European Commission v Grand Duchy of Luxemburg.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:34
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-490/09
Date27 January 2011
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62009CJ0490

Affaire C-490/09

Commission européenne

contre

Grand-Duché de Luxembourg

«Manquement d’État — Article 49 CE — Libre prestation des services — Non-remboursement des frais afférents aux analyses et aux examens de laboratoire effectués dans des États membres autres que le Grand-Duché de Luxembourg — Réglementation nationale ne prévoyant pas leur prise en charge sous la forme d’un remboursement des frais avancés pour de tels analyses et examens — Réglementation nationale subordonnant la prise en charge des prestations de soins de santé au respect des conditions prévues par cette réglementation»

Sommaire de l'arrêt

1. Libre prestation des services — Restrictions — Réglementation nationale relative au remboursement des frais médicaux engagés dans un autre État membre

(Art. 49 CE)

2. Recours en manquement — Preuve du manquement — Charge incombant à la Commission — Présentation d'éléments faisant apparaître le manquement

(Art. 10 CE et 226 CE)

1. Un État membre manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 CE en ne prévoyant pas, dans le cadre de sa règlementation relative à la sécurité sociale, la possibilité de prise en charge des frais afférents aux analyses et aux examens de laboratoire effectués dans un autre État membre, au moyen d’un remboursement des frais avancés pour ces analyses et examens, mais en prévoyant uniquement un système de prise en charge directe par les caisses de maladie.

Dans la mesure où l’application d'une telle réglementation revient à exclure, de fait, la possibilité de prise en charge des analyses et des examens de laboratoire effectués par la quasi-totalité, voire la totalité, des prestataires de services médicaux établis dans d'autres États membres, elle décourage, ou même empêche, les personnes affiliées à la sécurité sociale dudit État membre de s’adresser à de tels prestataires et constitue, tant pour celles-ci que pour les prestataires, un obstacle à la libre prestation des services.

(cf. points 41, 48, disp. 1)

2. Dans le cadre d’une procédure en manquement en vertu de l’article 226 CE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué en apportant à la Cour de justice les éléments nécessaires à la vérification par celle-ci de l’existence de ce manquement.

La seule circonstance que la Commission ne dispose pas de pouvoirs d’enquête en matière de manquement d’État et qu’elle dépend, pour l’instruction des dossiers, des réponses et de la collaboration des États membres ne saurait lui permettre de se soustraire à l'obligation susmentionnée, si elle ne reproche pas à l'État membre d'avoir manqué à ses obligations découlant de l'article 10 CE.

(cf. points 49, 57-58, 60)







ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

27 janvier 2011 (*)

«Manquement d’État – Article 49 CE – Libre prestation des services – Non-remboursement des frais afférents aux analyses et aux examens de laboratoire effectués dans des États membres autres que le Grand-Duché de Luxembourg – Réglementation nationale ne prévoyant pas leur prise en charge sous la forme d’un remboursement des frais avancés pour de tels analyses et examens – Réglementation nationale subordonnant la prise en charge des prestations de soins de santé au respect des conditions prévues par cette réglementation»

Dans l’affaire C‑490/09,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 30 novembre 2009,

Commission européenne, représentée par MM. G. Rozet et E. Traversa, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Grand-Duché de Luxembourg, représenté par M. C. Schiltz, en qualité d’agent, assisté de Me A. Rodesch, avocat,

partie défenderesse,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de chambre, MM. A. Arabadjiev (rapporteur), A. Rosas, U. Lõhmus et Mme P. Lindh, juges,

avocat général: M. P. Mengozzi,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 octobre 2010,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par son recours, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en maintenant en vigueur l’article 24 du code de la sécurité sociale luxembourgeois, qui exclut le remboursement des frais des analyses de biologie médicale effectuées dans un autre État membre et ne prévoit la prise en charge de ces analyses que par la voie du tiers payant, ainsi que l’article 12 des statuts de l’Union des caisses de maladie, qui subordonne le remboursement des analyses de biologie médicale réalisées dans un autre État membre au respect intégral des conditions de dispensation prévues par les conventions nationales luxembourgeoises, le Grand-Duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article [49] CE.

