European Commission v French Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:458
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-63/14
Date09 July 2015
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62014CJ0063
62014CJ0063

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

9 juillet 2015 ( *1 )

«Manquement d’État — Aides d’État — Aide illégale et incompatible avec le marché intérieur — Obligation de récupération — Impossibilité absolue — Compensations pour un service complémentaire au service de base»

Dans l’affaire C‑63/14,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, introduit le 10 février 2014,

Commission européenne, représentée par M. B. Stromsky, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République française, représentée par MM. G. de Bergues et D. Colas ainsi que par Mmes N. Rouam et J. Bousin, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, MM. C. Vajda, A. Rosas, E. Juhász (rapporteur) et D. Šváby, juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 février 2015,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 mars 2015,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en n’ayant pas pris, dans les délais prescrits, toutes les mesures nécessaires afin de récupérer auprès du bénéficiaire les aides d’État déclarées illégales et incompatibles avec le marché intérieur par l’article 2, paragraphe 1, de la décision 2013/435/UE de la Commission, du 2 mai 2013, concernant l’aide d’État SA.22843 (2012/C) (ex 2012/NN) mise à exécution par la France en faveur de la Société Nationale Corse Méditerranée et la Compagnie Méridionale de Navigation (JO L 220, p. 20, ci-après la «décision litigieuse»), en n’ayant pas annulé, dans les délais prescrits, tous les versements des aides visées à cet article 2, paragraphe 1, et en n’ayant pas informé la Commission, dans le délai imparti, des mesures prises pour se conformer à cette décision, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 288, quatrième alinéa, TFUE ainsi que des articles 3 à 5 de ladite décision.

Le cadre juridique

2

L’article 14 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1), prévoit:

«1. En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire (ci‑après dénommée ‘décision de récupération’). La Commission n’exige pas la récupération de l’aide si, ce faisant, elle allait à l’encontre d’un principe général de droit [de l’Union].

2. L’aide à récupérer en vertu d’une décision de récupération comprend des intérêts qui sont calculés sur la base d’un taux approprié fixé par la Commission. Ces intérêts courent à compter de la date à laquelle l’aide illégale a été mise à la disposition du bénéficiaire jusqu’à celle de sa récupération.

3. Sans préjudice d’une ordonnance de la Cour de justice [de l’Union européenne] prise en application de l’article [278 TFUE], la récupération s’effectue sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national de l’État membre concerné, pour autant que ces dernières permettent l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission. À cette fin et en cas de procédure devant les tribunaux nationaux, les États membres concernés prennent toutes les mesures prévues par leurs systèmes juridiques respectifs, y compris les mesures provisoires, sans préjudice du droit [de l’Union].»

Les antécédents du litige et la décision litigieuse

Les antécédents du litige

3

Par délibération du 7 juin 2007, l’Assemblée de Corse a attribué au groupement constitué de la Société nationale maritime Corse-Méditerranée (SNCM) SA (ci-après la «SNCM») et de la Compagnie méridionale de navigation SA (ci-après la «CMN») la délégation de service public de la desserte maritime entre le port de Marseille et les ports de Corse. Par décision du même jour, le président du Conseil exécutif de la collectivité territoriale de Corse a été autorisé à signer la convention de délégation de service public.

4

La convention de délégation de service public a été conclue pour la période allant du 1er juillet 2007 au 31 décembre 2013.

5

L’article 1er de ladite convention définit l’objet de celle-ci comme étant la fourniture de services maritimes réguliers sur l’ensemble des lignes de la délégation de service public entre le port de Marseille et les ports de Bastia, d’Ajaccio, de Porto Vecchio, de Propriano et de Balagne.

6

Le cahier des charges, contenu dans l’annexe 1 de la convention de délégation de service public, définit la nature desdits services. En particulier, il prévoit:

un service permanent «passager et fret» que le groupement composé de la SNCM et de la CMN doit assurer pendant toute l’année (ci-après le «service de base») et

un service complémentaire «passagers», à fournir par la SNCM, pour les pointes de trafic, couvrant environ 37 semaines sur les lignes Marseille-Ajaccio et Marseille-Bastia, ainsi que pour la période du 1er mai au 30 septembre pour la ligne Marseille-Propriano (ci-après le «service complémentaire»).

