Kingdom of Spain v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2002:475
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-409/00
Date10 September 2002
Celex Number62000CC0409
Procedure TypeRecours en annulation - fondé
EUR-Lex - 62000C0409 - FR 62000C0409

Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 10 septembre 2002. - Royaume d'Espagne contre Commission des Communautés européennes. - Aides d'État - Incidence sur la concurrence et les échanges entre États membres - Encadrements sectoriels et encadrement des aides à la protection de l'environnement. - Affaire C-409/00.

Recueil de jurisprudence 2003 page I-01487


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1. Le présent recours en annulation du royaume d'Espagne est dirigé contre la décision 2001/605/CE de la Commission, du 26 juillet 2000, concernant le régime d'aides appliqué par l'Espagne en vue de l'acquisition de véhicules utilitaires dans le cadre de la convention de collaboration conclue le 26 février 1997 entre le ministère de l'industrie et de l'énergie et l'Instituto de Crédito Oficial (ci-après la «convention»). La Commission a déclaré illégales et incompatibles avec le marché commun la plupart des aides en cause combinées au retrait définitif de la circulation de véhicules usagés et a ordonné leur récupération.

2. À compter du 1er janvier 1997, la convention poursuit, essentiellement sous la même forme, le régime d'aides introduit par le «Plan Renove Industrial» mis en oeuvre d'août 1994 à décembre 1996. Les régimes d'aides prévus par le «Plan Renove Industrial» sont l'objet de la décision 98/693/CE de la Commission, du 1er juillet 1998 . Le recours du royaume d'Espagne dirigé contre cette dernière est pendant devant la Cour sous le numéro d'affaire C-351/98. Les conclusions dans cette affaire qui, à l'exception du premier moyen, ont de nombreuses similitudes avec la présente espèce ont été présentées le 7 mai 2002 . Par arrêt du 29 septembre 2000, le Tribunal de première instance a rejeté un recours également introduit contre la décision 98/693 par la Confederación Española de Transporte de Mercancías (CETM) .

II - Les faits et la décision attaquée

3. La convention conclue le 26 février 1997 prévoit que les personnes physiques ainsi que les petites et moyennes entreprises (ci-après les «PME») peuvent toucher une bonification d'intérêts pour des crédits de quatre ans destinés à financer l'acquisition de véhicules utilitaires ou leur location dans l'intention de les acheter, à concurrence de 70 %. La bonification d'intérêts représente pour chaque prêt un maximum de 85 000 ESP (511 euros) par million de pesetas prêté (6 010 euros).

4. D'après la convention, l'Instituto de Crédito Oficial (ci-après l'«ICO») ouvre une ligne de crédit de 35 milliards de ESP (210 millions d'euros). Le ministère de l'Industrie et de l'Énergie octroie à l'ICO une compensation correspondant à la différence entre le taux appliqué au prêt dans le cadre du programme d'aides et le taux consenti dans des conditions normales de marché, à concurrence de 4,5 points. Le volume d'aides est estimé à un total de 3 milliards de ESP (18 millions d'euros).

5. La subvention était accordée pour le financement des six catégories de véhicules suivantes: tracteurs routiers et camions de plus de 30 tonnes (catégorie A); véhicules utilitaires pesant entre 12 et 30 tonnes (catégorie B); véhicules utilitaires pesant entre 3,5 et 12 tonnes (catégorie C); modèles dérivés des véhicules de tourisme, fourgonnettes et véhicules utilitaires pesant jusqu'à 3,5 tonnes (catégorie D); autobus et autocars (catégorie E); remorques et semi-remorques (catégorie F).

6. La condition pour obtenir la subvention en cas d'acquisition d'un véhicule neuf est de simultanément retirer définitivement de la circulation un véhicule immatriculé en Espagne de la même catégorie ou d'une catégorie supérieure, et dont la première immatriculation remonte à plus de dix ans (sept ans pour les tracteurs routiers).

7. Par lettre du 26 février 1997, le gouvernement espagnol a notifié à la Commission la convention le jour même de son entrée en vigueur, avec effet rétroactif au 1er janvier 1997. Par lettre du 3 avril 1997, la Commission a demandé au gouvernement espagnol de lui communiquer des informations complémentaires. Après que les autorités espagnoles eurent, entre le 30 avril et le 9 octobre 1997, sollicité à cinq reprises une prorogation de délai, et après que les informations requises ne furent toujours pas parvenues à la Commission le 10 novembre 1997, cette dernière a introduit un examen de la mesure sur le fondement des informations dont elle disposait.

8. Par lettre du 20 novembre 1997, la Commission a informé le gouvernement espagnol de l'ouverture de la procédure formelle prévue à l'article 88, paragraphe 2, CE . Par lettre du 22 février 1999, le gouvernement espagnol a présenté ses observations sur l'ouverture de cette procédure.

