Marvin M. v Kreis Heinsberg.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:864
Date28 October 2020
Docket NumberC-112/19
Celex Number62019CJ0112
CourtCourt of Justice (European Union)
62019CJ0112

ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

28 octobre 2020 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 2006/126/CE – Article 2, paragraphe 1, et article 11, paragraphe 4 – Permis de conduire – Reconnaissance mutuelle – Portée de l’obligation de reconnaissance – Permis de conduire ayant fait l’objet d’un échange – Échange effectué à un moment où le droit de conduire avait été retiré par l’État membre de délivrance – Fraude – Refus de reconnaissance du permis délivré dans le cadre de l’échange »

Dans l’affaire C‑112/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgericht Aachen (tribunal administratif d’Aix-la-Chapelle, Allemagne), par décision du 4 février 2019, parvenue à la Cour le 12 février 2019, dans la procédure

Marvin M.

contre

Kreis Heinsberg,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, MM. E. Juhász (rapporteur) et I. Jarukaitis, juges,

avocate générale : Mme E. Sharpston,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour M. M., par Me H. D. Gebauer, Rechtsanwalt,

pour la Commission européenne, par M. W. Mölls et Mme N. Yerrell, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, paragraphe 1, et de l’article 11, paragraphes 1 et 4, de la directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, relative au permis de conduire (JO 2006, L 403, p. 18).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Marvin M. au Kreis Heinsberg (district de Heinsberg, Allemagne), au sujet de la décision de ce dernier refusant de reconnaître le permis de conduire délivré à M. M. par les autorités néerlandaises.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 2 et 8 de la directive 2006/126 énoncent :

« (2)

Les règles relatives aux permis de conduire sont un élément essentiel de la politique commune des transports, contribuent à améliorer la sécurité routière et facilitent la libre circulation des personnes qui transfèrent leur résidence dans un État membre autre que l’État de délivrance du permis. Compte tenu de l’importance des moyens de transport individuels, la possession d’un permis de conduire dûment reconnu par l’État d’accueil favorise la libre circulation et la liberté d’établissement des personnes. [...]

[...]

(8)

Pour répondre à des impératifs de sécurité routière, il convient de fixer les conditions minimales auxquelles le permis de conduire peut être délivré. Il faut procéder à une harmonisation des normes relatives aux examens à subir par les conducteurs et à l’octroi du permis. À cet effet, les connaissances, les aptitudes et les comportements liés à la conduite des automobiles devraient être redéfinis, l’examen de conduite devrait être basé sur ces concepts et les normes minimales concernant l’aptitude physique et mentale à la conduite de ces véhicules devraient être redéfinies. »

4

L’article 1er, paragraphe 1, de ladite directive prévoit :

« Les États membres établissent le permis de conduire national d’après le modèle communautaire figurant à l’annexe I, conformément aux dispositions de la présente directive. Le signe distinctif de l’État membre délivrant le permis figure dans l’emblème dessiné à la page 1 du modèle communautaire de permis de conduire. »

5

L’article 2 de la même directive, intitulé « Reconnaissance mutuelle », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les permis de conduire délivrés par les États membres sont mutuellement reconnus. »

6

L’article 7, paragraphe 1, de la directive 2006/126 définit les conditions de délivrance du permis de conduire liées à l’aptitude à conduire et à la résidence du demandeur sur le territoire de l’État membre délivrant le permis de conduire.

7

Aux termes de l’article 11 de la directive 2006/126 :

« 1. Dans le cas où le titulaire d’un permis de conduire national valable délivré par un État membre a établi sa résidence normale dans un autre État membre, il peut demander l’échange de son permis de conduire contre un permis équivalent. Il appartient à l’État membre qui procède à l’échange de vérifier pour quelle catégorie le permis présenté est effectivement encore valable.

2. Sous réserve du respect du principe de territorialité des lois pénales et de police, l’État membre où est située la résidence normale peut appliquer au titulaire d’un permis de conduire délivré par un autre État membre ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l’annulation du droit de conduire et, si nécessaire, procéder à ces fins à l’échange de ce permis.

3. L’État qui procède à l’échange renvoie l’ancien permis aux autorités de l’État membre qui l’a délivré et communique les motifs de cette action.

4. Un État membre refuse de délivrer un permis de conduire à un demandeur dont le permis fait l’objet d’une restriction, d’une suspension ou d’un retrait dans un autre État membre.

