl et à Intesa Gestione Crediti SpA (ci-après «Intesa»), aux droits de laquelle a succédé Italfondario SpA, au sujet d’une action en déclaration de faillite engagée par Intesa à l’encontre d’Interedil.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 Le règlement a été arrêté sur le fondement, notamment, des articles 61, sous c), CE et 67, paragraphe 1, CE.

4 L’article 2 du règlement, consacré aux définitions, dispose:

«Aux fins du présent règlement, on entend par:

a) ‘procédure d’insolvabilité’: les procédures collectives visées à l’article 1er, paragraphe 1. La liste de ces procédures figure à l’annexe A;

[...]

h) ‘établissement’: tout lieu d’opérations où le débiteur exerce de façon non transitoire une activité économique avec des moyens humains et des biens.»

5 La liste figurant à l’annexe A du règlement mentionne notamment, en ce qui concerne l’Italie, la procédure de «fallimento».

6 L’article 3 du règlement, qui traite de la compétence internationale, prévoit:

«1. Les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d’insolvabilité. Pour les sociétés et les personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé, jusqu’à preuve contraire, être le lieu du siège statutaire.

2. Lorsque le centre des intérêts principaux du débiteur est situé sur le territoire d’un État...

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