Lebara Ltd v Commissioners for Her Majesty’s Revenue & Customs.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:264
Date03 May 2012
Celex Number62010CJ0520
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑520/10
62010CJ0520

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

3 mai 2012 ( *1 )

«Fiscalité — Sixième directive TVA — Article 2 — Prestation de services à titre onéreux — Services de télécommunications — Cartes téléphoniques prépayées comportant des informations permettant de passer des appels internationaux — Commercialisation par un réseau de distributeurs»

Dans l’affaire C-520/10,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le First-tier Tribunal (Tax Chamber) (Royaume-Uni), par décision du 22 octobre 2010, parvenue à la Cour le 8 novembre 2010, dans la procédure

Lebara Ltd

contre

Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de chambre, M. J. Malenovský, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. G. Arestis et T. von Danwitz (rapporteur), juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: Mme K. Sztranc-Sławiczek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 octobre 2011,

considérant les observations présentées:

pour Lebara Ltd, par M. P. Lasok, QC, et M. M. Angiolini, barrister, mandatés par M. S. Macherla, solicitor,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par MM. S. Hathaway et L. Seeboruth, en qualité d’agents, assistés de M. R. Hill, barrister,

pour le gouvernement hellénique, par Mmes K. Paraskevopoulou, M. Germani et I. Pouli, en qualité d’agents,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes C. Wissels, M. de Ree et M. Bulterman ainsi que par M. J. Langer, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par M. R. Lyal et Mme C. Soulay, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 8 décembre 2011,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, point 1, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires — Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1), telle que modifiée par la directive 2003/92/CE du Conseil, du 7 octobre 2003 (JO L 260, p. 8, ci-après la «sixième directive»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Lebara Ltd (ci-après «Lebara») aux Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs (ci-après les «Commissioners») au sujet d’un avis d’imposition émis par ces derniers relatif à la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») prétendument due par Lebara en raison de services de télécommunications fournis par celle-ci au cours du mois de mars 2005.

Le cadre juridique

3

Aux termes de l’article 2, premier et deuxième alinéas, de la première directive 67/227/CEE du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires (JO 1967, 71, p. 1301, ci-après la «première directive»):

«Le principe du système commun de [TVA], est d’appliquer aux biens et aux services un impôt général sur la consommation exactement proportionnel au prix des biens et des services, quel que soit le nombre des transactions intervenues dans le processus de production et de distribution antérieur au stade d’imposition.

À chaque transaction, la [TVA], calculée sur le prix du bien ou du service au taux applicable à ce bien ou à ce service, est exigible déduction faite du montant de la [TVA] qui a grevé directement le coût des divers éléments constitutifs du prix.»

4

L’article 2, point 1, de la sixième directive soumet à la TVA «les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel».

5

Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, de cette directive, est considéré comme «livraison d’un bien» le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire.

6

L’article 6 de ladite directive prévoit:

«1. Est considérée comme ‘prestation de services’ toute opération qui ne constitue pas une livraison d’un bien au sens de l’article 5.

Cette opération peut consister entre autres:

en une cession d’un bien incorporel représenté ou non par un titre,

[...]

4. Lorsqu’un assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d’autrui, s’entremet dans une prestation de services, il est réputé avoir reçu et fourni personnellement les services en question.

[...]»

7

Aux termes de l’article 9 de la sixième directive, figurant sous le titre VI de celle-ci, intitulé «Lieu des opérations imposables»:

«1. Le lieu d’une prestation de services est réputé se situer à l’endroit où le prestataire a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel la prestation de services est rendue ou, à défaut d’un tel siège ou d’un tel établissement stable, au lieu de son domicile ou de sa résidence habituelle.

2. Toutefois:

[...]

e)

le lieu des prestations de services suivantes, rendues [...] à des assujettis établis dans la Communauté mais en dehors du pays du prestataire, est l’endroit où le preneur a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable pour lequel la prestation de services a été rendue ou, à défaut, le lieu de son domicile ou de sa résidence habituelle:

[...]

télécommunications. Sont considérés comme services de télécommunications les services ayant pour objet la transmission, l’émission et la réception de signaux, écrits, images et sons ou informations de toute nature par fils, par radio, par moyens optiques ou par d’autres moyens électromagnétiques, y compris la cession et la concession y afférentes d’un droit d’utilisation de moyens pour une telle transmission, émission ou réception. Les services de télécommunications au sens de la présente disposition couvrent aussi la fourniture d’accès aux réseaux d’information mondiaux,

[...]»

8

L’article 10, paragraphes 1 et 2, de cette même directive, figurant sous le titre VII de celle-ci, intitulé «Fait générateur et exigibilité de la taxe», est libellé comme suit:

«1. Sont considérés comme:

a)

fait générateur de la taxe: le fait par lequel sont réalisées les conditions légales, nécessaires pour l’exigibilité de la taxe;

b)

exigibilité de la taxe: le droit que le Trésor peut faire valoir aux termes de la loi, à partir d’un moment donné, auprès du redevable pour le paiement de la taxe, même si le paiement peut en être reporté.

2. Le fait générateur de la taxe intervient et la taxe devient exigible au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée. [...]

Toutefois, en cas de versements d’acomptes avant que la livraison de biens ou la prestation de services ne soit effectuée, la taxe devient exigible au moment de l’encaissement à concurrence du montant encaissé.

[...]»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

9

Lebara est une société établie au Royaume-Uni qui fournit des services de télécommunications. Au moment des faits au principal, elle commercialisait à cette fin, par l’intermédiaire d’assujettis établis dans plusieurs autres États membres (ci-après les «distributeurs»), des cartes téléphoniques ciblant des personnes établies dans ces États membres qui souhaitaient passer des appels vers des pays tiers à un prix avantageux.

10

Sur les cartes téléphoniques vendues par Lebara étaient indiqués, notamment, un nom de marque, la valeur nominale exprimée dans la devise de l’État membre d’établissement du distributeur, un ou plusieurs numéros locaux d’accès à utiliser pour passer un appel ainsi qu’un code PIN occulté. Pour passer un appel, il suffisait de connaître ces informations, notamment le code PIN.

11

Les cartes téléphoniques ne pouvaient servir qu’à passer des communications téléphoniques. Leur validité était limitée, d’une part, par la valeur nominale qui y était indiquée et, d’autre part, par une période déterminée, à compter de la date de sa première utilisation. Au terme de cette période, tout crédit d’appel non utilisé était perdu.

12

Pour atteindre un correspondant situé dans un pays tiers, l’utilisateur composait le numéro local d’accès figurant sur la carte. Cet appel était reçu sur le réseau de télécommunications d’un opérateur de téléphonie local, avec lequel Lebara avait préalablement conclu un accord sur la mise à disposition d’un ou de plusieurs numéros locaux spécialisés, et était dirigé vers le centre de commutation appartenant à Lebara et exploité par cette dernière au Royaume-Uni. Ensuite, le système automatisé de Lebara invitait l’utilisateur à composer le code PIN indiqué sur la carte. Quand le code était reconnu par le système automatisé, l’utilisateur composait le numéro international qu’il souhaitait appeler. L’appel était donc dirigé vers sa destination finale par des fournisseurs de services internationaux de téléphonie avec lesquels Lebara avait également conclu antérieurement des accords lui donnant accès à leur réseau international de télécommunications.

13

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