The Queen, on the application of Association of the British Pharmaceutical Industry v Medicines and Healthcare Products Regulatory Agency.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:75
Docket NumberC-62/09
Celex Number62009CC0062
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date11 February 2010

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO Jääskinen

présentées le 11 février 2010 (1)

Affaire C‑62/09

The Queen, à la demande de:

Association of the British Pharmaceutical Industry

contre

Medicines and Healthcare Products Regulatory Agency

[demande de décision préjudicielle formée par la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court) (Royaume-Uni)]

«Médicaments à usage humain – Directive 2001/83/CE – Article 94 – Incitations financières en faveur des cabinets médicaux prescrivant certains médicaments aux patients – Autorités de santé publique – Médecins – Liberté de prescription»





I – Introduction

1. Cette question préjudicielle concerne l’interprétation de l’article 94, paragraphe 1, de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (2). Cet article interdit la promotion de médicaments par l’intermédiaire de prime, d’avantage pécuniaire ou d’avantage en nature à des personnes habilitées pour les prescrire à moins que ceux-ci ne soient de valeur négligeable et n’aient trait à l’exercice de la médecine. Le renvoi préjudiciel porte sur des systèmes d’incitation à la prescription de médicaments qui ont été mis en place par les caisses de soins primaires (Primary Care Trusts, ci-après les «PCT») (3), et vise notamment à savoir si ces systèmes relèvent de l’article 94, paragraphe 1, de la directive 2001/83 et s’ils y sont contraires.

2. La procédure devant la juridiction de renvoi s’inscrit dans le contexte plus large de l’augmentation constante des charges sur le budget de l’État, laquelle résulte de l’introduction de nouveaux médicaments sur le marché pharmaceutique. Dans certains cas, ces nouveaux médicaments peuvent être extrêmement chers et provoquent une augmentation du coût du traitement par patient. Même pour les nouveaux médicaments dont les prix sont plus modérés, leur «valeur ajoutée» thérapeutique par rapport à d’autres produits plus anciens et beaucoup moins chers peut être très limitée ou nulle pour la majorité des patients. Néanmoins, on ne saurait nier que des médicaments plus efficaces peuvent réduire les dépenses totales en matière de santé publique.

3. Il convient, également, de rappeler que, même si le montant des dépenses directes pour les médicaments est relativement faible par rapport à l’ensemble des dépenses dans le secteur de la santé publique (4), il augmente en permanence. Par conséquent, il n’est pas étonnant que les autorités des États membres aient pris diverses mesures afin de ralentir son développement. L’arrêt A. Menarini Industrie Farmaceutiche Riunite e.a. (5) constitue l’exemple le plus récent de ces mesures qui font l’objet de procédures devant la Cour.

II – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union européenne (6)

4. L’article 95 CE constitue le fondement juridique des mesures communautaires pour le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives dans les États membres qui ont pour objet l’établissement et le fonctionnement du marché interne. Lorsque, sur le fondement de cet article, elle fait des propositions concernant, entre autres, la santé, la sauvegarde et la protection du consommateur, la Commission européenne doit prendre pour base un niveau de protection élevé.

5. L’article 152 CE dispose:

«1. Un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la mise en œuvre de toutes les politiques et actions de la Communauté.

L’action de la Communauté, qui complète les politiques nationales, porte sur l’amélioration de la santé publique et la prévention des maladies et des affections humaines et des causes de danger pour la santé humaine. Cette action comprend également la lutte contre les grands fléaux, en favorisant la recherche sur leurs causes, leur transmission et leur prévention ainsi que l’information et l’éducation en matière de santé.

[…]

5. L’action de la Communauté dans le domaine de la santé publique respecte pleinement les responsabilités des États membres en matière d’organisation et de fourniture de services de santé et de soins médicaux […]»

La directive 2001/83

6. Conformément au premier considérant du préambule de la directive 2001/83, cette directive a codifié et réuni en un seul texte les directives sur le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives, relatives aux médicaments à usage humain, parmi lesquelles figure la directive 92/28/CEE du Conseil, du 31 mars 1992, concernant la publicité faite à l’égard des médicaments à usage humain (7).

7. Les deuxième, quarante-septième et cinquantième considérants du préambule de la directive 2001/83 indiquent que:

«(2) Toute réglementation en matière de production, de distribution ou d’utilisation des médicaments doit avoir comme objectif essentiel la sauvegarde de la santé publique.

