Maurice Leone and Blandine Leone v Garde des Sceaux, ministre de la Justice and Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2090
Date17 July 2014
Celex Number62013CJ0173
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑173/13
62013CJ0173

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

17 juillet 2014 ( *1 )

«Politique sociale — Article 141 CE — Égalité des rémunérations entre travailleurs féminins et travailleurs masculins — Mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate — Bonification aux fins du calcul de la pension — Avantages bénéficiant essentiellement aux fonctionnaires féminins — Discriminations indirectes — Justification objective — Souci véritable d’atteindre l’objectif allégué — Cohérence dans la mise en œuvre — Article 141, paragraphe 4, CE — Mesures visant à compenser des désavantages dans la carrière professionnelle des travailleurs féminins — Inapplicabilité»

Dans l’affaire C‑173/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour administrative d’appel de Lyon (France), par décision du 3 avril 2013, parvenue à la Cour le 9 avril 2013, dans la procédure

Maurice Leone,

Blandine Leone

contre

Garde des Sceaux, ministre de la Justice,

Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, MM. M. Safjan et J. Malenovský, Mmes A. Prechal (rapporteur) et K. Jürimäe, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M. A. Calot Escobar,

considérant les observations présentées:

pour M. et Mme Leone, par Me B. Madignier, avocat,

pour la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, par Me J.‑M. Bacquer, en qualité d’agent,

pour le gouvernement français, par Mme M. Hours ainsi que par MM. G. de Bergues et S. Menez, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. D. Martin, en qualité d’agent,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 27 février 2014,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 157 TFUE.

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. et Mme Leone au Garde des Sceaux, ministre de la Justice, et à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (ci-après la «CNRACL») au sujet d’une demande d’indemnisation, par l’État français, du préjudice qu’auraient subi les intéressés en conséquence du refus de la CNRACL d’accorder à M. Leone le bénéfice d’une retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate et une bonification d’ancienneté aux fins du calcul de sa pension.

Le cadre juridique

3

L’article L. 1 du code des pensions civiles et militaires de retraite français (ci-après le «code des pensions») prévoit:

«La pension est une allocation pécuniaire personnelle et viagère accordée aux fonctionnaires civils et militaires et, après leur décès, à leurs ayants cause désignés par la loi, en rémunération des services qu’ils ont accomplis jusqu’à la cessation régulière de leurs fonctions.

Le montant de la pension, qui tient compte du niveau, de la durée et de la nature des services accomplis, garantit en fin de carrière à son bénéficiaire des conditions matérielles d’existence en rapport avec la dignité de sa fonction.»

Les dispositions relatives à la mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate

4

Il ressort de la décision de renvoi que les fonctionnaires civils peuvent, sous certaines conditions, bénéficier d’une mise à la retraite anticipée avec pension à jouissance immédiate.

5

Parmi ces conditions figurent celles fixées à l’article L. 24, I, 3°, du code des pensions, dans sa version résultant de l’article 136 de la loi no 2004-1485, du 30 décembre 2004, de finances rectificative pour 2004 (JORF du 31 décembre 2004, p. 22522), lequel énonce:

«I. –

La liquidation de la pension intervient:

[...]

Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d’un enfant vivant, âgé de plus d’un an et atteint d’une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu’il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Sont assimilées à l’interruption d’activité mentionnée à l’alinéa précédent les périodes n’ayant pas donné lieu à cotisation obligatoire dans un régime de retraite de base, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Sont assimilés aux enfants mentionnés au premier alinéa les enfants énumérés au II de l’article L. 18 que l’intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article».

6

L’article L. 18, II, troisième à sixième alinéas, du code des pensions comporte l’énumération suivante:

«Les enfants du conjoint issus d’un mariage précédent, ses enfants naturels dont la filiation est établie et ses enfants adoptifs;

Les enfants ayant fait l’objet d’une délégation de l’autorité parentale en faveur du titulaire de la pension ou de son conjoint;

Les enfants placés sous tutelle du titulaire de la pension ou de son conjoint, lorsque la tutelle s’accompagne de la garde effective et permanente de l’enfant;

Les enfants recueillis à son foyer par le titulaire de la pension ou son conjoint, qui justifie, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, en avoir assumé la charge effective et permanente.»

