Commission of the European Communities v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:740
CourtCourt of Justice (European Union)
Date18 December 2008
Docket NumberC-338/06
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - fondé
Celex Number62006CJ0338

Affaire C-338/06

Commission des Communautés européennes

contre

Royaume d'Espagne

«Manquement d'État — Deuxième directive 77/91/CEE — Articles 29 et 42 — Sociétés anonymes — Augmentation du capital — Droit préférentiel de souscription d'actions et d'obligations convertibles en actions — Suppression — Protection des actionnaires — Égalité de traitement»

Sommaire de l'arrêt

1. Libre circulation des personnes — Liberté d’établissement — Sociétés — Directive 77/91 — Traitement égal des actionnaires — Modification du capital d’une société anonyme — Droit préférentiel des actionnaires prévu en cas d’augmentation du capital souscrit par apports en numéraire

(Directive du Conseil 77/91, art. 29, § 1 et 4, et 42)

2. Libre circulation des personnes — Liberté d'établissement — Sociétés — Directive 77/91 — Modification du capital d'une société anonyme — Droit préférentiel des actionnaires prévu en cas d'augmentation du capital souscrit par apports en numéraire

(Directive du Conseil 77/91, art. 29, § 1 et 6)

3. Libre circulation des personnes — Liberté d'établissement — Sociétés — Directive 77/91 — Modification du capital d'une société anonyme — Droit préférentiel des actionnaires prévu en cas d'augmentation du capital souscrit par apports en numéraire

(Directive du Conseil 77/91, art. 29, § 4 et 6)

1. Ne manque pas aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 42 de la deuxième directive 77/91, en matière de droit des sociétés, lu en combinaison avec l’article 29, paragraphes 1 et 4, de cette directive, un État membre qui maintient en vigueur une réglementation en vertu de laquelle l’assemblée générale des actionnaires d’une société cotée en Bourse peut, lorsqu’elle décide d’une augmentation de capital avec suppression totale ou partielle du droit de souscription préférentiel, déterminer librement le prix d’émission des nouvelles actions pour autant que ladite assemblée dispose d’un rapport des administrateurs de la société ainsi que d’un rapport d’un contrôleur légal désigné à cet effet et pour autant que le prix d’émission des actions est supérieur à leur valeur d’actif nette telle qu’elle ressort du rapport du contrôleur légal.

En effet, si le droit préférentiel de souscription institué au bénéfice des actionnaires n’admet aucune autre exception que celle expressément prévue à l’article 29, paragraphe 4, de la deuxième directive, il n’en demeure par moins que celle-ci pose des exigences minimales en matière de protection des actionnaires et des créanciers des sociétés anonymes, en laissant les États membres libres d’adopter des dispositions qui leur sont plus favorables, prévoyant, notamment, des conditions plus restrictives pour la suppression dudit droit préférentiel.

En outre, le fait que la fixation du prix d’émission des nouvelles actions puisse, en vertu de cette réglementation, être inférieur à la valeur de marché de celles-ci ne saurait être considéré comme susceptible de créer une inégalité de traitement, au sens de l’article 42 de la deuxième directive, entre les anciens et les nouveaux actionnaires, en l’absence d’élément tendant à démontrer, ainsi que l’exige ledit article 42, que ces deux catégories d'actionnaires se trouvent dans des conditions identiques, de sorte qu’un traitement égal devrait leur être réservé. De plus, exiger que le prix d'émission des nouvelles actions ne soit pas inférieur à la valeur de marché de celles-ci aurait pour conséquence que, même si un tel prix était justifié par le rapport des administrateurs, l’assemblée générale des actionnaires ne pourrait pas l’appliquer sans enfreindre le principe d’égalité de traitement visé à l’article 42 de la deuxième directive.

(cf. points 26, 30-31, 33-34)

2. Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 29, paragraphes 1 et 6, de la deuxième directive 77/91, en matière de droit des sociétés, un État membre qui accorde un droit de souscription préférentiel d’actions, en cas d’augmentation de capital souscrite par apports en numéraire, non seulement aux actionnaires, mais aussi aux détenteurs d’obligations convertibles en actions, et qui accorde un droit de souscription préférentiel d’obligations convertibles en actions non seulement aux actionnaires, mais aussi aux détenteurs d’obligations convertibles en actions émises lors d’émissions précédentes.

