Union syndicale Solidaires Isère v Premier ministre and Others.
Jurisdiction | European Union |
ECLI | ECLI:EU:C:2010:612 |
Docket Number | C-428/09 |
Celex Number | 62009CJ0428 |
Court | Court of Justice (European Union) |
Procedure Type | Reference for a preliminary ruling |
Date | 14 October 2010 |
Affaire C-428/09
Union syndicale Solidaires Isère
contre
Premier ministre e.a.
(demande de décision préjudicielle, introduite par le Conseil d'État (France))
«Politique sociale — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Directive 2003/88/CE — Aménagement du temps de travail — Articles 1er, 3 et 17 — Champ d’application — Activité occasionnelle et saisonnière des titulaires d’un ‘contrat d’engagement éducatif’ — Limitation du temps de travail de ce personnel dans des centres de vacances et de loisirs à 80 jours par an — Réglementation nationale ne prévoyant pas, pour ce personnel, une période minimale de repos journalier — Dérogations prévues à l’article 17 — Conditions — Garantie d’une période équivalente de repos compensateur ou, dans des cas exceptionnels, d’une protection appropriée»
Sommaire de l'arrêt
1. Politique sociale — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Directive 2003/88 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail — Champ d'application
(Directive du Parlement européen et du Conseil 2003/88, art. 1er, § 3)
2. Politique sociale — Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs — Directive 2003/88 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail — Période minimale de repos
(Directive du Parlement européen et du Conseil 2003/88, art. 3, 17, § 2 et 3, b) et c))
1. Les titulaires de contrats d'engagement éducatif, exerçant des activités occasionnelles et saisonnières dans des centres de vacances et de loisirs, et accomplissant au maximum 80 journées de travail par an, relèvent du champ d'application de la directive 2003/88, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.
(cf. point 33 et disp. 1)
2. Les titulaires de contrats d’engagement éducatif, exerçant des activités occasionnelles et saisonnières dans des centres de vacances et de loisirs, et accomplissant au maximum 80 journées de travail par an, relèvent de la dérogation figurant à l’article 17, paragraphe 3, sous b) et/ou sous c), de la directive 2003/88, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.
Toutefois, il n’est pas satisfait aux conditions fixées à l’article 17, paragraphe 2, de cette directive pour l’application de ladite dérogation, selon lesquelles des périodes équivalentes de repos compensateur ou, dans des cas exceptionnels où l’octroi de telles périodes n’est pas possible pour des raisons objectives, une protection appropriée sont accordées aux travailleurs concernés, par une réglementation nationale limitant à 80 journées de travail par an l’activité des titulaires de tels contrats. Si la nature particulière du travail ou le contexte particulier dans lequel celui-ci est exercé permettent, de manière exceptionnelle, de déroger à l’article 3 de la directive et à l’obligation d’une alternance régulière entre une période de travail et une période de repos, une réglementation nationale ne permettant pas aux travailleurs de bénéficier du droit au repos journalier pendant toute la durée de leur contrat de travail, même s’il s’agit d’un contrat d’une durée maximale de 80 jours par an, non seulement vide de sa substance un droit individuel expressément accordé par cette directive, mais est également en contradiction avec l’objectif de cette dernière, qui est de protéger de façon efficace la sécurité et la santé des travailleurs.
