Council of the European Union v Boehringer Ingelheim Vetmedica GmbH and C. H. Boehringer Sohn.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2001:511
CourtCourt of Justice (European Union)
Date04 October 2001
Docket NumberC-23/00
Procedure TypeRecurso de casación - inadmisible
Celex Number62000CC0023
EUR-Lex - 62000C0023 - FR 62000C0023

Conclusions de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 4 octobre 2001. - Conseil de l'Union européenne contre Boehringer Ingelheim Vetmedica GmbH et C. H. Boehringer Sohn. - Pourvoi - Recevabilité - Demande d'annulation partielle d'un arrêt du Tribunal en tant qu'il déclare qu'il n'est pas nécessaire de statuer sur une exception d'irrecevabilité opposée à un recours qu'il rejette comme non fondé. - Affaire C-23/00 P.

Recueil de jurisprudence 2002 page I-01873


Conclusions de l'avocat général

1. Le Conseil de l'Union européenne demande l'annulation partielle d'un arrêt du Tribunal de première instance parce celui-ci n'a pas examiné l'exception d'irrecevabilité qu'il avait soulevée dans une affaire dans laquelle deux entreprises sollicitaient l'annulation d'une directive et la réparation du dommage qui en résultait pour elles .

La directive n'a pas été annulée, car le Tribunal a rejeté le recours comme étant non fondé. Le Conseil a néanmoins engagé un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal, estimant que celui-ci a commis une erreur de droit fondamentale en violation de l'article 230, paragraphe 4, CE et qu'en ne se prononçant pas préalablement sur la recevabilité des parties requérantes à demander l'annulation d'une directive, il s'est écarté de sa propre jurisprudence.

Le requérant demande à la Cour d'annuler les points 143 et 146 de l'arrêt du Tribunal et de statuer sur l'exception d'irrecevabilité qu'il avait soulevée dans l'affaire T-125/96. En revanche, il ne sollicite pas la condamnation des défenderesses aux dépens.

I - L'arrêt du Tribunal de première instance

2. Le 29 avril 1996, le Conseil a adopté la directive 96/22/CE , dont l'article 2, sous b), prévoit que les États membres veilleront à interdire la commercialisation de substances ß-agonistes en vue de leur administration à des animaux destinés à la consommation humaine. Conformément à l'article 4, paragraphe 2, les États membres pourront autoriser l'administration, à des fins thérapeutiques, de médicaments vétérinaires autorisés contenant du trembolone allyle, par voie orale, ou des substances ß-agonistes à des équidés ou à des animaux de compagnie, pour autant qu'ils soient utilisés conformément aux spécifications du fabricant, et des substances ß-agonistes, sous forme d'injection, pour l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes.

3. Boehringer Ingelheim Vetmedica GmbH (ci-après «BI Vetmedica») est pratiquement la seule entreprise pharmaceutique de l'Union européenne à produire et à commercialiser des médicaments vétérinaires contenant une substance ß-agoniste, à savoir le clenbutérol, pour le traitement des affections respiratoires des animaux destinés à la commercialisation pour la consommation humaine. Elle réalise environ 97 % des ventes de médicaments vétérinaires tombant sous le coup de l'interdiction des ß-agonistes prévue par la directive 96/22.

L'adoption de cette directive signifiait qu'à partir du 1er juillet 1997, date à laquelle les États membres devaient l'avoir transposée dans leur législation interne, BI Vetmedica ne pouvait plus y commercialiser ses médicaments vétérinaires à base de clenbutérol pour des animaux destinés à la consommation humaine, à l'exception des fins thérapeutiques énoncées à l'article 4, paragraphe 2.

4. Le 9 août 1996, BI Vetmedica et C. H. Boehringer Sohn Ltd (ci-après «Boehringer»), qui est propriétaire à 100 % de la première et une des vingt sociétés pharmaceutiques les plus importantes au monde, ont engagé un recours visant à l'annulation partielle de la directive 96/22 et à la réparation du dommage qu'elles prétendaient avoir subi.

5. Par demande séparée, déposée au greffe le 31 octobre 1996, le Conseil a soulevé une exception d'irrecevabilité conformément à l'article 114 du règlement de procédure. Deux années plus tard, par ordonnance du 19 novembre 1998, le Tribunal a décidé de joindre l'exception au fond.

6. Le 8 juillet 1996, la Commission a adopté le règlement (CE) n° 1312/96 , fixant les limites maximales de résidus provisoires pour le clenbutérol dans les aliments d'origine animale, mais exclusivement aux fins thérapeutiques autorisées par la directive 96/22, à savoir, dans le cas des bovins, uniquement pour l'induction de la tocolyse chez les vaches parturientes et, dans le cas des équidés, pour l'induction de la tocolyse et le traitement des troubles respiratoires.

7. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 septembre 1996, les requérantes ont introduit un recours visant à l'annulation partielle du règlement n° 1312/96. Elles ont également soulevé une exception d'illégalité à l'encontre de la directive 96/22.

