Erste Group Bank AG (C-125/07 P), Raiffeisen Zentralbank Österreich AG (C-133/07 P), Bank Austria Creditanstalt AG (C-135/07 P) and Österreichische Volksbanken AG (C-137/07 P) v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date24 September 2009

Affaires jointes C-125/07 P, C-133/07 P, C-135/07 P et C-137/07 P

Erste Group Bank AG, anciennement Erste Bank der österreichischen Sparkassen AG, e.a.

contre

Commission des Communautés européennes

«Pourvoi — Ententes — Fixation par des banques autrichiennes des taux créditeurs et débiteurs — 'Club Lombard' — Affectation du commerce entre États membres — Calcul des amendes — Succession d'entreprises — Impact concret sur le marché — Mise en œuvre de l'entente»

Sommaire de l'arrêt

1. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Affectation du commerce entre États membres — Critères — Pratiques restrictives s'étendant à l'ensemble du territoire d'un État membre — Existence d'une forte présomption d'affectation

(Art. 81, § 1, CE)

2. Concurrence — Ententes — Affectation du commerce entre États membres — Critères d'appréciation — Entente globale impliquant la quasi-totalité des établissements bancaires d'un État membre et concernant une vaste gamme de produits et de services financiers

(Art. 81, § 1, CE)

3. Concurrence — Ententes — Délimitation du marché — Objet

(Art. 81, § 1, CE et 82 CE)

4. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Personne juridique responsable de l'exploitation de l'entreprise lors de l'infraction — Disparition

5. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Gravité de l'infraction

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)

6. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Impact concret sur le marché

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03, point 1 A, al. 1)

7. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Gravité de l'infraction — Entente horizontale en matière de prix — Infraction très grave

(Art. 81, § 1, CE; communication de la Commission 98/C 9/03)

8. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Répartition des entreprises concernées dans différentes catégories — Conditions

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03, point 1 A, al. 4 et 6)

9. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Répartition des entreprises concernées dans différentes catégories — Conditions

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03, point 1 A)

10. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Circonstances atténuantes

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03, point 3)

11. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Non-imposition ou réduction de l'amende en contrepartie de la coopération de l'entreprise incriminée — Nécessité d'un comportement ayant facilité la constatation de l'infraction par la Commission

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 96/C 207/04)

12. Pourvoi — Compétence de la Cour — Arrêt du Tribunal concernant la fixation d'une amende en matière de concurrence

(Art. 81 CE; règlement du Conseil nº 17, art. 15)

13. Droit communautaire — Principes — Droits de la défense — Respect dans le cadre des procédures administratives — Concurrence

(Règlement du Conseil nº 17, art. 11, § 2 et 5)

14. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Non-imposition ou réduction de l'amende en contrepartie de la coopération de l'entreprise incriminée — Nécessité d'un comportement ayant facilité la constatation de l'infraction par la Commission

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 96/C 207/04)

15. Concurrence — Procédure administrative — Communication des griefs — Nature juridique — Caractère préparatoire

(Règlement du Conseil nº 17)

1. Pour être susceptibles d’affecter le commerce entre États membres, une décision, un accord ou une pratique doivent, sur la base d’un ensemble d’éléments objectifs de droit ou de fait, permettre d’envisager avec un degré de probabilité suffisant qu’ils exercent une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d’échanges entre États membres, et cela de manière à faire craindre qu’ils puissent entraver la réalisation d’un marché unique entre États membres. Il faut, en outre, que cette influence ne soit pas insignifiante. Ainsi, une incidence sur les échanges intracommunautaires résulte en général de la réunion de plusieurs facteurs qui, pris isolément, ne seraient pas nécessairement déterminants. Pour vérifier si une entente affecte sensiblement le commerce entre États membres, il faut l’examiner dans son contexte économique et juridique.

Le fait qu’une entente n’ait pour objet que la commercialisation des produits dans un seul État membre ne suffit pas pour exclure que le commerce entre États membres puisse être affecté. En effet, une entente s’étendant à l’ensemble du territoire d’un État membre a, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, entravant ainsi l’interpénétration économique voulue par le traité CE. Dans le cas d'une telle entente, il existe une forte présomption d’affectation du commerce entre les États membres, celle-ci ne pouvant être écartée que si l’analyse des caractéristiques de l’accord et du contexte économique dans lequel il s’insère démontre le contraire. Le juge communautaire peut donc, sans renverser la charge de la preuve, constater, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation des faits, qu'une telle présomption n'a pas été renversée.