9. Le 26 juillet 2000, la Commission a adopté la décision attaquée dont le dispositif comporte notamment les dispositions suivantes:

«Article premier

L'aide financière accordée au titre de la convention de collaboration du 26 février 1997 à des personnes physiques assujetties à l'impôt sur les activités économiques ou à des petites et moyennes entreprises exerçant leurs activités dans des secteurs autres que celui du transport, à l'échelle exclusivement locale ou régionale, en vue de l'acquisition de véhicules utilitaires de catégorie D, conformément à la convention, ne constitue pas une aide au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité.

Article 2

Toutes les autres aides financières accordées au titre de la convention de collaboration du 26 février 1997 à des personnes physiques assujetties à l'impôt sur les activités économiques ou à des petites et moyennes entreprises sont incompatibles avec le marché commun.

[...]

Article 4

1. L'Espagne adopte toutes les mesures nécessaires pour procéder à la récupération, auprès de leurs bénéficiaires, des aides visées à l'article 2, mises à leur disposition de manière illégale.

[...]»

III - Procédure et conclusions des parties

10. Par requête inscrite au registre de la Cour le 10 novembre 2000, le royaume d'Espagne a introduit un recours en application de l'article 230 CE et a conclu à ce qu'il plaise à la Cour:

1. annuler la décision attaquée et

2. condamner la Commission aux dépens.

11. La Commission conclut à ce qu'il plaise à la Cour:

1. rejeter le recours et

2. condamner le royaume d'Espagne aux dépens.

12. Pour des raisons de plus grande clarté, l'argumentation des parties sera exposée séparément dans le cadre de l'appréciation juridique de chacun des moyens.

IV - Appréciation juridique

13. À l'appui de son recours, le royaume d'Espagne avance cinq moyens d'annulation:

- l'indétermination de la décision attaquée,

- l'absence de sélectivité de la mesure,

- l'absence de discrimination,

- l'absence d'une distorsion de concurrence, et

- la violation de l'article 87, paragraphe 3, sous c), CE (compatibilité d'aides destinées à faciliter le développement de certaines activités économiques).

14. La Commission a présenté deux exceptions d'irrecevabilité du premier moyen. Toutefois, ces exceptions ne concernent en réalité pas seulement ce moyen, mais la recevabilité du recours en tant que tel.

15. En effet, la Commission objecte d'une part qu'il est contraire au propre intérêt du royaume d'Espagne de contester la disposition qui lui est favorable de l'article 1er de la décision attaquée. En substance, elle met donc en cause l'intérêt à agir du royaume d'Espagne pour autant que le recours est dirigé contre une disposition qui ne lui fait pas grief. Si l'on suivait la thèse de la Commission, le gouvernement espagnol aurait dû exclure de sa conclusion en annulation l'article 1er de la décision attaquée.

16. D'autre part, la Commission estime que le royaume d'Espagne n'a pas d'intérêt actuel à attaquer la décision puisque jusqu'à maintenant il n'a pas tenté de l'exécuter, donc de récupérer les aides. Cette exception aussi porte sur le recours dans son ensemble.

17. Par cette argumentation, la Commission réagit au grief tiré de l'indétermination de la décision attaquée. Elle ne devient compréhensible que si l'on connaît les arguments du royaume d'Espagne sur ce moyen. C'est pourquoi nous n'examinerons les exceptions d'irrecevabilité qu'après avoir rappelé ci-dessous les développements des parties sur le premier moyen.

A - Sur la recevabilité du recours et sur le premier moyen: l'indétermination de la décision attaquée

1) Arguments des parties

a) Le royaume d'Espagne

18. D'après le gouvernement espagnol, la distinction des subventions - qui ne constituent pas des aides en vertu de l'article 1er de la décision attaquée - des autres subventions contestées est imprécise.

19. L'article 1er repose sur trois critères: l'activité du bénéficiaire limitée à l'échelle locale et régionale, son appartenance à un autre secteur que le transport commercial et l'acquisition d'un véhicule de catégorie D (pesant jusqu'à 3,5 tonnes). Or, pour les autorisations de transport, le droit espagnol ne distingue qu'entre les véhicules utilitaires légers (dont le poids maximal autorisé est compris entre 2 tonnes et 6 tonnes ou dont la capacité de charge est inférieure ou égale à 3,5 tonnes) et les véhicules utilitaires lourds. Depuis le 2 janvier 1998, toutes les autorisations locales et régionales accordées aux transporteurs non professionnels pour exploiter des véhicules utilitaires légers ont été automatiquement converties en autorisations nationales.

20. Le défaut de détermination prive la décision attaquée de son plein effet . L'absence de détermination du groupe de bénéficiaires visé par l'article 1er de la décision attaquée s'étend logiquement à l'article 2.

21. Le gouvernement espagnol explique en détail les règles nationales relatives à l'autorisation du transport commercial («transportes públicos»), c'est-à-dire le transport de personnes et de marchandises pour compte d'autrui, et le transport privé («transportes privados»), c'est-à-dire le transport pour compte propre effectué par des personnes privées et le transport assuré...

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