Norbert Reitbauer y otros contra Enrico Casamassima.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:577
Date10 July 2019
Celex Number62017CJ0722
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-722/17
62017CJ0722

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

10 juillet 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Règlement (UE) no 1215/2012 – Compétence judiciaire en matière civile et commerciale – Compétences exclusives – Article 24, points 1 et 5 – Litiges en matière de droits réels immobiliers et en matière d’exécution des décisions – Procédure d’adjudication judiciaire d’un immeuble – Action en contestation de l’état de distribution du produit de cette adjudication »

Dans l’affaire C‑722/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bezirksgericht Villach (tribunal de district de Villach, Autriche), par décision du 19 décembre 2017, parvenue à la Cour le 27 décembre 2017, dans la procédure

Norbert Reitbauer,

Dolinschek GmbH,

B.T.S. Trendfloor Raumausstattungs-GmbH,

Elektrounternehmen K. Maschke GmbH,

Klaus Egger,

Architekt DI Klaus Egger Ziviltechniker GmbH

contre

Enrico Casamassima,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.-C. Bonichot, président de chambre, Mme C. Toader (rapporteure), MM. A. Rosas, L. Bay Larsen et M. Safjan, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. D. Dittert, chef d’unité,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 janvier 2019,

considérant les observations présentées :

pour M. Reitbauer, Dolinschek GmbH, B.T.S. Trendfloor Raumausstattungs-GmbH, Elektrounternehmen K. Maschke GmbH, M. Egger et Architekt DI Klaus Egger Ziviltechniker GmbH, par Me G. Götz, Rechtsanwalt,

pour M. Casamassima, par Me H. Walder, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement portugais, par MM. L. Inez Fernandes, M. Figueiredo et P. Lacerda, en qualité d’agents,

pour le gouvernement suisse, par M. M. Schöll, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mme M. Heller et M. M. Wilderspin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 3 avril 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 24, points 1 et 5, du règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2012, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2012, L 351, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Norbert Reitbauer, Dolinschek GmbH, B.T.S. Trendfloor Raumausstattungs-GmbH, Elektrounternehmen K. Maschke GmbH, M. Klaus Egger et Architekt DI Klaus Egger Ziviltechniker GmbH (ci-après, ensemble, « Reitbauer e.a. ») à M. Enrico Casamassima, domicilié en Italie, au sujet d’une action en contestation de l’état de distribution du produit d’une adjudication judiciaire d’un immeuble, sis en Autriche.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 15, 21 et 34 du règlement no 1215/2012 sont libellés comme suit :

« (15)

Les règles de compétence devraient présenter un haut degré de prévisibilité et s’articuler autour de la compétence de principe du domicile du défendeur. Cette compétence devrait toujours être disponible, sauf dans quelques cas bien déterminés où la matière en litige ou l’autonomie des parties justifie un autre critère de rattachement. S’agissant des personnes morales, le domicile doit être défini de façon autonome de manière à accroître la transparence des règles communes et à éviter les conflits de compétence.

[...]

(21)

Le fonctionnement harmonieux de la justice commande de réduire au minimum la possibilité de procédures concurrentes et d’éviter que des décisions inconciliables ne soient rendues dans différents États membres. Il importe de prévoir un mécanisme clair et efficace pour résoudre les cas de litispendance et de connexité et pour parer aux problèmes résultant des divergences nationales quant à la date à laquelle une affaire est considérée comme pendante. Aux fins du présent règlement, il convient de définir cette date de manière autonome.

[...]

