French Republic v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1996:195
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-241/94
Date07 May 1996
Celex Number61994CC0241
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado
61994C0241

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. F. G. JACOBS

présentées le 7 mai 1996 ( *1 )

1.

La République française tente d'obtenir dans la présente affaire l'annulation d'une décision dans laquelle la Commission estime que certaines interventions de l'État dans des coûts liés à des licenciements et à une reconversion résultant d'une restructuration constituent des aides d'État, bien qu'elles aient vocation à bénéficier de la dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 3, sous c), du traité CE. La République française soutient que la Commission a commis une erreur de droit en considérant que, pour établir l'existence d'une aide, il suffit que les conventions, comme celles en vertu desquelles l'aide alléguée a été accordée, aient été négociées avec les entreprises concernées et que les coûts qui y sont liés puissent varier. De façon plus générale, la République française fait valoir que les mesures en cause, dont elle soutient qu'elles sont applicables quels que soient la nature juridique, la taille, la localisation et le secteur d'activité des entreprises concernées, sont des mesures générales qui ne favorisent pas certaines entreprises ou certaines productions et qui bénéficient exclusivement aux salariés touchés par les restructurations économiques.

2.

La République française allègue à titre subsidiaire que la Commission a modifié sa position à l'égard de mesures telles que celles en cause et que son attitude actuelle aurait des conséquences défavorables sur la politique de l'emploi.

Les dispositions du traité

3.

L'article 92, paragraphe 1, du traité dispose que:

« Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre les États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. »

4.

L'article 92, paragraphe 3, énonce un certain nombre de types d'aides qui peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun, incluant

« c)

les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun... ».

5.

L'article 93, paragraphe 3, dispose que:

« La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides... ».

La législation nationale

6.

Le code du travail français exige qu'un employeur verse des indemnités de licenciement et mette en œuvre des arrangements minimaux en vue de faciliter le réembauchage des salariés lorsque ceux-ci sont licenciés pour des raisons économiques, telles qu'elles sont définies ( 1 ).

7.

Lorsqu'une entreprise occupant au moins 50 salariés se propose d'en licencier au moins 10 dans une même période de 30 jours, la loi prévoit une obligation supplémentaire, à savoir l'établissement d'un plan social ( 2 ). Le plan doit être adressé aux autorités administratives qui peuvent faire toute suggestion pour le compléter ou le modifier en tenant compte de la situation financière de l'entreprise. Le plan doit tenter d'éviter ou de réduire les licenciements et prévoir des mesures allant plus loin que les arrangements minimaux visés ci-dessus, en vue de faciliter le réembauchage de certains salariés dont le licenciement ne peut pas être évité. La loi n'impose pas que certaines mesures particulières soient incluses dans le plan social, bien qu'elle donne comme exemples de mesurespossibles ( 3 ) les actions de reclassement interne ou externe, les actions de formation, la création d'activités nouvelles et les mesures de réduction ou d'aménagement de la durée du travail.

8.

Parmi les mesures pouvant être incluses dans le plan social figurent certains types de conventions qui, en vertu d'un accord entre l'entreprise et le Fonds national de l'emploi (ci-après le « FNE »), qui est un organe public, peuvent être financées par l'État dans des limites déterminées. D'après le gouvernement français, les principaux types de conventions du FNE pouvant être incluses dans un plan social se répartissent en trois grandes catégories.

9.

Il existe tout d'abord des conventions destinées à promouvoir des alternatives aux licenciements, incluant des conventions de chômage partiel et de travail à mi-temps en vertu desquelles l'État verse une partie de l'indemnité due au salarié qui est mis en chômage partiel ou qui passe à un emploi à mi-temps.

10.

Il existe en deuxième lieu des conventions qui tentent d'améliorer les chances des salariés de trouver un nouvel emploi. Elles comprennent les conventions de cellule de reclassement, dont le but est de mettre en place des structures aidant les salariés à la recherche d'un emploi, et qui sont principalement financées par les entreprises avec des interventions de l'État; dans le cadre des conventions de congés de conversion, les salariés obtiennent un congé de conversion, rémunéré en partie, l'État contribuant à l'allocation légale du salarié pendant le congé; les conventions d'allocation temporaire prévoient que l'État contribue au paiement de la différence de salaire de la personne qui accepte un nouvel emploi assorti d'une rémunération inférieure; enfin, en vertu des conventions de reclassement, l'État intervient dans le paiement de certains frais encourus par les salariés qui trouvent un emploi dans une autre région.