7

L’article 18, III, du code des pensions comporte les précisions suivantes:

«À l’exception des enfants décédés par faits de guerre, les enfants devront avoir été élevés pendant au moins neuf ans, soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l’âge où ils ont cessé d’être à charge au sens des articles L. 512‑3 et R. 512‑2 à R. 512‑3 du code de la sécurité sociale.

Pour satisfaire la condition de durée ci-dessus, il sera tenu compte, le cas échéant, du temps pendant lequel les enfants auront été élevés par le conjoint après le décès du titulaire.»

8

L’article R. 37 du code des pensions, dans sa rédaction issue du décret no 2005‑449, du 10 mai 2005, pris pour l’application de l’article 136 de la loi de finances rectificative pour 2004 (loi no 2004‑1485, du 30 décembre 2004) et modifiant le code des pensions civiles et militaires de retraite (JORF du 11 mai 2005, p. 8174), prévoit:

«I. –

L’interruption d’activité prévue au premier alinéa du 3° du I de l’article L. 24 doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois et être intervenue alors que le fonctionnaire était affilié à un régime de retraite obligatoire. En cas de naissances ou d’adoptions simultanées, la durée d’interruption d’activité prise en compte au titre de l’ensemble des enfants en cause est également de deux mois.

Cette interruption d’activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l’adoption et le dernier jour de la seizième semaine suivant la naissance ou l’adoption.

Par dérogation aux dispositions de l’alinéa précédent, pour les enfants énumérés aux troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas du II de l’article L. 18 que l’intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article, l’interruption d’activité doit intervenir soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l’âge où ils ont cessé d’être à charge au sens des articles L. 512‑3 et R. 512‑2 à R. 512‑3 du code de la sécurité sociale.

II. –

Sont prises en compte pour le calcul de la durée d’interruption d’activité les périodes correspondant à une suspension de l’exécution du contrat de travail ou à une interruption du service effectif, intervenues dans le cadre:

a)

Du congé pour maternité [...];

b)

Du congé de paternité [...];

c)

Du congé d’adoption [...];

d)

Du congé parental [...];

e)

Du congé de présence parentale [...];

f)

D’une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans [...].

III. –

Les périodes visées au deuxième alinéa du 3° du I de l’article L. 24 sont les périodes n’ayant pas donné lieu à cotisation de l’intéressé et pendant lesquelles celui-ci n’exerçait aucune activité professionnelle.»

Les dispositions relatives à la bonification

9

Aux termes de l’article 15 du décret no 2003‑1306, du 26 décembre 2003, relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (JORF du 30 décembre 2003, p. 22477):

«I. –

Aux services effectifs s’ajoutent, dans les conditions prévues pour les fonctionnaires civils de l’État, les bonifications suivantes:

[...]

Une bonification fixée à quatre trimestres, à condition que les fonctionnaires aient interrompu leur activité, pour chacun de leurs enfants légitimes et de leurs enfants naturels nés avant le 1er janvier 2004, pour chacun de leurs enfants dont l’adoption est antérieure au 1er janvier 2004 et, sous réserve qu’ils aient été élevés pendant neuf ans au moins avant leur vingt et unième anniversaire, pour chacun des autres enfants énumérés au paragraphe II de l’article 24 dont la prise en charge a débuté avant le 1er janvier 2004.

Cette interruption d’activité doit être d’une durée continue au moins égale à deux mois et intervenir dans le cadre d’un congé pour maternité, d’un congé pour adoption, d’un congé parental ou d’un congé de présence parentale [...] ou d’une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans [...]

Les dispositions du 2° s’appliquent aux pensions liquidées à compter du 28 mai 2003;

La bonification prévue au 2° est acquise aux femmes fonctionnaires ayant accouché au cours de leurs années d’études avant le 1er janvier 2004 et avant leur...

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