Chalkor AE Epexergasias Metallon v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2011:815
CourtCourt of Justice (European Union)
Date08 December 2011
Docket NumberC-386/10
Procedure TypeRecurso de casación - infundado
Celex Number62010CJ0386

Affaire C-386/10 P

Chalkor AE Epexergasias Metallon

contre

Commission européenne

«Pourvoi — Concurrence — Ententes — Marché des tubes sanitaires en cuivre — Amendes — Taille du marché, durée de l’infraction et coopération pouvant être prises en considération — Recours juridictionnel effectif»

Sommaire de l'arrêt

1. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Appréciation économique complexe — Marge d'appréciation de la Commission — Contrôle de légalité — Contrôle juridictionnel — Portée

(Art. 263 TFUE; règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)

2. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Gravité et durée de l'infraction — Pouvoir d'appréciation de la Commission — Limites

(Règlements du Conseil nº 17, art. 15, § 2, et nº 1/2003, art. 23, § 3 ; communication de la Commission 98/C 9/03)

3. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Application des lignes directrices pour le calcul des amendes — Motivation de la décision — Portée

(Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2; communication de la Commission 98/C 9/03)

4. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Pouvoir d'appréciation de la Commission — Contrôle juridictionnel — Compétence de pleine juridiction du juge de l'Union — Portée

(Art. 261 TFUE; règlements du Conseil nº 17, art. 17 et nº 1/2003, art. 31)

5. Droit de l'Union — Principes — Droit à une protection juridictionnelle effective — Contrôle juridictionnel des décisions adoptées par la Commission en matière de concurrence — Contrôle de légalité et de pleine juridiction, tant de droit que de fait — Violation — Absence

(Art. 263 TFUE; charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, art. 47; règlement du Conseil nº 1/2003, art. 31)

1. Si, dans les domaines donnant lieu à des appréciations économiques complexes, tels que la détermination du montant des amendes infligées pour infraction aux règles de concurrence, la Commission dispose d’une marge d’appréciation en matière économique, cela n’implique pas que le juge de l’Union doit s’abstenir de contrôler l’interprétation, par la Commission, de données de nature économique. En effet, dans le cadre du contrôle de légalité, le juge de l’Union doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées.

Il appartient au juge de l’Union d’effectuer le contrôle de légalité qui lui incombe sur la base des éléments apportés par le requérant au soutien des moyens invoqués. Lors de ce contrôle, le juge ne saurait s’appuyer sur la marge d’appréciation dont dispose la Commission ni en ce qui concerne le choix des éléments pris en considération lors de l’application des critères relatifs à la fixation de l'amende mentionnés dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, ni en ce qui concerne l’évaluation de ces éléments pour renoncer à exercer un contrôle approfondi tant de droit que de fait.

(cf. points 54, 62)

2. Pour la détermination du montant des amendes pour infraction aux règles de concurrence, il y a lieu de tenir compte de la durée des infractions et de tous les éléments de nature à entrer dans l’appréciation de la gravité de celles-ci, tels que le comportement de chacune des entreprises, le rôle joué par chacune d’elles dans l’établissement des pratiques concertées, le profit qu’elles ont pu tirer de ces pratiques, leur taille et la valeur des marchandises concernées ainsi que le risque que des infractions de ce type représentent pour la Communauté européenne. Des éléments objectifs tels le contenu et la durée des comportements anticoncurrentiels, leur nombre et leur intensité, l’étendue du marché affecté et la détérioration subie par l’ordre public économique doivent être pris en compte. L’analyse doit également prendre en considération l’importance relative et la part de marché des entreprises responsables ainsi qu’une éventuelle récidive.

Ainsi, le grand nombre d’éléments à prendre en considération donne nécessairement à la Commission des possibilités diverses dans l’appréciation de ces éléments, leur pondération et leur évaluation afin de sanctionner adéquatement l’infraction. Toutefois, elle reste soumise à certaines obligations. La durée d’une infraction est mentionnée en tant que telle par le législateur de l’Union comme élément à prendre en considération pour fixer le montant des amendes et, en l’absence de critère défini par le législateur, les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, permettent de préciser l’influence de cet élément dans le calcul de l’amende.

