Willi Burstein v Freistaat Bayern.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1998:211
Date07 May 1998
Celex Number61997CC0127
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-127/97
EUR-Lex - 61997C0127 - FR 61997C0127

Conclusions de l'avocat général Saggio présentées le 7 mai 1998. - Willi Burstein contre Freistaat Bayern. - Demande de décision préjudicielle: Bayerisches Verwaltungsgericht Regensburg - Allemagne. - Article 100 A, paragraphe 4, du traité CE. - Affaire C-127/97.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-06005


Conclusions de l'avocat général

1 Le renvoi préjudiciel effectué par le Bayerisches Verwaltungsgericht Regensburg (Allemagne) a pour objet l'interprétation de plusieurs dispositions de la directive 91/173/CEE du Conseil, du 21 mars 1991, portant neuvième modification de la directive 76/769/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses (1) (ci-après la «directive»).

Certaines des questions posées par la juridiction de renvoi concernent en outre l'interprétation de l'article 100 A du traité et, notamment, du paragraphe 4 de cet article. Elles donnent ainsi à la Cour l'occasion de revenir, pour autant que cela s'avère nécessaire, sur le rapport délicat entre une mesure communautaire visant à la réalisation du marché intérieur et une réglementation nationale dérogatoire, un sujet qui fut déjà l'objet d'une précédente affaire (2), dans le cadre de laquelle a été précisément débattue la même réglementation allemande que celle en cause en l'espèce.

Le cadre juridique

2 Le 12 décembre 1989, la République fédérale d'Allemagne a adopté un règlement interdisant la fabrication, la mise sur le marché et l'emploi du pentachlorophénol (ci-après le «PCP»), de ses sels et de ses composés, des préparations contenant plus de 0,01 % de ladite substance, ainsi que des produits qui, à la suite de leur traitement au moyen de ces préparations, contiennent la substance en question dans une concentration dépassant 5 mg/kg (ppm) (3).

3 Le 21 mars 1991, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur la base de l'article 100 A du traité, a arrêté la directive qui a modifié la directive 76/769/CEE du Conseil, du 27 juillet 1976, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses (4) (ci-après la «directive de base»), en introduisant une réglementation relative au PCP.

En particulier, à l'annexe I de la directive de base, un nouveau point 23 a été ajouté, qui interdit la mise sur le marché de substances et de préparations contenant du PCP, ses sels et ses esters en concentration égale ou supérieure à 0,1 % masse. La même directive prévoit des dérogations spécifiques, en déclarant l'interdiction inapplicable aux substances et préparations destinées à être utilisées dans des installations industrielles pour le traitement des bois, pour l'imprégnation de textiles lourds et comme agents de synthèse et/ou de transformation dans des procédés industriels. Ces dérogations sont toutefois subordonnées, d'une part, au fait que les installations industrielles concernées ne permettent pas l'émission et/ou le rejet de PCP en quantité supérieure aux prescriptions de la législation existante et, d'autre part, s'agissant du traitement des bois, à la circonstance que les bois traités ne soient pas utilisés ensuite à l'intérieur d'immeubles ou pour la confection de conteneurs destinés à entrer en contact avec des matériels ayant une incidence sur la santé des personnes et/ou des animaux. Le délai de transposition de la directive était fixé au 1er juillet 1992. Les États membres étaient tenus de communiquer à la Commission, au plus tard le 31 décembre 1991, les dispositions de droit interne adoptées dans le champ d'application de la directive.

4 Le 2 août 1991, la République fédérale d'Allemagne a notifié à la Commission, en application de l'article 100 A, paragraphe 4, les dispositions nationales relatives au PCP qu'elle estimait nécessaire de continuer à appliquer.

La Commission n'a confirmé ces dispositions que le 2 décembre 1992 (5). A la suite d'un recours formé par la République française, la décision de confirmation de la Commission a été annulée par la Cour, par l'arrêt du 17 mai 1994 (6), pour violation de l'obligation de motivation posée à l'article 190 du traité.

Par lettre du 18 mai 1994, la République fédérale d'Allemagne a confirmé à la Commission sa volonté de continuer à appliquer le règlement allemand relatif au PCP (7), et la Commission, par décision du 14 septembre 1994, a confirmé les dispositions de ce règlement en application de l'article 100 A, paragraphe 4 (8).

Les faits à l'origine du litige au principal et les questions préjudicielles

5 Il ressort de l'ordonnance de renvoi que, le 17 décembre 1992, le Gewerbeaufsichtsamt Regensburg (inspection du travail de Ratisbonne) a enjoint à M. Burstein d'éliminer 120 000 caisses à munitions que celui-ci détenait sur son terrain en vue de les revendre, au motif qu'il s'était avéré que ces caisses avaient été traitées au moyen de PCP, et contenaient cette substance dans une concentration dépassant la valeur limite de 5 mg/kg prévue par la réglementation allemande de 1989.

M. Burstein a formé opposition contre cette mesure en contestant la compatibilité de celle-ci avec le droit communautaire et, notamment, avec la directive, qui prévoit des limites moins sévères. Toujours selon le demandeur au principal, la primauté du droit communautaire entraînerait, en l'espèce, l'inapplicabilité de la réglementation allemande relative au PCP et, partant, l'illégalité de l'injonction. La réglementation nationale ne pourrait en effet s'appliquer qu'à partir du 14 septembre 1994, date de la seconde confirmation par la Commission, la première (du mois de décembre 1992) ayant été annulée par la Cour de justice.

