Dresdner Bank AG and Others v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2006:271
CourtGeneral Court (European Union)
Date27 September 2006
Docket NumberT-60/02,T-54/02,T-61/02,T-44/02,T-56/02
Procedure TypeOposición - infundada
Celex Number62002TJ0044(01)

Affaires jointes T-44/02 OP, T-54/02 OP, T-56/02 OP, T-60/02 OP et T-61/02 OP

Dresdner Bank AG e.a.

contre

Commission des Communautés européennes

« Concurrence — Article 81 CE — Accord de fixation des prix et modalités de facturation des services de change d'espèces — Allemagne — Preuves de l'infraction — Opposition »

Arrêt du Tribunal (quatrième chambre) du 27 septembre 2006

Sommaire de l'arrêt

1. Procédure — Opposition

(Règlement de procédure du Tribunal, art. 48, § 2, et 122, § 4)

2. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Notion

(Art. 81, § 1, CE)

3. Concurrence — Procédure administrative — Décision de la Commission constatant une infraction

(Art. 81, § 1, CE)

4. Droit communautaire — Principes — Droits fondamentaux — Présomption d'innocence

5. Concurrence — Procédure administrative — Décision de la Commission constatant une infraction — Contrôle juridictionnel

6. Concurrence — Ententes — Preuve

7. Concurrence — Procédure administrative — Respect des droits de la défense — Communication des griefs — Contenu nécessaire

8. Concurrence — Procédure administrative — Respect des droits de la défense

1. La procédure d'opposition prévue à l'article 122, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal a pour objet de permettre à la juridiction de procéder à un nouvel examen de la cause sur une base contradictoire, sans être liée par la solution de l'arrêt par défaut. En l'absence de toute disposition du règlement de procédure prévoyant le contraire, l'opposante est, en principe, libre de son argumentation, sans être limitée à la réfutation des motifs de l'arrêt par défaut.

Compte tenu de la finalité de la procédure d'opposition, l'interdiction de produire des moyens nouveaux en cours d'instance, prévue à l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, ne saurait être interprétée comme interdisant à l'opposante de produire des moyens qu'elle aurait déjà pu produire au stade de la défense. Une telle interprétation dudit article serait dénuée de sens, car elle risquerait de conduire à une impasse procédurale dans l'hypothèse où l'opposition serait fondée : le Tribunal, tout en constatant qu'il ne lui est pas possible de confirmer la solution figurant dans l'arrêt par défaut selon laquelle un des moyens est fondé, ne serait pas en mesure de se prononcer sur les autres moyens du recours, dans le respect du contradictoire.

(cf. points 43-44)

2. Pour qu'il y ait accord, au sens de l'article 81, paragraphe 1, CE, il faut et il suffit que les entreprises en cause aient exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d'une manière déterminée. En ce qui concerne la forme d'expression de cette volonté commune, il suffit qu'une stipulation soit l'expression de la volonté des parties de se comporter sur le marché conformément à ses termes. Il s'ensuit que la notion d'accord, au sens de l'article 81, paragraphe 1, CE, suppose l'existence d'une concordance de volontés entre deux parties au moins, dont la forme de manifestation n'est pas importante pour autant qu'elle constitue l'expression fidèle de celles-ci.

(cf. points 53-55)

3. En ce qui concerne l'administration de la preuve d'une infraction à l'article 81, paragraphe 1, CE, la Commission doit rapporter la preuve des infractions qu'elle constate et établir les éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l'existence des faits constitutifs d'une infraction.

(cf. point 59)

4. Le principe de la présomption d'innocence, tel qu'il résulte notamment de l'article 6, paragraphe 2, de la convention européenne des droits de l'homme, fait partie des droits fondamentaux qui, selon la jurisprudence de la Cour, par ailleurs réaffirmée par le préambule de l'Acte unique européen et par l'article 6, paragraphe 2, UE, constituent des principes généraux du droit communautaire.

Eu égard à la nature des infractions en cause ainsi qu'à la nature et au degré de sévérité des sanctions qui s'y rattachent, le principe de la présomption d'innocence s'applique aux procédures relatives à des violations des règles de concurrence applicables aux entreprises susceptibles d'aboutir au prononcé d'amendes ou d'astreintes. Dans le cadre d'un recours tendant à l'annulation d'une décision infligeant une amende, il est nécessaire de tenir compte de ce principe. L'existence d'un doute dans l'esprit du juge doit profiter à l'entreprise destinataire de la décision constatant une infraction. Le juge ne saurait donc conclure que la Commission a établi l'existence de l'infraction en cause à suffisance de droit si un doute subsiste encore dans son esprit sur cette question.

