Marcandi Limited v Commissioners for Her Majesty's Revenue & Customs.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:540
Date05 July 2018
Celex Number62016CJ0544
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-544/16
62016CJ0544

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

5 juillet 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 2, point 1, sous c) – Émission de “crédits” permettant d’enchérir lors de ventes aux enchères en ligne – Prestation de services à titre onéreux – Opération préalable – Article 73 – Base d’imposition »

Dans l’affaire C‑544/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par First-tier Tribunal (Tax Chamber) (Royaume-Uni), par décision du 17 octobre 2016, parvenue à la Cour le 28 octobre 2016, dans la procédure

Marcandi Limited, agissant sous le nom commercial Madbid

contre

Commissioners for Her Majesty’s Revenue & Customs,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, MM. E. Levits, A. Borg Barthet (rapporteur), Mme M. Berger et M. F. Biltgen, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 13 décembre 2017,

considérant les observations présentées :

pour Marcandi Ltd, par M. J. Brinsmead-Stockham, barrister, Mme C. Van Zyl, solicitor, et Mme A. Brown, advocate,

pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. D. Robertson et Mme Z. Lavery, en qualité d’agents, assistés de M. P. Mantle, barrister,

pour la Commission européenne, par M. R. Lyal et Mme L. Lozano Palacios, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 mars 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, paragraphe 1, des articles 14, 24, 62, 63, 65 et 73 ainsi que de l’article 79, sous b), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Marcandi Ltd, agissant sous le nom commercial Madbid, aux Commissioners for Her Majesty’s Revenue and Customs (administration fiscale et douanière, Royaume-Uni) (ci-après l’« administration fiscale ») au sujet du régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable à la vente de « crédits » permettant de participer à des ventes aux enchères en ligne.

Le cadre juridique

3

Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la directive TVA :

« Sont soumises à la TVA les opérations suivantes :

a)

les livraisons de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ;

[...]

c)

les prestations de services, effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ;

[...] »

4

L’article 14, paragraphe 1, de cette directive définit la livraison de biens comme « le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire ».

5

Aux termes de l’article 24, paragraphe 1, de ladite directive :

« Est considérée comme “prestation de services” toute opération qui ne constitue pas une livraison de biens. »

6

L’article 62 de la même directive dispose :

« Aux fins de la présente directive sont considérés comme :

1)

“fait générateur de la taxe” le fait par lequel sont réalisées les conditions légales nécessaires pour l’exigibilité de la taxe ;

2)

“exigibilité de la taxe” le droit que le Trésor peut faire valoir aux termes de la loi, à partir d’un moment donné, auprès du redevable pour le paiement de la taxe, même si le paiement peut en être reporté. »

7

L’article 63 de la directive TVA prévoit :

« Le fait générateur de la taxe intervient et la taxe devient exigible au moment où la livraison de biens ou la prestation de services est effectuée. »

8

L’article 65 de cette directive est rédigé comme suit :

« En cas de versements d’acomptes avant que la livraison de biens ou la prestation de services ne soit effectuée, la taxe devient exigible au moment de l’encaissement, à concurrence du montant encaissé. »

9

L’article 73 de ladite directive prévoit :

« Pour les livraisons de biens et les prestations de services autres que celles visées aux articles 74 à 77, la base d’imposition comprend tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acquéreur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations. »

10

L’article 79 de la même directive dispose :

« Ne sont pas à comprendre dans la base d’imposition les éléments suivants :

[...]

b)

les rabais et ristournes de prix consentis à l’acquéreur ou au preneur et acquis au moment où s’effectue l’opération ;

[...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

11

Marcandi est une société établie au Royaume-Uni qui exerce des activités de vente en ligne sous le nom commercial Madbid (ci-après « Madbid »). La majorité des biens vendus par Madbid sont des produits dits « high tech », tels que des téléphones mobiles, des tablettes, des ordinateurs, des téléviseurs. Madbid vend occasionnellement des biens d’une plus grande valeur, comme, notamment, des voitures.

12

Le site Internet de Madbid permet à ses utilisateurs d’acheter des biens vendus par Madbid soit pour un prix déterminé, auprès de la boutique en ligne, soit au moyen d’enchères en ligne.

