European Commission v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:528
CourtCourt of Justice (European Union)
Date16 September 2010
Docket NumberC-306/08
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62008CC0306

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO Jääskinen

présentées le 16 septembre 2010 (1)

Affaire C‑306/08

Commission européenne

contre

Royaume d’Espagne

«Recours en manquement – Directive 93/37/CEEDirective 2004/18/CE –Marchés publics de travaux – Marchés publics de services – Concession de service public – Concession de travaux publics – Aménagement du territoire – Lois d’urbanisme et d’aménagement urbain dans la région de Valence»





1. La Commission européenne a engagé le présent recours en manquement afin que la Cour constate qu’en attribuant des «programmes d’action intégrée» (ci-après les «PAI»), en application, successivement, de la LRAU (2) puis de la LUV (3), le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des directives 93/37/CEE (4) et 2004/18/CE (5) sur la passation des marchés publics.

2. Cette action permet à la Cour d’examiner, une fois encore, le traitement des mesures d’aménagement du territoire dans le cadre des règles qui régissent la passation des marchés publics et de préciser la signification des expressions «à titre onéreux» et «concessions» qui figurent dans les directives sur les marchés publics en question.

3. Le présent recours en manquement trouve son origine dans les nombreuses pétitions adressées au Parlement européen déplorant divers aspects de la LRAU, notamment la situation géographique des projets d’aménagement et leur impact sur l’environnement, l’expropriation de propriétaires terriens sans compensation équitable et l’obligation qui leur était faite de payer pour des travaux d’infrastructure qu’ils ne souhaitaient pas ou dont ils n’avaient pas besoin (6). La Commission a étudié les différents griefs et conclu que le seul point sur lequel elle pouvait engager des poursuites était celui du marché public soit parce qu’elle n’était pas compétente (7), soit parce que les bases juridiques du dossier n’étaient pas suffisantes (8). Les principaux griefs des pétitionnaires étant déduits de sujets autres que le respect des règles sur les marchés publics (9), le recours de la Commission, quelle que soit son issue, leur sera de peu de secours.

I – Cadre juridique

A – Le droit communautaire (10)

1. Directive 93/37

4. La directive 93/37 s’applique aux marchés publics de travaux et aux concessions de travaux publics.

5. Les marchés publics de travaux sont définis comme étant des «contrats à titre onéreux, conclus par écrit entre, d’une part, un entrepreneur et, d’autre part, un pouvoir adjudicateur […] et ayant pour objet soit l’exécution, soit conjointement l’exécution et la conception des travaux relatifs à une des activités visées à l’annexe II ou d’un ouvrage […], soit la réalisation, par quelque moyen que ce soit, d’un ouvrage répondant aux besoins précisés par le pouvoir adjudicateur» (11).

6. Les concessions de travaux publics sont définies comme étant des «contrat(s) présentant les mêmes caractéristiques que ceux visés au point a), à l’exception du fait que la contrepartie des travaux consiste soit uniquement dans le droit d’exploiter l’ouvrage, soit dans ce droit assorti d’un prix» (12).

7. L’article 6, paragraphe 6, énonce une interdiction générale de discrimination.

8. L’article 11 exige que les avis de marché public soient publiés in extenso au Journal officiel des Communautés européennes ainsi que dans la banque de données TED.

9. L’article 12 précise les délais de réception des offres et prévoit, dans le cas des procédures ouvertes, que les offres doivent être déposées dans un délai de 52 jours à compter de la publication de l’avis.

10. Le chapitre II du titre IV, qui contient les articles 24 à 29 inclus, concerne les critères qualitatifs de sélection. L’article 24 énumère les situations dans lesquelles un entrepreneur peut être exclu de la procédure d’adjudication. C’est le cas notamment des entrepreneurs en faillite ou des entrepreneurs qui ont été condamnés pour un délit affectant leur moralité professionnelle. Les articles 25 à 28 inclus énumèrent les preuves qui peuvent être exigées d’un entrepreneur concernant son inscription au registre professionnel, sa situation financière et économique ainsi que ses capacités techniques. L’article 29 précise la situation des États membres qui ont des listes officielles d’entrepreneurs agréés.

2. Directive 2004/18

11. La directive 2004/18 opère une refonte de la directive 93/37, notamment, et couvre désormais tous les marchés publics, qui sont définis comme étant des «contrats à titre onéreux conclus par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l’exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services au sens de la présente directive» (13).

