Dyson Ltd v Registrar of Trade Marks.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:558
Docket NumberC-321/03
Celex Number62003CC0321
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date14 September 2006

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PHILIPPE LÉger

présentées le 14 septembre 2006 (1)

Affaire C‑321/03

Dyson Ltd

contre

Registrar of Trade Marks

[demande de décision préjudicielle formée par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume‑Uni)]

«Marque – Première directive 89/104/CEE – Article 2 – Signe susceptible de constituer une marque – Article 3, paragraphe 1, sous e), deuxième tiret – Motif absolu de refus d’enregistrement – Caractéristique fonctionnelle d’un produit – Exclusion»





1. Une caractéristique fonctionnelle apparente d’un produit peut-elle constituer une marque au sens de la première directive 89/104/CEE du Conseil (2) et, dans l’affirmative, à quelles conditions?

2. Telles sont, en substance, les questions posées par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume‑Uni), dans le cadre d’un litige opposant la société Dyson Ltd (ci-après «Dyson» ou la «partie demanderesse») au Registrar of Trade Marks au sujet de l’enregistrement comme marque du bac de collecte de poussières transparent intégré aux modèles d’aspirateurs Dyson.

I – Le cadre juridique

A – La réglementation internationale

3. L’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ci-après l’«accord ADPIC»), constituant l’annexe 1C de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce, du 15 avril 1994, a été approuvé au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, par la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994 (3).

4. L’article 7 de l’accord ADPIC dispose:

«La protection et le respect des droits de propriété intellectuelle devraient contribuer à la promotion de l’innovation technologique et au transfert et à la diffusion de la technologie, à l’avantage mutuel de ceux qui génèrent et de ceux qui utilisent des connaissances techniques et d’une manière propice au bien-être social et économique, et à assurer un équilibre de droits et d’obligations.»

B – La réglementation communautaire

5. La directive a été adoptée par le Conseil afin d’abolir les disparités entre les législations des États membres qui étaient susceptibles d’entraver la libre circulation des produits ainsi que la libre prestation des services et de fausser les conditions de concurrence dans le marché commun (4). Elle limite le rapprochement aux dispositions nationales qui ont l’incidence la plus directe sur le fonctionnement du marché intérieur (5). Parmi ces dispositions figurent celles qui définissent les conditions auxquelles est subordonné l’enregistrement d’une marque (6) et celles qui déterminent la protection dont jouissent les marques régulièrement enregistrées (7).

6. L’article 2 de la directive définit les signes susceptibles de constituer une marque de la manière suivante:

«Peuvent constituer des marques tous les signes susceptibles d’une représentation graphique, notamment les mots, y compris les noms de personnes, les dessins, les lettres, les chiffres, la forme du produit ou de son conditionnement, à condition que de tels signes soient propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises.»

7. L’article 3 de la directive énumère les motifs de refus ou de nullité qui peuvent être opposés à l’enregistrement d’une marque. Ledit article 3, paragraphe 1, prévoit:

«Sont refusés à l’enregistrement ou susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés:

a) les signes qui ne peuvent constituer une marque;

b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif;

c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci;

d) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce;

e) les signes constitués exclusivement:

– par la forme imposée par la nature même du produit,

– par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique,

– par la forme qui donne une valeur substantielle au produit;

[…]»

8. L’article 3, paragraphe 3, de la directive prévoit qu’une marque n’est pas refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, n’est pas susceptible d’être déclarée nulle en application du paragraphe 1, sous b), c) ou d) de la même disposition si, avant la date de la demande d’enregistrement et après l’usage qui en a été fait, elle a acquis un caractère distinctif.

9. L’article 5 de la directive détermine ensuite les droits que confère l’enregistrement de la marque à son titulaire. Le paragraphe 1 de cette disposition est libellé comme suit:

«La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage, dans la vie des affaires:

a) d’un signe identique à la marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée;

b) d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d’association entre le signe et la marque.»

C – La législation nationale

10. La loi sur les marques (Trade Marks Act) de 1994 (ci-après la «loi de 1994»), qui a transposé la directive en droit anglais, définit, à sa section 1, paragraphe 1, la notion de marque comme étant «tout signe susceptible de représentation graphique et propre à distinguer les produits et services d’une entreprise de ceux des autres entreprises». Aux termes de cette même disposition, «une marque peut en particulier consister en mots, y compris noms de personnes, dessins, lettres, chiffres, ou en la forme du produit ou de son conditionnement».

11. Les motifs de refus d’enregistrement d’une marque figurent à la section 3 de la loi de 1994. Cette disposition est rédigée de la manière suivante:

«1. Sont refusés à l’enregistrement:

a) les signes qui ne remplissent pas les conditions énumérées [à] la section 1, paragraphe 1;

b) les marques qui sont dépourvues de tout caractère distinctif;

c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation de service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci;

d) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce;

Une marque n’est pas refusée à l’enregistrement en application [de ce qui est visé sous] b), c) ou d) si, avant la date de la demande d’enregistrement et après l’usage qui en a été fait, elle a acquis un caractère distinctif.

[…]»

II – Les faits et la procédure au principal

12. Depuis 1993, Dyson fabrique et commercialise l’aspirateur Dual Cyclone, un aspirateur sans sac dans lequel est intégré un bac de collecte de poussières et de saletés transparent.

13. Le 10 décembre 1996, la société Notetry Ltd (8) a présenté une demande d’enregistrement en application de la loi de 1994. Cette demande était formalisée dans le bordereau de dépôt par les représentations et les descriptions suivantes:

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«La marque consiste en un réceptacle ou compartiment de collecte transparent faisant partie de la surface externe d’un aspirateur, tel que représenté sur le dessin.»

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«La marque consiste en un réceptacle ou compartiment de collecte transparent faisant partie de la surface externe d’un aspirateur, tel que représenté sur le dessin.»

14. La demande d’enregistrement a été présentée pour des produits relevant de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice (9) et correspondant à la description suivante:

«Appareils pour nettoyer, polir et shampouiner sols et tapis; aspirateurs; shampouineurs pour tapis; polisseurs de sols; pièces et parties constitutives de tous les produits précités.»

15. Par décision du 23 juillet 2002, l’examinateur (Registrar of Trade Marks) a rejeté cette demande au motif que le signe en cause était dépourvu de caractère distinctif au sens de la section 3, paragraphe 1, sous b), de la loi de 1994. Il a également indiqué que le compartiment de collecte transparent servait finalement à désigner l’espèce et la destination du produit en cause, ce qui constituait, aux termes de la section 3, paragraphe 1, sous c), de ladite loi, un motif absolu de refus d’enregistrement.

16. Dyson a formé un recours à l’encontre de cette décision devant la High Court of Justice le 16 août 2002.

III – Les questions préjudicielles

17. Dans sa décision de renvoi (10), la High Court of Justice considère, tout d’abord, que les marques dont l’enregistrement est demandé sont dépourvues de caractère distinctif au sens de la section 3, paragraphe 1, premier alinéa, sous b), de la loi de 1994 (11).

18. Elle note également que ces marques présentent un caractère descriptif des caractéristiques des produits en cause au sens de la section 3, paragraphe 1, premier alinéa, sous c), de ladite loi (12) et ne permettent pas aux consommateurs d’identifier l’origine commerciale du produit.

19. La High Court of Justice souligne, en outre, que la demande d’enregistrement en cause pourrait être refusée en raison du monopole que conférerait l’enregistrement de la marque dans l’utilisation d’un matériau qui devrait, selon elle, rester à la libre disposition des fabricants d’aspirateurs sans sac.

20. Ensuite, la juridiction de renvoi (13) s’interroge sur le...

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