Italmobiliare SpA v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:697
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-268/14
Date15 October 2015
Celex Number62014CC0268
Procedure TypeRecurso de anulación

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NILS Wahl

présentées le 15 octobre 2015 (1)

Affaire C‑268/14 P

Italmobiliare SpA

contre

Commission européenne

«Pourvoi – Marchés du ciment et des produits connexes – Article 18, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil – Pouvoirs de la Commission de demander des renseignements – Destinataire d’une demande de renseignements – Proportionnalité – Motivation – Droit d’être entendu»





1. Quelles sont les conditions et les limites des pouvoirs de la Commission européenne de demander aux entreprises, par voie de décision, de fournir des renseignements dans le cadre d’une enquête portant sur des infractions éventuelles aux règles de concurrence de l’Union européenne?

2. Telles sont, en substance, les questions essentielles soulevées dans le pourvoi introduit par Italmobiliare SpA (ci-après «Italmobiliare» ou la «requérante») contre l’arrêt du Tribunal Italmobiliare/Commission (T-305/11, EU:C:2014:126, ci-après, l’«arrêt attaqué») rejetant son recours en annulation d’une décision de la Commission adoptée sur le fondement de l’article 18, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 1/2003 (2) et ordonnant à cette société de fournir un volume considérable de renseignements.

3. Des questions sensiblement similaires sont également posées dans trois autres pourvois formés par d’autres sociétés opérant sur le marché du ciment contre trois arrêts du Tribunal rejetant également la plupart de leurs griefs dirigés contre des décisions de la Commission semblables à celle contestée par Italmobiliare. Je présenterai également aujourd’hui mes conclusions dans ces trois autres affaires (3). Les présentes conclusions doivent ainsi être lues conjointement avec ces autres conclusions.

I – Le cadre juridique

4. Le considérant 23 du règlement n° 1/2003 énonce:

«La Commission doit disposer dans toute la Communauté du pouvoir d’exiger les renseignements qui sont nécessaires pour déceler les accords, décisions et pratiques concertées interdits par l’article [101 TFUE] ainsi que l’exploitation abusive d’une position dominante interdite par l’article [102 TFUE]. Lorsqu’elles se conforment à une décision de la Commission, les entreprises ne peuvent être contraintes d’admettre qu’elles ont commis une infraction, mais elles sont en tout cas obligées de répondre à des questions factuelles et de produire des documents, même si ces informations peuvent servir à établir à leur encontre ou à l’encontre d’une autre entreprise l’existence d’une infraction.»

5. Les dispositions pertinentes de l’article 18 du règlement n° 1/2003 (intitulé «Demandes de renseignements») prévoient:

«1. Pour l’accomplissement des tâches qui lui sont assignées par le présent règlement, la Commission peut, par simple demande ou par voie de décision, demander aux entreprises et associations d’entreprises de fournir tous les renseignements nécessaires.

2. Lorsqu’elle envoie une simple demande de renseignements à une entreprise ou à une association d’entreprises, la Commission indique la base juridique et le but de la demande, précise les renseignements demandés et fixe le délai dans lequel ils doivent être fournis. Elle indique aussi les sanctions prévues à l’article 23 au cas où un renseignement inexact ou dénaturé serait fourni.

3. Lorsque la Commission demande par décision aux entreprises et associations d’entreprises de fournir des renseignements, elle indique la base juridique et le but de la demande, précise les renseignements demandés et fixe le délai dans lequel ils doivent être fournis. Elle indique également les sanctions prévues à l’article 23 et indique ou inflige les sanctions prévues à l’article 24. Elle indique encore le droit de recours ouvert devant la Cour de justice contre la décision.

[…]»

II – Les antécédents du litige

6. En 2008 et en 2009, la Commission a effectué en vertu de l’article 20 du règlement n° 1/2003 plusieurs inspections dans les locaux de différentes sociétés opérant dans le secteur cimentier, au nombre desquelles figuraient Italcementi Fabbriche Riunite Cemento SpA (ci‑après «Italcementi»), Ciments français SA, Ciment Calcia SA et Ciment Belges SA, sociétés qui, aux termes de l’arrêt attaqué, sont sous contrôle direct ou indirect de la requérante. Ces inspections ont été suivies en 2009 et en 2010 par l’envoi d’un certain nombre de demandes de renseignements au titre de l’article 18, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, adressées, notamment, à Italcementi.

7. Par lettre du 4 novembre 2010, la Commission a informé Italcementi de son intention de lui adresser une décision de demande de renseignements en vertu de l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003 et lui a communiqué le projet de questionnaire qu’elle envisageait d’annexer à cette décision. Italcementi a présenté ses observations à la Commission les 15 novembre et 1er décembre 2010.

