Sot. Lélos kai Sia EE and Others v GlaxoSmithKline AEVE Farmakeftikon Proïonton, formerly Glaxowellcome AEVE.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:504
Date16 September 2008
Celex Number62006CJ0468
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-478/06,C-468/06

Affaires jointes C-468/06 à C-478/06

Sot. Lélos kai Sia EE e.a.

contre

GlaxoSmithKline AEVE Farmakeftikon Proïonton, anciennement Glaxowellcome AEVE

(demandes de décision préjudicielle, introduites par l'Efeteio Athinon)

«Article 82 CE — Abus de position dominante — Produits pharmaceutiques — Refus d’approvisionner des grossistes effectuant des exportations parallèles — Caractère normal des commandes»

Sommaire de l'arrêt

1. Concurrence — Position dominante — Abus — Refus de livrer des grossistes exportant vers d'autres États membres — Conditions — Refus de nature à éliminer toute concurrence effective

(Art. 82 CE)

2. Concurrence — Position dominante — Abus — Refus de livraison — Conditions

(Art. 3, § 1, g), CE et 82 CE)

3. Concurrence — Position dominante — Abus — Refus de livrer des grossistes exportant vers d'autres États membres — Secteur des produits pharmaceutiques — Incidence des effets du commerce parallèle de médicaments pour le consommateur final sur le caractère abusif du refus

(Art. 82 CE)

4. Concurrence — Règles communautaires — Champ d'application matériel — Pratiques visant à interdire ou à restreindre les exportations parallèles — Inclusion

(Art. 3, § 1, g), CE, 81 CE et 82 CE)

5. Concurrence — Règles communautaires — Champ d'application matériel — Secteur des produits pharmaceutiques soumis à une réglementation nationale en matière de prix — Inclusion

(Art. 81 CE et 82 CE)

6. Concurrence — Position dominante — Abus — Refus de livrer des grossistes exportant vers d'autres États membres — Secteur des produits pharmaceutiques — Incidence de la réglementation nationale en matière de prix des médicaments sur le caractère abusif du refus

(Art. 3, § 1, g) et t), CE et 82 CE)

1. Le refus d'une entreprise disposant d’une position dominante sur le marché d’un produit donné de satisfaire les commandes passées par un client antérieur constitue une exploitation abusive de cette position dominante au sens de l’article 82 CE lorsque, sans aucune justification objective, ce comportement est de nature à éliminer la concurrence de la part d’un partenaire commercial. S’agissant du refus d’une entreprise de livrer ses produits dans un État membre à des grossistes qui exportent ces produits vers d’autres États membres, un tel effet sur la concurrence peut exister non seulement lorsque ce refus fait obstacle aux activités de ces grossistes sur le marché dudit État membre, mais également lorsqu’il conduit à éliminer la concurrence effective de ceux-ci dans la distribution de ces mêmes produits sur les marchés de ces autres États membres.

(cf. points 34-35)

2. Une entreprise disposant d’une position dominante pour la distribution d’un produit - bénéficiant du prestige d’une marque connue et appréciée des consommateurs - ne saurait cesser ses livraisons à un client ancien et respectant les usages commerciaux, lorsque les commandes de ce client ne présentent aucun caractère anormal. Un tel comportement serait contraire aux objectifs énoncés à l’article 3, paragraphe 1, sous g), CE, explicités par l’article 82 CE, notamment au second alinéa, sous b) et c), de celui-ci, puisque le refus de vendre limiterait les débouchés au préjudice des consommateurs et établirait une discrimination pouvant aller jusqu’à l’élimination d’un partenaire commercial du marché en cause.

(cf. point 49)

3. Afin de déterminer si le refus d’une entreprise pharmaceutique détenant une position dominante sur le marché national de la distribution de certains médicaments de satisfaire les commandes de grossistes actifs dans l’exportation parallèle vers d’autres États membres où les prix de vente de ces médicaments sont fixés à un niveau supérieur relève effectivement de l’interdiction énoncée à l’article 82 CE, notamment au second alinéa, sous b), de cet article, il convient d’examiner s'il existe des considérations objectives en raison desquelles une telle pratique ne peut être considérée comme une exploitation abusive de la position dominante détenue par cette entreprise.

