Syndicat des cadres de la sécurité intérieure v Premier ministre and Others.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2019:318
Docket NumberC-254/18
Celex Number62018CJ0254
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date11 April 2019
62018CJ0254

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

11 avril 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 2003/88/CE – Aménagement du temps de travail – Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs – Durée maximale hebdomadaire de travail – Période de référence – Caractère glissant ou fixe – Dérogation – Fonctionnaires de police »

Dans l’affaire C‑254/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (France), par décision du 4 avril 2018, parvenue à la Cour le 12 avril 2018, dans la procédure

Syndicat des cadres de la sécurité intérieure

contre

Premier ministre,

Ministre de l’Intérieur,

Ministre de l’Action et des Comptes publics,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. T. von Danwitz, E. Levits, C. Vajda (rapporteur) et P. G. Xuereb, juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : Mme V. Giacobbo-Peyronnel, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 29 novembre 2018,

considérant les observations présentées :

pour le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure, par Me P. Gernez, avocat,

pour le gouvernement français, par M. R. Coesme ainsi que par Mmes A.-L. Desjonquères et E. de Moustier, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme C. Valero et par M. M. van Beek, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 février 2019,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, sous b), de l’article 16, sous b), de l’article 17, paragraphe 3, et de l’article 19, premier alinéa, de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO 2003, L 299, p. 9).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Syndicat des cadres de la sécurité intérieure (ci-après le « SCSI ») au Premier ministre (France), au ministre de l’Intérieur (France) ainsi qu’au ministre de l’Action et des Comptes publics (France) au sujet de la période de référence utilisée pour calculer la durée moyenne hebdomadaire de travail des fonctionnaires actifs des services de la police nationale.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 89/391/CEE

3

L’article 2 de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (JO 1989, L 183, p. 1), énonce :

« 1. La présente directive s’applique à tous les secteurs d’activités, privés ou publics (activités industrielles, agricoles, commerciales, administratives, de service, éducatives, culturelles, de loisirs, etc.).

2. La présente directive n’est pas applicable lorsque des particularités inhérentes à certaines activités spécifiques dans la fonction publique, par exemple dans les forces armées ou la police, ou à certaines activités spécifiques dans les services de protection civile s’y opposent de manière contraignante.

Dans ce cas, il y a lieu de veiller à ce que la sécurité et la santé des travailleurs soient assurés, dans toute la mesure du possible, compte tenu des objectifs de la présente directive. »

La directive 2003/88

4

Le considérant 15 de la directive 2003/88 est libellé comme suit :

« Compte tenu des questions susceptibles d’être soulevées par l’aménagement du temps de travail, il convient de prévoir une certaine souplesse dans l’application de certaines dispositions de la présente directive, tout en assurant le respect des principes de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs. »

5

L’article 1er de la directive 2003/88 énonce :

« [...]

2. La présente directive s’applique :

a)

aux périodes minimales de repos journalier, de repos hebdomadaire et de congé annuel ainsi qu’au temps de pause et à la durée maximale hebdomadaire de travail, et

b)

à certains aspects du travail de nuit, du travail posté et du rythme de travail.

3. La présente directive s’applique à tous les secteurs d’activités, privés ou publics, au sens de l’article 2 de la directive 89/391/CEE, sans préjudice des articles 14, 17, 18 et 19 de la présente directive.

[...]

4. Les dispositions de la directive 89/391/CEE s’appliquent pleinement aux matières visées au paragraphe 2, sans préjudice des dispositions plus contraignantes et/ou spécifiques contenues dans la présente directive. »

6

L’article 3 de la directive 2003/88 relatif au repos journalier prévoit :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de vingt-quatre heures, d’une période minimale de repos de onze heures consécutives. »

7

L’article 5 de cette directive, intitulé « Repos hebdomadaire », dispose :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie, au cours de chaque période de sept jours, d’une période minimale de repos sans interruption de vingt-quatre heures auxquelles s’ajoutent les onze heures de repos journalier prévues à l’article 3.

