Proceedings relating to the execution of European arrest warrants issued agains Ciprian Vasile Radu.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:648
Date18 October 2012
Celex Number62011CC0396
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-396/11
62011CC0396

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M ME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 18 octobre 2012 ( 1 )

Affaire C‑396/11

Ministerul Public – Parchetul de pe lângă Curtea de Apel Constanţa

contre

Ciprian Vasile Radu

[demande de décision préjudicielle formée par la Curtea de Apel Constanţa (Roumanie)]

«Coopération policière et judiciaire en matière pénale — Décision-cadre relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres — Possibilité pour l’État membre d’exécution du mandat de rejeter la demande de remise de la personne recherchée»

1.

Par la demande de décision préjudicielle qui lui a été déférée dans la présente affaire, la Cour est appelée à interpréter la décision-cadre 2002/584/JAI ( 2 ). Dans les grandes lignes, l’affaire soulève trois questions. Premièrement, elle concerne l’interprétation qu’il convient de faire de ladite décision après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, et elle soulève en particulier la question de savoir si les modifications apportées au traité sur l’Union européenne par l’effet de l’article 6 TUE doivent influer sur cette interprétation. Deuxièmement, elle soulève la question de l’interaction entre l’article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après la «convention») et l’article 6 de la charte des droits fondamentaux de l’Union (ci-après la «Charte»), d’une part, et les dispositions de la décision-cadre impliquant la privation de liberté d’une personne recherchée dans le cadre des procédures d’exécution d’un mandat d’arrêt européen, d’autre part. Troisièmement, elle soulève la question de savoir si la décision-cadre, correctement interprétée, permet à un État membre de refuser l’exécution d’un tel mandat en cas de violations de dispositions relatives aux droits de l’homme, y compris des articles susmentionnés.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le traité sur l’Union européenne

2.

Aux termes de l’article 6 TUE:

«1. L’Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000, telle qu’adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg, laquelle a la même valeur juridique que les traités.

[…]

3. Les droits fondamentaux, tels qu’ils sont garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales et tels qu’ils résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, font partie du droit de l’Union en tant que principes généraux» ( 3 ).

La Charte

3.

L’article 6 de la Charte dispose:

«Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté.»

4.

L’article 47 de la Charte dispose par ailleurs:

«Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article.

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. […]»

5.

L’article 48 de la Charte dispose:

«1. Tout accusé est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

2. Le respect des droits de la défense est garanti à tout accusé.»

6.

Aux termes de l’article 52 de la Charte:

«1. Toute limitation de l’exercice des droits et libertés reconnus par la présente Charte doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et libertés d’autrui.

[…]

3. Dans la mesure où la présente Charte contient des droits correspondant à des droits garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, leur sens et leur portée sont les mêmes que ceux que leur confère ladite convention. Cette disposition ne fait pas obstacle à ce que le droit de l’Union accorde une protection plus étendue.

[…]»

La décision-cadre

7.

La décision-cadre remplace le système d’extradition multilatéral en vigueur jusqu’alors, fondé sur la convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957, par un système fondé sur le mandat d’arrêt européen. En application du nouveau système, lorsqu’une personne (ci-après la «personne recherchée») recherchée par les autorités d’un État membre (ci-après l’«État membre d’émission») en raison des infractions qu’elle a commises, ou qu’elle est dite avoir commises, est physiquement présente sur le territoire d’un autre État membre (ci-après l’«État membre d’exécution»), l’autorité judiciaire désignée dans le premier État peut émettre un mandat d’arrêt européen tendant à l’arrestation et à la remise de cette personne par le second État.

8.

Le chapitre 1er de la décision-cadre est intitulé «principes généraux» et comprend les articles 1er à 8. Aux termes de l’article 1er:

«1. Le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire émise par un État membre en vue de l’arrestation et de la remise par un autre État membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté.

2. Les États membres exécutent tout mandat d’arrêt européen, sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de la présente décision-cadre.

3. La présente décision-cadre ne saurait avoir pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 du traité sur l’Union européenne.»

9.

Les articles 3 et 4 définissent un certain nombre de motifs pour lesquels il est obligatoire (article 3) ou simplement possible (article 4) de refuser l’exécution d’un mandat d’arrêt européen.

10.

L’article 8 précise le contenu et la forme du mandat d’arrêt européen. En particulier, l’article 8, paragraphe 1, sous c), exige «l’indication de l’existence d’un jugement exécutoire, d’un mandat d’arrêt ou de toute autre décision judiciaire exécutoire ayant la même force entrant dans le champ d’application des articles 1er et 2».

11.

Le chapitre 2 de la décision-cadre comprend les articles 9 à 25. Il est intitulé «procédure de remise» et, outre qu’il établit un certain nombre de conditions générales à respecter, contient des dispositions visant à protéger les droits de la personne recherchée. En particulier:

la personne recherchée doit être informée, lors de son arrestation, du contenu du mandat d’arrêt européen ainsi que de la possibilité de sa remise; lorsque la personne recherchée est arrêtée dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen, elle a le droit de bénéficier des services d’un conseil et d’un interprète (article 11);

l’autorité judiciaire d’exécution peut décider de remettre la personne recherchée en liberté après son arrestation et peut la mettre en liberté provisoire à tout moment à condition que toutes les mesures nécessaires soient prises pour éviter sa fuite (article 12);

lorsque la personne recherchée consent à sa remise, ce consentement doit avoir été donné volontairement et en pleine connaissance de cause; elle a le droit de se faire assister d’un conseil à cette fin (article 13); si elle ne consent pas à sa remise, la personne recherchée a le droit d’être entendue par l’autorité judiciaire d’exécution de l’État membre d’exécution, laquelle peut demander à l’État membre d’émission de lui fournir des informations complémentaires (articles 14 et 15);

tout mandat d’arrêt européen doit être traité en urgence; lorsque la personne recherchée consent à sa remise, la décision finale sur l’exécution du mandat d’arrêt européen doit être prise dans les dix jours suivant ledit consentement; dans les autres cas, ce délai est de soixante jours à compter de l’arrestation. Tant qu’aucune décision définitive n’a été prise sur l’exécution du mandat d’arrêt européen, l’autorité judiciaire d’exécution s’assure que les conditions matérielles nécessaires à une remise effective de la personne restent réunies (article 17);

lorsque le mandat d’arrêt européen a été émis pour l’exercice de poursuites pénales à l’encontre de la personne recherchée, celle-ci doit, en règle générale, être entendue par l’autorité judiciaire d’exécution (articles 18 et 19);

lorsque l’autorité judiciaire de l’État membre d’exécution décide la remise de la personne recherchée, cette dernière doit être remise au plus tard dix jours après la décision finale d’exécution du mandat d’arrêt européen. Ce délai peut être prorogé en cas de force majeure ou pour des raisons humanitaires sérieuses militant contre la remise (article 23).

La convention

12.

L’article 5 de la convention stipule, dans la mesure pertinente aux fins de la présente affaire:

«1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales:

a)

s’il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent;

[…]

c)

s’il a été arrêté et détenu en vue d’être conduit devant l’autorité judiciaire compétente, lorsqu’il y a des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis une infraction ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir après l’accomplissement...

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