À cet égard, une telle entreprise ne saurait se fonder sur le fait que les exportations parallèles qu’elle vise à limiter n’auraient qu’une utilité minime pour les consommateurs finals. En effet, les exportations parallèles de médicaments d’un État membre où les prix de ceux-ci sont bas vers d’autres États membres dans lesquels les prix sont plus élevés permettent, en principe, aux acheteurs desdits médicaments dans ces derniers États de disposer d’une source alternative d’approvisionnement, ce qui conduit nécessairement à certains avantages pour le consommateur final de ces médicaments. L’attractivité de l’autre source d’approvisionnement que constitue le commerce parallèle dans l’État membre d’importation réside dans le fait que ce commerce est en mesure d’offrir sur le marché de cet État membre les mêmes produits à des prix inférieurs à ceux pratiqués sur ce même marché par les entreprises pharmaceutiques. De ce fait, même dans les États membres où les prix des médicaments font l’objet d’une réglementation étatique, le commerce parallèle est susceptible d’exercer une pression sur les prix et, partant, de créer des avantages financiers non seulement pour les caisses d’assurance maladie, mais également pour les patients concernés, pour lesquels le montant du prix des médicaments qui demeure à leur charge sera moins élevé. De même, le commerce parallèle de médicaments d’un État membre vers un autre État membre est susceptible d’élargir le choix ouvert aux entités de ce dernier qui s’approvisionnent en médicaments au moyen d’une procédure d’appel d’offres, dans le cadre de laquelle les importateurs parallèles peuvent offrir des médicaments à des prix moins élevés.

(cf. points 38-39, 51, 53, 55-57)

4. Dans le cadre de l’application de l’article 81 CE, un accord entre producteur et distributeur qui tendrait à reconstituer les cloisonnements nationaux dans le commerce entre États membres pourrait être de nature à contrarier l’objectif du traité visant à réaliser l’intégration des marchés nationaux par l’établissement d’un marché unique. Ainsi, des accords visant à cloisonner les marchés nationaux selon les frontières nationales ou rendant plus difficile l’interpénétration des marchés nationaux, notamment ceux visant à interdire ou à restreindre les exportations parallèles, ont été qualifiés par le juge communautaire d’accords ayant pour objet de restreindre la concurrence au sens dudit article du traité. À la lumière dudit objectif du traité et de celui visant à assurer que la concurrence n’est pas faussée dans le marché intérieur, ne sauraient donc non plus être soustraites à l’interdiction énoncée à l’article 82 CE les pratiques d’une entreprise en position dominante visant à éviter toutes exportations parallèles d’un État membre vers d’autres États membres, pratiques qui, en cloisonnant les marchés nationaux, neutralisent les avantages d’une concurrence efficace en termes d’approvisionnement et de prix que ces exportations procureraient aux consommateurs finals dans ces autres États.

(cf. points 65-66)

5. La circonstance qu'il existe un degré de réglementation étatique des prix dans le secteur des produits pharmaceutiques ne peut exclure l’application des règles communautaires de la concurrence. En effet, d’une part, le contrôle exercé par les États membres sur les prix de vente ou de remboursement de ces produits ne soustrait pas entièrement leur prix à la loi de l’offre et de la demande. D’autre part, lorsqu’un produit pharmaceutique est protégé par un brevet conférant un monopole temporaire à son titulaire, la concurrence sur le prix qui peut exister entre un producteur et ses distributeurs, ou entre commerçants parallèles et distributeurs nationaux, est, jusqu’à l’expiration de ce brevet, la seule forme de concurrence envisageable.

(cf. points 61, 64, 67)

6. L'intensité de la réglementation relative aux prix des médicaments ne saurait ôter son caractère abusif à tout refus d'une entreprise pharmaceutique en position dominante de satisfaire les commandes qui lui sont adressées par des grossistes actifs dans les exportations parallèles. Néanmoins, une telle entreprise doit être en mesure de prendre des mesures raisonnables et proportionnées à la nécessité de préserver ses propres intérêts commerciaux.

Or, il ne peut être ignoré que, dans les États membres qui connaissent un système de fixation des prix dans le secteur des produits pharmaceutiques, cette intervention étatique est un des facteurs susceptibles de créer des opportunités pour le commerce parallèle. En outre, à la lumière des objectifs du traité visant à la protection du consommateur par une concurrence non faussée ainsi qu’à l’intégration des marchés nationaux, les règles de la concurrence ne sauraient être interprétées de telle manière que, pour défendre ses propres intérêts commerciaux, le seul choix qui reste à une entreprise pharmaceutique en position dominante est de ne pas commercialiser du tout ses médicaments dans un État membre où les prix de ceux-ci sont fixés à un niveau relativement bas.

Afin d'apprécier si le refus d’une telle entreprise pharmaceutique de livrer des grossistes actifs dans les exportations parallèles constitue une mesure raisonnable et proportionnée par rapport à la menace que constituent ces exportations pour ses intérêts commerciaux légitimes, il convient donc de déterminer si les commandes passées par ces grossistes présentent un caractère anormal au regard des relations commerciales antérieures entretenues par l’entreprise avec les grossistes concernés ainsi que de l’ampleur des commandes par rapport aux besoins du marché de l’État membre concerné.

S’il ne saurait être admis qu’une telle entreprise, dans un État membre où les prix sont relativement bas, cesse d’honorer les commandes normales d’un client antérieur au seul motif que celui-ci, tout en approvisionnant le marché dudit État membre, exporte certaines des quantités...

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