Dita Danosa v LKB Līzings SIA.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:674
Date11 November 2010
Celex Number62009CJ0232
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-232/09

Affaire C-232/09

Dita Danosa

contre

LKB Līzings SIA

(demande de décision préjudicielle, introduite par l'Augstākās Tiesas Senāts)

«Politique sociale — Directive 92/85/CEE — Mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail — Articles 2, sous a), et 10 — Notion de ‘travailleuse enceinte’ — Interdiction de licenciement d’une travailleuse enceinte pendant la période allant du début de sa grossesse jusqu’au terme de son congé de maternité — Directive 76/207/CEE — Égalité de traitement entre hommes et femmes — Membre d’un comité de direction d’une société de capitaux — Réglementation nationale autorisant le licenciement d’un tel membre sans aucune restriction»

Sommaire de l'arrêt

1. Politique sociale — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail — Directive 92/85 — Notion de «travailleur»

(Directive du Conseil 92/85)

2. Politique sociale — Travailleurs masculins et travailleurs féminins — Accès à l'emploi et conditions de travail — Égalité de traitement — Directive 76/207 — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Directives 92/85 et 86/613 — Révocation d'un membre d'un comité de direction pour cause de grossesse — Inadmissibilité

(Directives du Conseil 76/207, art. 2, § 1 et 7, et 3, § 1, c), 92/85, art. 10, et 86/613)

1. Un membre d’un comité de direction d’une société de capitaux, fournissant des prestations à cette dernière et faisant partie intégrante de celle-ci, doit être considéré comme ayant la qualité de travailleur aux fins de la directive 92/85, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, si son activité est exercée, pendant un certain temps, sous la direction ou le contrôle d’un autre organe de cette société et si, en contrepartie de cette activité, il perçoit une rémunération. Il appartient à la juridiction nationale de procéder aux vérifications des éléments de fait nécessaires afin d’apprécier si tel est le cas dans le litige dont elle est saisie.

À cet égard, la nature juridique sui generis de la relation d’emploi au regard du droit national ne peut avoir de conséquences quelconques sur la qualité de travailleur au sens du droit de l’Union. Pour autant qu’une personne accomplit, pendant un certain temps, en faveur d’une autre et sous la direction de celle-ci, des prestations en contrepartie desquelles elle perçoit une rémunération, la nature du lien juridique qui la lie à l’autre partie de la relation de travail est sans pertinence pour l’application de la directive 92/85. Par ailleurs, la qualité de membre d’un comité de direction d’une société de capitaux ne saurait, en tant que telle, exclure que la personne concernée se soit trouvée dans un lien de subordination par rapport à cette société. Il convient en effet d’examiner les conditions dans lesquelles le membre du comité a été recruté, la nature des fonctions qui lui ont été confiées, le cadre dans lequel ces dernières sont exercées, l’étendue des pouvoirs de l’intéressé et le contrôle dont il fait l’objet au sein de la société, ainsi que les circonstances dans lesquelles il peut être révoqué.

(cf. points 39-40, 47, 56, disp. 1)

2. L’article 10 de la directive 92/85, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui permet la révocation d’un membre d’un comité de direction d’une société de capitaux sans restriction lorsque la personne intéressée a la qualité de «travailleuse enceinte» au sens de cette directive et que la décision de révocation prise à son égard est essentiellement fondée sur son état de grossesse. À supposer même que le membre concerné d’un comité de direction n’ait pas cette qualité, il n’en demeure pas moins que la révocation, pour cause de grossesse ou pour une cause fondée essentiellement sur cet état, d’un membre d’un comité de direction exerçant des fonctions en tant que partie intégrante de la société et fournissant des prestations à celle-ci en contrepartie à une rémunération ne peut concerner que les femmes et constitue, dès lors, une discrimination directe fondée sur le sexe, contraire aux articles 2, paragraphes 1 et 7, et 3, paragraphe 1, sous c), de la directive 76/207, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail, telle que modifiée par la directive 2002/73.