Le cadre juridique

2 L’article 24 du code de la sécurité sociale luxembourgeois, dans sa version applicable au litige (Mémorial A 2008, p. 790, ci-après le «code de la sécurité sociale»), dispose:

«Les prestations de soins de santé sont accordées, soit sous forme de remboursement par la Caisse nationale de santé [, ancienne Union des caisses de maladie,] et les caisses de maladie aux personnes protégées qui ont fait l’avance des frais, soit sous forme de prise en charge directe par la Caisse nationale de santé, le prestataire de soins n’ayant dans ce dernier cas d’action contre la personne protégée que pour la participation statutaire éventuelle de celle-ci. À défaut de disposition conventionnelle contraire, le mode de la prise en charge directe ne s’applique qu’aux actes, services et fournitures ci-après:

– les analyses et examens de laboratoire;

[...]»

3 Il est constant entre les parties au litige que la réglementation luxembourgeoise relative à la sécurité sociale ne prévoit pas la possibilité de prise en charge des analyses et des examens de laboratoire, au sens de l’article 24 du code de la sécurité sociale, sous la forme d’un remboursement des frais avancés pour ces analyses et examens par les assurés sociaux.

4 Aux termes de l’article 12, premier et deuxième alinéas, des statuts de l’Union des caisses de maladie, dans leur version qui résulte du texte coordonné applicable au 1er janvier 1995 (Mémorial A 1994, p. 2989, ci-après les «statuts»):

«Les prestations et fournitures prises en charge par l’assurance maladie au Luxembourg sont limitées à celles prévues à l’article 17 du code [de la sécurité sociale] et qui sont inscrites dans les nomenclatures visées à l’article 65 du même code ou dans les listes prévues par les présents statuts.

Les prestations ne sont opposables à l’assurance maladie que si leur dispensation a été réalisée conformément aux stipulations des conventions visées aux articles 61 et 75 du code [de la sécurité sociale].»

La procédure précontentieuse

5 La Commission a été saisie de deux plaintes relatives à des cas de refus de remboursement à des patients affiliés à la sécurité sociale luxembourgeoise des frais d’analyses de biologie médicale réalisées dans des États membres autres que le Grand-Duché de Luxembourg.

6 Dans l’un de ces cas, le remboursement des frais a été refusé au motif que, la législation nationale prévoyant la prise en charge des frais afférents à ces analyses directement par les caisses de maladie, la caisse de maladie concernée n’était pas habilitée à procéder au remboursement en l’absence de tarification de la prestation.

7 Selon la Commission, dans l’autre cas, le remboursement d’analyses sanguines et par ultrasons effectuées en Allemagne a été refusé au motif que seules les prestations prévues dans les statuts peuvent être remboursées et que les prestations doivent être effectuées conformément aux dispositions des différents accords nationaux applicables. Dans ce cas, les conditions prévues pour le remboursement de ces analyses n’auraient pas pu être remplies par l’auteur de la plainte en raison des différences entre les systèmes de santé luxembourgeois et allemand. La Commission indique, à titre d’exemple, que les prélèvements ont été directement effectués par le médecin, alors que la législation luxembourgeoise exige qu’ils soient réalisés dans un «laboratoire séparé». Or, il ne serait pas possible de satisfaire à cette exigence en Allemagne.

8 À la suite desdites plaintes, la Commission a, le 23 octobre 2007, adressé au Grand-Duché de Luxembourg une lettre de mise en demeure dans laquelle elle soutenait que le maintien en vigueur des articles 24 du code de la sécurité sociale et 12 des statuts n’est pas conforme à l’article 49 CE.

9 Par lettre du 17 décembre 2007, cet État membre a répondu à ladite lettre de mise en demeure qu’il était conscient de ses obligations qui découlent du droit de l’Union et qu’il entendait, d’une part, apporter une solution à caractère général au problème soulevé par la Commission et, d’autre part, traiter «d’une façon pragmatique» les «cas isolés» qui se présenteraient entre-temps.

10 Le Grand-Duché de Luxembourg a néanmoins fait état de plusieurs difficultés techniques pour se conformer auxdites obligations. Il s’est prévalu, notamment, de l’impossibilité pour l’Union des caisses de maladie d’appliquer une tarification par analogie pour les remboursements de frais exposés à l’étranger, des conditions nationales spécifiques de remboursement des frais des analyses de biologie médicale ainsi que du fait que la modification des statuts relève de la compétence des partenaires sociaux.

11 Considérant qu’elle n’avait obtenu aucun engagement ferme de la part des autorités luxembourgeoises quant à l’élimination du manquement allégué, la Commission a, le 16 octobre 2008, adressé un avis motivé au Grand-Duché de Luxembourg, en l’invitant à se conformer à ses obligations découlant de l’article 49 CE dans un délai de deux mois à...

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