Kattner Stahlbau GmbH v Maschinenbau- und Metall- Berufsgenossenschaft.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:127
Docket NumberC-350/07
Celex Number62007CJ0350
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date05 March 2009

Affaire C-350/07

Kattner Stahlbau GmbH

contre

Maschinenbau- und Metall- Berufsgenossenschaft

(demande de décision préjudicielle, introduite par

le Sächsisches Landessozialgericht)

«Concurrence — Articles 81 CE, 82 CE et 86 CE — Affiliation obligatoire à un organisme d'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles — Notion d''entreprise' — Abus de position dominante — Libre prestation des services — Articles 49 CE et 50 CE — Restriction — Justification — Risque d'atteinte grave à l'équilibre financier du système de sécurité sociale»

Sommaire de l'arrêt

1. Concurrence — Règles communautaires — Entreprise — Notion — Organisme d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles

(Art. 81 CE et 82 CE)

2. Libre prestation des services — Restrictions — Réglementation nationale instaurant un régime d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles — Justification par des raisons d'intérêt général — Équilibre financier d'une branche de la sécurité sociale

(Art. 49 CE et 50 CE)

1. Une caisse professionnelle, auprès de laquelle les entreprises relevant d'une branche d'activité et d'un territoire déterminés ont l'obligation de s'affilier au titre de l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, ne constitue pas une entreprise au sens des articles 81 CE et 82 CE, mais remplit une fonction à caractère exclusivement social, dès lors qu'elle opère dans le cadre d'un régime d'assurance qui met en oeuvre le principe de solidarité et que ce régime est soumis au contrôle de l'État. La circonstance que la caisse professionnelle fournit directement des services d'assurance n'est pas, en tant que telle, de nature à affecter le caractère purement social de cette fonction, dans la mesure où elle n'affecte ni le caractère solidaire dudit régime ni le contrôle qui est exercé par l'État sur celui-ci.

S'agissant de la condition relative au caractère solidaire du régime d'assurance, elle est remplie lorsque celui-ci est financé par des cotisations dont le taux n'est pas systématiquement proportionnel au risque assuré et que la valeur des prestations servies n'est pas nécessairement proportionnelle à la rémunération de l'assuré. Ne remettent pas en cause le caractère solidaire du financement ni l'absence d'un plafonnement des cotisations, ni le fait que ce régime est mis en oeuvre non par un seul organisme, mais par plusieurs sur une base sectorielle et/ou géographique, ni, enfin, le fait que ces organismes peuvent décider de fixer une cotisation minimale uniforme.

En ce qui concerne la condition relative au contrôle exercé par l'État, le fait de conférer une marge de manoeuvre aux caisses professionnelles, dans le cadre d'un régime d'autogestion, pour fixer des éléments qui déterminent le montant des cotisations et des prestations ne saurait, en tant que tel, être susceptible de modifier la nature de l'activité exercée par lesdites caisses, dans la mesure où cette marge de manoeuvre est prévue et strictement encadrée par la loi et où, en outre, ces dernières sont à cet égard sous la tutelle de l'État.

(cf. points 44, 50-55, 61-62, 64-68, disp. 1)

2. Une réglementation nationale instaurant un régime d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, qui poursuit un objectif social, opère selon un système mettant en oeuvre le principe de solidarité et est placé sous le contrôle de l'État, est susceptible de constituer une restriction à la libre prestation des services en ce qu'elle gêne ou rend moins attrayant, voire empêche, directement ou indirectement, l'exercice de cette liberté par des prestataires de service d'assurance établis dans d'autres États membres qui souhaitent proposer des contrats d'assurance couvrant de tels risques dans l'État membre concerné, et par des entreprises relevant dudit régime qui souhaitent s'adresser à de tels prestataires. Toutefois, une telle réglementation répond à des raisons impérieuses d'intérêt général visant à assurer l'équilibre financier d'une branche de la sécurité sociale, car l'obligation d'affiliation, en ce qu'elle assure le regroupement de toutes les entreprises relevant du régime concerné au sein de communautés de risques, permet la mise en oeuvre du principe de solidarité. Dans ces conditions, les articles 49 CE et 50 CE ne s'opposent pas à une telle réglementation, pour autant que ce régime n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif consistant à assurer l'équilibre financier d'une branche de la sécurité sociale, ce qu'il appartient à la juridiction nationale de vérifier.