13

Durant la période concernée par le litige au principal, Madbid était enregistrée comme assujetti à la TVA au Royaume-Uni ainsi que dans plusieurs autres États membres, notamment en Allemagne.

14

Aux termes de la clause 1.2 de ses conditions générales, Madbid « exploite un site de vente aux enchères avec paiement pour participation aux enchères ». Les utilisateurs qui souhaitent participer aux ventes aux enchères organisées par Madbid sont tenus d’acquérir auprès de celle-ci, contre paiement, des « crédits », qui sont nécessaires pour enchérir et ne peuvent servir à d’autres fins. En particulier, ces « crédits » ne peuvent être utilisés pour acheter les biens vendus dans la boutique en ligne. Ils ne peuvent pas non plus être convertis en argent.

15

Chacune des pages du site Internet de Madbid comporte un bouton qui permet à l’utilisateur d’accéder à une page sur laquelle sont vendus les « crédits ». Lorsqu’ils ont été achetés, ceux-ci sont portés au crédit du compte de l’utilisateur. Chaque « crédit » est identifié par un code unique et se voit attribuer une valeur monétaire correspondant au montant payé par l’utilisateur. Des « crédits gratuits » sont parfois alloués aux utilisateurs. D’une valeur de 0,00 livre sterling (GBP), ils permettent uniquement aux utilisateurs de participer aux ventes aux enchères organisées par Madbid. Ces « crédits gratuits » expirent à l’issue d’une période de 30 jours, tandis que les « crédits » payés sont valables pendant 180 jours.

16

Pour chaque vente aux enchères, un prix de lancement est fixé à 0,00 GBP, le compte à rebours étant réglé sur le temps maximum imparti pour enchérir, lequel est généralement d’une minute. À chaque nouvelle enchère, le compte à rebours reprend avec la même durée que celle initialement fixée. Pour chaque vente, un nombre défini de « crédits », compris entre 1 et 8, est nécessaire pour enchérir et l’utilisateur, en cliquant sur le bouton « offre », utilise ses « crédits » à hauteur de ce nombre. L’offre ainsi faite par l’utilisateur est de 0,01 GBP plus élevée que l’offre précédente et devient l’offre la plus élevée pour la vente concernée. Le prix de vente affiché du bien augmente également de 0,01 GBP.

17

L’utilisateur qui remporte une vente aux enchères bénéficie du droit d’acheter le bien au prix auquel il a été adjugé, augmenté des frais de transport et de manutention. La valeur des « crédits » utilisés pour enchérir au cours de cette vente est épuisée et n’est, partant, pas imputée sur le prix du bien adjugé. Tant que le bien ne lui a pas été expédié, l’utilisateur dispose du droit d’annuler sa commande. Le cas échéant, il sera remboursé à hauteur du prix auquel il a remporté la vente.

18

Par ailleurs, une fonction « acheter maintenant » permet à l’utilisateur d’acheter un bien identique à celui faisant l’objet de la vente aux enchères à laquelle il participe, pour un prix qui, au cours de celle-ci, diminue à hauteur de la contre-valeur des « crédits » qu’il a utilisés pour enchérir dans le cadre de cette vente. L’utilisateur qui achète un bien par l’intermédiaire de la fonction « acheter maintenant » au cours d’une vente aux enchères ne peut plus enchérir au titre de celle-ci.

19

Enfin, la fonction « remise cumulée » permet à l’utilisateur qui n’a pas remporté la vente aux enchères et qui n’a pas non plus utilisé la fonction « acheter maintenant » d’obtenir une remise qu’il pourra faire valoir ultérieurement, lors de l’achat d’un bien disponible dans la boutique en ligne de Madbid. Une « remise cumulée », dont le montant correspond à la contre-valeur des « crédits » ayant permis à l’utilisateur d’enchérir dans le cadre de ladite vente, expire à l’issue d’un délai de 365 jours.

20

Si l’utilisateur qui a effectué un achat au moyen des fonctions « remise cumulée » ou « acheter maintenant » annule sa commande, il bénéficie d’un remboursement à hauteur du montant qu’il a payé pour les biens en question, à l’exclusion de la contre-valeur des «...

