European Commission v Kingdom of Spain.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:31
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC‑529/09
Date24 January 2013
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62009CJ0529
62009CJ0529

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

24 janvier 2013 ( *1 )

«Manquement d’État — Aides d’État incompatibles avec le marché commun — Obligation de récupération — Inexécution — Exception d’irrecevabilité — Autorité de la chose jugée par un précédent arrêt de la Cour»

Dans l’affaire C‑529/09,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 108, paragraphe 2, deuxième alinéa, TFUE, introduit le 18 décembre 2009,

Commission européenne, représentée par MM. L. Flynn et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Royaume d’Espagne, représenté par Mme N. Díaz Abad, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet, M. Ilešič, J.-J. Kasel (rapporteur) et Mme M. Berger, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 juillet 2012,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en n’adoptant pas dans le délai imparti les mesures nécessaires pour se conformer à la décision 1999/509/CE de la Commission, du 14 octobre 1998, concernant des aides accordées par l’Espagne aux entreprises du groupe Magefesa et à ses successeurs (JO 1999, L 198, p. 15), en ce qui concerne l’entreprise Industrias Domésticas SA (ci-après «Indosa»), le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 288, quatrième alinéa, TFUE ainsi que 2 et 3 de cette décision.

Le cadre juridique

2

Le considérant 13 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1), est libellé comme suit:

«considérant que, en cas d’aide illégale incompatible avec le marché commun, une concurrence effective doit être rétablie; que, à cette fin, il importe que l’aide, intérêts compris, soit récupérée sans délai; qu’il convient que cette récupération se déroule conformément aux procédures du droit national; que l’application de ces procédures ne doit pas faire obstacle au rétablissement d’une concurrence effective en empêchant l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission; que, afin d’atteindre cet objectif, les États membres doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l’effet utile de la décision de la Commission».

3

L’article 14 dudit règlement, intitulé «Récupération de l’aide», prévoit:

«1. En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission décide que l’État membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire […] La Commission n’exige pas la récupération de l’aide si, ce faisant, elle allait à l’encontre d’un principe général de droit communautaire.

2. L’aide à récupérer en vertu d’une décision de récupération comprend des intérêts qui sont calculés sur la base d’un taux approprié fixé par la Commission. Ces intérêts courent à compter de la date à laquelle l’aide illégale a été mise à la disposition du bénéficiaire jusqu’à celle de sa récupération.

3. Sans préjudice d’une ordonnance de la Cour de justice [de l’Union européenne] prise en application de l’article [278 TFUE], la récupération s’effectue sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national de l’État membre concerné, pour autant que ces dernières permettent l’exécution immédiate et effective de la décision de la Commission. À cette fin et en cas de procédure devant les tribunaux nationaux, les États membres concernés prennent toutes les mesures prévues par leurs systèmes juridiques respectifs, y compris les mesures provisoires, sans préjudice du droit communautaire.»

4

Aux termes de l’article 23, paragraphe 1, du même règlement:

«Si l’État membre concerné ne se conforme pas à une décision conditionnelle ou négative, en particulier dans le cas visé à l’article 14, la Commission peut saisir directement la Cour […] conformément à l’article [108, paragraphe 2, TFUE].»

Les antécédents du litige

Le cadre factuel

5

Magefesa est un groupe d’entreprises industrielles espagnoles fabriquant des articles ménagers.

6

Le groupe Magefesa est constitué, notamment, de quatre entreprises, à savoir Indosa, établie au Pays basque, Cubertera del Norte SA (ci-après «Cunosa») et Manufacturas Gur SA (ci-après «GURSA»), établies en Cantabrie, ainsi que Manufacturas Inoxidables Gibraltar SA (ci-après «MIGSA»), établie en Andalousie.

7

Ayant connu de graves difficultés financières à partir de l’année 1983, le groupe Magefesa a fait l’objet d’un programme d’action prévoyant, notamment, une réduction de ses effectifs ainsi que l’octroi d’aides par le gouvernement central espagnol et par les gouvernements régionaux des Communautés autonomes du Pays basque, de Cantabrie et d’Andalousie, où étaient situées les différentes usines du groupe.