Un État membre refuse de reconnaître, à toute personne dont le permis de conduire a fait l’objet, sur son territoire, d’une restriction, d’une suspension ou d’un retrait, la validité de tout permis de conduire délivré par un autre État membre.

[...] »

8

L’article 15 de la directive 2006/126, dans sa version en vigueur à la date des faits en cause au principal,prévoyait :

« Les États membres s’assistent mutuellement dans la mise en œuvre de la présente directive et échangent des informations sur les permis qu’ils ont délivrés, échangés, remplacés, renouvelés ou retirés. Ils utilisent le réseau des permis de conduire de l’Union européenne établi à cet effet [...] »

Le droit allemand

9

Aux termes de l’article 29, paragraphe 1, de la Verordnung über die Zulassung von Personen zum Straßenverkehr (règlement relatif à l’admission des personnes à la circulation routière), dans sa version applicable au litige au principal :

« 1. Le titulaire d’un droit de conduire étranger peut conduire des véhicules automobiles en Allemagne dans les limites de son autorisation lorsqu’il n’a pas de résidence normale dans ce pays conformément à l’article 7. »

10

L’article 29, paragraphe 3, de ce règlement dispose :

« L’autorisation visée au paragraphe 1 ne s’applique pas aux titulaires de droits de conduire étrangers,

[...]

3. dont le permis de conduire a été retiré en Allemagne, soit par une décision judiciaire provisoire ou définitive, soit par une décision administrative directement exécutoire ou définitive,

[...]

Dans les cas visés à la première phrase, l’autorité compétente peut adopter un acte constatant l’absence d’autorisation. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

11

M. M. s’est vu délivrer par les autorités allemandes un permis de conduire pour les véhicules des catégories AM et B, le 3 juillet 2008, ainsi que pour la catégorie T, le 1er juillet 2015.

12

À l’occasion d’un contrôle routier effectué le 9 juin 2016, il a été constaté que M. M. conduisait sous l’emprise de stupéfiants. Le 20 septembre 2016, ce dernier a été informé de l’intention des autorités allemandes compétentes de lui retirer le droit de conduire.

13

Après avoir indiqué auxdites autorités, le 29 septembre 2016, qu’il n’était plus domicilié en Allemagne, M. M. a, le 13 octobre 2016, fait une déclaration de domicile aux Pays-Bas, où il a demandé, le 1er novembre 2016, l’échange de son permis de conduire allemand contre un permis de conduire néerlandais.

14

Par un arrêté du 9 novembre 2016, immédiatement exécutoire et notifié à M. M. le 12 novembre 2016, le Kreis Heinsberg (district de Heinsberg) a procédé au retrait du droit de conduire de l’intéressé et lui a enjoint de restituer sans délai son permis de conduire.

15

Après avoir constaté, le 14 novembre 2016, la validité du droit de conduire de M. M. au regard des informations figurant dans la base de données du réseau des permis de conduire de l’Union européenne (RESPER), les autorités néerlandaises compétentes pour l’échange des permis de conduire ont délivré un permis de conduire néerlandais à M. M., le 17 novembre 2016, en échange de son permis de conduire allemand. Cet échange a été notifié au Kreis Heinsberg (district de Heinsberg) par un courrier du 5 décembre 2016, auquel était joint le permis de conduire allemand de M. M.

16

Les autorités néerlandaises, ayant été informées par le Kreis Heinsberg (district de Heinsberg) du retrait du droit de conduire allemand de M. M., ont fait savoir, le 4 janvier 2017, à la suite d’une demande à cet égard, qu’elles maintenaient la transcription du permis de conduire de M. M., au motif que, à la date de la demande d’échange, ladite base de donnée ne contenait aucune mention quant à une restriction du droit de conduire de l’intéressé.

17

Le 17 janvier 2017, lors d’un contrôle routier effectué en Allemagne, les services de police ont relevé que M. M. ne disposait pas d’un droit de conduire valide sur le territoire de cet État membre.

18

Par une décision du 5 septembre 2017, le Kreis Heinsberg (district de Heinsberg) a constaté que le permis de conduire délivré à M. M. aux Pays-Bas ne l’autorisait pas à conduire des véhicules en Allemagne.

19

M. M. a contesté cette décision devant le Verwaltungsgericht Aachen (tribunal administratif d’Aix-la-Chapelle, Allemagne).

20

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