[...] »

8

L’article 6 de ladite directive, intitulé « Durée maximale hebdomadaire de travail », est libellé comme suit :

« Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que, en fonction des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs :

[...]

b)

la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours n’excède pas quarante-huit heures, y compris les heures supplémentaires. »

9

L’article 16 de la même directive, intitulé « Périodes de référence », dispose :

« Les États membres peuvent prévoir :

[...]

b)

pour l’application de l’article 6 (durée maximale hebdomadaire de travail), une période de référence ne dépassant pas quatre mois.

Les périodes de congé annuel payé, accordé conformément à l’article 7, et les périodes de congé de maladie ne sont pas prises en compte ou sont neutres pour le calcul de la moyenne ;

[...] »

10

L’article 17 de la directive 2003/88 prévoit, notamment, les dérogations suivantes :

« [...]

2. Les dérogations prévues aux paragraphes 3, 4 et 5 peuvent être adoptées par voie législative, réglementaire et administrative ou par voie de conventions collectives ou d’accords conclus entre partenaires sociaux, à condition que des périodes équivalentes de repos compensateur soient accordées aux travailleurs concernés ou que, dans des cas exceptionnels dans lesquels l’octroi de telles périodes équivalentes de repos compensateur n’est pas possible pour des raisons objectives, une protection appropriée soit accordée aux travailleurs concernés.

3. Conformément au paragraphe 2 du présent article, il peut être dérogé aux articles 3, 4, 5, 8 et 16 :

[...]

b)

pour les activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d’assurer la protection des biens et des personnes, notamment lorsqu’il s’agit de gardiens ou de concierges ou d’entreprises de gardiennage ;

c)

pour les activités caractérisées par la nécessité d’assurer la continuité du service ou de la production [...]

[...] »

11

L’article 19 de cette directive, intitulé « Limitations aux dérogations aux périodes de référence », énonce, à ses premier et deuxième alinéas :

« La faculté de déroger à l’article 16, point b), prévue à l’article 17, paragraphe 3, et à l’article 18 ne peut avoir pour effet l’établissement d’une période de référence dépassant six mois.

Toutefois, les États membres ont la faculté, tout en respectant les principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, de permettre que, pour des raisons objectives ou techniques ou pour des raisons ayant trait à l’organisation du travail, les conventions collectives ou accords conclus entre partenaires sociaux fixent des périodes de référence ne dépassant en aucun cas douze mois. »

Le droit français

12

L’article 3 du décret no 2000-815, du 25 août 2000, relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État et dans la magistrature (JORF du 29 août 2000, p. 13301), tel que modifié par le décret no 2011-184, du 15 février 2011 (JORF du 17 février 2011, p. 2963), dispose :

« I.– L’organisation du travail doit respecter les garanties minimales ci-après définies.

La durée hebdomadaire du travail effectif, heures supplémentaires comprises, ne peut excéder ni quarante-huit heures au cours d’une même semaine, ni quarante-quatre heures en moyenne sur une période quelconque de douze semaines consécutives et le repos hebdomadaire, comprenant en principe le dimanche, ne peut être inférieur à trente-cinq heures.

[...]

II.– Il ne peut être dérogé aux règles énoncées au I que dans les cas et conditions ci-après :

a)

Lorsque l’objet même du service public en cause l’exige en permanence, notamment pour la protection des personnes et des biens, par décret en Conseil d’État, pris après avis du comité d’hygiène et de sécurité le cas échéant, du comité technique ministériel et du Conseil supérieur de la fonction publique, qui détermine les contreparties accordées aux catégories d’agents concernés ;

[...] »

13

L’article 1er du décret no 2002-1279, du 23 octobre 2002, portant dérogations aux garanties minimales de durée du travail et de repos applicables aux personnels de la police nationale (JORF du 25 octobre 2002, p. 17681), tel que modifié par le décret no...

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