Anheuser-Busch Inc. v Budĕjovický Budvar, národní podnik.
Jurisdiction | European Union |
ECLI | ECLI:EU:C:2004:396 |
Date | 29 June 2004 |
Celex Number | 62002CC0245 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Procedure Type | Reference for a preliminary ruling |
Docket Number | C-245/02 |
M. ANTONIO TIZZANO
présentées le 29 juin 2004(1)
Anheuser-Busch Inc.
contre
Budějovický Budvar, národní podnik
[demande de décision préjudicielle formée par le Korkein oikeus (Finlande)]
«Accord ADPIC (TRIPs) – Article 16 – Protection de la marque – Protection du nom commercial – Usage d'un nom commercial en tant que marque»
1. La présente affaire est issue du courant finlandais de l’abondant contentieux qui s’est développé, dans divers pays, entre la brasserie tchèque Budějovický Budvar (2) (ci-après la «brasserie Budvar», ou simplement «Budvar») établie en Bohême, dans la ville de Ceské Budějovice (Budweis tchèque) (3) , (République tchèque), et la société américaine Anheuser-Busch, Inc. (4) (ci-après «Anheuser-Busch») concernant le droit d’utiliser les termes «Bud», «Budweiser» et similaires pour la commercialisation de leurs bières respectives. 2. À cette occasion, la Cour est appelée à préciser, pour l’essentiel, quel est le régime applicable à l’usage d’une marque enregistrée et d’une dénomination sociale susceptibles d’entrer en conflit, en particulier à la lumière de l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (5) (ci-après, selon sa version anglaise, l’«accord TRIPs»). I – Le cadre juridique A – Le droit international 3. L’article 8 de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle (6) (ci-après la «convention de Paris») prévoit que: «le nom commercial (7) sera protégé dans tous les pays de l’Union sans obligation de dépôt ou d’enregistrement, qu’il fasse ou non partie d’une marque de fabrique ou de commerce». 4. L’article 2 de l’accord TRIPs fait un renvoi au régime de plusieurs dispositions matérielles de la convention de Paris dont son article 8. Ce dernier a donc été incorporé dans le régime de l’Organisation mondiale du commerce (ci-après l’«OMC») (8) . 5. Parmi les dispositions matérielles de l’accord TRIPs qui nous intéressent ici, l’article 16, paragraphe 1, prévoit: «Le titulaire d’une marque de fabrique ou de commerce enregistrée aura le droit exclusif d’empêcher tous les tiers agissant sans son consentement de faire usage au cours d’opérations commerciales de signes identiques ou similaires pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque de fabrique ou de commerce est enregistrée dans les cas où un tel usage entraînerait un risque de confusion. En cas d’usage d’un signe identique pour des produits ou services identiques, un risque de confusion sera présumé exister. Les droits décrits ci-dessus ne porteront préjudice à aucun droit antérieur existant (9) et n’affecteront pas la possibilité qu’ont les Membres de subordonner l’existence des droits à l’usage.» 6. L’article 70 de l’accord TRIPs en fixe l’application dans le temps comme suit: «1. Le présent accord ne crée pas d’obligations pour ce qui est des actes qui ont été accomplis avant sa date d’application pour le Membre en question. 2. Sauf dispositions contraires du présent accord, celui-ci crée des obligations pour ce qui est de tous les objets existant à sa date d’application pour le Membre en question, et qui sont protégés dans ce Membre à cette date, ou qui satisfont ou viennent ultérieurement à satisfaire aux critères de protection définis dans le présent accord. […]» 7. L’accord TRIPs, tout comme l’accord OMC, auquel il est annexé, est entré en vigueur le 1er janvier 1995; toutefois, selon son article 65, paragraphe 1, les membres n’avaient pas l’obligation de l’appliquer avant l’expiration d’une période d’un an à partir de son entrée en vigueur. B – Le droit communautaire 8. La Communauté est intervenue pour réglementer la matière des marques commerciales en adoptant, pour ce qui nous intéresse ici, la directive 89/104/CEE (10) (ci-après la «directive 89/104» ou la «directive»), qui, «en harmonie complète avec […] la convention de Paris» (11) , effectue un rapprochement des législations des États membres pour certains aspects de la matière, sans toutefois procéder à une harmonisation complète. 9. Il convient de rappeler ici que, selon l’article 4, paragraphe 1, de la directive: «Une marque est refusée à l’enregistrement ou est susceptible d’être déclarée nulle si elle est enregistrée […] lorsqu’elle est identique à une marque antérieure.» 