Opinion of Advocate General Hogan delivered on 23 May 2019.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:451
Docket NumberC-383/18
Celex Number62018CC0383
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date23 May 2019
62018CC0383

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. GERARD HOGAN

présentées le 23 mai 2019 ( 1 )

Affaire C‑383/18

Lexitor sp. z o.o

contre

Spółdzielcza Kasa Oszczędnościowo – Kredytowa im. Franciszka Stefczyka z siedzibą w Gdyni,

Santander Consumer Bank S.A. z siedzibą we Wrocławiu,

mBank S.A. z siedzibą w Warszawie

[demande de décision préjudicielle du Sąd Rejonowy Lublin-Wschód w Lublinie z siedzibą w Świdniku (tribunal d’arrondissement de Lublin-Wschód de Lublin, qui a son siège à Świdnik, Pologne)]

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 2008/48/CE – Article 16, paragraphe 1 – Contrats de crédit – Remboursement anticipé – Droit du consommateur à une réduction du coût total du crédit correspondant aux intérêts et frais dus pour la durée résiduelle du contrat »

1.

Cette affaire concerne l’interprétation de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil (JO 2008, L 133, p. 66, et rectificatifs JO 2009, L 207, p. 14, JO 2010, L 199, p. 40, et JO 2011, L 234, p. 46). Comme nous allons le démontrer incessamment, la signification de cette disposition législative – qui concerne le droit d’un consommateur à une réduction du coût du crédit lorsqu’il a remboursé totalement ou partiellement, de façon anticipée, une somme due en vertu d’un contrat de crédit – est, à certains égards, à tout le moins obscure et ne se prête pas facilement à une interprétation satisfaisante. Il n’est d’ailleurs pas impossible que le législateur de l’Union – et ce peut-être en raison des questions que soulève précisément ce renvoi préjudiciel – puisse envisager un jour de reformuler cette disposition.

2.

Quoi qu’il en soit, la demande de décision préjudicielle dans cette affaire a pour origine une procédure opposant Lexitor sp. z o.o à Spółdzielcza Kasa Oszczędnościowo – Kredytowa im. Franciszka Stefczyka z siedzibą w Gdyni, Santander Consumer Bank S.A. z siedzibą we Wrocławiu (« Santander Consumer Bank ») et mBank S.A. z siedzibą w Warszawie, au sujet de l’application de pénalités et de frais supplémentaires lorsque des consommateurs s’acquittent de façon anticipée des obligations qui leur incombent en vertu de contrats de crédit aux consommateurs.

3.

Avant d’examiner cette question, il convient, tout d’abord, d’exposer les dispositions pertinentes de la directive 2008/48 et du droit national.

I. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. La directive 87/102/CEE

4.

L’article 8 de la directive 87/102/CEE du Conseil, du 22 décembre 1986, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (JO 1987, L 42, p. 48), disposait :

« Le consommateur a le droit de s’acquitter par anticipation des obligations qui découlent pour lui du contrat de crédit. Dans ce cas, le consommateur a droit, conformément aux dispositions arrêtées par les États membres, à une réduction équitable du coût du crédit. »

5.

La directive 87/102 a été abrogée et remplacée par la directive 2008/48 avec effet au 11 juin 2010.

2. La directive 2008/48

6.

Les considérants 7, 9, 10, 39 et 40 de la directive 2008/48 énoncent :

« (7)

Afin de faciliter l’émergence d’un marché intérieur performant en matière de crédit aux consommateurs, il est nécessaire de prévoir un cadre communautaire harmonisé dans un certain nombre de domaines clés. Compte tenu du développement constant du marché du crédit aux consommateurs et de la mobilité croissante des citoyens européens, une législation communautaire tournée vers l’avenir, capable de s’adapter aux futures formes du crédit et offrant aux États membres un degré de souplesse approprié dans la transposition de ses dispositions, devrait permettre d’établir un ensemble moderne de règles sur le crédit aux consommateurs.

