Salvatore Stallone v Office national de l'emploi (ONEM).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2001:320
Docket NumberC-212/00
Celex Number62000CC0212
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date07 June 2001
EUR-Lex - 62000C0212 - FR 62000C0212

Conclusions de l'avocat général Tizzano présentées le 7 juin 2001. - Salvatore Stallone contre Office national de l'emploi (ONEM). - Demande de décision préjudicielle: Tribunal du travail de Mons - Belgique. - Sécurité sociale des travailleurs migrants - Règlement (CEE) nº 1408/71 - Allocation de chômage - Condition de cohabitation pour les membres de la famille à charge. - Affaire C-212/00.

Recueil de jurisprudence 2001 page I-07625


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1. La législation d'un État membre qui subordonne l'octroi de l'allocation de chômage au taux avantageux de «chef de ménage» à la condition que l'intéressé cohabite avec d'autres membres de la famille, et donc sans tenir compte de ceux qui résident dans un autre État membre, est-elle compatible avec le droit communautaire? C'est là, en substance, la question préjudicielle qui nous est soumise au titre de l'article 234 CE par le Tribunal du travail de Mons, Belgique (ci-après, le «tribunal»), et qui concerne en particulier l'interprétation des articles 1er, sous f), et 68, paragraphe 2, du règlement (CEE) n_ 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté (JO L 149, p. 2; ci-après le «règlement n_ 1408/71»), tant dans la version en vigueur au 1er décembre 1990 que dans la version suivante, résultant des modifications et mises à jour apportées au règlement n_ 1408/71 par le règlement (CE) n_ 118/97 du Conseil du 2 décembre 1996 (JO L 28, p. 1; ci-après, le «règlement n_ 118/97»), entré en vigueur le 1er février 1997.

II - Le cadre juridique

A - Les dispositions communautaires pertinentes

2. La disposition pertinente en la matière est surtout l'article 1er, sous f), i) du règlement n_ 1408/71, tel que modifié par le règlement n_ 118/97. Elle est identique, en substance, à l'ancien article 1er, sous f), tel que modifié par l'article 1er, paragraphe 2, sous c), du règlement (CEE) n_ 1390/81 du Conseil, du 12 mai 1981, étendant aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille le règlement (CEE) n_ 1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté (JO L 143, p. 1; ci-après le «règlement n_1390/81»). Afin d'éviter toute confusion, nous précisons que, dans le présent contexte, les références que nous ferons à l'article 1er, sous f), c'est-à-dire à la numérotation d'origine de la disposition en cause, devront être entendues comme visant uniquement l'article 1er, sous f), i.

3. Conformément à cette disposition:

«Le terme "membre de la famille" désigne toute personne définie ou admise comme membre de la famille ou désignée comme membre du ménage par la législation au titre de laquelle les prestations sont servies ou, dans les cas visés à l'article 22, paragraphe 1, point a) et à l'article 31, par la législation de l'État membre sur le territoire duquel elle réside; toutefois, si ces législations ne considèrent comme membre de la famille ou du ménage qu'une personne vivant sous le toit du travailleur salarié ou non salarié, cette condition est réputée remplie lorsque la personne en cause est principalement à la charge de ce dernier.»

4. Quant à lui, l'article 3, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71, disposition qui n'a pas été modifiée, prévoit que:

« Les personnes qui résident sur le territoire de l'un des États membres et auxquelles les dispositions du présent règlement sont applicables sont soumises aux obligations et sont admises au bénéfice de la législation de tout État membre dans les mêmes conditions que les ressortissants de celui-ci, sous réserve de dispositions particulières contenues dans le présent règlement.»

5. Pour le calcul des prestations de chômage, l'article 68, paragraphe 2, du règlement n_ 1408/71, qui est également resté inchangé pendant la période pertinente, énonce que:

« L'institution compétente d'un État membre dont la législation prévoit que le montant des prestations varie avec le nombre des membres de la famille tient compte également des membres de la famille de l'intéressé qui résident sur le territoire d'un autre État membre, comme s'ils résidaient sur le territoire de l'État compétent. Cette disposition ne s'applique pas si, dans le pays de résidence des membres de la famille, une autre personne a droit à des prestations de chômage, pour autant que les membres de la famille soient pris en considération lors du calcul de ces prestations» (1).

6. Il convient enfin de rappeler encore, même uniquement par référence aux prestations familiales, l'article 74 du règlement n_ 1408/71, dans la version résultant du règlement n_ 118/97 (identique en substance à l'ancien article 74, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71, tel que modifié par le règlement n_1390/81), aux termes duquel:

«Le travailleur salarié ou non salarié en chômage qui bénéficie des prestations de chômage au titre de la législation d'un État membre a droit, pour les membres de sa famille qui résident sur le territoire d'un autre État membre, aux prestations familiales prévues par la législation du premier État, comme s'ils résidaient sur le territoire de celui-ci...» (2).

B - Les dispositions nationales

7. En vertu de l'article 66 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage ( Moniteur belge du 31 décembre 1991, p. 29 888; ci-après, l'«arrêté royal»), le bénéfice des allocations de chômage est accordé exclusivement aux chômeurs qui résident effectivement sur le territoire belge. En outre, pour ceux «ayant charge de famille», l'indemnité est accordée à un taux plus avantageux, dit «chef de ménage». A cet égard, l'article 110, paragraphe 1, de l'arrêté royal est rédigé comme suit (3):

«Par travailleur ayant charge de famille, il faut entendre le travailleur qui:

1_ cohabite avec un conjoint ne disposant ni de revenus professionnels, ni de revenus de remplacement; dans ce cas il n'est pas tenu compte de l'existence éventuelle de revenus d'autres personnes avec lesquelles le travailleur cohabite;

2_ ne cohabite pas avec un conjoint mais cohabite exclusivement avec:

a) un ou plusieurs enfants, à condition qu'il puisse prétendre pour au moins un de ceux-ci aux allocations familiales ou qu'aucun de ceux-ci ne dispose de revenus professionnels ou de revenus de remplacement;

b) un ou plusieurs enfants et d'autres parents ou alliés jusqu'au troisième degré inclus, à condition qu'il puisse prétendre aux allocations familiales pour au moins un de ces enfants et que les autres parents ou alliés ne disposent ni de revenus professionnels, ni de revenus de remplacement;

c) un ou plusieurs parents ou alliés jusqu'au troisième degré inclus qui ne disposent ni de revenus professionnels, ni de revenus de remplacement;

3_ habite seul et est redevable d'une pension alimentaire sur base soit d'une décision judiciaire, soit d'un acte notarié intervenu dans le cadre d'une procédure en divorce ou de séparation de corps par consentement mutuel».

8. En outre, l'article 114, paragraphe 3, de l'arrêté royal prévoit que:

«Le montant journalier de base de l'allocation de chômage est, pour le travailleur ayant charge de famille, majoré durant toute la durée du chômage, d'un complément pour perte d'un revenu unique, fixé à 5 p.c. de la rémunération journalière moyenne» (4).

9. Quant à la notion de «cohabitation», sur laquelle se fonde l'article 110 de l'arrêté royal, l'article 59 de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991 portant dispositions d'application de l'arrêté royal (Moniteur belge du 25 janvier 1992, p. 1593; ci-après, l'«arrêté ministériel») énonce:

«Par cohabitation, il y a lieu d'entendre le fait, pour deux ou plusieurs personnes, de vivre ensemble sous le même toit et de régler principalement en commun les questions ménagères.

Sont également censés cohabiter les membres du ménage qui:

1_ sont appelés sous les drapeaux ou accomplissent un service d'objecteur de conscience;

2_ sont emprisonnés, internés ou placés dans un établissement pour malades mentaux, pendant les douze premiers mois;

3_ ont temporairement une autre résidence pour des raisons professionnelles.»

III - Les faits et la question préjudicielle

10. M. Stallone, d'origine italienne, a été admis pour la première fois au bénéfice des allocations de chômage en Belgique le 20 février 1978, après y avoir travaillé du 16 mai 1977 au 19 février 1978. Il ressort du dossier de la présente affaire que, après avoir reçu ces allocation au taux prévu pour les personnes sans famille à charge entre 1991 et 1993, M. Stallone a saisi, le 20 septembre 1993, l'Office national de l'emploi (ci-après l'«ONEM»), d'une demande de paiement de ces allocations au taux «chef de ménage» en précisant que, bien que résidant en Italie, sa femme et ses enfants étaient restés à sa charge. L'ONEM, le défendeur dans l'affaire au principal, a rejeté cette demande en se fondant sur les dispositions nationales précitées, notamment sur l'article 110 de l'arrêté royal. M. Stallone a été avisé du rejet de sa demande le 1er décembre 1993 lorsqu'il s'est présenté auprès de l'organisme compétent pour le paiement.

11. Le 2 décembre 1993, M. Stallone a donc introduit contre la décision de refus le recours à l'origine de la présente affaire. En raison de l'apparente contradiction entre les dispositions du droit communautaire qui, pour le calcul du montant d'une prestation de chômage, interdisent une condition de résidence des membres de la famille sur le territoire de l'État membre compétent, et la législation belge sur le chômage qui subordonne en substance le bénéfice de cette indemnité au taux de «chef de ménage» à la résidence des membres de la famille de l'intéressé sur le territoire belge, la juridiction nationale a jugé opportun de poser à...

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