Opinion of Advocate General Mengozzi delivered on 27 June 2018.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:504
Date27 June 2018
Celex Number62017CC0380
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-380/17
62017CC0380

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 27 juin 2018 ( 1 )

Affaire C‑380/17

Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie,

K,

B

en présence de

H. Y. ( 2 ),

Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie

[demande de décision préjudicielle formée par le Raad van State (Conseil d’État, Pays‑Bas)]

« Renvoi préjudiciel – Exclusion du champ d’application de la directive 2003/86/CE – Dispositions du droit de l’Union rendues applicables de manière directe et inconditionnelle par le droit national – Compétence de la Cour – Droit au regroupement familial – Régime plus favorable des réfugiés – Article 12, paragraphe 1, troisième alinéa – Rejet d’une demande – Non-respect du délai de trois mois suivant l’octroi du statut de protection subsidiaire – Délai indicatif »

I. Introduction

1.

Dans le présent renvoi à titre préjudiciel, déféré par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas), la Cour est, d’une part, appelée à se prononcer sur sa propre compétence à interpréter la directive 2003/86/CE du Conseil, du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial ( 3 ), dans un contexte où, bien que la situation en cause dans l’affaire au principal soit expressément exclue du champ d’application de cet acte, le droit national qui transpose cette directive a unilatéralement entendu étendre le champ d’application de ladite directive afin de couvrir une situation de ce type. Cette question est également soulevée dans l’affaire C‑257/17, C et A, dans laquelle mes conclusions sont présentées ce jour même.

2.

D’autre part, la Cour est invitée à se prononcer sur la nature du délai de trois mois inscrit à l’article 12, paragraphe 1, troisième alinéa de la directive 2003/86, en particulier sur la question de savoir si les autorités nationales sont en droit de rejeter la demande de regroupement familial au simple motif du dépassement dudit délai.

II. Le cadre juridique et factuel

A. Le droit international

3.

L’article 3, paragraphe 1, de la Convention relative aux droits de l’enfant adoptée et ouverte à la signature, ratification et adhésion par l’Assemblée générale dans sa résolution 44/25 du 20 novembre1989 stipule que « dans toutes les décisions qui concernent les enfants, […] l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ».

4.

Aux termes de l’article 8, paragraphe 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, ci-après la « CEDH », intitulé « Droit au respect de la vie privée et familiale » :

« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. »

B. Le droit de l’Union

5.

L’article 7 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( 4 ) (ci-après la « Charte »), intitulé « Respect de la vie privée et familiale », dispose :

« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications. »

6.

L’article 24, paragraphes 2 et 3, de la Charte énonce :

« (2) Dans tous les actes relatifs aux enfants, qu’ils soient accomplis par des autorités publiques ou des institutions privées, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale.

(3) Tout enfant a le droit d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à son intérêt. »

7.

La directive 2003/86 fixe les conditions dans lesquelles est exercé le droit au regroupement familial dont bénéficient les ressortissants de pays tiers résidant légalement sur le territoire des États membres. Conformément à son considérant 2, cette directive respecte les droits fondamentaux, notamment le droit au respect de la vie familiale, consacré dans de nombreux instruments du droit international, dont, en particulier, l’article 8 de la CEDH et l’article 7 de la Charte, susmentionnés.

8.

Aux termes du considérant 8 de la directive 2003/86, « [l]a situation des réfugiés devrait demander une attention particulière, à cause des raisons qui les ont contraints à fuir leur pays et qui les empêchent d’y mener une vie en famille normale. À ce titre, il convient de prévoir des conditions plus favorables pour l’exercice de leur droit au regroupement familial ».

9.

Selon l’article 2, sous b), de la directive 2003/86 :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

b)

“réfugié” : tout ressortissant de pays tiers ou apatride bénéficiant d’un statut de réfugié au sens de la convention relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, modifiée par le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ».

10.

L’article 3, paragraphe 2, sous c) de la directive 2003/86 dispose que « [l]a présente directive ne s’applique pas lorsque le regroupant est un ressortissant de pays tiers :

c)

autorisé à séjourner dans un État membre en vertu de formes subsidiaires de protection, conformément aux obligations internationales, aux législations nationales ou aux pratiques des États membres, ou demandant l’autorisation de séjourner à ce titre et dans l’attente d’une décision sur son statut. »

11.

L’article 5, paragraphe 5, de la directive 2003/86, dispose qu’« [a]u cours de l’examen de la demande, les États membres veillent à prendre dûment en considération l’intérêt supérieur de l’enfant mineur ».

12.

L’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/86, énonce :

« Lors du dépôt de la demande de regroupement familial, l’État membre concerné peut exiger de la personne qui a introduit la demande de fournir la preuve que le regroupant dispose :

a)

d’un logement considéré comme normal pour une famille de taille comparable dans la même région et qui répond aux normes générales de salubrité et de sécurité en vigueur dans l’État membre concerné ;

b)

d’une assurance maladie couvrant l’ensemble des risques normalement couverts pour ses propres ressortissants dans l’État membre concerné, pour lui-même et les membres de sa famille ;

c)

de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et à ceux des membres de sa famille sans recourir au système d’aide sociale de l’État membre concerné. Les États membres évaluent ces ressources par rapport à leur nature et leur régularité et peuvent tenir compte du niveau des rémunérations et des pensions minimales nationales ainsi que du nombre de membres que compte la famille. »

13.

Aux termes de l’article 12, paragraphe 1, premier et troisième alinéas de la directive 2003/86, qui s’insère dans son chapitre V, intitulé « Regroupement familial des réfugiés » :

« Par dérogation à l’article 7, les États membres ne peuvent pas imposer au réfugié et/ou aux membres de la famille de fournir, en ce qui concerne les demandes relatives aux membres de la famille [...] des éléments de preuve attestant qu’il répond aux conditions visées à l’article 7.

[...]

Les États membres peuvent exiger du réfugié qu’il remplisse les conditions visées à l’article 7, paragraphe 1, si la demande de regroupement familial n’est pas introduite dans un délai de trois mois suivant l’octroi du statut de réfugié. »

14.

L’article 17 de la directive 2003/86 précise :

« Les États membres prennent dûment en considération la nature et la solidité des liens familiaux de la personne et sa durée de résidence dans l’État membre, ainsi que l’existence d’attaches familiales, culturelles ou sociales avec son pays d’origine, dans les cas de rejet d’une demande, de retrait ou de non-renouvellement du titre de séjour, ainsi qu’en cas d’adoption d’une mesure d’éloignement du regroupant ou des membres de sa famille. »

15.

L’article 2, sous f), de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection ( 5 ), énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

f)

“personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire”, tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 15, l’article 17, paragraphes 1 et 2, n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays. »

C. Le droit néerlandais

16.

Selon le Raad van State (Conseil d’État), une demande de délivrance d’un visa pour un séjour de plus de trois mois, telle que celle en cause dans le litige au principal, constitue une demande d’entrée et de séjour en vue d’un regroupement familial d’un réfugié ou d’un bénéficiaire de la protection subsidiaire. Une telle demande est introduite au bénéfice d’un membre de la famille résidant à l’étranger ou si le membre de la famille est entré aux Pays‑Bas en même temps que le regroupant. Après l’introduction de cette demande, le secrétaire d’État peut accorder d’office à ce membre de la famille un permis de séjour au titre de l’asile.

17.

L’article 29...

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