[…]

(9)

Une harmonisation complète est nécessaire pour assurer à tous les consommateurs de la Communauté un niveau élevé et équivalent de protection de leurs intérêts et pour créer un véritable marché intérieur. Par conséquent, les États membres ne devraient pas être autorisés à maintenir ou introduire des dispositions nationales autres que celles prévues par la présente directive. Cependant, une telle restriction ne devrait s’appliquer que dans le cas où il existe des dispositions harmonisées dans la présente directive. En l’absence de telles dispositions harmonisées, les États membres devraient cependant être libres de maintenir ou d’introduire des dispositions législatives nationales. […]

(10)

Les définitions contenues dans la présente directive déterminent la portée de l’harmonisation. L’obligation qui incombe aux États membres de mettre en œuvre les dispositions de la présente directive devrait, dès lors, être limitée au champ d’application de la présente directive, tel qu’il résulte de ces définitions. […]

[…]

(39)

Le consommateur devrait avoir le droit de s’acquitter des obligations qui lui incombent avant la date fixée dans le contrat de crédit. Dans le cas d’un remboursement anticipé, total ou partiel, le prêteur devrait avoir droit à une indemnité pour les coûts directement liés au remboursement anticipé, compte tenu aussi des éventuelles économies ainsi réalisées par le prêteur. Toutefois, afin de déterminer la méthode de calcul de l’indemnité, il importe de respecter quelques principes. Le calcul de l’indemnité due au prêteur devrait être transparent et compréhensible pour le consommateur dès le stade précontractuel et, en tout état de cause, pendant l’exécution du contrat de crédit. En outre, la méthode de calcul devrait être d’une application facile pour le prêteur et le contrôle des indemnités par les autorités concernées devrait être facilité. C’est pourquoi, et compte tenu du fait qu’un crédit aux consommateurs n’est, en raison de sa durée et de son volume, pas financé par des mécanismes de financement à long terme, il convient de fixer le plafond de l’indemnité au moyen d’un taux uniforme. Cette méthode met en évidence la spécificité des crédits aux consommateurs et ne devrait pas affecter le recours éventuel à une méthode différente pour d’autres produits, qui sont financés par des mécanismes de financement à long terme, tels que les crédits hypothécaires à taux fixe.

(40)

Les États membres devraient avoir le droit de disposer que le prêteur peut réclamer une indemnité en cas de remboursement anticipé à la seule condition que le montant du remboursement au cours d’une période de douze mois dépasse un seuil défini par les États membres. Pour fixer ce seuil, qui ne devrait pas être supérieur à 10000 [euros], les États membres devraient, par exemple, tenir compte du montant moyen des crédits aux consommateurs sur leur marché. »

7.

L’article 1er de la directive 2008/48 est intitulé « Objet ». Il prévoit :

« La présente directive a pour objet d’harmoniser certains aspects des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de contrats de crédit aux consommateurs. »

8.

Aux termes de son article 2, paragraphe 1, la directive 2008/48 s’applique aux contrats de crédit.

9.

L’article 3 de la directive 2008/48 est intitulé « Définitions ». Il est libellé comme suit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[…]

c)

“contrat de crédit” un contrat en vertu duquel un prêteur consent ou s’engage à consentir à un consommateur un crédit sous la forme d’un délai de paiement, d’un prêt ou de toute autre facilité de paiement similaire, à l’exception des contrats conclus en vue de la prestation continue de services ou de la livraison de biens de même nature, aux termes desquels le consommateur règle le coût desdits services ou biens, aussi longtemps qu’ils sont fournis, par des paiements échelonnés ;

[…]

g)

“coût total du crédit pour le consommateur” : tous les coûts, y compris les intérêts, les commissions, les taxes, et tous les autres types de frais que le consommateur est tenu de payer pour le contrat de crédit et qui sont connus par le prêteur, à l’exception des frais de notaire ; ces coûts comprennent également les coûts relatifs aux services accessoires liés au contrat de crédit, notamment les primes d’assurance, si, en outre, la conclusion du contrat de service est obligatoire pour l’obtention même du crédit ou en application des clauses et conditions commerciales ;

[…] »

10.

L’article 10 de la directive 2008/48 est intitulé « Information à mentionner dans les contrats de crédit ». Son paragraphe 2 dispose :

« Le contrat de crédit mentionne, de façon claire et concise :

[…]

r)

le droit au remboursement anticipé, la procédure à suivre en cas de remboursement anticipé ainsi que, le cas échéant, des informations sur le droit du prêteur à une indemnité et le mode de calcul de cette indemnité ;

[…] »

11.

L’article 16 de la directive 2008/48 est intitulé « Remboursement anticipé » et dispose :

« 1. Le consommateur a le droit de s’acquitter à tout moment, intégralement ou partiellement, des obligations qui lui incombent en vertu du contrat de crédit. Dans ce cas, il a droit à une réduction du coût total du crédit, qui correspond aux intérêts et frais dus pour la durée résiduelle du contrat.

2. En cas de remboursement anticipé du crédit, le prêteur a droit à une indemnité équitable et objectivement justifiée pour les coûts éventuels liés directement au remboursement anticipé du crédit, à condition que le remboursement anticipé intervienne pendant une...

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