Orange Polska SA v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:590
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-123/16
Date25 July 2018
Celex Number62016CJ0123
Procedure TypeRecurso de casación - infundado
62016CJ0123

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

25 juillet 2018 ( *1 )

« Pourvoi – Concurrence – Article 102 TFUE – Abus de position dominante – Marchés polonais de gros de l’accès fixe à Internet à haut débit – Refus de donner accès au réseau et de fournir des produits de gros – Règlement (CE) no 1/2003 – Article 7, paragraphe 1 – Article 23, paragraphe 2, sous a) – Intérêt légitime à constater une infraction ayant pris fin – Calcul de l’amende – Lignes directrices de 2006 pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 – Gravité – Circonstances atténuantes – Investissements réalisés par l’entreprise contrevenante – Contrôle de légalité – Contrôle de pleine juridiction – Substitution de motifs »

Dans l’affaire C‑123/16 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 27 février 2016,

Orange Polska SA, établie à Varsovie (Pologne), représentée par Me S. Hautbourg, avocat, par Mes P. Paśnik et M. Modzelewska de Raad, adwokaci, Mme A. Howard, barrister, ainsi que par M. D. Beard, QC,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Commission européenne, représentée par MM. J. Szczodrowski, L. Malferrari et E. Gippini Fournier, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

Polska Izba Informatyki i Telekomunikacji, établie à Varsovie, représentée par Me P. Litwiński, adwokat,

European Competitive Telecommunications Association AISBL (ECTA), anciennement European Competitive Telecommunications Association, établie à Bruxelles (Belgique), représentée par MM. G. I. Moir et J. MacKenzie, solicitors,

parties intervenantes en première instance,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M. A. Rosas, Mmes C. Toader, A. Prechal et M. E. Jarašiūnas (rapporteur), juges,

avocat général : M. M. Wathelet,

greffier : Mme L. Carrasco Marco, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 novembre 2017,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 21 février 2018,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, Orange Polska SA (ci-après « Orange ») demande, à titre principal, l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 17 décembre 2015, Orange Polska/Commission (T‑486/11, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2015:1002), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision C(2011) 4378 final de la Commission, du 22 juin 2011, relative à une procédure d’application de l’article 102 TFUE (Affaire COMP/39.525 – Telekomunikacja Polska) (ci-après la « décision litigieuse »), ainsi que l’annulation de cette décision.

Le cadre juridique

Le règlement (CE) no 1/2003

2

Le considérant 11 du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101 et 102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), énonce :

« Pour assurer l’application des dispositions du traité, la Commission [européenne] doit pouvoir adresser aux entreprises ou aux associations d’entreprises des décisions destinées à faire cesser les infractions aux articles [101 et 102 TFUE]. Dès lors qu’il existe un intérêt légitime à agir de la sorte, elle doit également po uvoir adopter des décisions constatant qu’une infraction a été commise dans le passé, même sans imposer d’amende. [...] »

3

L’article 4 de ce règlement, qui figure au chapitre II de ce dernier, intitulé « Compétences », prévoit que, « [p]our l’application des articles [101 et 102 TFUE], la Commission dispose des compétences prévues par le présent règlement ».

4

Au chapitre III de ce règlement, portant sur les « [d]écisions de la Commission », l’article 7 de ce dernier, intitulé « Constatation et cessation d’une infraction », dispose, à son paragraphe 1 :

« Si la Commission, agissant d’office ou saisie d’une plainte, constate l’existence d’une infraction aux dispositions de l’article [101 ou 102 TFUE], elle peut obliger par voie de décision les entreprises et associations d’entreprises intéressées à mettre fin à l’infraction constatée. À cette fin, elle peut leur imposer toute mesure corrective de nature structurelle ou comportementale [...] Lorsque la Commission y a un intérêt légitime, elle peut également constater qu’une infraction a été commise dans le passé. »

5

L’article 16 dudit règlement, qui figure au chapitre IV de ce dernier, relatif à la coopération, précise notamment, à son paragraphe 1, que, « [l]orsque les juridictions nationales statuent sur [...] des pratiques relevant de l’article [101 ou 102 TFUE] qui font déjà l’objet d’une décision de la Commission, elles ne peuvent prendre de décisions qui iraient à l’encontre de la décision adoptée par la Commission ».