8. Les parties ont déclaré n'avoir aucune objection à ce que les deux affaires soient jointes aux fins de l'arrêt.

Étant donné que la demande en annulation partielle du règlement n° 1312/96, dans l'affaire T-152/96, avait pour fondement essentiel l'exception d'illégalité soulevée à l'encontre de la directive 96/22, dont l'annulation partielle constituait, en partie, l'objet du recours dans l'affaire T-125/96, et que les arguments invoqués par les requérantes pour contester la légalité de la directive étaient, en substance, identiques dans les deux affaires, le Tribunal a jugé opportun de se prononcer sur la question, commune aux deux affaires, de la légalité de la directive 96/22 avant d'examiner les autres moyens de recevabilité et de fond allégués à l'appui de chaque recours.

9. Afin d'établir l'illégalité de la directive 96/22, les requérantes avaient invoqué quatre moyens: le premier était déduit de la violation du principe de proportionnalité, le deuxième, de la violation des principes de la sécurité juridique et de la protection de la confiance légitime, le troisième, de la violation du principe de bonne administration et le quatrième, de la violation de l'article 43 du traité CE (devenu, après modification, article 37 CE), le Conseil ayant omis de consulter à nouveau le Parlement européen comme il était tenu de le faire puisque, considéré dans son ensemble, le contenu matériel du texte qu'il a finalement adopté était différent de celui du texte sur lequel l'assemblée avait déjà été consultée.

Le Tribunal a examiné les quatre moyens aux points 49 à 142 de l'arrêt et les a successivement rejetés. C'est la raison pour laquelle, au point 143, il a déclaré que la demande d'annulation de la directive 96/22 n'était pas fondée et a jugé superflu de se prononcer sur l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Conseil.

Estimant que la directive 96/22 n'enfreignait aucune des règles de droit invoquées par les requérantes à l'appui de leur demande en réparation, le Tribunal a rejeté celle-ci comme étant non fondée, au point 146 de l'arrêt entrepris, et il a ajouté qu'il était superflu de statuer sur l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Conseil.

10. Dans le dispositif de l'arrêt, le Tribunal a annulé le règlement n° 1312/96 de la Commission dans la mesure où il restreignait la validité des limites maximales de résidus qu'il fixait pour le clenbutérol à certaines indications thérapeutiques spécifiques pour les bovins et les équidés. Il a rejeté les recours pour le surplus.

II - Le pourvoi

11. Le Conseil reconnaît que l'arrêt entrepris lui est propice puisque le Tribunal y reprend les arguments que cette institution avait elle-même articulés dans l'affaire T-125/96 pour s'opposer à la demande d'annulation partielle de la directive 96/22 et à la demande en réparation ainsi que les arguments qu'elle avait invoqués en réponse à l'exception d'illégalité soulevée dans l'affaire T-152/96, qui visait à l'annulation partielle du règlement n° 1312/96. Le Conseil a néanmoins engagé un pourvoi parce qu'il considère qu'en n'examinant pas l'exception d'irrecevabilité qu'il avait soulevée contre les requérantes, le Tribunal a commis une erreur de droit.

Dans leurs mémoires en réponse respectifs, BI Vetmedica, Boehringer et la Fédération européenne de la santé animale (ci-après la «Fedesa»), qui avait été autorisée à intervenir en première instance à l'appui des conclusions des deux entreprises, ont soutenu que le pourvoi du Conseil était manifestement irrecevable, en particulier, parce qu'il ne remplissait pas les conditions imposées par l'article 49, deuxième alinéa, du statut CE de la Cour de justice puisque les prétentions de l'institution n'avaient pas été rejetées.

12. Le président de la Cour a autorisé le Conseil à présenter une réplique succincte limitée à ce point précis.

Aussi bien BI Vetmedica et Boehringer que la Fedesa ont présenté une duplique. Dans son mémoire en réponse, le gouvernement du Royaume-Uni, dont l'intervention en première instance visait à ce que l'action en réparation soit déclarée irrecevable comme le souhaitait le Conseil, s'est concentré sur ce seul même argument et n'a pas fait usage de son droit de réplique.

La Stichting Kwaliteitsgarantie Vleeskalversectoir (ci-après la «SKV») et la Commission, qui étaient intervenues en première instance à l'appui des conclusions du Conseil, ont présenté un mémoire en réponse et ont renoncé à la réplique.

13. Aucune des parties n'ayant introduit une demande indiquant les raisons pour lesquelles elle eût souhaité présenter des observations orales, la Cour a décidé, comme l'article 120 du règlement de procédure l'autorise à le faire, de statuer sans les convoquer en audience.

14. Avant d'analyser les questions de droit soulevées dans cette affaire, je vais tout d'abord examiner la recevabilité du pourvoi. Lorsque j'aborderai le fond, j'étudierai, dans l'ordre, les exceptions d'irrecevabilité soulevées en première instance dans le cadre du recours en annulation de la directive 96/22 et en réparation du préjudice. Je terminerai en me prononçant sur la recevabilité du recours en annulation.

A - Sur la recevabilité du pourvoi

15. BI Vetmedica et Boehringer soutiennent que le pourvoi du Conseil, qui était...

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