10. Selon le paragraphe 2 suivant de cet article: «[A]ux fins du paragraphe 1, on entend par ‘marques antérieures’ […] d) les marques qui, à la date de dépôt de la demande de marque, ou, le cas échéant, à la date de la priorité invoquée à l’appui de la demande de marque, sont ‘notoirement connues’ dans l’État membre au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris.» 11. L’article 4, paragraphe 4, sous b), prévoit que chaque État membre pourra décider que l’enregistrement d’une marque pourra être refusé ou, si elle est déjà enregistrée, est susceptible d’être déclaré nul lorsque «des droits à une marque non enregistrée ou un autre signe utilisé dans la vie des affaires ont été acquis avant la date de dépôt de la demande de marque postérieure ou, le cas échéant, avant la date de la priorité invoquée à l’appui de la demande de marque postérieure, et que cette marque non enregistrée ou cet autre signe donne à son titulaire le droit d’interdire l’utilisation d’une marque postérieure». 12. À son tour, pour ce qui nous intéresse, l’article 5, paragraphe 1, dispose que: «1. La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage, dans la vie des affaires: a) d’un signe identique à la marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée; b) d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association entre le signe et la marque». 13. On peut notamment interdire, conformément au paragraphe 3 de cet article, d’apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement. 14. Le paragraphe 5 précise que les paragraphes précédents «n’affectent pas les dispositions applicables dans un État membre et relatives à la protection contre l’usage qui est fait d’un signe à des fins autres que celle de distinguer les produits ou services, lorsque l’usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur porte préjudice». C – Le droit national 15. En vertu de l’article 2, paragraphe 1, de la toiminimilaki (12) (loi finlandaise relative aux noms commerciaux, ci-après la «toiminimilaki»), le droit exclusif d’utiliser un nom commercial s’acquiert par l’enregistrement de ce nom ou «sa consécration par l’usage», c’est-à-dire lorsque le nom commercial est connu de manière générale dans les milieux visés par l’activité de l’opérateur économique qui l’utilise. 16. L’article 3, paragraphe 2, de la toiminimilaki prévoit que le droit exclusif acquis en vertu de l’usage confère à son titulaire le pouvoir d’interdire à tout autre opérateur économique d’utiliser un nom commercial qui risque d’être confondu avec le sien. 17. Selon l’article 3, paragraphe 1, de la tavaramerkkilaki (13) (loi finlandaise relative aux marques, ci-après la «tavaramerkkilaki»), chaque personne peut utiliser, dans la vie des affaires son nom commercial comme signe distinctif pour ses marchandises si cette utilisation n’est pas propre à créer un risque de confusion avec une autre marque déjà protégée. 18. En vertu de l’article 4, paragraphe 1, de la tavaramerkkilaki, le titulaire d’un droit exclusif d’apposer un signe distinctif sur une marchandise peut interdire à quiconque d’utiliser, dans la vie des affaires, des mentions pouvant créer une confusion avec le signe protégé. Il existe un risque de confusion, selon l’article 6, paragraphe 1, de la même loi, uniquement si deux signes sont utilisés pour désigner des marchandises identiques ou similaires. 19. Lorsque plusieurs personnes revendiquent le droit exclusif d’apposer, sur leurs marchandises, des signes susceptibles d’être confondus, l’article 7 de la tavaramerkkilaki résout le conflit entre les deux droits en reconnaissant la priorité au signe antérieur, dans la mesure où le droit revendiqué n’a pas été perdu en raison, par exemple, du défaut d’usage par le titulaire. 20. De même l’article 6, paragraphe 1, de la toiminimilaki prévoit que, lorsqu’il s’agit de trancher un litige qui concerne des noms commerciaux susceptibles d’être confondus, la priorité doit être donnée à celui pour lequel on peut invoquer un fondement juridique antérieur. 21. Pour ce qui concerne le risque de confusion entre une marque et un nom commercial, l’article 14, paragraphe 1, point 6, de la tavaramerkkilaki prévoit que l’on ne saurait enregistrer une marque plus récente susceptible d’être confondue avec un nom commercial antérieur. 22. De la même façon, l’article 10, point 4, de la toiminimilaki dispose que l’on ne saurait faire figurer dans le nom commercial tout élément susceptible d’être confondu, notamment, avec la marque d’un autre opérateur économique. 23. Enfin, selon ce qui ressort de l’ordonnance de renvoi, la jurisprudence finlandaise a étendu la protection des noms commerciaux, en vertu de l’article 8 de la convention de Paris, également aux noms commerciaux enregistrés dans un autre État adhérent à la...
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