To continue reading

Request your trial
4 practice notes
  • Opinion of Advocate General Kokott delivered on 10 February 2022.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 February 2022
    ...Marek Batko (C‑276/18, EU:C:2020:485, point 53). C’est également en ce sens que vont dans le sens de l’arrêt du 5 juillet 2018, Marcandi (C‑544/16, EU:C:2018:540, point 22 Ainsi, voir arrêt du 17 juin. Décembre 2015, WebMindLicenses (C‑419/14, EU:C:2015:832, point 59) ; En revanche, arrêt d......
  • KrakVet Marek Batko sp. K. v Nemzeti Adó- és Vámhivatal Fellebbviteli Igazgatósága.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 18 June 2020
    ...not, in any event, lead to a misapplication of the provisions of that directive (see, to that effect, judgment of 5 July 2018, Marcandi, C‑544/16, EU:C:2018:540, paragraph 51 Where they find that the same transaction has been the object of a different tax treatment in another Member State, ......
  • Opinion of Advocate General Ćapeta delivered on 27 January 2022.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 27 January 2022
    ...EU:C:1996:398), apartado 15; de 3 de mayo de 2012, Lebara (C‑520/10, EU:C:2012:264), apartado 32, y de 5 de julio de 2018, Marcandi (C‑544/16, EU:C:2018:540), apartado 38 Sentencia de 21 de febrero de 2006, BUPA Hospitals y Goldsborough Developments (C‑419/02, EU:C:2006:122), apartado 50 y ......
  • Paulo Nascimento Consulting - Mediação Imobiliária, Lda, contra Autoridade Tributária e Aduaneira.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 2 May 2019
    ...las sentencias de 29 de octubre de 2015, Saudaçor, C‑174/14, EU:C:2015:733, apartado 32, y de 5 de julio de 2018, Marcandi, C‑544/16, EU:C:2018:540, apartados 36 y 31 En particular, su artículo 2, apartado 1, letras a) y c), y su artículo 9, apartado 1, párrafo primero. 32 A diferencia, en ......
4 cases
  • Opinion of Advocate General Kokott delivered on 10 February 2022.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 February 2022
    ...Marek Batko (C‑276/18, EU:C:2020:485, point 53). C’est également en ce sens que vont dans le sens de l’arrêt du 5 juillet 2018, Marcandi (C‑544/16, EU:C:2018:540, point 22 Ainsi, voir arrêt du 17 juin. Décembre 2015, WebMindLicenses (C‑419/14, EU:C:2015:832, point 59) ; En revanche, arrêt d......
  • Opinion of Advocate General Ćapeta delivered on 27 January 2022.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 27 January 2022
    ...(C‑288/94, EU:C:1996:398, point 15) ; du 3 mai 2012, Lebara (C‑520/10, EU:C:2012:264, point 32), et du 5 juillet 2018, Marcandi (C‑544/16, EU:C:2018:540, point 38 Arrêt du 21 février 2006, BUPA Hospitals et Goldsborough Developments (C‑419/02, EU:C:2006:122, point 50 et jurisprudence citée)......
  • KrakVet Marek Batko sp. K. v Nemzeti Adó- és Vámhivatal Fellebbviteli Igazgatósága.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 18 June 2020
    ...ogni caso, portare a un’applicazione erronea delle disposizioni di tale direttiva (v., in tal senso, sentenza del 5 luglio 2018, Marcandi, C‑544/16, EU:C:2018:540, punto 51 Quando accertano che una stessa operazione è oggetto di un trattamento fiscale differente in un altro Stato membro, i ......
  • Paulo Nascimento Consulting - Mediação Imobiliária, Lda, contra Autoridade Tributária e Aduaneira.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 2 May 2019
    ...en particular, las sentencias de 29 de octubre de 2015, Saudaçor, C‑174/14, EU:C:2015:733, apartado 32, y de 5 de julio de 2018, Marcandi, C‑544/16, EU:C:2018:540, apartados 36 y 31 En particular, su artículo 2, apartado 1, letras a) y c), y su artículo 9, apartado 1, párrafo primero. 32 A ......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT