Nóra Baczó and János István Vizsnyiczai v Raiffeisen Bank Zrt.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:88
Docket NumberC-567/13
Celex Number62013CJ0567
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date12 February 2015
62013CJ0567

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

12 février 2015 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Protection des consommateurs — Directive 93/13/CEE — Article 7 — Contrat de crédit immobilier — Clause compromissoire — Caractère abusif — Recours du consommateur — Règle de procédure nationale — Incompétence du tribunal saisi du recours visant l’invalidité d’un contrat d’adhésion pour connaître de la demande tendant à constater le caractère abusif de clauses contractuelles contenues dans ce même contrat»

Dans l’affaire C‑567/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Fővárosi Törvényszék (Hongrie), par décision du 2 octobre 2013, parvenue à la Cour le 5 novembre 2013, dans la procédure

Nóra Baczó,

János István Vizsnyiczai

contre

Raiffeisen Bank Zrt,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M. A. Ó Caoimh, Mme C. Toader (rapporteur), MM. E. Jarašiūnas et C. G. Fernlund, juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 novembre 2014,

considérant les observations présentées:

pour le gouvernement hongrois, par Mme M. M. Tátrai et M. M. Z. Fehér, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme K. Talabér‑Ritz et M. M. van Beek, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO L 95, p. 29).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Baczó et M. Vizsnyiczai à Raiffeisen Bank Zrt au sujet d’une demande visant à faire constater l’invalidité d’un contrat de crédit immobilier et de la clause compromissoire figurant dans ledit contrat.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 93/13:

«La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur.»

4

L’article 3, paragraphe 1, de cette directive est rédigé comme suit:

«Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.»

5

L’article 6, paragraphe 1, de ladite directive dispose:

«Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives.»

6

Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de la même directive:

«Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.»

Le droit hongrois

Le droit matériel

7

L’article 200 de la loi no IV de 1959 instituant le code civil (a Polgári Törvénykönyvről szóló 1959. évi IV. törvény, ci-après le «code civil»), dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du contrat en cause au principal, prévoit:

«(1) Les parties définissent librement la teneur d’un contrat. Elles peuvent déroger d’un commun accord aux règles régissant les contrats si aucune disposition légale ne s’y oppose.

(2) Est nul tout contrat qui enfreint ou contourne une règle de droit, à moins que ladite règle ne prévoie une autre conséquence juridique. Est également nul tout contrat qui est manifestement contraire aux bonnes mœurs.»

8

Aux termes de l’article 209, paragraphe 1, de ce code, «est abusive une condition contractuelle générale ou une clause d’un contrat de consommation qui n’a pas fait l’objet d’une négociation individuelle dès lors que, en violation des obligations de bonne foi et de loyauté, elle fixe les droits et les obligations des parties découlant du contrat de manière unilatérale et non motivée au détriment de la partie contractante qui n’est pas l’auteur de la clause».

9

L’article 209/A, paragraphe 1, dudit code prévoit que la partie lésée peut contester une clause contractuelle abusive. Selon le paragraphe 2 de cet article, de telles clauses sont nulles.

10

L’article 227, paragraphe 2, du même code dispose que «tout contrat ayant pour objet une prestation impossible est nul».

11

En application de l’article 239/A, paragraphe 1, du code civil, une partie peut demander au juge, d’une part, de constater l’invalidité du contrat ou de certaines de ses clauses (invalidité partielle) et, d’autre part, de ne pas se prononcer quant aux conséquences qu’entraîne, en droit, cette invalidité.

12

Selon l’article 213, paragraphe 1, de la loi no CXII de 1996 sur les établissements de crédit et les entreprises financières (hitelintézetekről és a pénzügyi vállalkozásokról szóló 1996. évi CXII. törvény), dans sa version en vigueur à la date de conclusion du contrat en cause au principal, est nul tout contrat de crédit à la consommation et de crédit immobilier qui omet de mentionner les clauses énumérées dans ladite disposition, parmi lesquelles figurent notamment l’objet du contrat, le taux annuel effectif global ou le montant global des couts liés au contrat.

Le droit procédural

13

Selon l’article 3, paragraphe 2, de la loi no III de 1952 instituant le code de procédure civile (a polgári perrendtartásról szóló 1952. évi III. törveny, ci‑après le «code de procédure civile»), le juge, en l’absence d’une disposition légale contraire, est lié par les conclusions et les arguments juridiques présentés par les parties. Le juge prend en considération les conclusions et les arguments soumis par les parties non pas en fonction de leur dénomination formelle, mais en fonction de leur contenu.

14

En application de l’article 22, paragraphe 1, de ce code, la juridiction locale, soit un járásbíróság (tribunal local), soit un kerületi bíróság (tribunal d’arrondissement), est la juridiction de droit commun. Relèvent, par conséquent, de sa compétence matérielle toutes les affaires que la loi ne réserve pas au törvényszék (tribunal départemental).

15

Conformément à l’article 23, paragraphe 1, sous k), dudit code, le törvényszék est compétent pour statuer dans des affaires ayant pour objet la constatation de l’invalidité de clauses contractuelles abusives, au titre, notamment, de l’article 209/A du code civil.

16

L’avis 2/2010/VI.28 du collège des juges civils de la Kúria (Cour suprême) relatif à certaines questions de procédure concernant les actions en nullité énonce que le juge a l’obligation de constater d’office un motif de nullité manifeste qui peut être clairement établi sur la base des éléments de preuve disponibles.

17

L’avis 2/2011/XII.12 du collège des juges civils de la Kúria relatif à certaines questions liées à la validité des contrats de consommation précise que la juridiction locale est tenue, dans le cadre de l’examen du recours sur le fond, d’examiner le caractère abusif d’une clause contractuelle soit sur la base d’une exception formulée par la partie défenderesse, soit d’office.

18

En application de l’article 24, paragraphe 1, du code de procédure civile, la valeur du litige se détermine en fonction du montant de la créance ou de la valeur de tout autre droit invoqués dans le recours.

19

En ce qui concerne le calcul de la taxe due pour l’introduction d’un recours civil contentieux, l’article 39, paragraphe 1, de la loi no XCIII de 1990 relative aux droits et aux taxes (1990. évi XCIII. tv. az illetékekről, ci-après la «loi relative aux droits et aux taxes») prévoit que l’assiette de cette taxe correspond, sauf disposition contraire de ladite loi, à la valeur de l’objet du litige à la date de l’introduction du recours.

20

L’article 39, paragraphe 3, de la loi relative aux droits et aux taxes dispose cependant:

«Lorsque la valeur de l’objet du litige ne peut pas être établie en application des dispositions du paragraphe 1 ci-dessus, [...] l’assiette de la taxe est fixée comme suit:

a)

devant la juridiction locale, à 350 000 forints hongrois (HUF) dans le cadre des procédures contentieuses [...]

b)

devant le törvényszék:

si celle-ci statue en tant que juridiction de première instance: à 600 000 HUF dans le cadre des procédures contentieuses [...]»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

21

Le 13 septembre 2007, les requérants au principal, Mme Baczó et M. Vizsnyiczai, ont conclu un contrat de crédit immobilier garanti par une hypothèque avec Raiffeisen Bank Zrt, un établissement bancaire de droit hongrois. Ce contrat contenait une clause compromissoire, en vertu de laquelle les litiges nés du contrat de crédit, à l’exception de ceux relatifs aux créances pécuniaires, relèvent de la compétence d’un tribunal arbitral.

22

Le 26 février 2013, les requérants au principal ont...

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