11.

Viennent en troisième lieu les conventions permettant aux salariés âgés de prendre immédiatement ou progressivement une retraite anticipée. Elles comprennent les conventions d'allocation spéciale du FNE, dans lesquelles l'État contribue à une allocation spéciale versée aux salariés qui s'approchent de la retraite jusqu'à ce qu'ils bénéficient d'une retraite au taux plein, et les conventions de préretraite progressive, en vertu desquelles l'État contribue à une allocation qui est versée jusqu'à la retraite aux salariés passant à un emploi à mi-temps.

12.

Le code du travail, complété par de la législation secondaire et des circulaires administratives, détermine la base de calcul des interventions du FNE dans chaque type de convention et limite le montant ou la durée des interventions dans chaque cas; tant la base de calcul que l'intervention maximale s'appliquent à toutes les entreprises dans tous les secteurs, sous réserve d'exceptions pour certaines régions rencontrant des difficultés économiques particulières, exceptions qui, d'après le gouvernement français, représentent une proportion insignifiante de l'ensemble des interventions du FNE.

13.

Le mode de calcul de l'intervention accordée dans chaque convention comprend un certain nombre de variables reflétant les objectifs sociaux du FNE, par exemple la taille ou la localisation (selon que l'entreprise se trouve ou non dans une zone désignée) de l'entreprise. Dans certains cas, principalement dans la première et la troisième catégorie de conventions visées ci-dessus, la qualité du plan social est prise en compte en tant que facteur de négociation, et l'intervention de l'État prend en considération les mesures adoptées par l'entreprise dans le cadre du plan pour améliorer la situation des salariés menacés de licenciement.

14.

Les facteurs pris en compte pour apprécier l'effort de l'entreprise ainsi que le type et le niveau de l'intervention comprennent, selon le gouvernement français, la taille de l'entreprise, le périmètre d'activité, la situation économique et financière de l'entité concernée et l'éventuel groupe auquel elle appartient, l'abandon ou le maintien par l'entreprise des activités dans lesquelles les travailleurs concernés opèrent et la fermeture complète, immédiate ou échelonnée du site.

15.

La mesure dans laquelle l'intervention de l'État peut varier en fonction de ces facteurs est souvent considérable. A l'un des extrêmes, d'après le gouvernement français, une entreprise peut être exemptée entièrement de sa participation financière dans certaines circonstances si elle est confrontée à des difficultés financières graves; à l'autre extrême, l'État peut refuser de conclure une convention particulière, bien que les refus soient apparemment rares et susceptibles d'être annulés si un recours juridictionnel est introduit. Entre ces deux extrêmes, il semble que différents critères et plafonds s'appliquent en fonction du type de convention du FNE en cause; apparemment, les plafonds peuvent toutefois être revus s'ils sont insuffisants pour couvrir le nombre de salariés pouvant être pris en compte.

Les faits

16.

La société Kimberly Clark Sopalin (ci-après « Kimberly Clark »), qui fabrique et transforme de la ouate de cellulose, dispose à Sotteville-les-Rouen d'une usine qui occupait 465 salariés au début de 1993. Des facteurs économiques ont amené l'entreprise à opérer une restructuration générale de ses activités, impliquant un passage à la fabrication exclusive de mouchoirs en papier, un investissement de 80 millions de FF dans la modernisation des installations d'emballage, une réorganisation de la production, l'application de nouvelles méthodes de travail et une proposition visant à réduire l'effectif de 207 personnes. Dans ce cadre, un plan social a été mis en oeuvre pour un coût total de 109 millions de FF, dont 25 % environ, ou 27 millions de FF, ont été supportés par l'État dans le cadre de conventions du FNE. Aucune notification d'aide proposée n'a été faite à la Commission en application de l'article 93, paragraphe 3.

17.

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