7

En vertu de la convention de délégation de service public, les deux délégataires reçoivent une contribution annuelle de la part de l’office des transports de Corse, en contrepartie du service de base et du service complémentaire. La compensation financière finale de chaque délégataire pour chaque année est limitée au montant du déficit d’exploitation entraîné par les obligations résultant du cahier des charges, en tenant compte d’un rendement raisonnable du capital nautique engagé au prorata des journées de son utilisation effective pour les traversées correspondant à ces obligations. Dans l’hypothèse où les recettes réalisées seraient inférieures aux recettes prévisionnelles fixées par les délégataires dans leur offre, ladite convention prévoit un ajustement de la compensation publique.

8

Postérieurement à sa signature, la convention de délégation de service public a été modifiée, de telle sorte que plus de 100 traversées par an, entre la Corse et Marseille, ont été supprimées, que les montants annuels de la compensation financière de référence ont été réduits de 6,5 millions d’euros pour les deux délégataires et que le mécanisme d’ajustement annuel des recettes par délégataire a été plafonné.

La décision litigieuse

9

À la suite d’une plainte introduite par Corsica Ferries France SAS (ci‑après «Corsica Ferries») au sujet d’aides illégales et incompatibles avec le marché intérieur dont la SNCM et la CMN auraient bénéficié par la convention de délégation de service public portant sur les liaisons maritimes entre la Corse et Marseille, la Commission a, par lettre du 27 juin 2012, informé la République française de sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, sur les aides potentielles au bénéfice de la SNCM et de la CMN contenues dans la convention de délégation de service public (JO 2012, C 301, p. 1).

10

Dans le cadre de son examen, la Commission a procédé à une appréciation des deux services en cause, à savoir le service de base et le service complémentaire.

11

La Commission a relevé que les compensations reçues au titre du service de base par la SNCM et la CMN constituaient des aides illégales, dans la mesure où lesdites compensations avaient été octroyées sans que soit respectée la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 3, TFUE. Toutefois, elle a constaté que ces compensations étaient compatibles avec le marché intérieur.

12

Pour décider que les compensations prévues par la convention de délégation de service public et se rapportant au service complémentaire, assuré par la seule SNCM, constituaient des aides d’État illégales et incompatibles avec le marché intérieur, la Commission a considéré que deux des quatre critères fixés par la Cour dans l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, EU:C:2003:415) n’étaient pas remplis.

13

La Commission a en effet constaté, en premier lieu, que le service complémentaire n’était ni nécessaire ni proportionné à la satisfaction d’un besoin réel de service public. Elle a estimé, en second lieu, d’une part, que les conditions de l’appel d’offres n’avaient pas permis d’assurer une concurrence effective et, d’autre part, que les compensations financières n’avaient pas été définies par référence à une base de coûts établie a priori ou par comparaison avec la structure de charges d’autres entreprises maritimes comparables.

14

Au vu des éléments susmentionnés, la Commission a, par la décision litigieuse, notifiée à la République française le 3 mai 2013, arrêté ce qui suit:

«Article premier

Les compensations versées à la SNCM et à la CMN dans le cadre de la [convention de délégation de service public] du 7 juin 2007 constituent des aides d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, [...] TFUE. Ces aides d’État ont été octroyées en violation des obligations prévues à l’article 108, paragraphe 3, [...] TFUE.

Article 2

1. Les compensations versées à la SNCM au regard de la mise en place des capacités supplémentaires prévues aux I a) 2), I b) 2) et I d) 1.4) du cahier des charges de la [convention de délégation de service public] susmentionnée sont incompatibles avec le marché intérieur.

2. Les compensations versées à la SNCM et à la CMN pour l’opération des autres services prévus par la [convention de délégation de service public] susmentionnée sont compatibles avec le marché...

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