Honyvem Informazioni Commerciali Srl v Mariella De Zotti.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2005:641
Date25 October 2005
Celex Number62004CC0465
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-465/04

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. M. Poiares Maduro

présentées le 25 octobre 2005 (1)

Affaire C-465/04

Honyvem Informazioni Commerciali Srl

contre

Mariella De Zotti

[demande de décision préjudicielle formée par la Corte suprema di cassazione (Italie)]

«Agents commerciaux indépendants – Droit de l’agent commercial à une indemnité en cas de cessation du contrat»





1. Par la présente demande de décision préjudicielle, la Corte suprema di cassazione (Italie) défère à la Cour de justice une question dans laquelle elle lui demande de clarifier différents aspects du régime institué par la directive 86/653/CEE du Conseil, du 18 décembre 1986, relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants (2) (ci‑après la «directive 86/653» ou la «directive»). Plus précisément, les différents aspects à clarifier concernent les conditions de reconnaissance et de calcul du droit de l’agent commercial à une indemnité, prévu à l’article 17, paragraphe 2, de la directive, et l’interdiction, prévue à l’article 19 de la même directive, des dérogations aux dispositions de l’article 17 au détriment de l’agent commercial avant l’échéance du contrat. Et cela dans le cadre spécifique de l’ordre juridique italien, dans lequel les conventions collectives applicables aux agents commerciaux jouent depuis longtemps un rôle central pour déterminer les indemnités auxquelles l’agent commercial a droit après la cessation du contrat.

I – Les faits, le cadre juridique et les questions préjudicielles déférées à la Cour

2. Par lettre du 23 octobre 1997, la société Honyvem Informazioni Commerciali Srl (ci-après «Honyvem») a résilié, avec effet au 30 juin 1998, le contrat d’agent commercial conclu avec Mme Mariella De Zotti, qui, en vertu de son point 10, était régi «par les dispositions du code civil, par les lois spéciales relatives au mandat d’agent commercial ainsi que par les conventions collectives en matière commerciale».

3. Par un recours formé le 12 avril 1999 contre Honyvem devant le Tribunale di Milano, Mme De Zotti a conclu à ce que le commettant soit condamné à lui verser l’indemnité de fin de contrat qui, selon elle, atteignait 181 889 420 ITL en application des critères énoncés à l’article 1751 du code civil italien (codice civile, ci-après le «code civil»).

4. Cette disposition relative à l’indemnité de fin de contrat a transposé les articles 17, 18 et 19 de la directive 86/653 dans l’ordre juridique italien et elle était libellée comme suit à la date de la cessation du contrat:

«Au moment de la cessation du contrat, le commettant est tenu de verser une indemnité à l’agent commercial si au moins une des conditions suivantes est remplie:

l’agent commercial a apporté de nouveaux clients au commettant ou a développé sensiblement les opérations avec les clients existants et le commettant reçoit encore des avantages substantiels résultant des opérations avec ces clients;

le paiement de cette indemnité est équitable, compte tenu de toutes les circonstances, notamment des commissions que l’agent commercial perd et qui résultent des opérations avec ces clients.

L’indemnité n’est pas due:

si le commettant a mis fin au contrat en raison d’un manquement imputable à l’agent commercial et ne permettant pas la poursuite, même temporaire, de la relation en raison de sa gravité;

si l’agent commercial a mis fin au contrat, à moins que cette cessation ne soit due à des circonstances imputables au commettant ou à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent qui justifie raisonnablement que la poursuite de ses activités ne puisse pas être exigée;

si, en accord avec le commettant, l’agent cède à un tiers les droits et obligations découlant pour lui du contrat d’agence.

Le montant de l’indemnité ne peut pas excéder un chiffre équivalent à une indemnité annuelle calculée à partir de la moyenne annuelle des rémunérations perçues par l’agent commercial au cours des cinq dernières années et, si le contrat remonte à moins de cinq ans, l’indemnité est calculée sur la moyenne de la période en question.

L’octroi de cette indemnité ne prive toutefois pas l’agent commercial du droit de prétendre à des dommages et intérêts.

L’agent commercial perd le droit à l’indemnité prévue par le présent article s’il n’a pas notifié au commettant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits.

Il ne peut pas être dérogé aux dispositions du présent article en défaveur de l’agent commercial» (3).

5. Le Tribunale a accueilli les thèses présentées par la défenderesse Honyvem et a considéré comme dû le montant inférieur de 78 880 276 ITL, résultant de l’application des critères de calcul de l’indemnité de fin de contrat, prévus dans l’accord économique collectif (ci-après l’«AEC») du 28 novembre 1992, conclu le 27 novembre 1992 entre la Confcommercio (organisation représentant les entreprises du secteur du commerce, du tourisme et des services) et la FNAARC (organisation représentant les agents commerciaux et les représentants de commerce) et qui se lit comme suit:

«[…]

Point I)

Par référence aux dispositions de l’article 1751 du code civil, tel que modifié par l’article 4 du décret législatif n° 303 du 10 septembre 1991, et en particulier au principe de l’équité, dans tous les cas de cessation du contrat, il sera versé à l’agent commercial ou au représentant commercial une indemnité dont le montant sera égal à 1 % du montant global des commissions échues et liquidées au cours du contrat.