[…]

(47) La publicité des médicaments auprès des personnes habilitées à les prescrire ou à les délivrer contribue à l’information de ces personnes. Il convient cependant de la soumettre à des conditions strictes et à un contrôle effectif, en s’inspirant notamment des travaux réalisés dans le cadre du Conseil de l’Europe.

[…]

(50) Les personnes habilitées à prescrire des médicaments doivent être à même d’exercer ces tâches en toute objectivité, sans être influencées par des incitations financières directes ou indirectes.»

8. L’article 4, paragraphe 3, de la directive 2001/83 prévoit que:

«Les dispositions de la présente directive n’affectent pas les compétences des autorités des États membres, ni en matière de fixation des prix des médicaments ni en ce qui concerne leur inclusion dans le champ d’application des systèmes nationaux d’assurance maladie, sur la base de conditions sanitaires, économiques et sociales.»

9. Le titre VIII, intitulé «Publicité», comprenait à l’origine les articles 86 à 100 de la directive 2001/83, lesquels sont relatifs à la publicité et à l’information, d’une part, du public en général et, d’autre part, des personnes habilitées à prescrire les médicaments.

10. L’article 86, paragraphe 1, du titre VIII de la directive 2001/83 (8) est libellé comme suit:

«Aux fins du présent titre, on entend par ‘publicité pour des médicaments’ toute forme de démarchage d’information, de prospection ou d’incitation qui vise à promouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation de médicaments; elle comprend en particulier:

– la publicité pour les médicaments auprès du public,

– la publicité pour les médicaments auprès des personnes habilitées à les prescrire ou à les délivrer,

[…]

– les incitations à prescrire ou à délivrer des médicaments par l’octroi, l’offre ou la promesse d’avantages, pécuniaires ou en nature, sauf lorsque leur valeur intrinsèque est minime,

[…]»

11. Un nouveau titre VIII bis, intitulé «Information et publicité», a été inséré dans la directive 2001/83 par la directive 2004/27/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004 (9), afin de préciser le champ d’application de la directive 2001/83 et les définitions qu’elle recouvre. Le nouveau titre VIII bis est composé des articles 88 bis à 100. Il commence avec le nouvel article 88 bis, qui traite de la future stratégie d’information de la Commission destinée à assurer une information de qualité, objective, fiable et non publicitaire concernant les médicaments.

12. L’article 94, paragraphe 1, compris à présent dans le titre VIII bis de la directive 2001/83 (10), prévoit:

«Dans le cadre de la promotion des médicaments auprès des personnes habilitées à les prescrire ou à les délivrer, il est interdit d’octroyer, d’offrir ou de promettre à ces personnes une prime, un avantage pécuniaire ou un avantage en nature à moins que ceux-ci ne soient de valeur négligeable et n’aient trait à l’exercice de la médecine ou de la pharmacie.»

La directive 89/105/CE

13. La directive 89/105/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d’application des systèmes d’assurance-maladie (11), fixe le cadre procédural dans lequel les mesures nationales contrôlent les prix des médicaments à usage humain ou restreignent l’éventail des médicaments couverts par les systèmes nationaux d’assurance maladie.

III – Le cadre factuel

14. L’Association of the British Pharmaceutical Industry (ci-après l’«ABPI») est une organisation professionnelle représentant des sociétés pharmaceutiques nationales et internationales exerçant des activités au Royaume-Uni. Elle a introduit une action devant la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division (Administrative Court), à l’encontre de la Medicines and Healthcare Products Regulatory Agency (ci-après la «MHRA»), qui est une agence exécutive du Department of Health, dont les fonctions comprennent le fait d’assurer le respect du droit national et européen en matière de publicité et de promotion des médicaments.

15. En Angleterre et au pays de Galles, le Secretary of State for Health est responsable de la fourniture d’un service de santé complet. En Angleterre, les services médicaux sont financés localement par les PCT et, au pays de Galles, par les conseils locaux de santé (Local Health Boards). Un cabinet de médecins généralistes est un groupe de médecins généralistes ou de médecins individuels engagés par une PCT afin de dispenser des services médicaux.

16. Les médecins généralistes et les autres professionnels de santé sont spécifiquement habilités à rédiger des ordonnances et, lorsqu’ils font des prescriptions financées par le NHS, ils doivent satisfaire aux règles du NHS et au contrôle desdites prescriptions. Ils doivent, également, se conformer aux codes de conduite professionnelle édictés par le General Medical Council, qui est un organisme qui répertorie les médecins...

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