8

Aux fins de l’attribution de ces aides, des sociétés de gestion ont été créées dans les Communautés autonomes concernées, à savoir Fiducias de la cocina y derivados SA (ci-après «Ficodesa») au Pays basque, Gestión de Magefesa en Cantabria SA en Cantabrie et Manufacturas Damma SA en Andalousie.

9

La situation ayant néanmoins continué à se détériorer, Cunosa a cessé ses activités au début de l’année 1994 et a été déclarée en faillite le 13 avril 1994, MIGSA a cessé ses activités en 1993 et a été déclarée en faillite le 17 mai 1999. En ce qui concerne GURSA, elle est restée inactive à partir de l’année 1994 et a, par la suite, été déclarée insolvable.

10

Quant à Indosa, elle a, à la suite d’une demande en ce sens de la part de ses employés, été déclarée en état de cessation de paiement par une décision juridictionnelle du 19 juillet 1994, avec effet rétroactif de cette déclaration au 24 février 1986. Indosa a cependant été autorisée, par une nouvelle décision juridictionnelle, à poursuivre ses activités pour éviter que soient mis en danger les emplois des 478 salariés de l’entreprise.

11

S’agissant des sociétés de gestion, Ficodesa a été déclarée en faillite le 19 janvier 1995 et Manufacturas Damma SA ainsi que Gestión de Magefesa en Cantabria SA ont cessé leurs activités.

Les décisions de la Commission

12

Le groupe Magefesa a fait l’objet de deux procédures en matière d’aides d’État.

13

Le 20 décembre 1989, la Commission a adopté la décision 91/1/CEE concernant les aides accordées en Espagne par le gouvernement central et plusieurs gouvernements autonomes à MAGEFESA, producteur d’ustensiles de cuisine en acier inoxydable et de petits appareils électriques (JO 1991, L 5, p. 18), par laquelle cette institution a déclaré illégales et incompatibles avec le marché commun les aides accordées aux entreprises du groupe Magefesa, sous la forme de garanties de prêts, d’un prêt à des conditions autres que celles du marché, d’aides non remboursables ainsi que d’une bonification d’intérêts.

14

Les aides, octroyées par la Communauté autonome du Pays basque qui ont été considérées comme illégales et incompatibles avec le marché commun au titre de la décision 91/1, se répartissent comme suit:

une garantie de prêt de 300 millions de ESP, accordée directement à Indosa;

une garantie de prêt de 672 millions de ESP, accordée à Ficodesa, et

une bonification d’intérêts de 9 millions de ESP.

15

Par la même décision, les autorités espagnoles ont été invitées, notamment, à retirer les garanties de prêts, à transformer le prêt à taux réduit en crédit normal et à récupérer les aides non remboursables.

16

En 1997, la Commission a reçu de nouvelles plaintes au sujet des avantages résultant pour les entreprises du groupe Magefesa de la non-restitution des aides déclarées incompatibles avec le marché commun par la décision 91/1 ainsi que du non-respect des obligations financières et fiscales de ces entreprises. Par la suite, cette institution a décidé d’ouvrir la procédure prévue à l’article 93, paragraphe 2, du traité CE (devenu article 88, paragraphe 2, CE, lui-même devenu article 108 TFUE) pour les aides accordées à ces entreprises ou à celles qui leur ont succédé après l’année 1989 et elle a adopté, le 14 octobre 1998, la décision 1999/509. Celle-ci a été notifiée au gouvernement espagnol le 29 octobre 1998.

17

Par ladite décision, la Commission a déclaré illégales et incompatibles avec le marché commun les aides accordées par les autorités espagnoles notamment à Indosa, sous la forme de non-paiement constant d’impôts et de cotisations sociales, tant jusqu’au jour de la déclaration de faillite de cette entreprise que postérieurement à cette date et jusqu’au mois de mai de l’année 1997.

18

Par l’article 2 de la même décision, le Royaume d’Espagne a été invité à adopter les mesures qui s’imposaient pour récupérer ces aides auprès des bénéficiaires, étant entendu que les montants récupérés devaient comprendre les intérêts dus à compter de l’octroi desdites aides jusqu’à la date effective du remboursement de celles-ci.

19

En application de l’article 3 de la décision 1999/509, le Royaume d’Espagne était tenu d’informer la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de cette décision, des mesures adoptées au titre de celle-ci.

20

Par requête déposée au greffe de la Cour le 28 décembre 1998, le Royaume...

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