12. Les marchés publics de travaux sont en outre définis comme étant des «marchés publics ayant pour objet soit l’exécution, soit conjointement la conception et l’exécution de travaux relatifs à une des activités mentionnées à l’annexe I ou d’un ouvrage, soit la réalisation, par quelque moyen que ce soit, d’un ouvrage répondant aux besoins précisés par le pouvoir adjudicateur» (14).

13. Les marchés publics de services sont en outre définis comme étant des «marchés publics autres que les marchés publics de travaux ou de fournitures portant sur la prestation de services visés à l’annexe II» (15).

14. La concession de travaux publics est, à son tour, définie comme étant un «contrat présentant les mêmes caractéristiques qu’un marché public de travaux, à l’exception du fait que la contrepartie des travaux consiste soit uniquement dans le droit d’exploiter l’ouvrage, soit dans ce droit assorti d’un prix» (16).

15. La concession de services est définie, quant à elle, comme étant un «contrat présentant les mêmes caractéristiques qu’un marché public de services, à l’exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d’exploiter le service, soit dans ce droit assorti d’un prix» (17). La concession de services est exclue du champ d’application de la directive (18).

16. La directive 2004/18 ne s’applique pas aux marchés publics de services ayant pour objet l’acquisition ou la location, quelles qu’en soient les modalités financières, de terrains, de bâtiments existants ou d’autres biens immeubles ou qui concernent des droits sur ces biens (19).

17. L’article 2 dispose que, lorsqu’ils adjugent des marchés, les pouvoirs adjudicateurs traitent les opérateurs économiques sur un pied d’égalité, de manière non discriminatoire et agissent avec transparence.

18. L’article 6 traite de la confidentialité qui doit entourer les secrets techniques et commerciaux ainsi que des autres aspects confidentiels des offres soumises aux pouvoirs adjudicateurs, auxquels il est fait interdiction de divulguer les renseignements que les opérateurs économiques leur communiquent à titre confidentiel.

19. L’article 24 dispose que les pouvoirs adjudicateurs indiquent dans l’avis de marché s’ils autorisent ou non les variantes et que, lorsqu’ils les autorisent, ils mentionnent dans le cahier des charges les exigences minimales que les variantes doivent respecter ainsi que les modalités de leur soumission. Ils ne prennent en considération que les variantes répondant aux exigences minimales qu’ils ont requises.

20. L’article 30 concerne les cas justifiant le recours à la procédure négociée avec publication préalable d’un avis de marché. Il esquisse la manière dont ces procédures négociées doivent être menées.

21. L’article 31, paragraphe 4, sous a), régit les cas justifiant le recours à la procédure négociée sans publication d’un avis de marché et, plus particulièrement, les cas dans lesquels des travaux ou des services complémentaires ne figurant pas dans le projet initialement envisagé sont devenus nécessaires à l’exécution de l’ouvrage ou du service tel qu’il y est décrit.

22. L’article 48, paragraphe 2, dresse la liste des preuves qui peuvent être fournies en vue d’établir les capacités techniques des opérateurs économiques.

23. L’article 53 dispose que les critères sur lesquels les pouvoirs publics se fondent pour attribuer les marchés publics sont soit le critère de l’offre économiquement la plus avantageuse du point de vue du pouvoir adjudicateur (lequel critère peut comprendre divers critères liés à l’objet du marché public en question, comme, par exemple, la qualité, le prix, la valeur technique, le caractère esthétique et fonctionnel, les caractéristiques environnementales et la rentabilité, notamment), soit le critère du prix le plus bas. Il fait également obligation au pouvoir adjudicateur de préciser, si possible, la pondération relative qu’il confère à chacun des critères choisis pour déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse ou l’ordre décroissant d’importance des critères.

B – Le droit national

1. La législation nationale

24. En Espagne, les marchés publics relèvent de la compétence législative de l’État. Cette compétence s’étend également aux opérations d’expropriation et au droit de propriété. D’autre part, l’aménagement du territoire et l’occupation du sol relèvent du pouvoir législatif régional dans les limites prévues par la Constitution et la loi de l’État (20). La LRAU et la LUV ont été adoptées sur la base des compétences régionales en matière d’urbanisme, d’occupation du sol et d’aménagement du territoire.

25. La Constitution espagnole reconnaît le droit à la propriété privée ainsi que le droit d’héritage, mais elle précise néanmoins que leur contenu est limité par leur fonction sociale conformément aux lois (21). La Constitution dispose ainsi que tous les Espagnols ont le droit de disposer d’une demeure digne et appropriée, que les pouvoirs publics créent les conditions nécessaires et établissent les normes pertinentes pour rendre ce droit effectif en réglementant l’utilisation du sol conformément à l’intérêt général pour empêcher la spéculation. Elle ajoute...

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