En effet, ainsi qu'il ressort du libellé dudit article 29, paragraphes 1 et 6, l'offre de nouvelles actions et d'obligations convertibles en actions s’adresse non pas aux actionnaires et aux détenteurs d'obligations simultanément, mais «par préférence» aux actionnaires. Dès lors, ce n’est que dans la mesure où ceux-ci n’ont pas exercé leur droit préférentiel que lesdites actions et obligations peuvent être offertes aux autres acquéreurs, au nombre desquels figurent notamment les détenteurs d’obligations convertibles en actions.

(cf. points 39-40, 46, disp. 1)

3. Manque aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 29, paragraphe 6, de la deuxième directive 77/91, en matière de droit des sociétés, lu en combinaison avec le paragraphe 4 du même article, un État membre qui ne prévoit pas que l'assemblée générale des actionnaires d'une société peut, lors d'une émission d'obligations convertibles en actions, décider la suppression du droit de souscription préférentiel des obligations convertibles en actions.

S’il est vrai que les États membres sont libres de prévoir des conditions plus restrictives pour la suppression du droit de souscription préférentiel en cause, il n’en demeure pas moins que l’article 29, paragraphe 6, de la deuxième directive, lu en combinaison avec le paragraphe 4 du même article, exige que, dans certaines conditions, l’assemblée générale des actionnaires puisse décider la suppression du droit de souscription préférentiel de tous les titres convertibles en actions. Une réglementation nationale qui ne prévoit pas expressément la possibilité d’une telle suppression, même à supposer qu'elle puisse être interprétée dans un sens opposé à son libellé, ne serait pas susceptible de créer une situation suffisamment précise, claire et transparente pour permettre aux particuliers de connaître la plénitude de leurs droits et de s’en prévaloir devant les juridictions nationales.

(cf. points 50-51, 55, 57, disp. 1)







ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

18 décembre 2008 (*)

«Manquement d’État – Deuxième directive 77/91/CEE – Articles 29 et 42 – Sociétés anonymes – Augmentation du capital – Droit préférentiel de souscription d’actions et d’obligations convertibles en actions – Suppression – Protection des actionnaires – Égalité de traitement»

Dans l’affaire C‑338/06,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 4 août 2006,

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. G. Braun et R. Vidal Puig, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume d’Espagne, représenté par M. F. Díez Moreno, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

soutenu par:

République de Pologne, représentée par Mme E. Ośniecka-Tamecka, en qualité d’agent,

République de Finlande, représentée par M. J. Heliskoski, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, représenté par Mme V. Jackson, en qualité d’agent, assistée de Mme J. Stratford, barrister,

parties intervenantes,

LA COUR (première chambre),

composée de M. P. Jann, président de chambre, MM. A. Tizzano (rapporteur), A. Borg Barthet, E. Levits et J.-J. Kasel, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: M. R. Grass,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 septembre 2008,

rend le présent

Arrêt

1 Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que:

– en autorisant l’assemblée des actionnaires à approuver l’émission de nouvelles actions sans droit de souscription préférentiel à un prix inférieur à leur valeur raisonnable;

– en accordant le droit de souscription préférentiel d’actions, en cas d’augmentation de capital souscrite par apports en numéraire, non seulement aux actionnaires, mais aussi aux détenteurs d’obligations convertibles en actions;

– en accordant un droit de souscription préférentiel d’obligations convertibles en actions non seulement aux actionnaires, mais aussi aux détenteurs d’obligations convertibles en actions émises lors d’émissions précédentes, et

– en ne prévoyant pas que l’assemblée des actionnaires peut approuver la suppression du droit de souscription préférentiel d’obligations convertibles en actions,

le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 29 et 42 de la deuxième directive 77/91/CEE du Conseil, du 13 décembre 1976, tendant à coordonner pour les rendre équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l’article [48] deuxième alinéa du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital (JO 1977, L 26, p. 1, ci-après «la deuxième directive»).

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

2 Les deuxième et cinquième considérants de la deuxième directive...

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