En effet, l’objectif poursuivi par des règles du droit de l’Union régissant l’égalité entre les hommes et les femmes dans le domaine des droits des femmes enceintes ou accouchées est de protéger celles-ci avant et après l’accouchement. Cet objectif, qui inspire tant la directive 92/85 que la directive 76/207, ne pourrait pas être atteint si la protection contre le licenciement accordée par le droit de l’Union aux femmes enceintes dépendait de la qualification formelle de leur relation d’emploi en droit national ou du choix fait lors de leur engagement entre l’un ou l’autre type de contrat. Quelle que soit la directive applicable, il importe d’assurer à l’intéressée la protection accordée par le droit de l’Union aux femmes enceintes dans le cas où la relation juridique qui l’unit à une autre personne a été rompue en raison de sa grossesse.

(cf. points 68-70, 74, disp. 2)







ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

11 novembre 2010 (*)

«Politique sociale − Directive 92/85/CEE − Mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail − Articles 2, sous a), et 10 − Notion de ‘travailleuse enceinte’ − Interdiction de licenciement d’une travailleuse enceinte pendant la période allant du début de sa grossesse jusqu’au terme de son congé de maternité − Directive 76/207/CEE − Égalité de traitement entre hommes et femmes − Membre d’un comité de direction d’une société de capitaux − Réglementation nationale autorisant le licenciement d’un tel membre sans aucune restriction»

Dans l’affaire C‑232/09,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par l’Augstākās Tiesas Senāts (Lettonie), par décision du 13 mai 2009, parvenue à la Cour le 25 juin 2009, dans la procédure

Dita Danosa

contre

LKB Līzings SIA,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de chambre, MM. A. Arabadjiev, A. Rosas, A. Ó Caoimh (rapporteur) et Mme P. Lindh, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er juillet 2010,

considérant les observations présentées:

– pour Mme Danosa, par Mes V. Liberte, zvērināta advokāte, et A. Rasa, zvērināta advokāta palīgs,

– pour LKB Līzings SIA, par Me L. Liepa, zvērināts advokāts, ainsi que par Mme S. Kravale et M. M. Zalāns,

– pour le gouvernement letton, par Mmes K. Drēviņa et Z. Rasnača, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement hellénique, par M. M. Apessos ainsi que par Mmes S. Trekli et S. Vodina, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement hongrois, par Mme R. Somssich, M. M. Fehér et Mme K. Szíjjártó, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par MM. A. Sauka et M. van Beek, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 2 septembre 2010,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16 paragraphe 1 de la directive 89/391/CEE) (JO L 348, p. 1).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Danosa à LKB Līzings SIA (ci-après «LKB») au sujet de la décision de l’assemblée des associés de cette société à responsabilité limitée de révoquer Mme Danosa des fonctions de membre du comité de direction de ladite société.

Le cadre juridique

La réglementation de l’Union

La directive 76/207/CEE

3 L’article 2, paragraphe 1, de la directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (JO L 39, p. 40), telle que modifiée par la directive 2002/73/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 septembre 2002 (JO L 269, p. 15, ci-après la «directive 76/207»), dispose que «[l]e principe de l’égalité de traitement […] implique l’absence de toute discrimination fondée sur le sexe, soit directement, soit indirectement, par référence, notamment, à l’état matrimonial ou familial».

4 L’article 2, paragraphe 7, de la directive 76/207 prévoit que cette directive «ne fait pas obstacle aux dispositions relatives à la protection de la femme, notamment en ce qui concerne la grossesse et la maternité». En outre, il prévoit que tout traitement moins favorable d’une femme lié à la grossesse ou au congé de maternité au sens de la directive 92/85 constitue une discrimination au sens de la directive 76/207.

5 Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la directive 76/207:

«L’application du principe de l’égalité de traitement implique l’absence de toute discrimination directe ou indirecte fondée sur le sexe dans les secteurs public ou privé, y compris les organismes publics, en ce qui...

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