Wolff & Müller GmbH & Co. KG v José Filipe Pereira Félix.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2004:610
Date12 October 2004
Celex Number62003CJ0060
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-60/03
Arrêt de la Cour
Affaire C-60/03


Wolff & Müller GmbH & Co. KG
contre
José Filipe Pereira Félix



(demande de décision préjudicielle, formée par le Bundesarbeitsgericht)

«Article 49 CE – Restrictions à la libre prestation des services – Entreprises du secteur de la construction – Sous-traitance – Obligation pour une entreprise de se porter caution pour la rémunération minimale des travailleurs employés par un sous-traitant»

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 12 octobre 2004

Sommaire de l'arrêt

Libre prestation des services – Détachement des travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services – Directive 96/71 – Réglementation nationale prévoyant pour une entreprise ayant recours aux services d'une entreprise établie dans un autre État membre la responsabilité en tant que caution pour la rémunération minimale des travailleurs employés par l'autre entreprise – Restriction à la libre prestation des services – Justification par des raisons d'intérêt général – Protection sociale des travailleurs

(Art. 49 CE; directive du Parlement européen et du Conseil 96/71, art. 5)
L’article 5 de la directive 96/71 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services, en vertu duquel les États membres prennent des mesures adéquates en cas de non-respect de cette directive et veillent en particulier à ce que les travailleurs et/ou leurs représentants disposent de procédures adéquates aux fins de l’exécution des obligations prévues par la même directive, interprété à la lumière de l’article 49 CE, ne s’oppose pas en principe à des règles nationales selon lesquelles une entreprise de construction qui est établie dans l’État membre concerné et qui charge une entreprise établie dans un autre État membre d’effectuer des travaux de construction répond, en tant que caution ayant renoncé au bénéfice de discussion, des obligations de cette entreprise ou d’un sous-traitant pour le paiement du salaire minimal d’un travailleur employé par ces derniers ou de cotisations à un organisme commun aux parties à une convention collective, lorsque le salaire minimal consiste dans le montant à payer après déduction des impôts et des cotisations de sécurité sociale et de promotion de l’emploi ou des prestations correspondantes en matière de sécurité sociale qui doit être payé au travailleur (salaire net), et ceci même lorsque les règles nationales visées n’ont pas pour objectif prioritaire la protection de la rémunération du travailleur ou que cette protection n’est qu’un objectif secondaire de celles-ci. En effet, si le droit au salaire minimal constitue un élément de la protection des travailleurs, laquelle figure parmi les raisons impérieuses d’intérêt général susceptibles de justifier une éventuelle restriction à la libre prestation des services, les modalités procédurales permettant d’obtenir le respect de ce droit, telles que la responsabilité en tant que caution, doivent également être regardées comme étant de nature à garantir une telle protection, dans la mesure où cette règle profite aux travailleurs détachés au motif que, au bénéfice de ces derniers, elle ajoute au premier débiteur du salaire minimal qu’est l’employeur un second débiteur, qui est lié solidairement au premier et qui est même généralement plus solvable que celui-ci.

(cf. points 28, 34-35, 37, 40, 45 et disp.)




ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
12 octobre 2004(1)


«Article 49 CE – Restrictions à la libre prestation des services – Entreprises du secteur de la construction – Sous-traitance – Obligation pour une entreprise de se porter caution pour la rémunération minimale des travailleurs employés par un sous-traitant»

Dans l'affaire C-60/03, ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l'article 234 CE, introduite par le Bundesarbeitsgericht (Allemagne), par décision du 6 novembre 2002, parvenue à la Cour le 14 février 2003, dans la procédure Wolff & Müller GmbH & Co. KG contreJosé Filipe Pereira Félix,

LA COUR (deuxième chambre),,



composée de M. C. W. A. Timmermans (rapporteur), président de chambre, MM. C. Gulmann et R. Schintgen, Mmes F. Macken et N. Colneric, juges, avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,
greffier: Mme M. Múgica Arzamendi, administrateur principal,

considérant les observations présentées:

pour Wolff & Müller GmbH & Co. KG, par Me T. Möller, Rechtsanwalt,
pour M. Pereira Félix, par Me M. Veiga, Rechtsanwältin,
pour le gouvernement allemand, par Mme A. Tiemann, en qualité d'agent,
pour le gouvernement français, par M. G. de Bergues ainsi que par Mmes C. Bergeot-Nunes et O. Christmann, en qualité d'agents,
pour le gouvernement autrichien, par MM. E. Riedl et G. Hesse, en qualité d'agents,
pour la Commission des Communautés européennes, par Mme M. Patakia, en qualité d'agent, assistée de Me R. Karpenstein, Rechtsanwalt,

vu la décision prise, l'avocat général entendu, de juger l'affaire sans conclusions,

rend le présent



Arrêt

1
La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 49 CE.
2
Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Wolff & Müller GmbH & Co. KG (ci-après «Wolff & Müller»), une entreprise de construction, à M. Pereira Félix au sujet de la responsabilité de cette entreprise en tant que caution pour le paiement du salaire minimal dû à ce dernier par son employeur.
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
3
Le cinquième considérant de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1996, concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services (JO 1997, L 18, p. 1), énonce: «considérant qu’une telle promotion de la prestation de services dans un cadre transnational nécessite une concurrence loyale et des mesures garantissant le respect des droits des travailleurs».
4
Aux termes de l’article 1er de la directive 96/71, intitulé «Champ d’application»: «1. La présente directive s’applique aux entreprises établies dans un État membre qui, dans le cadre d’une prestation de services transnationale, détachent des travailleurs, conformément au paragraphe 3, sur le territoire d’un État membre. […] 3. La présente directive s’applique dans la mesure où les entreprises visées au paragraphe 1 prennent l’une des mesures transnationales suivantes:
a)
détacher un travailleur, pour leur compte et sous leur direction, sur le territoire d’un État membre, dans le cadre d’un contrat conclu entre l’entreprise d’envoi et le destinataire de la prestation de services opérant dans cet État membre, pour autant qu’il existe une relation de travail entre l’entreprise d’envoi et le travailleur pendant la période de détachement
[…]»
5
L’article 3 de la directive 96/71, intitulé «Conditions de travail et d’emploi», dispose à son paragraphe 1: «Les États membres veillent à ce que, quelle que soit la loi applicable à la relation de travail, les entreprises visées à l’article 1er paragraphe 1 garantissent aux travailleurs détachés sur leur territoire les conditions de travail et d’emploi concernant les matières visées ci-après qui, dans l’État membre sur le territoire duquel le travail est exécuté, sont fixées:
par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives
et/ou
par des conventions collectives ou sentences arbitrales déclarées d’application générale au sens du paragraphe 8, dans la mesure où elles concernent les activités visées en annexe:
[…]
c)
les taux de salaire minimal, y compris ceux majorés pour les heures supplémentaires; le présent point ne s’applique pas aux régimes complémentaires de...

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