(34)

Pour assurer la continuité nécessaire entre la convention [du 27 septembre 1968 concernant la compétence judicaire à l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 1972, L 299, p. 32)], le règlement (CE) no 44/2001 [du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1)] et le présent règlement, il convient de prévoir des dispositions transitoires. La même continuité doit être assurée en ce qui concerne l’interprétation par la Cour de justice de l’Union européenne de la convention de Bruxelles de 1968 et des règlements qui la remplacent. »

4

Le chapitre II de ce règlement, intitulé « Compétence », contient notamment une section 1, « Dispositions générales », et une section 2, « Compétences spéciales ». L’article 4, paragraphe 1, qui figure sous cette section 1, dispose :

« Sous réserve du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre. »

5

L’article 7 dudit règlement est libellé comme suit :

« Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite dans un autre État membre :

1)

a)

en matière contractuelle, devant la juridiction du lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande ;

b)

aux fins de l’application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu d’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande est :

pour la vente de marchandises, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient dû être livrées,

pour la fourniture de services, le lieu d’un État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ;

[...] »

6

Aux termes de l’article 24, points 1 et 5, du même règlement :

« Sont seules compétentes les juridictions ci–après d’un État membre, sans considération de domicile des parties :

1)

en matière de droits réels immobiliers et de baux d’immeubles, les juridictions de l’État membre où l’immeuble est situé.

[...]

5)

en matière d’exécution des décisions, les juridictions de l’État membre du lieu de l’exécution. »

Le droit autrichien

L’EO

7

Il ressort des articles 209 à 212 de l’Exekutionsordnung (code des procédures d’exécution, ci-après l’« EO ») qu’il doit être débattu oralement de la distribution du produit de la vente forcée d’un bien. À cet effet, les créanciers sont invités à déclarer leurs créances sur le produit à distribuer et à les établir par des preuves documentaires. L’exactitude et l’ordre de priorité des créances sont vérifiés lors de l’audience.

8

Dans le cadre de la procédure de distribution du produit de la vente forcée, les créanciers et le débiteur peuvent contester, en vertu de l’article 213 de l’EO, la prise en compte de certaines créances. La contestation peut porter sur l’existence, le rang ou le montant d’une créance déclarée.

9

Aux termes de l’article 231, paragraphe 1, de l’EO, le juge se prononce sur les questions de droit soulevées par la contestation par une ordonnance de distribution. Si la décision sur la contestation dépend de la constatation d’éléments de fait litigieux, la partie demanderesse est invitée, par l’ordonnance de distribution, à intenter une action en contestation de l’état de distribution.

10

Selon l’article 232 de l’EO, la juridiction d’exécution est compétente pour statuer sur l’action en contestation de l’état de distribution.

L’AnfO

11

Aux termes de l’article 1er de l’Anfechtungsordnung (loi relative à l’action paulienne, ci–après l’« AnfO »), l’action paulienne tend à ce que les actes juridiques frauduleux qui concernent le patrimoine du débiteur soient déclarés inopposables au créancier demandeur et à lui seul. Cette action est ouverte lorsqu’une exécution sur le patrimoine du débiteur n’a pas permis de désintéresser intégralement le créancier ou ne le permettrait pas et si elle est susceptible de se traduire par un tel désintéressement.

12

Il ressort des articles 2 et 3 de l’AnfO que l’action paulienne peut être exercée en cas d’intention de fraude ou de dilapidation du patrimoine, ainsi que d’actes de disposition à titre gracieux.

13

Conformément à l’article 6 de l’AnfO, le fait que l’acte litigieux a été accompli en vertu d’un titre exécutoire ou de l’exécution d’un jugement ne fait pas obstacle à l’action paulienne.

14

Ainsi qu’il ressort de l’article 10 de l’AnfO, l’action paulienne peut être intentée dans le cadre de la procédure de distribution du produit de la vente forcée.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

15

M. Casamassima et Mme C., domiciliés à Rome (Italie), ont été concubins au moins jusqu’au printemps 2014. Au cours de l’année 2010, ils avaient acheté une maison à Villach (Autriche). Dans le livre foncier, seule Mme C. était inscrite en tant que propriétaire.

16

Des travaux de rénovation de l’immeuble ont, par la suite, été commandés auprès de Reitbauer e.a. Les paiements pour ces travaux n’étant pas intégralement honorés, Reitbauer e.a. ont introduit une action en dédommagement contre Mme C. Une série de jugements, dont le premier, non définitif, rendu au début de l’année 2014, faisaient...

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