Andrea Raccanelli v Max-Planck-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften eV.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:425
Date17 July 2008
Celex Number62007CJ0094
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-94/07

Affaire C-94/07

Andrea Raccanelli

contre

Max-Planck-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften eV

(demande de décision préjudicielle, introduite par l'Arbeitsgericht Bonn)

«Article 39 CE — Notion de ‘travailleur’ — Organisation non gouvernementale d’utilité publique — Bourse de doctorant — Contrat d’emploi — Conditions»

Sommaire de l'arrêt

1. Libre circulation des personnes — Travailleurs — Notion

(Art. 39 CE)

2. Libre circulation des personnes — Travailleurs — Dispositions du traité — Interdiction de discrimination sur le fondement de la nationalité — Champ d'application

(Art. 39 CE)

3. Libre circulation des personnes — Travailleurs — Égalité de traitement — Interdiction de discrimination sur le fondement de la nationalité

(Art. 39 CE)

1. Un chercheur préparant une thèse de doctorat sur la base d’un contrat de bourse conclu avec une association d'utilité publique gérant des instituts de recherche scientifique, constituée selon le droit privé d'un État membre, ne doit être considéré comme un travailleur, au sens de l’article 39 CE, que si son activité est exercée, pendant un certain temps, sous la direction d’un institut relevant de cette association et si, en contrepartie de cette activité, il perçoit une rémunération. Il appartient au juge national de procéder aux vérifications de fait nécessaires afin d’apprécier si tel est le cas dans l’affaire.

À cet égard, la notion de «travailleur», au sens de l’article 39 CE, revêt une portée communautaire et ne doit pas être interprétée de manière restrictive. Doit être considérée comme «travailleur» toute personne qui exerce des activités réelles et effectives, à l’exclusion d’activités tellement réduites qu’elles se présentent comme purement marginales et accessoires. La caractéristique de la relation de travail est la circonstance qu’une personne accomplit pendant un certain temps, en faveur d’une autre et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle touche une rémunération.

(cf. points 33-35, 37, disp. 1)

2. Une association de droit privé sous la forme d’une association d’utilité publique doit respecter, envers les travailleurs au sens de l’article 39 CE, le principe de non-discrimination.

En vertu dudit article, d'une part, la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté européenne implique l’abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail. D’autre part, le principe de non-discrimination énoncé à l’article 39 CE est formulé en termes généraux et n’est pas adressé de manière spécifique aux États membres ou aux organismes relevant du droit public. Ainsi, la prohibition des discriminations fondées sur la nationalité s’impose non seulement à l’action des autorités publiques, mais s’étend également aux réglementations d’une autre nature visant à régler, de façon collective, le travail salarié ainsi que les prestations de services. En effet, l’abolition entre les États membres des obstacles à la libre circulation des personnes serait compromise si la suppression des barrières d’origine étatique pouvait être neutralisée par des obstacles résultant de l’exercice de leur autonomie juridique par des associations ou des organismes ne relevant pas du droit public. Ainsi, en ce qui concerne l’article 39 CE qui énonce une liberté fondamentale et constitue une application spécifique de l’interdiction générale de discrimination contenue à l’article 12 CE, la prohibition de la discrimination s’impose également à toutes conventions visant à régler de façon collective le travail salarié, ainsi qu’aux contrats entre particuliers.

(cf. points 41-46,48, disp. 2)

3. Une discrimination sur le fondement de la nationalité interdite par l'article 39 CE consiste dans l’application de règles différentes à des situations comparables ou bien dans l’application de la même règle à des situations différentes. Il appartient au juge national d’établir si, lorsqu'une association de droit privé conclut des contrats de bourse et des contrats de travail avec des doctorants, les derniers étant réservés aux doctorants nationaux, le refus potentiel du choix entre les deux types de contrat pour un doctorant étranger a impliqué une inégalité de traitement entre les doctorants nationaux et étrangers.

En outre, ni l’article 39 CE ni les dispositions du règlement nº 1612/68 relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté n’imposent aux États membres ou aux associations de droit privé une mesure déterminée en cas de violation de l’interdiction de discrimination, mais ils leur laissent la liberté de choisir parmi les différentes solutions propres à réaliser l’objectif de ces dispositions respectives, en fonction des différentes situations qui peuvent se présenter. Dès lors, dans l’hypothèse où un doctorant étranger serait fondé à se prévaloir d’un préjudice occasionné par la discrimination dont il aurait fait l’objet, il appartiendrait à la juridiction de renvoi d’apprécier, au regard de la législation nationale applicable en matière de responsabilité non contractuelle, la nature de la réparation à laquelle il serait en droit de prétendre.

(cf. points 47-48, 50-52, disp. 2-3)







ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

17 juillet 2008 (*)

«Article 39 CE – Notion de ‘travailleur’ – Organisation non gouvernementale d’utilité publique – Bourse de doctorant – Contrat d’emploi – Conditions»

Dans l’affaire C‑94/07,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par l’Arbeitsgericht Bonn (Allemagne), par décision du 4 novembre 2004, parvenue à la Cour le 20 février 2007, dans la procédure

Andrea Raccanelli

contre

Max-Planck-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften eV,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet et E. Levits (rapporteur), juges,

avocat général: M. M. Poiares Maduro,

greffier: Mme K. Sztranc-Sławiczek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 avril 2008,

considérant les observations présentées:

– pour la Max-Planck-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften eV, par Me A. Schülzchen, Rechtsanwalt,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. V. Kreuschitz et G. Rozet, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l'avocat général entendu, de juger l'affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 39 CE et 7 du règlement (CEE) n° 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté (JO L 257, p. 2).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Raccanelli à la Max-Planck-Gesellschaft zur Förderung der Wissenschaften eV (ci-après la «MPG») au sujet d’une relation de travail qu’il aurait conclue avec l’institut Max-Planck de radioastronomie, établi à Bonn (ci-après le «MPI»), qui est un organisme relevant de la MPG.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3 L’article 1er du règlement n° 1612/68, qui figure sous le titre I de celui-ci, intitulé «De l’accès à l’emploi», dispose:

«1. Tout ressortissant d’un État membre, quel que soit le lieu de sa résidence, a le droit d’accéder à une activité salariée et de l’exercer sur le territoire d’un autre État membre, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l’emploi des travailleurs nationaux de cet État.

2. Il bénéficie notamment sur le territoire d’un autre État membre de la même priorité que les ressortissants de cet État dans l’accès aux emplois disponibles.»

4 L’article 7 du règlement n° 1612/68, qui figure sous le titre II de celui-ci, intitulé «De l’exercice de l’emploi et de l’égalité de traitement», est libellé comme suit:

«1. Le travailleur ressortissant d’un État membre ne peut, sur le territoire des autres États membres, être, en raison de sa nationalité, traité différemment des travailleurs nationaux, pour toutes conditions d’emploi et de travail, notamment en matière de rémunération, de licenciement et de réintégration professionnelle ou de réemploi s’il est tombé en chômage.

2. Il y bénéficie des mêmes avantages sociaux et fiscaux que les travailleurs nationaux.

[…]

4. Toute...

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