6

Le chapitre VI du règlement no 1/2003 est consacré aux sanctions. À ce chapitre, l’article 23 de ce dernier, intitulé « Amendes », prévoit :

« [...]

2. La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :

a)

elles commettent une infraction aux dispositions de l’article [101 ou 102 TFUE] [...]

[...] »

7

Au chapitre VII dudit règlement, intitulé « Prescription », figure l’article 25 de ce dernier, portant sur la « [p]rescription en matière d’imposition de sanctions ». Cet article dispose, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1. Le pouvoir conféré à la Commission en vertu des articles 23 et 24 est soumis aux délais de prescription suivants :

a)

trois ans en ce qui concerne les infractions aux dispositions relatives aux demandes de renseignements ou à l’exécution d’inspections ;

b)

cinq ans en ce qui concerne les autres infractions.

2. La prescription court à compter du jour où l’infraction a été commise. Toutefois, pour les infractions continues ou répétées, la prescription ne court qu’à compter du jour où l’infraction a pris fin. »

8

Figurant parmi les dispositions générales du règlement no 1/2003, l’article 31 de celui-ci énonce :

« La Cour de justice statue avec compétence de pleine juridiction sur les recours formés contre les décisions par lesquelles la Commission a fixé une amende ou une astreinte. Elle peut supprimer, réduire ou majorer l’amende ou l’astreinte infligée. »

La directive 2014/104/UE

9

La directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 novembre 2014, relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l’Union européenne (JO 2014, L 349, p. 1), prévoit, à son article 10 :

« 1. Les États membres arrêtent, conformément au présent article, les règles relatives aux délais de prescription applicables aux actions en dommages et intérêts. [...]

[...]

4. Les États membres veillent à ce qu’un délai de prescription soit suspendu ou, selon le droit national, interrompu par tout acte d’une autorité de concurrence visant à l’instruction ou à la poursuite d’une infraction au droit de la concurrence à laquelle l’action en dommages et intérêts se rapporte. Cette suspension prend fin au plus tôt un an après la date à laquelle la décision constatant une infraction est devenue définitive ou à laquelle il a été mis un terme à la procédure d’une autre manière. »

10

L’article 18, paragraphe 3, de cette directive dispose :

« Une autorité de concurrence peut considérer la réparation versée à la suite d’un règlement consensuel et avant qu’elle n’ait adopté sa décision d’imposer une amende comme une circonstance atténuante. »

Les lignes directrices pour le calcul des amendes

11

Les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices de 2006 »), dans leur partie relative à la détermination du montant de base de l’amende, précisent :

« 19. Le montant de base de l’amende sera lié à une proportion de la valeur des ventes, déterminée en fonction du degré de gravité de l’infraction, multipliée par le nombre d’années d’infraction.

20. L’appréciation de la gravité sera faite au cas par cas pour chaque type d’infraction, [en] tenant compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce.

21. En règle générale, la proportion de la valeur des ventes prise en compte sera fixée à un niveau pouvant aller jusqu’à 30 %.

22. Afin de décider si la proportion de la valeur des ventes à prendre en considération dans un cas donné devrait être au bas ou au haut de cette échelle, la Commission tiendra compte d’un certain nombre de facteurs, tels que la nature de l’infraction, la part de marché cumulée de toutes les parties concernées, l’étendue géographique de l’infraction, et la mise en œuvre ou non de l’infraction.

[...] »

12

Le point 29 de ces lignes directrices, qui porte sur les circonstances atténuantes, indique que « [l]e montant de base de l’amende peut être réduit lorsque la Commission constate l’existence de circonstances atténuantes » et en dresse une liste exemplative.

Les antécédents du litige et la décision litigieuse

13

Les antécédents du litige et la décision litigieuse, tels qu’ils sont exposés aux points 1 à 34 de l’arrêt attaqué, peuvent être résumés comme suit.

14

Orange est le successeur juridique de Telekomunikacja Polska SA (ci-après, également, « Orange »), une entreprise de télécommunications constituée en Pologne en 1991 après la privatisation d’un ancien monopole d’État.

...

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