À cet égard, le fait que ce régime offre une couverture minimale, de sorte que, en dépit de l'obligation d'affiliation qu'il comporte, il est loisible aux entreprises qui en relèvent de compléter cette couverture en souscrivant des assurances supplémentaires, à supposer que celles-ci soient disponibles sur le marché, constitue un facteur militant en faveur de la proportionnalité.

(cf. points 77, 82-89, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

5 mars 2009 (*)

«Concurrence – Articles 81 CE, 82 CE et 86 CE – Affiliation obligatoire à un organisme d’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles – Notion d’‘entreprise’ – Abus de position dominante – Libre prestation des services – Articles 49 CE et 50 CE – Restriction – Justification – Risque d’atteinte grave à l’équilibre financier du système de sécurité sociale»

Dans l’affaire C‑350/07,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Sächsisches Landessozialgericht (Allemagne), par décision du 25 juillet 2007, parvenue à la Cour le 30 juillet 2007, dans la procédure

Kattner Stahlbau GmbH

contre

Maschinenbau- und Metall- Berufsgenossenschaft,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh (rapporteur), J. Klučka, U. Lõhmus et Mme P. Lindh, juges,

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

– pour Kattner Stahlbau GmbH, par Me R. Mauer, Rechtsanwalt,

– pour Maschinenbau- und Metall- Berufsgenossenschaft, par Me H. Plagemann, Rechtsanwalt,

– pour le gouvernement allemand, par MM. M. Lumma et J. Möller, en qualité d’agents,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. V. Kreuschitz et O. Weber, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 18 novembre 2008,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 49 CE et 50 CE ainsi que 81 CE, 82 CE et 86 CE.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Kattner Stahlbau GmbH (ci‑après «Kattner») à la Maschinenbau- und Metall- Berufsgenossenschaft (caisse professionnelle du secteur de la construction mécanique et de la métallerie, ci‑après la «MMB») au sujet de l’affiliation obligatoire de Kattner à cette dernière au titre de l’assurance légale contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Le cadre juridique national

3 En Allemagne, le régime légal d’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles est régi par le livre VII du code de la sécurité sociale (Sozialgesetzbuch VII), dans sa version issue de la loi du 7 août 1996 (BGBl 1998 I, p. 1254, ci‑après le «SGB VII»), entré en vigueur le 1er janvier 1997. L’article 1er du SGB VII prévoit que cette assurance a pour objectifs:

«1. De prévenir par tous les moyens appropriés les accidents du travail et les maladies professionnelles ainsi que tous les dangers pour la santé liés au travail, et

2. après la survenance d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, de rétablir par tous les moyens appropriés la santé et la capacité de travail des assurés et de dédommager ces derniers ou leurs ayants droit par des prestations en espèces.»

4 Il ressort de la décision de renvoi ainsi que des observations soumises à la Cour que ce régime repose, notamment, sur les éléments suivants.

L’affiliation obligatoire

5 Dans le cadre dudit régime, toutes les entreprises ont l’obligation de s’affilier, au titre de l’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, à la Berufsgenossenschaft (caisse professionnelle) dont elles relèvent sur le plan tant matériel que géographique. Les différentes caisses professionnelles ont le statut d’organismes de droit public ne poursuivant pas un but lucratif. Selon le gouvernement allemand et la Commission des Communautés européennes, il existe actuellement 25 caisses professionnelles. Chaque caisse professionnelle se subdivise en plusieurs branches selon les secteurs d’activités concernés.

Les cotisations

6 L’article 152, paragraphe 1, du SGB VII, intitulé «Répartition», dispose:

«Les cotisations sont fixées par voie de répartition après l’expiration de l’année civile au cours de laquelle les droits à cotisation sont nés. La répartition doit couvrir les besoins de l’année écoulée, y compris les montants nécessaires à la constitution de provisions. Des cotisations ne peuvent être prélevées au surplus que pour alimenter le compte d’exploitation.»

7 L’article 153 du SGB VII, intitulé «Base de calcul», prévoit:

«1. Les bases de calcul des cotisations sont fournies, pour autant que les dispositions ci‑après n’en disposent pas autrement, par les besoins financiers (montant à répartir), le salaire des assurés et les classes de risque.

2. Le salaire des assurés est pris pour base à concurrence du montant du salaire annuel plafond.

3. Le statut peut prévoir que le calcul des cotisations prend pour base au minimum le salaire correspondant au salaire annuel minimal pour les assurés ayant 18 ans révolus. Si les assurés n’ont pas été employés pendant toute l’année civile ou ne...

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