Arrêt de la Cour
Affaire C-294/02
Commission des Communautés européennes
contre
AMI Semiconductor Belgium BVBA e.a.
«Clause compromissoire – Désignation du Tribunal de première instance – Compétence de la Cour – Parties en liquidation – Capacité d’ester en justice – Règlement (CE) nº 1346/2000 – Procédures d’insolvabilité – Récupération d’avances – Remboursement en vertu d’une clause contractuelle – Responsabilité solidaire – Répétition de l’indu»
Conclusions de l’avocat général Mme J. Kokott, présentées le 23 septembre 2004
Arrêt de la Cour (première chambre) du 17 mars 2005.
Sommaire de l’arrêt
1. Procédure – Saisine de la Cour sur la base d’une clause compromissoire – Compétence de la Cour de justice en tant qu’institution comprenant la Cour et le Tribunal – Nécessité d’indiquer dans la clause compromissoire le juge communautaire compétent – Absence
(Art. 238 CE)
2. Procédure – Saisine de la Cour sur la base d’une clause compromissoire – Recours introduit par une institution communautaire contre une entreprise faisant l’objet d’une procédure d’insolvabilité – Absence de dispositions communautaires en la matière – Renvoi aux principes communs aux droits procéduraux des États membres – Principes prévoyant l’irrecevabilité d’un tel recours
(Art. 238 CE; règlement du Conseil nº 1346/2000, art. 4, § 2, f), 16 et 17)
3. Procédure – Requête introductive d’instance – Objet du litige – Définition – Modification en cours d’instance – Interdiction
(Règlement de procédure de la Cour, art. 38 et 42)
1. L’utilisation des termes «Cour de justice» dans le traité ne se réfèrant pas à l’une ou l’autre juridiction communautaire, mais à l’institution communautaire qui comprend la Cour et le Tribunal, la référence faite à l’article 238 CE à la «Cour de justice» doit être comprise comme se rapportant à cette institution, et c’est cette dernière qui doit être visée dans un contrat pour qu’une compétence puisse être conférée à l’une ou l’autre juridiction communautaire.
Le traité ne prescrivant aucune formule particulière à utiliser dans une clause compromissoire, toute formule qui indique que les parties ont l’intention de soustraire leurs éventuels différends aux juridictions nationales pour les soumettre aux juridictions communautaires doit être considérée comme suffisante pour entraîner la compétence de ces dernières au titre de l’article 238 CE.
(cf. points 49-50)
2. Est irrecevable le recours introduit par la Commission devant les juridictions communautaires à l’encontre d’entreprises faisant l’objet d’une procédure d’insolvabilité dans un État membre.
En effet, il ressort des principes communs aux droits procéduraux des États membres, dont il faut déduire les règles à appliquer en l’absence de dispositions de droit communautaire en la matière, qu’un créancier ne saurait faire valoir en justice ses créances de manière isolée à l’encontre d’une personne faisant l’objet d’une procédure d’insolvabilité, mais est tenu de suivre les modalités de la procédure applicable.
Il ressort, par ailleurs, du règlement nº 1346/2000, relatif aux procédures d’insolvabilité, que les États membres sont obligés de respecter mutuellement les procédures ouvertes dans l’un deux et que l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité dans un État membre est reconnue dans tous les autres États membres et y produit les effets que lui attribue la loi de l’État d’ouverture.
Dès lors, les institutions communautaires bénéficieraient d’un avantage injustifiable par rapport aux autres créanciers s’il leur était possible de faire valoir leurs créances dans le cadre de procédures portées devant les juridictions communautaires, alors que toute poursuite devant les juridictions nationales est impossible.
(cf. points 68-70)
3. Aux termes de l’article 38 du règlement de procédure, les parties ont l’obligation de définir l’objet du litige dans l’acte introductif d’instance. Il s’ensuit que, même si l’article 42 du même règlement permet, sous certaines conditions, la production de moyens nouveaux, une partie ne peut en cours d’instance modifier l’objet même du litige. De nouvelles conclusions présentées pour la première fois lors de l’audience ne pourraient être admises sous peine de priver les défenderesses de la possibilité de préparer leur réponse et ainsi de violer les droits de la défense.
