ADR Center SpA v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:576
Docket NumberC-584/17
Date16 July 2020
Celex Number62017CJ0584
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

16 juillet 2020 (*)

« Pourvoi – Clause compromissoire – Conventions de subvention conclues dans le cadre du programme spécifique “Justice civile” pour la période 2007-2013 – Rapports d’audit mettant en cause le caractère éligible de certains coûts – Décision de la Commission européenne de procéder au recouvrement des sommes indûment versées – Article 299 TFUE – Pouvoir de la Commission d’adopter une décision formant titre exécutoire dans le cadre de relations contractuelles – Compétence du juge de l’Union – Protection juridictionnelle effective »

Dans l’affaire C‑584/17 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 octobre 2017,

ADR Center SpA, établie à Rome (Italie), représentée par Mes A. Guillerme et T. Bontinck, avocats,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par M. J. Estrada de Solà et Mme A. Katsimerou, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme A. Prechal, présidente de chambre, MM J. Malenovský et F. Biltgen (rapporteur), juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : Mme L. Hewlett, administratrice principale,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 27 février 2019,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 7 novembre 2019,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, ADR Center SpA (ci-après « ADR ») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 20 juillet 2017, ADR Center/Commission (T‑644/14, ci-après l’ « arrêt attaqué », EU:T:2017:533), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision C(2014) 4485 final de la Commission, du 27 juin 2014, relative au recouvrement d’une partie de la contribution financière versée à ADR en exécution de trois conventions de subvention conclues dans le cadre du programme spécifique « Justice civile » (ci-après la « décision litigieuse »), et, d’autre part, à obtenir la condamnation de la Commission européenne à lui verser le solde restant dû en vertu de ces trois conventions de subvention d’un montant de 49 172,52 euros ainsi que des dommages et intérêts.

Le cadre juridique

2 L’article 2, sous b), du règlement (UE, Euratom) nº 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) nº 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1, ci-après le « règlement financier »), prévoit que, aux fins de ce règlement, on entend par « institution », notamment, la Commission.

3 L’article 79, paragraphe 2, du règlement financier est libellé comme suit :

« L’institution peut formaliser la constatation d’une créance à charge de personnes autres que des États membres dans une décision qui forme titre exécutoire au sens de l’article 299 [TFUE].

[...] »

4 L’article 90 du règlement financier prévoit :

« 1. Le paiement doit s’appuyer sur la preuve que l’action correspondante est conforme aux dispositions de l’acte de base ou du contrat et couvre une ou plusieurs opérations suivantes :

a) un paiement de la totalité des montants dus ;

b) un paiement des montants dus selon les modalités suivantes :

i) un préfinancement, éventuellement fractionné en plusieurs versements après la signature de la convention de délégation, du contrat ou de la convention de subvention ou après la notification de la décision de subvention ;

ii) un ou plusieurs paiements intermédiaires en contrepartie de l’exécution partielle de l’action ;

iii) un paiement de solde des montants dus lorsque l’action est entièrement exécutée.

[...] »

Les antécédents du litige

5 Les antécédents du litige sont exposés aux points 1 à 42 de l’arrêt attaqué. Pour les besoins de la présente procédure, ils peuvent être résumés comme suit.

6 ADR est une société établie en Italie qui fournit des services dans le domaine du règlement amiable des litiges.

7 En décembre 2008, la Commission a conclu avec des consortiums, dont ADR assumait la coordination, trois conventions de subvention (ci‑après les « conventions de subvention »), en exécution de la décision nº 1149/2007/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 septembre 2007, établissant pour 2007-2013 le programme spécifique « Justice civile » dans le cadre du programme général « Droits fondamentaux et justice » (JO 2007, L 257, p. 16).

8 Conformément à l’article I.6 des conventions de subvention, lu en combinaison avec l’article II.15.4 de ces dernières, le coordinateur devait remettre, dans un délai de deux mois courant à compter de la clôture de l’action concernée, premièrement, un rapport final sur l’exécution technique de cette action, deuxièmement, un décompte financier final des coûts éligibles réellement supportés selon la structure et la description du budget prévisionnel et, troisièmement, un décompte récapitulatif complet des recettes et des dépenses de ladite action.

9 L’article I.9 des conventions de subvention stipulait que les subventions étaient régies par les clauses des conventions elles-mêmes, par les dispositions de l’Union applicables et, de façon subsidiaire, par la réglementation belge en matière de subventions. Il y était précisé que les décisions de la Commission concernant l’application des clauses de la convention de subvention concernée ainsi que les modalités de sa mise en œuvre pouvaient faire l’objet d’un recours formé par les bénéficiaires devant le juge de l’Union.

