Apple Inc. v Deutsches Patent- und Markenamt.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2070
Date10 July 2014
Celex Number62013CJ0421
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑421/13
62013CJ0421

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

10 juillet 2014 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Marques — Directive 2008/95/CE — Articles 2 et 3 — Signes susceptibles de constituer une marque — Caractère distinctif — Représentation, par dessin, de l’aménagement d’un magasin porte‑drapeau (‘flagship store’) — Enregistrement comme marque pour des ‘services’ relatifs aux produits qui sont mis en vente dans un tel magasin»

Dans l’affaire C‑421/13,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundespatentgericht (Allemagne), par décision du 8 mai 2013, parvenue à la Cour le 24 juillet 2013, dans la procédure

Apple Inc.

contre

Deutsches Patent- und Markenamt,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič (rapporteur), président de chambre, MM. C. G. Fernlund, A. Ó Caoimh, Mme C. Toader et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 30 avril 2014,

considérant les observations présentées:

pour Apple Inc., par Mes V. Schmitz-Fohrmann et A. Ruge, Rechtsanwälte,

pour le gouvernement français, par MM. D. Colas et F.‑X. Bréchot, en qualité d’agents,

pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par M. F. W. Bulst et Mme E. Montaguti, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 2 et 3 de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO L 299, p. 25, et rectificatif JO 2009, L 11, p. 86).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Apple Inc. (ci‑après «Apple») au Deutsches Patent- und Markenamt (Office allemand des brevets et des marques, ci-après le «DPMA»), au sujet du rejet par ce dernier d’une demande d’enregistrement de marque.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 2 de la directive 2008/95 dispose:

«Peuvent constituer des marques tous les signes susceptibles d’une représentation graphique, notamment les mots, y compris les noms de personnes, les dessins, les lettres, les chiffres, la forme du produit ou de son conditionnement, à condition que de tels signes soient propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises.»

4

Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, de la même directive:

«Sont refusés à l’enregistrement ou sont susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés:

[...]

b)

les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif;

c)

les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci;

d)

les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce;

e)

les signes constitués exclusivement:

i)

par la forme imposée par la nature même du produit,

ii)

par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique,

iii)

par la forme qui donne une valeur substantielle au produit;

[…]»

5

Le libellé des articles 2 et 3 de la directive 2008/95 correspond à celui des articles 2 et 3 de la directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), qui a été abrogée et remplacée par la directive 2008/95 à partir du 28 novembre 2008.

Le droit allemand

6

L’article 3, paragraphe 1, de la loi sur la protection des marques et autres signes distinctifs [Gesetz über den Schutz von Marken und sonstigen Kennzeichen (Markengesetz)], du 25 octobre 1994 (BGBl. 1994 I, p. 3082), correspond en substance à l’article 2 de la directive 2008/95. Le paragraphe 2 du même article 3 dispose:

«Ne peuvent pas être protégés en tant que marque les signes constitués exclusivement par une forme

1.

imposée par la nature même du produit

2.

nécessaire à l’obtention d’un résultat technique ou qui

3.

donne une valeur substantielle au produit.»

7

L’article 8 de ladite loi énonce:

«(1) Ne sauraient être enregistrés comme marque les signes dignes de protection au sens de l’article 3 qui ne peuvent pas être représentés graphiquement.

(2) Ne peuvent être enregistrées les marques

1.

dénuées de tout caractère distinctif pour les produits ou services;

2.

composées uniquement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou d’autres caractéristiques de ceux-ci.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

8

Le 10 novembre 2010, Apple a obtenu du United States Patent and Trademark Office (Office des brevets et des marques des États-Unis) l’enregistrement d’une marque tridimensionnelle consistant en la représentation, par un dessin multicolore (notamment gris métallique et brun clair), de ses magasins porte‑drapeaux («flagship stores») pour des services de la classe 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, adopté lors de la conférence diplomatique de Nice le 15 juin 1957, révisé en dernier lieu à Genève le 13 mai 1977 et modifié le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 1154, no I‑18200, p. 89, ci-après l’«arrangement de Nice»), à savoir pour des «services de commerce de détail relatifs aux ordinateurs, logiciels, périphériques, téléphones portables, électronique grand public et accessoires et démonstration de produits y relatifs».

9

Ladite représentation, décrite par Apple comme «le design et l’agencement distinctifs d’un magasin de détail», est la suivante:

Image

10

Par la suite, Apple a procédé à l’extension internationale de cette marque en application de l’arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques, du 14 avril 1891, tel que révisé et modifié en dernier lieu le 28 septembre 1979 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 828, no I‑11852, p. 390). Cette extension a été acceptée dans certains États et refusée dans d’autres.

11

Le 24 janvier 2013, l’extension au territoire allemand de cette marque tridimensionnelle internationale (IR 1060321) a été refusée par le DPMA, au motif que la représentation des espaces destinés à la vente des produits d’une entreprise ne serait rien d’autre que la représentation d’un aspect essentiel du commerce de cette entreprise. Si le consommateur peut, certes, comprendre l’aménagement d’un tel espace comme une indication de la valeur et de la catégorie de prix des produits, il ne saurait appréhender un tel aménagement comme une indication de l’origine de ceux-ci. Par ailleurs, l’espace de vente représenté en l’espèce ne se distinguerait pas suffisamment des magasins d’autres fournisseurs de produits électroniques.

12

Apple a formé un recours contre ladite décision de refus du DPMA devant le Bundespatentgericht.

13

Cette juridiction considère que l’aménagement représenté par le signe tridimensionnel reproduit au point 9 du présent arrêt a des particularités qui le distinguent de l’aménagement habituel des espaces de vente dans ce secteur économique.

14

Toutefois, le Bundespatentgericht, considérant que le litige dont il est saisi soulève des questions plus fondamentales en matière de droit des marques, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

Convient-il d’interpréter l’article 2 de la directive [2008/95] en ce sens que la possibilité de protéger le ‘conditionnement [d’un produit]’ couvre également la présentation matérialisant un service?

2)

Convient-il d’interpréter l’article 2 et l’article 3, paragraphe 1, de la directive [2008/95] en ce sens qu’un signe qui reproduit la présentation matérialisant le service peut être enregistré comme marque?

3)

Convient-il d’interpréter l’article 2 de la directive [2008/95] en ce sens que l’exigence de pouvoir représenter graphiquement la marque est remplie par un simple dessin ou avec des compléments comme une description de la présentation ou des indications de taille absolues en mètres ou relatives avec des indications de proportions?

4)

Convient-il d’interpréter l’article 2 de la directive [2008/95] en ce sens que le champ de la protection de la marque de service du commerce de détail s’étend également aux produits fabriqués par le commerçant lui-même?»

Sur les questions préjudicielles

Sur les première à troisième questions

15

À titre liminaire, il convient de préciser que, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, les termes «présentation matérialisant un service» employés dans les deux premières questions renvoient à la circonstance...

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