(cf. point 75)
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ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
17 mars 2005(1)
Table des matières
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1. Les objectifs du contrat |
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2. Le déroulement prévu des travaux |
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3. Le contrôle de la Commission |
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4. Les dispositions financières |
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6. La clause compromissoire |
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B – L’exécution du contrat |
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C – Les paiements effectués par la Commission et la demande de remboursement |
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D – La liquidation de trois des défenderesses |
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1. En ce qui concerne Interteam |
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2. En ce qui concerne A-Consult |
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3. En ce qui concerne Ision |
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II – Sur la compétence de la Cour |
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B – L’applicabilité de la clause compromissoire |
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III – Sur la recevabilité du recours en tant qu’il est dirigé contre trois défenderesses en liquidation ou ayant fait l’objet
d’une liquidation
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1. Le droit communautaire |
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B – Sur la recevabilité du recours en tant qu’il est dirigé contre InterTeam |
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C – Sur la recevabilité du recours en tant qu’il est dirigé contre A‑Consult et Ision |
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D – Sur les conclusions supplémentaires de la Commission |
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IV – Sur le bien-fondé du recours en tant qu’il est dirigé contre AMI Semiconductor, Intracom, Euram et Nordbank |
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A – Le droit au remboursement fondé sur l’article 23, point 23.3, de l’annexe II du contrat |
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1. Sur la responsabilité solidaire |
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2. Sur le calcul de la contribution financière due par la Commission |
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B – Le droit au remboursement fondé sur l’article 812 du BGB |
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V – Sur la demande reconventionnelle d’Intracom |
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«Clause compromissoire – Désignation du Tribunal de première instance – Compétence de la Cour – Parties en liquidation – Capacité d'ester en justice – Règlement (CE) n° 1346/2000 – Procédures d’insolvabilité – Récupération d'avances – Remboursement en vertu d'une clause contractuelle – Responsabilité solidaire – Répétition de l'indu»
Dans l'affaire C-294/02,
ayant pour objet un recours au titre de l'article 238 CE, introduit le 12 août 2002,
Commission des Communautés européennes, représentée par M. G. Wilms, en qualité d'agent, assisté de M e R. Karpenstein, Rechtsanwalt, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
AMI Semiconductor Belgium BVBA, anciennement Alcatel Microelectronics NV, établie à Audenarde (Belgique), représentée par M e s M. Hallweger et R. Lutz, Rechtsanwälte,
A-Consult EDV-Beratungsgesellschaft mbH (en liquidation), établie à Vienne (Autriche), représentée par M e E. Roehlich, Rechtsanwalt,
Intracom SA Hellenic Telecommunications & Electronic Industry, établie à Athènes (Grèce), représentée par M es M. Lienemeyer, U. Zinsmeister et D. Waelbroeck, avocats,
ISION Sales + Services GmbH & Co. KG (en liquidation), établie à Hambourg (Allemagne), représentée par M es H. Fialski et T. Delhey, Rechtsanwälte,
Euram-Kamino GmbH , établie à Hallbergmoos (Allemagne), représentée par M es M. Hallweger et R. Lutz, Rechtsanwälte,
HSH Nordbank AG, anciennement Landesbank Kiel Girozentrale, établie à Kiel (Allemagne), représentée par M es B. Treibmann et E. Meincke, Rechtsanwälte,
InterTeam GmbH (en liquidation), établie à Itzehoe (Allemagne), représentée par M es M. Hallweger et R. Lutz, Rechtsanwälte,
parties défenderesses,
LA COUR (première chambre),,
composée de M. P. Jann, président de chambre, M me R. Silva de Lapuerta, MM. K. Lenaerts, S. von Bahr et K. Schiemann (rapporteur), juges,
avocat général: M me J. Kokott,
greffier: M me M.-F. Contet, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du
8 juillet 2004,
ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 23 septembre 2004,
rend le présent
Arrêt
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Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de condamner, en tant que débiteurs solidaires,
AMI Semiconductor Belgium BVBA, anciennement Alcatel Microelectronics NV (ci‑après «AMI Semiconductor»), société de droit
belge, A‑Consult EDV‑Beratungsgesellschaft mbH (ci-après «A‑Consult»), société de droit autrichien, Intracom SA Hellenic Telecommunications
& Electronic Industry (ci‑après «Intracom»), société de droit grec, ainsi qu’ISION Sales + Services GmbH & Co. KG, anciennement
AllCon Gesellschaft für Kommunikationstechnologie mbH (ci‑après «Ision»), Euram‑Kamino GmbH (ci‑après «Euram»), HSH Nordbank
AG, anciennement Landesbank Kiel Girozentrale (ci‑après «Nordbank»), et InterTeam GmbH (ci‑après «InterTeam»), toutes quatre
des sociétés de droit allemand, (ci-après, ensemble, les «défenderesses») à lui payer la somme de 317 214 euros, majorée d’intérêts,
constituant le remboursement d’avances qu’elle a versées en exécution d’un contrat conclu avec ces sociétés dans le cadre
du projet Esprit nº 26927 (ci‑après le «projet»), intitulé «Electronic Commerce Fulfilment Service...