10 L’article II.14.1 des conventions de subvention précisait les critères généraux auxquels les coûts devaient correspondre pour pouvoir être considérés comme des coûts éligibles de l’action concernée.

11 L’article II.19.5 des conventions de subvention précisait à l’attention des bénéficiaires que, en vertu de l’article 256 CE (devenu article 299 TFUE), la Commission pouvait formaliser la constatation d’une créance à la charge de personnes autres que des États dans une décision formant titre exécutoire. Cette décision était susceptible d’un recours devant le Tribunal.

12 L’article II.20 des conventions de subvention contenait des clauses détaillées relatives aux contrôles et aux audits.

13 Après la remise des rapports finaux et au vu de leur contenu, la Commission a communiqué à ADR son intention de recouvrer certaines sommes versées au titre des paiements de préfinancement qu’elle avait effectués dans le cadre des conventions de subvention.

14 Par ailleurs, à la suite d’audits contradictoires réalisés par la Commission, celle-ci a communiqué à ADR, le 10 juin 2013, les montants des sommes qu’elle avait décidé de recouvrer en raison du caractère inéligible de certains coûts déclarés pour chacune des conventions en cause. La Commission a également informé ADR qu’elle lui enverrait, dans un délai d’un mois, des notes de débit et qu’elle allait, le cas échéant, procéder par compensation ou par exécution forcée au recouvrement des sommes indûment versées.

15 Par lettre du 9 juillet 2013, ADR a contesté les conclusions des audits et a soutenu que les ordres de recouvrement de la Commission étaient nuls dès lors que ces derniers avaient été adoptés plus de deux ans après la clôture de la procédure d’audit.

16 Le 16 octobre 2013, la Commission a communiqué à ADR trois notes de débit se rapportant chacune à une des conventions en cause et pour des montants de respectivement 62 649,47 euros, 78 991,12 euros et 52 634,75 euros. Ces notes de débit précisaient que, en cas de défaut de paiement à l’échéance, les montants des sommes indûment versées seraient majorés des intérêts de retard.

17 Le 27 juin 2014, après avoir envoyé à ADR des lettres de rappel le 16 décembre 2013 et des lettres de mise en demeure le 26 février 2014, la Commission a adopté, sur le fondement de l’article 299 TFUE et de l’article 79, paragraphe 2, du règlement financier, la décision litigieuse. Par cette décision, la Commission a ordonné à ADR le recouvrement du montant de 194 275,34 euros au titre du capital dû par celle-ci en exécution des conventions de subvention, majoré d’un montant de 3 236 euros au titre des intérêts de retard courant jusqu’au 30 avril 2014, et d’un montant supplémentaire de 21,30 euros par jour de retard à compter du 1er mai suivant. L’article 4 de la décision litigieuse précisait, notamment, que cette dernière formait titre exécutoire, au sens de l’article 299, premier alinéa, TFUE.

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

18 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 août 2014, ADR a introduit un recours par lequel elle demandait l’annulation de la décision litigieuse, le paiement du solde restant dû en application des conventions de subvention d’un montant de 49 172,52 euros ainsi que le paiement de dommages et intérêts en raison d’un prétendu préjudice à sa réputation et du temps investi par son personnel pour défendre ses intérêts dans le cadre des procédures administratives et juridictionnelles.

19 S’agissant de la recevabilité du recours formé par ADR, en ce qui concerne la demande tendant au paiement du solde restant dû, le Tribunal a rappelé, au point 56 de l’arrêt attaqué, que la recevabilité de cette demande dépendait de la nature juridique du recours. En effet, selon le Tribunal, si celui-ci est un recours introduit sur le fondement de l’article 263 TFUE, cette demande est irrecevable dans la mesure où il n’appartient pas au juge de l’Union d’adresser, dans le cadre du contrôle de légalité des actes de l’Union, des injonctions aux institutions de l’Union ou de se substituer à ces dernières, auxquelles il incombe de prendre les mesures que comporte l’exécution d’un arrêt rendu à la suite d’un recours en annulation.

20 Toutefois, aux points 59 et 60 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a précisé qu’un recours pouvait, nonobstant son fondement explicite sur l’article 263 TFUE, avoir, en réalité, un...

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