(cf. points 36-39, 43)

2. Une entente globale concernant l'essentiel des acteurs du secteur financier d'un État membre et une vaste gamme de produits et de services financiers, fondée sur un accord de principe pour éliminer la concurrence sur les prix et mise en oeuvre dans le cadre de réunions ainsi que de «tables rondes» distinctes, dédiées à des produits spécifiques, constitue une infraction unique qui justifie et nécessite un examen d’ensemble de l’aptitude de cette entente généralisée à affecter le commerce intracommunautaire. Il n'est donc pas nécessaire d'examiner séparément l'aptitude de chaque table ronde à affecter le commerce entre États membres.

(cf. points 55-56, 59)

3. La définition du marché ne joue pas le même rôle selon qu’il s’agit d’appliquer l’article 81 CE ou l’article 82 CE. Par conséquent, la définition du marché pertinent est inopérante dès lors que la Commission conclut qu'un accord fausse la concurrence et est susceptible d’affecter de façon sensible le commerce entre États membres.

(cf. point 60)

4. Lorsqu’une entreprise enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction.

Une entité qui n’est pas l’auteur de l’infraction peut néanmoins être sanctionnée pour celle-ci, en premier lieu, lorsque l’entité ayant commis l’infraction a cessé d’exister juridiquement. En effet, lorsqu’une entité ayant commis une infraction aux règles de la concurrence fait l’objet d’un changement juridique ou organisationnel, ce changement n’a pas nécessairement pour effet de créer une nouvelle entreprise dégagée de la responsabilité des comportements contraires aux règles de la concurrence de la précédente entité si, du point de vue économique, il y a identité entre les deux entités.

Par ailleurs, en second lieu, le comportement anticoncurrentiel d’une entreprise peut être imputé à une autre lorsque la première n’a pas déterminé son comportement sur le marché de façon autonome, mais a appliqué pour l’essentiel les directives émises par la seconde, eu égard en particulier aux liens économiques et juridiques qui les unissaient. La circonstance qu’une société filiale a une personnalité juridique distincte ne suffit donc pas à écarter la possibilité que son comportement soit imputé à la société mère.

À cet égard, la Commission a le choix de sanctionner soit la filiale ayant participé à l’infraction, soit la société mère qui la contrôlait pendant la période visée dans la décision. Elle n'est pas obligée de vérifier en priorité si les conditions pour imputer l’infraction à la société mère de l’entreprise ayant commis l’infraction sont remplies. En effet, la Commission ne saurait, par principe, être tenue de procéder dans un premier temps à une telle vérification avant de pouvoir envisager de se tourner contre l’entreprise, auteur de l’infraction, même si celle-ci a subi des modifications en tant qu’entité juridique. Le principe de la responsabilité personnelle ne s’oppose nullement à ce que la Commission envisage d’abord de sanctionner cette dernière avant d’explorer si, éventuellement, l’infraction peut être imputée à la société mère. De plus, s’il en était autrement, les enquêtes de la Commission seraient considérablement alourdies par la nécessité de vérifier, dans chaque cas de succession dans le contrôle d’une entreprise, dans quelle mesure les agissements de celle-ci peuvent être imputés à l’ancienne société mère.

En outre, dans une situation où une entreprise qui participe à une entente en acquiert une autre qui participe également à l'entente, il y a lieu de souligner que la première entreprise sait, au moment de la reprise des activités de la seconde, que cette dernière pourrait faire l’objet d’une procédure d’infraction à l’article 81 CE et que, en sa qualité d’ayant droit de cette société, elle s’expose ainsi aux conséquences d’une telle procédure en termes d’amende.

(cf. points 76-83)

5. Pour déterminer le montant des amendes infligées pour infaction aux règles communautaires de concurrence, il y a lieu de tenir compte de la durée et de tous les éléments de nature à entrer dans l’appréciation de la gravité des infractions. La gravité des infractions doit être établie en fonction d’un grand nombre d’éléments, tels que les circonstances particulières de l’affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce, sans qu’ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant...

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