Cette somme sera complétée par les mesures suivantes:

A. Agents et représentants commerciaux liés par une obligation d’exclusivité à une seule entreprise:

– 3 % des commissions dans la limite de 24 000 000 ITL annuelles;

– 1 % du montant des commissions allant de 24 000 001 ITL à 36 000 000 ITL annuelles.

B. Agents et représentants commerciaux non liés par une obligation d’exclusivité à une seule entreprise:

– 3 % des commissions dans la limite de 12 000 000 ITL annuelles;

– 1 % du montant des commissions allant de 12 000 001 ITL à 18 000 000 ITL annuelles.

De cette indemnité sera déduit ce que l’agent ou le représentant commercial est en droit d’obtenir par l’effet d’assurances volontaires souscrites par le commettant.

Sont également à prendre en considération aux fins du calcul de l’indemnité de résiliation du contrat les sommes versées expressément et spécifiquement à titre de remboursement des frais ou participation aux frais.

Point II)

Toujours en application de l’article 1751 du code civil, en plus des sommes citées au point I) ci-dessus, l’agent commercial aura droit à une somme complémentaire ainsi calculée:

– 3 % des commissions échues dans les trois premières années du contrat d’agence;

– 3,5 % des commissions échues entre la quatrième et la sixième année;

– 4 % des commissions échues pendant les années suivantes.

[…]

Point III)

Les parties reconnaissent que le système ci-dessus convenu en matière de taux et d’échelons satisfait au principe d’équité visé au troisième alinéa de l’article 1751 du code civil

Point IV)

[…]

Déclaration verbale.

Les parties confirment que les présentes dispositions collectives en matière de cessation de contrat d’agence, en application de l’article 1751 du code civil, constituent dans leur ensemble un régime plus favorable que la réglementation légale. Ces dispositions sont interdépendantes et inséparables, et ne peuvent se cumuler avec aucun autre régime.

[…]»

6. Mme De Zotti a interjeté appel de la décision du Tribunale devant la Corte d’appello di Milano, qui a partiellement fait droit au recours. Selon cette juridiction, l’article 1751 du code civil établit un critère inspiré d’une ratio méritocratique, qui rétribue l’agent commercial pour la clientèle qu’il a apportée, laquelle continue, même après la fin du contrat, de fournir des avantages au commettant. Dans la mesure où, au contraire, l’AEC fixe des critères totalement étrangers à cette ratio, il ne peut pas être dérogé aux critères visés à l’article 1751 par l’autonomie contractuelle. Appliquant ainsi l’article 1751, la Corte d’appello, réduisant le montant déjà accordé par la juridiction de première instance et versé par Honyvem, a alloué à Mme De Zotti le montant complémentaire (arrondi) de 57 000 000 ITL, outre les intérêts et la réévaluation.

7. Honyvem a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt, essentiellement au motif, d’une part, qu’il n’est pas permis de déroger au régime prévu à l’article 1751 dans le seul cas où cette dérogation a lieu au détriment de l’agent commercial et, d’autre part, que l’appréciation du caractère plus ou moins avantageux des dispositions relatives à l’indemnité de fin de contrat, contenues dans l’AEC, par rapport à celles prévues à l’article 1751 du code civil ne doit pas se faire ex post, c’est‑à-dire après la fin du contrat, mais ex ante. Dans ces conditions, il faudrait conclure que le régime contractuel collectif est plus favorable que celui qui est prévu à l’article 1751 du code civil, puisqu’il assure en tout état de cause à l’agent commercial une indemnité qui n’est pas nécessairement garantie par le régime légal.

8. Mme De Zotti a également formé un pourvoi incident au motif que l’indemnité de fin de contrat n’a pas été liquidée selon le montant qu’elle réclamait.

9. Eu égard à ce cadre factuel et juridique, la Corte suprema di cassazione a posé à titre préjudiciel à la Cour une question qu’il y a lieu de reformuler et de décomposer dans les deux sous-questions suivantes:

«1) Eu égard au contenu et à la finalité de l’article 17 de la directive 86/653, l’article 19 de cette même directive peut-il être interprété en ce sens qu’il permet qu’une convention collective prévoie une indemnité qui, d’une part, est due à l’agent commercial sans qu’il importe que les conditions visées à l’article 17, paragraphe 2, soient remplies et, d’autre part, est calculée non pas sur la base...

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