(cf. points 56-57, 71, 76-77)

3. Dans un souci de transparence, la Commission a adopté des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement nº 17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA, dans lesquelles elle indique à quel titre elle prendra en considération telle ou telle circonstance de l’infraction et les conséquences qui pourront en être tirées sur le montant de l’amende. Ces lignes directrices qui énoncent une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont l’administration ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement se limitent à décrire la méthode d’examen de l’infraction suivie par la Commission et les critères que celle-ci s’oblige à prendre en considération pour fixer le montant de l'amende. Il incombe dès lors à la Commission, lorsqu’elle motive sa décision, notamment, d’expliquer la pondération et l’évaluation qu’elle a faites des éléments pris en considération.

(cf. points 59-61)

4. En ce qui concerne la détermination du montant des amendes infligées pour infraction aux règles de concurrence, la compétence de pleine juridiction qui était reconnue au juge de l’Union par l’article 17 du règlement nº 17 l’est maintenant par l’article 31 du règlement nº 1/2003, conformément à l’article 261 TFUE. Cette compétence habilite le juge, au-delà du simple contrôle de légalité de la sanction, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, en conséquence, à supprimer, à réduire ou à majorer l’amende ou l’astreinte infligée.

Cependant, l’exercice de la compétence de pleine juridiction n’équivaut pas à un contrôle d’office et la procédure devant les juridictions de l’Union est contradictoire. À l’exception des moyens d’ordre public que le juge est tenu de soulever d’office, telle l’absence de motivation de la décision attaquée, c’est à la partie requérante qu’il appartient de soulever les moyens à l’encontre de cette dernière et d’apporter des éléments de preuve à l’appui de ces moyens. Cette exigence de nature procédurale ne va pas à l’encontre de la règle selon laquelle, s’agissant d’infractions aux règles de concurrence, c’est à la Commission qu’il appartient d’apporter la preuve des infractions qu’elle constate et d’établir les éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs d’une infraction. Ce qui est en effet demandé à un requérant dans le cadre d’un recours juridictionnel, c’est d’identifier les éléments contestés de la décision attaquée, de formuler des griefs à cet égard et d’apporter des preuves, qui peuvent être constituées d’indices sérieux, tendant à démontrer que ses griefs sont fondés.

(cf. points 63-65)

5. Le contrôle prévu par les traités des décisions adoptées par la Commission en matière de concurrence implique que le juge de l’Union exerce un contrôle tant de droit que de fait et qu’il ait le pouvoir d’apprécier les preuves, d’annuler la décision attaquée et de modifier le montant des amendes. Il n’apparaît dès lors pas que le contrôle de légalité prévu à l’article 263 TFUE, complété par la compétence de pleine juridiction quant au montant de l’amende, prévue à l’article 31 du règlement nº 1/2003, soit contraire aux exigences du principe de protection juridictionnelle effective figurant à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

(cf. point 67)







ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

8 décembre 2011 (*)

«Pourvoi – Concurrence – Ententes – Marché des tubes sanitaires en cuivre – Amendes – Taille du marché, durée de l’infraction et coopération pouvant être prises en considération – Recours juridictionnel effectif»

Dans l’affaire C‑386/10 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 29 juillet 2010,

Chalkor AE Epexergasias Metallon, établie à Athènes (Grèce), représentée par M. I. Forrester, QC,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission européenne, représentée par MM. E. Gippini Fournier et S. Noë, en qualité d’agents, assistés de M. B. Doherty, barrister, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de chambre, MM. U. Lõhmus, A. Rosas (rapporteur), A. Ó Caoimh et A. Arabadjiev, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 12 mai 2011,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 Par son pourvoi, Chalkor AE Epexergasias Metallon (ci-après «Chalkor») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 19 mai 2010...

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