(cf. points 37, 46-47, 52, 60-62, disp. 2)
ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
14 octobre 2010 (*)
«Politique sociale – Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs – Directive 2003/88/CE – Aménagement du temps de travail – Articles 1er, 3 et 17 − Champ d’application − Activité occasionnelle et saisonnière des titulaires d’un ‘contrat d’engagement éducatif’ – Limitation du temps de travail de ce personnel dans des centres de vacances et de loisirs à 80 jours par an − Réglementation nationale ne prévoyant pas, pour ce personnel, une période minimale de repos journalier − Dérogations prévues à l’article 17 − Conditions − Garantie d’une période équivalente de repos compensateur ou, dans des cas exceptionnels, d’une protection appropriée»
Dans l’affaire C‑428/09,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Conseil d’État (France), par décision du 2 octobre 2009, parvenue à la Cour le 29 octobre 2009, dans la procédure
Union syndicale Solidaires Isère
contre
Premier ministre,
Ministère du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville,
Ministère de la Santé et des Sports,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de chambre, MM. A. Arabadjiev, A. Rosas, U. Lõhmus et A. Ó Caoimh (rapporteur), juges,
avocat général: M. J. Mazák,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées:
– pour l’Union syndicale Solidaires Isère, par Me E. Decombard, avocat,
– pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et B. Messmer, en qualité d’agents,
– pour le gouvernement tchèque, par M. M. Smolek, en qualité d’agent,
– pour la Commission européenne, par MM. M. Van Hoof et M. van Beek, en qualité d’agents,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO L 299, p. 9).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un recours par lequel l’Union syndicale Solidaires Isère (ci-après l’«Union syndicale») demande au Conseil d’État d’annuler le décret n° 2006-950, du 28 juillet 2006, relatif à l’engagement éducatif pris pour l’application de la loi n° 2006-586, du 23 mai 2006, relative au volontariat associatif et à l’engagement éducatif, en tant qu’il insère dans le code du travail les articles D. 773-2-1, D. 773-2-2 et D. 773-2-3 ainsi que la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté son recours gracieux contre ledit décret.
Le cadre juridique
La réglementation de l’Union
3 Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (JO L 183, p. 1), cette directive «s’applique à tous les secteurs d’activités, privés ou publics (activités industrielles, agricoles, commerciales, administratives, de service, éducatives, culturelles, de loisirs, etc.)».
4 L’article 2, paragraphe 2, de ladite directive dispose toutefois que celle-ci «n’est pas applicable lorsque des particularités inhérentes à certaines activités spécifiques dans la fonction publique, par exemple dans les forces armées ou la police, ou à certaines activités spécifiques dans les services de protection civile s’y opposent de manière contraignante».
5 La directive 2003/88 a abrogé, avec effet au 2 août 2004, la directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (JO L 307, p. 18), dont elle a codifié les dispositions.
6 Les cinquième, septième, quinzième et seizième considérants de la directive 2003/88 énoncent:
«(5) Tous les travailleurs doivent disposer de périodes de repos suffisantes. […] Les travailleurs de la Communauté doivent bénéficier de périodes minimales de repos − journalier, hebdomadaire et annuel − et de périodes de pause adéquates. […]
[…]
(7) Des études ont démontré que l’organisme humain est plus sensible pendant la nuit aux perturbations environnementales et à certaines formes pénibles d’organisation du travail et que de longues périodes de travail de nuit sont préjudiciables à la santé des travailleurs et peuvent compromettre leur sécurité au travail.
[…]
(15) Compte tenu des questions susceptibles d’être soulevées par l’aménagement du temps de travail, il convient de prévoir une certaine souplesse dans l’application de certaines dispositions de la présente directive, tout en assurant le respect des principes de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs.
(16) Il convient de prévoir que certaines dispositions de la présente directive peuvent faire l’objet de dérogations, opérées, selon le cas, par les États membres ou les partenaires sociaux. En cas de dérogation, des périodes équivalentes de repos compensateur doivent, en règle générale, être accordées aux travailleurs concernés.»
7 L’article 1er de la directive 2003/88, qui concerne l’objet et le champ d’application de celle-ci, est libellé comme suit:
«1. La présente directive fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d’aménagement du temps de travail.
2. La présente directive s’applique:
a) aux périodes minimales de repos journalier, de repos hebdomadaire et de congé annuel ainsi qu’au temps de pause et à la durée maximale hebdomadaire de travail, et
b) à certains aspects du travail de nuit, du travail posté et du rythme de travail.
3. La présente directive s’applique à tous les secteurs d’activités, privés ou publics, au sens de l’article 2 de la directive 89/391/CEE, sans préjudice des articles 14, 17, 18 et 19 de la présente directive.
Sans préjudice de l’article 2, paragraphe 8, la présente directive ne s’applique pas aux gens de mer, tels que définis dans la directive 1999/63/CE [du Conseil, du 21 juin 1999, concernant l’accord relatif à l’organisation du temps de travail des gens de mer, conclu par l’Association des armateurs de la Communauté européenne (ECSA) et la Fédération des syndicats des transports dans l’Union européenne (FST) (JO L 167, p. 33)].
[…]»
8 L’article 3 de la directive 2003/88 consacre le droit de tout travailleur à une période minimale de repos de 11...
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