8. Le 6 décembre 2010, la Commission a informé la requérante qu’elle avait décidé d’ouvrir contre elle et sept autres sociétés une procédure au titre de l’article 11, paragraphe 6, du règlement n° 1/2003 et de l’article 2 du règlement (CE) n° 773/2004 (4), pour des infractions présumées à l’article 101 TFUE consistant en des restrictions d’importations dans l’Espace économique européen (EEE) en provenance de pays extérieurs à l’EEE, des répartitions de marchés, des coordinations des prix et des pratiques anticoncurrentielles connexes sur le marché du ciment et les marchés des produits connexes.

9. Le 30 mars 2011, la Commission a adopté la décision C(2011) 2364 final, relative à une procédure d’application de l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003 du Conseil (affaire 39520 – Ciment et produits connexes) (ciaprès la «décision contestée»).

10. Dans cette décision, la Commission a indiqué que, conformément à l’article 18 du règlement n° 1/2003, pour l’accomplissement des tâches qui lui sont assignées dans ce règlement, elle peut, par simple demande ou par voie de décision, demander aux entreprises et associations d’entreprises de fournir tous les renseignements nécessaires (considérant 3 de la décision contestée). Après avoir rappelé qu’Italcementi avait été informée de son intention d’adopter une décision conformément à l’article 18, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003 et que celle-ci avait présenté ses observations sur le projet de questionnaire (considérants 4 et 5 de la décision contestée), la Commission a demandé par voie de décision à la requérante et à ses filiales de répondre au questionnaire figurant en annexe I. En particulier, celle-ci comprenait 78 pages et 10 séries de questions (considérant 6 de la décision contestée). Les instructions relatives aux réponses à ce questionnaire figuraient à l’annexe II, et les modèles de réponse, à l’annexe III.

11. La Commission a également souligné (considérant 2 de la décision contestée) la nature des infractions présumées, qu’elle a décrites comme suit: «[l]es infractions présumées concernent des restrictions des flux commerciaux dans l’espace économique européen (EEE), y compris des restrictions d’importations dans l’EEE en provenance de pays extérieurs à l’EEE, des répartitions de marchés, des coordinations des prix et des pratiques anticoncurrentielles connexes sur le marché du ciment et les marchés des produits connexes». En se référant à la nature et à la quantité des renseignements demandés ainsi qu’à la gravité des infractions présumées aux règles de concurrence, la Commission a estimé qu’il convenait d’accorder à la requérante un délai de réponse de douze semaines.

12. Le dispositif de la décision contestée se lit comme suit:

«Article premier

Italmobiliare SpA, avec ses filiales situées dans l’Union européenne et contrôlées directement ou indirectement par elle, fournira les renseignements mentionnés à l’annexe I de la présente décision, sous la forme demandée à l’annexe II et à l’annexe III de cette dernière, dans un délai de réponse de douze semaines à compter de la date de notification de la présente décision. Toutes les annexes font partie intégrante de la présente décision.

Article 2

Italmobiliare, avec ses filiales situées dans l’Union européenne et contrôlées directement ou indirectement par elle, est destinataire de la présente décision.»

13. La requérante a répondu les 27 juin et 11 juillet 2011 au questionnaire envoyé par la Commission.

III – La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

14. Par requête déposée le 8 juin 2011, Italmobiliare a demandé au Tribunal d’annuler la décision contestée.

15. Par l’arrêt attaqué (5), le Tribunal a rejeté le recours et condamné Italmobiliare aux dépens.

IV – La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

16. Dans le pourvoi qu’elle a introduit devant la Cour le 26 mai 2014, Italmobiliare conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

– annuler l’arrêt attaqué et annuler la décision contestée;

– ordonner les mesures d’organisation de la procédure ou les moyens d’instructions nécessaires et appropriées en application des articles 62 et 64 du règlement de procédure de la Cour;

– condamner la Commission aux dépens de la procédure devant le Tribunal et devant la Cour;

– à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour que celui-ci statue de nouveau.

17. La Commission, partie défenderesse, conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

– rejeter le pourvoi;

– à titre subsidiaire, pour autant que de besoin, confirmer la légalité de la décision contestée;

– condamner Italmobiliare aux dépens.

V – Appréciation des moyens du pourvoi

18. Italmobiliare développe cinq moyens au soutien de son pourvoi. Ces moyens portent, en substance, sur le point de savoir si le Tribunal a correctement interprété les pouvoirs dont la Commission est investie pour demander des renseignements en vertu du règlement n° 1/2003.

19. Les dispositions normatives essentielles et la jurisprudence relatives à ces pouvoirs sont examinées dans les conclusions que je présente également...

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