Il est donc nécessaire que la Commission fasse état de preuves précises et concordantes pour établir l'existence de l'infraction. Toutefois, chacune des preuves apportées par la Commission ne doit pas nécessairement répondre à ces critères par rapport à chaque élément de l'infraction. Il suffit que le faisceau d'indices invoqué par l'institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence. L'existence d'une pratique ou d'un accord anticoncurrentiel peut donc être inférée d'un certain nombre de coïncidences et d'indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l'absence d'une autre explication cohérente, la preuve d'une violation des règles de concurrence.

(cf. points 60-63, 65)

5. En ce qui concerne la portée du contrôle juridictionnel exercé sur les décisions de la Commission en matière d'application des règles de concurrence, il existe une distinction essentielle entre les données et constatations factuelles, d'une part, dont l'éventuelle inexactitude peut être révélée par le juge à la lumière des arguments et éléments de preuve qui lui sont soumis, et les appréciations économiques, d'autre part. À cet égard, s'il n'appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation économique à celle de la Commission, il lui incombe non seulement de vérifier l'exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également de contrôler si ces éléments constituent l'ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s'ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées.

(cf. points 66-67)

6. Pour, dans le cadre de la constatation d'une infraction aux règles de concurrence, apprécier la valeur probante d'un document, il faut vérifier la vraisemblance de l'information qui y est contenue et tenir compte, notamment, de l'origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire pour se demander si, d'après son contenu, il semble sensé et fiable.

(cf. point 121)

7. Le respect des droits de la défense exige qu'une entreprise, destinataire d'une décision de la Commission relevant une infraction aux règles de concurrence, ait été en mesure de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits, griefs et circonstances allégués par la Commission.

La communication des griefs doit contenir un exposé des griefs libellé dans des termes suffisamment clairs, seraient-ils sommaires, pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés par la Commission. Ce n'est, en effet, qu'à cette condition que la communication des griefs peut remplir la fonction qui lui est attribuée par les règlements communautaires et qui consiste à fournir tous les éléments nécessaires aux entreprises et associations d'entreprises pour qu'elles puissent faire valoir utilement leur défense avant que la Commission n'adopte une décision définitive.

En principe, seuls les documents qui ont été cités ou mentionnés dans la communication des griefs constituent des moyens de preuve valables.

(cf. points 155-157)

8. Un document ne peut être considéré comme un document à charge que lorsqu'il est utilisé par la Commission à l'appui de la constatation d'une infraction commise par une entreprise. Aux fins d'établir une violation à son égard des droits de la défense, il ne suffit pas, pour l'entreprise en cause, de démontrer qu'elle n'a pas pu se prononcer au cours de la procédure administrative sur un document utilisé à un quelconque endroit de la décision attaquée. Il faut qu'elle démontre que la Commission a utilisé ce document, dans la décision attaquée, comme un élément de preuve pour retenir une infraction à laquelle l'entreprise aurait participé.

(cf. point 158)




ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

27 septembre 2006 (*)

« Concurrence – Article 81 CE – Accord de fixation des prix et modalités de facturation des services de change d’espèces – Allemagne – Preuves de l’infraction – Opposition »

Dans les affaires jointes T‑44/02 OP, T‑54/02 OP, T‑56/02 OP, T‑60/02 OP et T‑61/02 OP,

Dresdner Bank AG, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Mes M. Hirsch et W. Bosch, avocats,

Bayerische Hypo- und Vereinsbank AG, anciennement Vereins- und Westbank AG, établie à Munich (Allemagne), représentée initialement par Mes J. Schulte, M. Ewen et A. Neus, puis par Mes W. Knapp, T. Müller-Ibold et C. Feddersen, avocats,

Bayerische Hypo- und Vereinsbank AG, établie à Munich, représentée initialement par Mes W. Knapp, T. Müller-Ibold et B. Bergmann, puis par Mes Knapp, Müller-Ibold, et C. Feddersen, avocats,

DVB Bank AG, anciennement Deutsche Verkehrsbank AG, établie à Francfort-sur-le-Main, représentée par Mes M. Klusmann et F. Wiemer, avocats,

Commerzbank AG, établie à Francfort-sur-le-Main, représentée par Mes H. Satzky et B. Maassen, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. T. Christoforou, A. Nijenhuis et M. Schneider, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet l’opposition formée par la Commission contre les arrêts du Tribunal du 14 octobre 2004, dans les affaires Dresdner Bank/Commission (T‑44/02, non publié au Recueil), Vereins- und...

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