6 La juridiction de renvoi, paraissant nourrir quelques doutes sur la compatibilité de la réglementation nationale, a sursis à statuer et déféré à la Cour les quatre questions préjudicielles suivantes:

«1) La directive 91/173/CEE du Conseil, du 21 mars 1991, doit-elle être interprétée en ce sens que les États membres ne sont liés que par l'interdiction de l'admission du pentachlorophénol et de ses sels et esters en concentration égale ou supérieure à 0,1 % masse dans les substances et préparations mises sur le marché, mais qu'en revanche ils sont libres de fixer des valeurs limites autonomes pour les produits traités au pentachlorophénol?

2) En cas de réponse négative à la première question:

La directive susmentionnée interdit-elle d'appliquer une réglementation nationale plus sévère déjà en vigueur avant son adoption, jusqu'à ce que la Commission ait

pris une décision en application de l'article 100 A, paragraphe 4, du traité CE?

3) En cas de réponse affirmative à la deuxième question:

Cette réglementation nationale peut-elle alors s'appliquer à compter de la date à laquelle elle a été confirmée par la Commission, même si cette décision est attaquée ultérieurement devant la Cour de justice et déclarée nulle à la suite de ce recours?

Le fait que la décision de la Commission ne soit annulée que pour des raisons de forme et qu'elle soit adoptée à nouveau ultérieurement a-t-il une incidence à cet égard? Cette nouvelle décision a-t-elle un effet rétroactif?

4) En cas de réponse négative à la troisième question:

La directive susmentionnée est-elle directement applicable dans l'État membre concerné jusqu'à ce que la question de l'applicabilité de la réglementation nationale soit définitivement tranchée?»

7 Par les questions préjudicielles que nous venons de citer, la juridiction de renvoi souhaite, en substance, obtenir de la Cour principalement une interprétation qui précise le champ d'application de la directive (première question). En particulier, il est demandé à la Cour d'établir si la valeur limite fixée par la directive dans un but d'harmonisation n'est applicable qu'au PCP, à ses sels et à ses esters, en tant que substances et préparations au sens de la directive de base, ou bien si elle s'applique également aux produits traités au moyen de ces substances ou de ces préparations.

Si la Cour devait considérer que la directive n'est pas applicable aux produits traités au PCP, il s'ensuivrait que, s'agissant de ces produits, les autorités compétentes allemandes étaient libres de prévoir, en vue de la protection de l'environnement, une réglementation différente, voire plus sévère, puisqu'un tel choix relève du libre exercice du pouvoir normatif par le législateur national lorsqu'on se situe en dehors du cadre de l'harmonisation exigée par les mesures communautaires. En pareille hypothèse, il n'y aurait pas lieu de répondre aux autres questions, qui ont trait au régime dérogatoire dont s'est prévalu, sur le fondement de l'article 100 A, paragraphe 4, le législateur allemand, ou à l'effet direct des dispositions de la directive.

8 Si les produits traités au PCP devaient, au contraire, être également inclus dans le champ d'application de la directive, l'applicabilité en l'espèce des mesures nationales plus strictes serait admise dans les limites de la dérogation à la mesure d'harmonisation prévue par l'article 100 A, paragraphe 4, et la Cour serait alors de nouveau amenée à se prononcer sur les conditions et les effets de cet article (9), en répondant aux autres questions d'interprétation formulées par la juridiction de renvoi (deuxième, troisième et quatrième questions).

La première question préjudicielle

9 Pour répondre à la première question il faut, dès lors, définir le champ d'application ratione materiae de la directive. Plus précisément, la Cour est appelée à établir si la mesure d'harmonisation relative au PCP, à ses sels et à ses esters, selon laquelle ceux-ci «ne sont pas admis en concentration égale ou...

To continue reading

Request your trial
3 practice notes
  • Fendt Italiana Srl v Agenzia Dogane - Ufficio Dogane di Trento.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 19 Abril 2007
    ...ECR 649, paragraph 8;Case 301/82SA Clin-Midy[1984] ECR 251, paragraph 6; Case 187/84 Giacomo Caldana[1985] ECR 3013, paragraph 19; Case C‑127/97 Burstein [1998] ECR I-6005, paragraph 31. The need for Member States to conform to the general principles of the EC Treaty in matters not subject ......
  • Cindu Chemicals BV and Others (C-281/03) and Arch Timber Protection BV (C-282/03) v College voor de toelating van bestrijdingsmiddelen.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 17 Marzo 2005
    ...22), ainsi que les commentaires de l’avocat général Saggio dans ses conclusions rendues dans l’affaire Burstein (arrêt du 1er octobre 1998, C-127/97, Rec. p. I-6005, points 22, 23 et avant-dernier alinéa du point 31 de ces conclusions), qui se réfère en particulier à la directive sur les su......
  • Willi Burstein contra Freistaat Bayern.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 1 Octubre 1998
    ...- Reference for a preliminary ruling: Bayerisches Verwaltungsgericht Regensburg - Germany. - Article 100a(4) of the EC Treaty. - Case C-127/97. European Court reports 1998 Page I-06005 Summary Parties Grounds Decision on costs Operative part Keywords Approximation of laws - Restrictions on ......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT